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Lettres.

OUVRAGES DIVERS

Varron avait écrit des Epistolicae quaestiones et aussi de simples Epistolae. Teuffel (Gesch. der röm. Liter.. 4° éd., 166, 6 e) émet l'hypothèse que les Epistolae se diviseraient en graecae et latinae. Mais les prétendues Lettres latines sont en réalité des lettres adressées à des membres de la gens Latinia. Nonius indique le destinataire d'une lettre tantôt par ad avec l'accusatif (ainsi, en parlant des lettres de Varron, ad Fufum p. 144, noenum; ad Caesarem p. 56, petauristae), tantôt par le génitif (ainsi luli Caesaris p. 263, curriculus. C'est avec le génitif qu'il dit Cicero ad Varronem epist. Paeti (p. 83, comedim) en parlant de la lettre à Paetus, Fam. 9, 20, 3. et Cicero in epist. Cassi (p. 259, contendere) en parlant de la lettre à Cassius, Fam. 15. 14, 5. On voit que les mots epistolis Latini (p. 473, imitat), epistola Latiniae (p. 419, uindicare), ainsi que la forme corrompue epistola Latina (p. 121, hilaresco; p. 141, minutum) désignent des lettres ad Latinium et ad Latiniam.

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De uita populi romani III (Non. p. 548, creterra). Parmi diverses sortes d'objets précieux en métal, et à côté des creterrae, figurent des ananc(a)ea. Ce sont des vases à boire, comme l'indique Plaute, Rudens 2, 3, 32 s.: Neptunus magnis poculis hac nocte eum inuitauit. - Credo hercle anancaeo datum quod biberet. Les commentateurs, depuis le seizième siècle, y voient des coupes plus grandes que les coupes ordinaires, et ajoutent qu'on les faisait venir les dernières pour achever la raison des convives, qui étaient tenus de les boire jusqu'à la dernière goutte. Le Dictionnaire des antiquités de M. Saglio omet ce détail fort douteux, mais affirme que Plaute parle de l'anancaeum « comme d'un vase à boire de grande capacité »; la forme, selon le même dictionnaire, en est inconnue. Je crois, au contraire, que la forme est le seul point sur lequel nos conjectures aient chance de trouver juste. L'emploi de ce genre de vases à la fin d'un repas est absolument hypothétique. La grande dimension n'est indiquée qu'en apparence par le passage de Plaute. Le leno, dit Ampelisca, a été invité par Neptune à de fortes rasades (il a bu un bon coup en se débattant dans la

1. Datif. Voir le passage de Sesqueulixes (p. 321 Non.).

2. Mss. ancaeo, anan eo.

mer). Je crois, répond Trachalion, qu'on lui a servi à boire dans une coupe de nécessité, anancaeum. Il y a là deux plaisanteries indépendantes, et par conséquent on ne peut rien conclure de l'épithète magnis donnée à poculis. Si donc l'on considère isolément la plaisanterie de Trachalion, on voit que l'anancaeum est un vase qu'on n'est pas libre de ne pas boire, c'est-à-dire une de ces cornes percées à la pointe, dont le contenu s'écoulait en un jet plus ou moins fort: elles ne laissaient au buveur ni la liberté de cesser de boire, ni même celle de boire lentement.

Logistoricus de admirandis. - On sait que les Logistorici ont pour titre un nom de personne, pour sous-titre un ablatif avec de: ainsi Catus, de liberis educandis. On admet de même un Gallus Fundanius, de admirandis. Mais un contemporain de Varron pouvait-il s'appeler Gallus Fundanius? en autres termes, arrivait-il alors qu'on mît le cognomen avant le nom de la gens? Il faut rejeter résolument cette appellation barbare: elle ne s'appuie sur aucun témoignage. Les anciens ne citent l'écrit de Varron que sous l'une des formes suivantes : Gallus (Macrobe), - Fundanius (Charisius deux fois et Priscien une fois; les trois passages donnent la même citation et ne représentent qu'un seul témoignage), Gallus uel Fundanius (Non. p. 217, putei; p. 71, aboriatur), Gallus aut Fundania (sic, Non. p. 205, fretum). On voit que Gallus et Fundanius (ou peut-être Fundania) sont deux titres d'un même ouvrage. Chacun d'eux représente sans doute une rédaction et une édition différentes du logistoricus; Varron en aura remanié le cadre, de la même façon que Cicéron remania le cadre de ses Académiques. Fundania est le nom de la femme de Varron, à qui s'adressent les premiers mots des Rerum rusticarum libri, écrits dans la quatre-vingtième année de l'auteur. Varron auraitil, dans l'une des dernières années de sa vie, substitué le nom de sa femme, ou d'un parent de sa femme, à celui de Cornelius Gallus en disgrâce?

MÉNIPPÉES

'Avoρonómoλiç meρt yeveλxxjs (Nonius p. 379, religio):

Non fit thesauris, non auro pectus solutum,
Non demunt animis curas ac relligiones
Persarum montes, non atria diuitis Crassi.

Les montagnes d'or des Perses, connues par Plaute, Stichus 24, figurent déjà dans Aristophane, Acharn. 82, et Lucien semble y faire allusion, Hermotime 814. Ici Persarum montes n'est qu'une expression figurée pour dire beaucoup d'or, et Varron n'a aucune

REVUE DE PHILOLOGIE Juillet 1883.

VII.

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intention géographique, pas plus que nous quand nous parlons de châteaux en Espagne; il est donc inutile de changer Crassi en Croesi, comme l'avait fait Camerarius, pour mettre à côté de Persarum un autre nom oriental. Le terme atria indique d'ailleurs qu'il s'agit d'un richard romain, dont le palais somptueux devait être situé à Rome même et bien connu des lecteurs de Varron. Il dit un palais de Crassus, comme on dit : un dîner de Lucullus. S'agit-il ici du Crassus qui périt en combattant les Parthes? s'agit-il de son père ou d'un de ses ancêtres? La question est malaisée à résoudre; en tous cas, le surnom de riche était héréditaire dans la famille depuis un Crassus contemporain de la seconde guerre punique. C'en est assez pour qu'il paraisse préférable d'écrire Diuitis par un grand d; ici ce n'est point une épithète ordinaire, c'est l'agnomen de Crassus, ou, tout au moins, une allusion à cet agnomen.

Si L. Crassus l'orateur portait l'agnomen Diues, ce que je ne saurais déterminer, on pourrait voir dans les vers de Varron une allusion aux colonnes de marbre qu'il fit placer chez lui, précisément dans son atrium, en un temps où les monuments publics eux-mêmes n'en avaient point encore (Plin., h. n. 17, 6 et 36, 7; dans le second passage il faut lire in eodem (Palatio) in atrio).

Desultorius (Nonius p. 503, feruit):

Feruere piratis uastarique omnia circum.

Varron, en 67, fut chargé de commander les flottes qui croisaient contre les pirates sur les côtes de la Grèce, inter Delum et Siciliam (Varro, Rerum rustic. II praef. fin.), et s'acquitta si bien de son emploi que son chef Pompée lui décerna une couronne navale (Plin., h. n. 7, 115). Notre fragment du Desultorius fait très probablement allusion à cette campagne maritime; en ce cas le Desultorius a été écrit après 67. Le sous-titre grec (map! Tou уpáperv) indique avec certitude que c'était une ménippée. Nous avons donc ici un point de repère chronologique précis pour apprécier les termes illa uetera nostra, par lesquels Varron désigne ses ménippées dans un dialogue de Cicéron écrit en 45 (Acad. post., 1, 2, 8).

Dolium aut Seria (Probus sur Virgile, Ecl. 6. 31, p. 18 Keil; on n'a que deux mss., l'un et l'autre du xv° siècle):

Mundus domus est maxima homulli,

1

Quam quinque altitonae fragmine 1 zonae
Cingunt, per quam limbus pictus

Bis sex signis stellumicantibus

1. Fragmine le Vaticanus, fragminae le Parisiensis.

Altus in obliquo aethere lunae bigas acceptat postumi cui seplasia fetet appellatur a caelatura caelum, etc.

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Les dimètres anapestiques de la ménippée Jarre ou cruche s'étendent au moins jusqu'au mot acceptat; ils présentent les difficultés suivantes 1° le second vers a une syllabe de trop, probablement dans la première moitié; 2o dans ce vers on ne comprend guère la valeur de l'ablatif, non plus que le mot même de fragmine; 3o on ne comprend guère quam et per quam; d'une part des relatifs devraient porter sur le mot propre, le masculin mundus, plutôt que sur domus, qui n'est ici que par figure; d'autre part (que ces relatifs s'appliquent au mundus ou à la domus), per ne va pas; il doit s'agir d'une bande marquée autour de la surface sphérique; or, per portant sur un mot qui désigne le monde, ferait naître plutôt l'idée de quelque ligne ou plan coupant le volume de la sphère. M. Riese remplace fragmine par flammigerae: correction d'une vraisemblance médiocre en elle-même, qui d'ailleurs réduit le second dimètre dans sa seconde moitié quand il faudrait le réduire dans la première, qui ne rend pas moins défectueuse l'application des relatifs quam et per quam, et qui enfin oblige son auteur à rayer ensuite, on ne devinerait jamais quel mot, à rayer pictus ut glossema (!) vocis aptus, quae legenda est (?) pro altus. » M. Bücheler, qui jadis voulait remplacer altitonae par alte, remplace maintenant altitonae fragmine par altitono agmine: outre que le mot conjectural agmine ne peut se bien prendre ici dans aucun de ses deux sens, celui de troupe et celui de marche ou cours, et que l'origine du groupe intrus fr n'est pas expliquée, la difficulté qui s'attache aux relatifs quam et per quam reste entière. -Il manque avant le troisième dimètre un mot dont per quam puisse raisonnablement dépendre, c'est-à-dire un mot qui désigne la surface sphérique posons en principe qu'il faut rétablir ce mot, sphaera. Du moment qu'il a disparu, on a dû vouloir rattacher per quam à domus, on aura donc interpolé quam devant quinque supprimons ce quam, ce qui ramène le second dimètre à sa coupe légitime. Comme le séjour élevé de la foudre est la sphère dans son ensemble, non chacune des cinq zones prise à part, altitonae doit porter sur le substantif restitué, non sur zonae: nous lirons donc sphaerae au génitif. D'où dépend ce génitif? d'un pluriel construit avec quinque corrigeons l'ablatif fragmine (ou, suivant la variante précieuse du Parisiensis, fragminae) en fragmina. Ou mieux des morceaux ou cassures n'allant point ici (non plus que le segmine de Barth, car segmen signifie une rognure), lisons par exemple opźyuzz: chacune des zones qui contribuent à enclore l'univers est comme une ceinture de remparts. Otons enfin

zonae, glose de ce puzz', et remettons à la place le mot légitime sphaerae, évincé par l'intrusion de la glose. La brève devant sph (devant z si l'on gardait zonae) n'a rien qui choque : cf. infamia stans dans des anapestes des Eumenides. Ajoutons enfin limes (devant lunae) pour compléter le cinquième dimètre et en préciser le sens; ainsi nous isolerons le parémiaque terminal :

Mundus domus est maxima homulli:
Quinque altitonae pauza sphaerae
Cingunt, per quam limbus pictus
Bis sex signis stellumicantibus,
Altus in obliquo aethere (limes,)
Lunae bigas acceptat.

Le titre de la ménippée citée ensuite doit être non pas Post uinum seplasia faetet (Riese), ou Postume, cur seplasia faetet (Bücheler), mais simplement Seplasia faetet, le quartier des parfumeries sent mauvais. Avant seplasia je lirais volontiers cui (ti-, tulus est): cf. plus haut la forme de citation Varro in Cynicis, (ea satura) quam inscripsit Dolium aut Seria. Quant à postumi, ces syllabes corrompues ne cachent que l'annonce de la nouvelle

citation.

"Eyw Gε, TEρ! Túyys (Non. p. 179, terta) :

Aerea terta nitet galea...

Au premier abord, rien qui choque dans ce casque de bronze, aerea. Mais si l'on regarde les variantes, il est curieux de constater combien cette leçon, si satisfaisante en apparence, a peu d'autorité. Le ms. de Leyde a area. La première main de l'Harleianus ne connaît aussi qu'area, l'e est de seconde main. Dans le Parisiensis, toute cette partie de Nonius manque. Seul le ms. de Wolfenbüttel semble avoir aerea, et encore (outre que nulle part je ne vois aerea certifié expressément), la variante gelea pour galea prouve que dans ce ms. aussi un correcteur avait marqué quelque part un e à insérer dans le texte; que ce correcteur, par conséquent, avait sous les yeux area. Conclusion: area seul est traditionnel, aerea n'est qu'une de ces conjectures faciles, qu'on peut croire écloses dans le cerveau des moines. Cela posé, si l'on remarque que dans un autre fragment de la même ménippée (Non., p. 228, torques) il est question de colliers d'or et de boucliers à ciselures d'argent qui brillent dans la bataille, on lira aurea. La réduction graphique de au à a est bien connue. Auro dans

1. Zona, au sens cosmographique, était-il en usage au temps des ménippées ? Je le croirais introduit dans la langue plus tard, par Varron d'Atace et Virgile.

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