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DESCRIPTION DES MEILLEURES PEINTURES ET SCULptures qui SE TROUVENT DANS LES Églises de tournai.

L'Église Cathédrale.

Cette église est très-grande, et d'une architecture gothique. Le chœur, les nefs et les croisées sont d'une hauteur bien proportionnée. Les voûtes du chœur sont d'une délicatesse admirable; si la grande nef y correspondait, ce vaisseau serait un chef-d'œuvre de l'art.

on

En entrant dans cette église du côté de l'évêché, voit une galerie de pierre de taille, en forme de balustrade, d'une architecture gothique, ornée de plusieurs figures de pierre blanche. C'est dans cette galerie qu'on a placé la Bretéque de cette ville.

On voit ensuite, au-dessus du bénitier, une chapelle fondé par Monsieur Naveus, chanoine de cette église. Quatre belles colonnes de marbre jaspé soutiennent son centre (1); deux autres placées à chaque côté l'affermoissent ces huit colonnes sont de l'ordre Toscan. Au-dessus des quatre colonnes du milieu se trouve un piedestal sur lequel est posé Saint-Michel qui terrasse le diable. Ce groupe est sculpté en bois par le sieur Le Creux, sculpteur en cette ville, élève du sieur Gylis, directeur de l'académie impériale et royale de peinture de la même ville. (2) Les grilles de cette chapelle et des galeries ont

(1) La belle statue du Sauveur qu'on voit encore posée contre ces quatre colonnes, avec l'inscription: Si quis per me introïerit salvabitur, aurait bien mérité une petite mention.

(2) Ce groupe est maintenant au-dessus du jubé à l'entrée du chœur. Il est assez singulier qu'on ait donné pour place à un pareil sujet la chaire que Cousin appelle celle de l'Évêque « en laquelle dit-il, or installe l'évesque pour prescher, quand on le met en possession. Tom. III, p. 166.

élé faites à Cambray par un habile serrurier. La dorure est du sieur Tardif, doreur à Tournai.

Vers le milieu de la nef est placée une chaire de vérité. Elle représente plusieurs vertus sculptées en bois par le sieur Gylis. Les ornements de cette chaire sont des sieurs Colier, très-habiles ornemanistes de cette ville. C'est bien dommage qu'on ait coloré cet ouvrage. Si on l'eut verni, on en aurait conservé la délicatesse, qui se trouve en quelque sorte cachée. On peut dire à la gloire de ces artistes, qu'ils ont travaillé ces ornements avec autant de goût, suivant le sujet, que si c'eût été un ouvrage d'orfévrerie. (1)

A côté de cette chaire, sur la droite, est la chapelle St-Louis Roi de France. Dans le milieu on voit le monument en marbre de l'illustre de Bonneau, gouverneur de cette ville; il est composé d'un enfant debout sur un trône de marbre blanc, et appuyé sur un écusson représentant en bas relief le portrait de ce Seigneur, entouré d'une draperie délicatement travaillée. Ce monument qu'a fait le sieur Gyrardon, premier sculpteur de Louis XIV, est orné de branches de palmes de bronze. (2)

Étant dans la croisée on voit encore sur la droite la chapelle de Sainte-Anne. Elle est en marbre blanc jaspé. Son architecture est de l'ordre Corinthien. Le sieur Caré, autrefois peintre de cette ville, en a donné le plan. Cet autel est si matériel, qu'il représente plutôt un portique qu'un autel. (8) Le tableau représente la SainteFamille; il est de Matthieu Vannègre, qui le peignit l'an

(1) Le tout est conservé.

(2) Perdu ou détruit.

(3) Voilà une appréciation qui est bien juste.

1622. Cet homme était très habile, et surtout pour le coloris. On a voulu persuader au public que cette pièce était de Rubens ou de Vandyck. Mais de pareilles erreurs ne peuvent être prononcées que par ceux qui n'ont aucune conuaissance de la peinture, et qui ne jugent des ouvrages que par l'éclat des couleurs, sans considérer l'harmonie et l'ensemble, qui font la bonté d'un tableau, et caractérisent la magie de la peinture. Les connaisseurs qui ont vu les ouvrages de Franc-Flore et de Coxis, élèves de Raphaël, savent bien que ce tableau est plutôt dans le goût de ces maîtres, qui ignoraient la perspective aérienne, et donnaient trop de sécheresse à leurs contours, puisque tous leurs ouvrages sont très-durs et secs, de même que tous les anciens tableaux: au lieu que Rubeus et Vandyck, qui sont les princes de la peinture, savaient marier les fonds avec les contours, et observaient ponctuellement la perspective aérienne jusqu'au reflet etc. C'est ce qui fait régner dans l'ensemble de leurs ouvrages une harmonie parfaite et inimitable.

A côté de cet autel est un portail de marbre blanc et noir, dont les portes sont de bronze. L'architecture est de l'ordre Toscan. On y voit l'épitaphe de Monsieur de Boulogne, chanoine qui a fait construire ce monument. Les figures qui sont au-dessus, sont sculptées par Quillin d'Anvers. (1)

De l'autre côté, entre le jubé et la chapelle SaintAndré, on voit un semblable portail donné par Monsieur Daubermont, aussi chanoine. Les figures qui y a placées sont inférieures à celles de Quillin d'Anvers. (2)

(1) Détruit et vendu. Il était à l'entrée de la carolle. (2) Idem. Des grillages en bois remplacent ces deux monuments.

La chapelle de Saint-André, joignant ce portail, est conforme à celle de Sainte-Anne; mais les marbres sont mieux polis et plus proprement appliqués. Monsieur Boré, homme très-habile en cet art, en a dirigé l'ouvrage. Le tableau de cet autel représente Saint-André tenant sa croix, environné d'une gloire d'anges et de chérubins. Cette pièce est peinte en bas relief imitant le marbre, par le sieur Guéraert, professeur et directeur de l'académie d'Anvers. (1) Elle fait allusion à cette pierre. Il est surprenant qu'elle fasse un si bel effet, à cause du cadre qui est de marbre blanc : s'il eut été de toute autre couleur, ce tableau aurait surpris les plus clair-voyants. Mais puisqu'on a jugé à propos d'y mettre un cadre blanc, pour rendre cet autel conforme à celui de Saint-Anne, on devait en conséquence faire peindre ce tableau couleur de bronze, d'autant plus que le sieur Guéraert excelle également dans l'un et dans l'autre de ces genres de peintures: la peinture en bronze posée dans un cadre blanc, aurait été relevée de telle sorte, qu'elle aurait fait le même effet qu'on voit dans les tableaux que le sieur Guéraert a peints pour l'abbaye du saint-Sépulcre à Cambrai, où on les a placés dans des boiseries de chêne peintes en couleur brune; et ce sont ces boiseries qui font sortir tellement les bas reliefs, qu'ils paraissent être de marbre.

L'entrée du chœur est fermée par un jubé construit sur des colonnes de marbre jaspe; les bases sont en marbre noir, et les chapitaux d'albâtre. Cette pièce est très-solide et d'une très-belle architecture de l'ordre

(1) Tout est conservé.

BULLETIN T. XI.

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Toscan. Les bas-reliefs d'albâtre représentent différents traits d'histoires du vieux et du nouveau testament, et sont parfaitement rendus, de même que la Sainte-Vierge, Saint-Piat et Saint-Eleuthère, qui sont sculptés en rondes bosses. Ce monument est de Cornil de Vrint, frère du célèbre peintre de ce nom. Ce fut lui qui traça le plan de l'hôtel-de-ville d'Anvers, dont il était le plus habile sculpteur. En entrant au chœur par le jubé, les yeux sont agréablement surpris et satisfaits, tant par sa hauteur que par la délicatesse de ses voûtes. Les formes sont fort simples; (1) le derrière est décoré d'une ancienne tapisserie faite à Audenarde sur les cartons de Pierre de Cortone d'Italie. Le sieur Baron, tapissier à Tournai, en a fait revivre les couleurs que le temps avait altérées. On voit sur la droite la stalle de l'évêque. La menuiserie est parfaite. Les sieurs Durieux et Dupré, menuisiers en cette ville, en ont fait la boiserie. La sculpture est du sieur Lecreux. Une grille de fer artistement travaillée la ferme.

Le grand autel est d'airain, (2) il est d'une architecture

(1) Ces stalles ont disparu. Les stalles actuelles viennent de l'abbaye de Saint-Fueillien du Rouls.

(2) Cela est très-inexact. Le contre-rétable seul de l'autel était en airain. « Sur un mur, dit le chanoine Wacquez, de la hauteur de l'autel, s'élèvent en cuivre jeté (coulé), neuf colonnes avec leurs bases et chapiteaux. Elles sont disposées de telle sorte qu'elles soutiennent une grande table de cuivre, aussi longue que la pierre, (la table de l'autel ) et aussi large que le mur susdit, sur laquelle, dans le milieu, se trouve le tabernacle ancien du très Saint-Sacrement. » Il y avait quatre colonnes de chaque côté et une au milieu. Les châsses étaient posées sur la table d'airain. On avait cessé, du temps de Wacquez, de placer le Saint-Sacrement au maître-autel; il était au tabernacle de l'autel de la Férie au bout du chœur.

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