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maintenant, et Ti Beλtíwv, comme nous disons encore meilleur. "Et tient de porro, de ultro, de adeo : il veut dire en allant plus loin, en avançant, en progressant.

'En revient à postquam, quelquefois à ex quo (et non à cum, au moins pris dans le sens temporel). En d'autres termes, ce mot sert à faire entendre que l'action exprimée dans l'apodose est postérieure à celle dont il est question dans la protase. Si les deux actions sont dans le rapport de cause à effet, alors se produit une acception nouvelle, à laquelle convient la traduction française puisque.

"Ayav, díxv, comme en latin nimis, nimium, en français excessivement, s'emploie en parlant de ce qui dépasse la mesure ou nécessaire, ou légitime, ou simplement ordinaire.

Пáv, retro, pourra s'interpréter quelquefois dans l'avenir. On sait, en effet, que le Grec plaçait l'avenir derrière lui et le passé devant. Comparer лv, oпisco, à l'avenir, dans Homère. En pareil cas, le français emploie, sinon derrière, du moins (ce qui paraît logiquement assez voisin), 'après. Exemple: Ceux qui viendront après nous (c'est-à-dire nos descendants).

"Iows, qui signifie également, s'emploie le plus souvent pour marquer l'espèce d'équilibre de l'esprit que deux opinions contraires se disputent, et qui, entre les deux, reste en suspens. Dire que ce mot a souvent le sens de peut-être, ce n'est qu'une mauvaise façon de parler; mais ajouter qu'au sens de peut-être il joint celui de sans aucun doute, d'assurément, c'est une absurdité assez commune pour qu'on puisse l'appeler de son nom, sans se faire soupçonner de vouloir attaquer personne en particulier. La vérité est que les Grecs fuyaient l'exagération des mots avec le même soin que beaucoup de personnes chez nous (et peut-être dans tous les pays néo-latins) apportent à la rechercher. C'est même, si je ne me trompe, particulièrement dans ce souci d'éviter l'hyperbole, d'atténuer leur pensée plutôt que de la surfaire, que consistait la politesse des Grecs, en cela, assez différente de la nôtre. Nous croyons nous montrer courtois en adhérant sans réserve aux idées qu'on nous exprime, en renchérissant même sur les affirmations de notre interlocuteur; et nous ne songeons point qu'il y a une sorte de pédanterie à vouloir sembler plus sûrs de son dire qu'il ne paraît l'être lui-même. Un grec bien élevé, se piquait plutôt de ne se montrer certain d'aucune chose; il s'interdisait dans la conversation les formules tranchantes, qui lui rappelaient les champs, plutôt encore que l'école. Là, où nous répondons assurément, sans nul doute, incontestablement, les Attiques disaient modestement peut-être. Notre langage,

comme celui des Latins, nos pères, est volontiers hyperbolique. Le leur était (pour employer un mot qu'on a, en le leur empruntant, singulièrement détourné de son seul et vrai sens) emphatique: c'est-à-dire qu'ils disaient peu pour faire entendre beaucoup.

Faut-il conclure de là que Cousin et d'autres ont eu tort, en maint passage, de traduire low, par assurément ? Ceci, encore une fois, est une tout autre question. Qui dit traduction, dit transaction transaction entre des habitudes d'esprit distinctes, entre des langues nécessairement et foncièrement différentes. Un traducteur est un homme toujours en quête d'accommodements. Autre est la tâche du lexicographe, qui ne doit songer qu'à la vérité. Définir cette tâche comme nous la comprenons, ce sera en même temps donner une conclusion générale aux remarques détachées qui précèdent. Nous dirons donc : Quand un lexicographe a réuni tous les équivalents ou quasi-équivalents, toutes les périphrases, propres à éclaircir les divers emplois d'un mot, quand il a distribué toutes ces acceptions logiquement, et autant que possible généalogiquement, il ne devrait jamais arriver, et, en fait, il arrive le plus souvent qu'il a oublié la chose principale, à savoir le sens : le sens, qui n'est pas seulement le lien des acceptions particulières, qui n'est pas davantage un être de raison imaginé pour la commodité de la mémoire qui est la raison d'être du mot, le principe créateur et conservateur qui l'a produit et grâce auquel il a vécu. Y.

SUR LES SCOLIES DE JUVÉNAL

En lisant les Scolies inédites de Juvenal, publiées par M. Beldame dans la Revue de Philologie, t. VI, p. 76 et suiv., j'ai noté quelques altérations du texte qui me paraissent faciles à corriger.

Il faut lire

Satire VI, v. 296. Rhodos et Miletos, clides (?) insulae. Cyclades insulae, bien que Rhodes soit une Sporade et que Milet ne soit 'qu'une presqu'île. Mais ce scoliaste est fort ignorant de la géographie. Plus haut, Sat. III, v. 70, il dit: Samo, insula Cycladum, alors que Samos est une Sporade comme Rhodes.

Ib., v. 366. Il faut lire évidemment : « qui virilibus exsecantur. » Enfin, la glose stantem extra pocula caprum, ob odium ad Bacchum (Sat. I, v. 76) me paraît fort intelligible. Le bouc étant l'animal ordinairement sacrifié à Bacchus, le scoliaste rend compte de sa présence à l'extérieur du vase par la répulsion que doit inspirer à un bouc la liqueur de Bacchus. Inutile d'ajouter que c'est une subtilité absurde.

Σ. Ρ.

ANATOLE BOUCHERIE.

La Faculté des lettres de Montpellier vient de perdre un de ses professeurs les plus distingués, M. Anatole Boucherie, chargé du cours de philologie romane. On sait qu'il jouissait, comme romaniste, d'une réputation étendue et bien méritée. C'est sur les études de cet ordre que son activité s'est concentrée de plus en plus dans les dernières années. Mais il est juste de rappeler ici les services qu'il a rendus aussi à la philologie classique.

Plusieurs de ses publications touchent aux deux domaines. Ainsi le Fragment de Valenciennes, Explication du mélange de mots latins et romans dont se compose cet ancien texte (Mézières, 1866); les Cinq Formules rhythmées et assonancées (Montpellier, 1867); la Vie de sainte Euphrosyne (1872); Un Almanach au Xe siècle (1872); les Formules de conjuration antérieures au IX® siècle (1873); le Commentaire inédit sur Virgile (1874); les Mélanges latins et bas-latins (1875). Ce sont de curieux monuments du bas-latin, tirés de différents mss., principalement de Paris et de Montpellier, reproduits avec soin, restitués habilement en maints endroits, et accompagnés d'études grammaticales et lexicographiques fort intéressantes, surtout au point de vue de l'étude du vieux français, mais sans rien négliger de ce qui peut être utile aux latinistes. Il n'est pas inopportun de rappeler l'attention sur ces travaux au moment où de plusieurs côtés, après avoir fouillé les origines de la langue latine, on se porte avec ardeur vers l'étude de ses destinées finales. On remarque dans plusieurs de ces opuscules le soin accordé à la poésie rhythmée. C'est en effet un sujet qui intéressait beaucoup Boucherie. Il avait recueilli, depuis des années, de nombreuses observations sur cette matière et comptait en faire un ouvrage spécial. Peu de jours avant sa mort, il parlait de ce projet à l'auteur des présentes lignes, à propos du livre récent de W. Meyer (Ludus de Antichristo).

D'autres ouvrages sont consacrés à la véritable antiquité, à des auteurs dont la philologie classique ne peut hésiter à réclamer l'étude pour elle. C'est d'abord la Notice sur le palimpseste de Montpellier (ms. 141), publiée dans les Notices des manuscrits de la Bibliothèque nationale, t. XXIII, 2e partie. L'auteur du Catalogue des mss. des Bibliothèques des Départements ayant lu dans ce palimpseste les noms de Priscien et de Pompeius, et croyant apercevoir les lettres Fe après ce dernier nom, avait espéré qu'en déchiffrant le reste on retrouverait des fragments de l'ouvrage si important de Pompeius Festus. Cette espérance fut bientôt recon

nue vaine. Mais il valait la peine encore de dépouiller un ms. du VIIIe siècle contenant certains fragments de Priscien (livre viii) et de Pompeius, le commentateur de Donat. C'est ce que Boucherie a fait avec toute l'exactitude désirable. Le même volume des Notices renferme l'ouvrage le plus considérable de Boucherie en dehors des langues romanes, l'édition princeps des 'Epunveúuzτz d'après le ms. de Montpellier 306, et de la Kaupv quiz de Pollux d'après le ms. de Paris 3049. Il croyait alors devoir identifier ces deux écrits, et les attribuer tous deux à Julius Pollux, l'auteur de l'Onomasticon. Sur ce dernier point, du moins, il s'exprimait lui-même plus tard avec réserve. On sait ce que sont ces ouvrages: une espèce de guide de la conversation grecque et latine, suivi, dans le ms. de Montpellier, d'un vocabulaire composé par ordre de matières. Ils ont pour nous un double intérêt celui de nous faire mieux connaître les méthodes employées dans l'antiquité pour l'étude des langues vivantes, et de nous fournir un assez grand nombre d'expressions grecques et latines qui ne se trouvent pas ailleurs. Boucherie lui-même en a dressé la liste dans des index rédigés avec le plus grand soin. La restitution des textes, fort altérés, surtout le grec, est faite avec prudence et sagacité.

Le mérite de Boucherie est d'autant plus considérable qu'il a dù tout à lui-même. Il n'a été élève ni des écoles ni des Facultés. La place si honorable qu'il a fini par occuper dans le monde savant, il l'a conquise en suivant pas à pas l'humble et pénible filière du maître d'étude, du chargé de cours dans les lycées de province. Il a dû chercher lui-même sa voie, et tenir ferme par sa seule énergie dans les travaux personnels, qui n'étaient pas alors en faveur.

Dans l'enseignement (et encore à la Faculté il est revenu plus d'une fois aux études classiques pour aider le professeur de litté rature latine), Boucherie s'est fait aimer et apprécier hautement de tous ses élèves. Il a décidé de la vocation de plus d'un. Il a su à la fois les diriger d'une main sûre en vue des épreuves universitaires, et leur inspirer le goût de l'étude désintéressée.

Né le 29 mars 1831 à Challignac dans la Charente, Boucherie est mort à Montpellier, le 3 avril 1883.

T.

Avis. Ce bulletin a avant tout pour but de faire connaître à nos lecteurs, aussitôt que possible, les publications nouvelles qui paraissent dans le domaine de la philologie classique. En général, nous ne pouvons qu'annoncer, le temps nous manque pour apprécier. Nous insérons pourtant les comptes-rendus dont les auteurs ont eu le temps d'examiner et par conséquent de juger. Une simple annonce sans appréciation n'implique donc pas une opinion défavorable sur l'ouvrage qui en est l'objet.

Editions.

T. Macci Plauti comoediae. T. II, fasc. 2: Amphitruo; recensuerunt Georgius GOETZ et Gustavus LOEWE. Lipsiae (Teubner), 1882. xп et 132 p. in-8°. - Prix : 5 fr.

Les continuateurs de Ritschl ont publié l'Amphitruo avec un apparatus criticus extrêmement riche; la collection du ms. B a été revue par Hugo Hinckh, celle de l'Ursininianus (D) par Hinckh; le ms. du British Museum (J) a été collationné par Müller-Strübing, et l'Ambrosianus (E) par Goetz et Loewe. Toutes les conjectures proposées par les savants et offrant quelque importance sont soigneusement rapportées, ainsi que les citations de cette pièce de Plaute faites par les Grammairiens latins (Nonius, Donat, Charisius, Festus, Priscien, Osbernus). Pour ce fascicule, comme pour les précédents, les éditeurs ont montré qu'ils étaient à la hauteur de leur tâche. E. C.

Discours de Cicéron pour le poète Archias. Texte latin publié d'après les travaux les plus récents, avec une nouvelle collation du Gemblacensis, un commentaire critique et explicatif, une introduction et un index, par Emile THOMAS. Paris (Hachette), 1883, 64 p. in-8°.

Les trois sources admises pour le texte de ce discours sont: 1° le Gemblacensis, ms. du XIIe s. (jadis dans la Bibliothèque de Bourgogne, et antérieurement au monastère de Gembloux) conservé aujourd'hui à Bruxelles, sous le n° 5352; 2o l'Erfurtensis maintenant à Berlin; 3o des variantes recueillies par Pithou à la marge d'une édition de Lambin. M. Thomas, ayant reconnu la supériorité du Gemblacensis, en a fait une soigneuse collation. D'ailleurs ce ms. n'est pas exempt d'altérations, et dans plusieurs passages, M. T. a dû proposer quelques conjectures. Pour le commentaire, qui est fort développé, il a mis à profit les travaux les plus estimés et les plus récents.

De Apollinari Sidonio emendando. Scripsit Fridolfus V. GUSTAFSSON. Helsingforsiae, 1882, xvш et 124 p. in-8°.

M. Gustafsson discute le texte de Sidoine Apollinaire dans 418 passages et propose des corrections appuyées le plus souvent sur le texte des manuscrits. Il a, pour ce travail, collationné les mss. du Vatican 3421, S. IX-X et 1783, s. IX-X, un ms. de Stockholm, s. xi, le Bernensis 285, S. XII, et en outre examiné partiellement plusieurs mss. du fonds de la Reine de Suède au Vatican, ainsi que divers mss. de Florence. Quant aux mss. de Paris, il ne les connaît malheureusement que par l'édition de M. Baret. Quoi qu'il en soit, le travail de M. G. est très méritoire. On pourra voir dans un prochain numéro de la Revue Critique un compte rendu détaillé de cette publication. E. C.

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