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grande quantité à l'ouverture de la caverne; là aussi la couche de charbons et de cendres est la plus compacte et la trace d'anciens foyers plus apparente.

Les instruments ont été recueillis en arrière et près du milieu de la caverne, là où les ossements et les tessons de poterie devenaient plus rares, mais aussi mieux conservés; tandis que ceux trouvés autour des foyers étaient brisés en si petits fragments, qu'il m'a été impossible de reconstruire en entier un vase quelconque. Cependant beaucoup de débris sont suffisamment grands pour qu'on puisse juger de la capacité des ustensiles de ces peuplades primitives.

La couche dans laquelle se rencontrent des traces d'hommes, est d'une épaisseur de 95 centimètres, et plus les poteries sont profondément enfouies, plus elles sont grossièrement travaillées et se brisent avec facilité: aussi, voulant en conserver des échantillons, ai-je dû les faire sécher au soleil pour pouvoir les emporter avec quelque chance de succès.

Dans la caverne de Bossey, l'époque romaine est aussi représentée par quelques fragments de poterie et d'autres objets dont je vais donner un court aperçu. La plupart des poteries de cette époque sont noires et faites à l'aide du tour; les ornements en sont peu variés: deux ou trois lignes en creux à des distances inégales sont tracées sur les bords des vases; les fonds ne portent aucune marque de fabrique, aucun nom qui puisse révéler leur provenance. Je crois pouvoir ranger à la même époque : une épingle à cheveux, en bronze, de 12 centimètres de longueur (planche VI, figure 7), de la meilleure conservation; une épingle en os avec tête aplatie, percée d'un petit trou et terminée par deux ailerons dont l'un a été brisé (figure 8); une aiguille en os avec trou rond et pointe effilée (figure 9); deux petites pierres à aiguiser (figures 10 et 11); deux monnaies romaines, dont l'une est un grand bronze de l'empereur Alexandre et l'autre est fruste.

La pièce la plus remarquable de ces fouilles est un noyau

d'abricot pétrifié. L'abricotier était-il connu des Romains? Je laisse résoudre cette question à de plus doctes que moi. Outre ces objets, j'ai trouvé une petite chaînette en cuivre, mais la forme de ses maillons a un cachet si moderne, que je ne sais vraiment pas, lors même qu'elle a été trouvée dans la couche romaine, si elle peut appartenir à cet âge.

Tous ces derniers objets ont été recueillis au-dessus de la couche lacustre et à 15 ou 20 centimètres au-dessous du sol actuel de la caverne; et tandis que les instruments de l'époque lacustre étaient enfouis à partir du bord de la caverne jusqu'au milieu, les autres, au contraire, l'étaient du milieu au fond: telle est la différence marquée entre les deux gisements. Cette régularité même rend difficile toute possibilité d'erreur sur leur âge respectif.

A côté de ces deux couches bien établies, il s'en trouve une troisième représentée par un certain nombre d'ossements d'animaux; c'est le sol actuel de la caverne. Ces débris ont été apportés par les renards et autres carnassiers qui venaient, loin des regards des humains, ronger dans cet antre obscur le fruit de leurs rapines.

Après avoir recueilli dans ces fouilles tous les ossements que je venais de mettre au jour, je priai M. le professeur Rutimeyer, de Bâle, de bien vouloir me les classer; voici, après un examen scrupuleux, les résultats de son travail. Il y a reconnu: Le bœuf, la brebis, la chèvre, le cochon, le renard, le chat, le lièvre, la loutre, la poule, l'oie, la corneille.

Le bœuf ordinaire est en plus grande quantité; après vient la chèvre, la brebis, le cochon. Quant à la loutre, il n'en a été trouvé qu'un seul fragment, une vertèbre, et du renard une seule dent.

Le cochon, au rapport de M. Rutimeyer, est sans doute un animal domestique, dont il est impossible de dire s'il a plus de rapport avec le cochon sauvage qu'avec le cochon des tourbières, les mâchoires en étant trop incomplètes. Cinq longues

dents recourbées, que je n'avais pas cru devoir joindre au premier envoi, remis par l'intermédiaire de M. Forel fils, de Morges, me font supposer que c'est le sanglier et non un animal domestique dont il doit être ici question.

Il s'est trouvé dans ces ossements des vertèbres d'homme; mais ces débris ayant été recueillis au milieu des décombres et des pierres détachées de la voûte dans les derniers temps, on peut supposer qu'ils ont été apportés en ces lieux par quelque

carnassier.

Les ossements de races animales sont en si grande quantité, qu'il m'a été impossible de les séparer en couches lacustre, romaine et moderne; d'ailleurs la classification n'aurait pas pu être bien complète. En effet, tous ces débris étant répandus avec une grande profusion, il m'aurait fallu, pour noter le gisement des principaux spécimens, beaucoup plus de temps que je

n'en avais à consacrer à ces fouilles.

Tous ces os ont été fendus ou brisés par la main de l'homme pour en extraire la moelle. On comprend que ce fait, également reconnu dans les ossements des cavernes de Menton1, occasionnent de grandes difficultés lorsqu'on veut s'occuper d'une classification; aussi ne saurait-on assez marquer de reconnaissance aux savants qui, comme M. le professeur Rutimeyer, veulent bien se dévouer pour agrandir la sphère des connaissances humaines.

Ayant appris depuis peu que, dans des fouilles opérées avec soin, il faut tenir compte des objets même les plus insignifiants, je ne terminerai pas sans dire encore quelques mots de deux fragments que mon inexpérience des premiers jours m'avait fait repousser comme peu dignes d'intérêt.

Le premier objet que j'ai trouvé dans la caverne de Bossey, est une pierre de la forme d'un oeuf de poule. Cette pierre n'ayant rien, au premier abord, qui annonçât un produit de l'industrie humaine, je l'ai cassée pour en reconnaître la nature et j'en ai jeté les fragments.

Voir sur ce sujet l'intéressante brochure de M. Forel.

Dans la couche de l'époque lacustre, j'ai encore ramassé un fragment de galet ferrifère, auquel il a été enlevé des éclats; en l'absence, dans notre contrée, du silex, ces populations ont dû se servir de ces éclats comme instrument tranchant. Celui qui a tenu ces débris dans ses mains, a-t-il songé qu'un jour des morceaux semblables jetés dans une fournaise ardente, allaient fournir un métal qui devait changer la face du monde ? A-t-il été donné à l'un de ces hommes des temps primitifs d'entrevoir au travers des siècles cette révolution métallurgique? Ce n'est pas probable et n'était guère à prévoir à cette époque reculée. Concluons donc que la présence de ce galet au milieu de ces débris est un fait sans précédent dans les habitations de cette époque primitive.

Tels sont les résultats de mes fouilles pendant l'année der nière; maintenant il me reste une question à résoudre. Cette caverne était-elle une habitation permanente ou un lieu de re fuge? Je n'ose me prononcer d'une manière positive; cependant, si l'on en juge par la quantité de poteries et d'ossements d'animaux recueillis, d'après les instruments en os, le marteau en pierre et le peson de fuseau, je ne suis pas loin de croire que la caverne de Bossey a été habitée d'une manière permanente pendant une partie de l'époque lacustre et aurait servi de refuge à quelque vagabond de l'époque romaine.

Ce serait aussi l'opinion de plusieurs savants auxquels j'ai communiqué le fruit de mes recherches.

F. THIOLY.

LETTRES

DE

PIERRE DE LA BAUME

Évêque de Genève

A BEZANSON HUGUES

le

Les lettres que nous publions, au nombre de onze, adressées par dernier évêque de Genève, Pierre de la Baume, à Bezanson Hugues, ont été transcrites en 1863 dans les Archives de Turin par les soins de M. le professeur Merle d'Aubigné. La plupart de ces lettres sont sans indication d'année; nous avons cherché à en établir la date probable en nous aidant des lumières de notre collègue, M. le professeur Galiffe. Le contenu de la plupart de ces lettres est assez insignifiant; deux cependant sont fort piquantes. Ces pièces confirment en même temps qu'elles complètent tout ce que nous avait appris, au sujet du caractère et des dispositions de Pierre de la Baume, la partie de sa correspondance publiée par MM. Galiffe père et Louis Sordet ".

1

Matériaux pour l'Histoire de Genève. Tome second.

2 Mémoire sur les lettres de Pierre de la Baume inséré dans le tome II des Mémoires de la Société d'Histoire et d'Archéologie.

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