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aux porteurs de croix et aux sonneurs, pour le vin; au curé, pour le De profundis annuel, et pour lever le testament, ne sont pas sans intérêt, étant rapprochés d'autres documents analogues.

Je proposerai donc de réserver celui-ci pour le recueil de statistique, malgré quelques incertitudes de lecture.

La pièce n° 6, datée de l'année 1578, est plus intéressante; elle donne la taxation pour le bailliage ou comté de Beauvais de certaines denrées, de journées d'artisans et de frais d'hôteliers, de taverniers, de rôtisseurs, etc.

Les artisans indiqués sont au nombre d'une centaine environ. Si l'on compare les prix à ceux portés dans un autre document beaucoup plus détaillé et plus important se rapportant à l'année 1307. et concernant le bailliage d'Amiens, document dont j'ai entretenu le comité dans un précédent rapport, on trouvera une application très-curieuse de la différence d'appréciation des mêmes objets à ces deux époques, distantes l'une de l'autre de plus de deux siècles. Le nombre des objets communs aux deux listes n'est pas considérable. En voici un exemple:

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Et ainsi pour quelques autres. On trouve une augmentation de plus de trois-quarts dans la taxe la plus récente, ce qui est assez d'accord avec le résultat auquel est arrivé M. Leber dans son appréciation de la fortune privée au moyen âge. Toutefois, cette question de la valeur comparative des denrées et de la main-d'œuvre se complique tellement par la valeur variable, selon les époques, du prix moyen du marc d'argent monnayé et de ce qu'on a nommé le pouvoir de l'argent, qu'il me paraît utile de réunir un bien plus grand nombre de matériaux propres à éclairer cet intéressant sujet d'études.

Pour la taxe concernant la ville de Beauvais, comme elle ne fut rendue qu'en vertu de l'ordonnance de 1577, générale dans

tout le royaume, il sera intéressant de la comparer plus tard à d'autres applications semblables qui ont été faites dans d'autres provinces.

La pièce n° 7 est l'extrait des comptes rendus, en 1565 el 1567, par les marguilliers de Saint-Jean, près Beauvais ; on y trouve la mention des oublies distribués le jour de la Pentecôte, de chemineaux, sorte de gâteaux distribués le jeudi-absolu, et plusieurs indications du prix des vins et autres objets de dépenses.

Cette pièce est suivie d'extraits d'un manuscrit inédit dont on n'indique ni l'époque ni la provenance, et où se trouve consignée la valeur du blé, et autres denrées, pour les années 1584, 1586 et 1587.

La copie n° 8 est indiquée comme présentant le menu d'un dîner des officiers municipaux de la ville de Beauvais, à l'occasion des élections annuelles faites en 1570; mais le texte porte la date du 27 juin 1660.

La pièce no 9 est le menu d'un repas de noces d'un conseiller du roi au bailliage et siége présidial de la même ville, en 1596. Chaque plat du souper du jour et du diner du lendemain y est estimé neuf écus, évaluation qui serait exorbitante pour le plus grand nombre de mets indiqués, tels que deux perdrix, deux bécasses, deux ramiers, etc., un lapin, un levraut.

La pièce n° 10 est la copie d'un arrêté de Louis XIII, daté de 1625, et accordant exemptions du logement des troupes aux habitants de la ville de Beauvais et des pays à deux lieues à l'entour, qui avaient eu beaucoup à souffrir par suite des désordres causés par la présence des troupes.

Sous le n° 11 se trouve une ordonnance rendue en 1670, par Fr. de Boufflers, bailli de Beauvais, défendant les danses publiques, la fréquentation des cabarets les dimanches et fêtes, ainsi que les soirées-veillées des ouvriers, comme donnant lieu à des dérèglements.

Enfin, sous le n° 12 de son envoi, M. Mathon a adressé plusieurs extraits du même volume manuscrit anonyme indiqué cidessus. Ces extraits présentent divers traits de mœurs et font men tion de dépenses pendant le xvr et le xvII° siècle.

Le document le plus intéressant est un règlement de l'année 1595, fixant la préséance entre les arbalestriers et les harquebusiers de la ville de Beauvais.

Je proposerais de réserver pour le recueil de statistique la pièce n° 6 (tarif de l'année 1578), et de déposer dans les archives les autres copies ou extraits de pièces envoyés par M. Mathon fils1.

XXVIII.

Rapport fait à la section d'histoire, le 23 juillet 1855, par M. de la Villegille, secrétaire du comité, sur des communications de MM. Geslin de Bourgogne et Châtelet, correspondants2.

M. Geslin de Bourgogne, correspondant du ministère de l'instruction publique et des cultes pour les travaux historiques, a adressé un extrait des registres des États de Bretagne, sur lequel la section a bien voulu me demander un rapport. Cet extrait porte pour titre :

«Estat de ce que monte la despense, tant des officiers de l'armée suivant l'estat du roy, que des vivres, artielerye et atiral d'ycelle, ensemble de l'entretenement des Suisses, régiments et cavalerye, destinez pour servir en ladicte armée de ce pays de Bretagne, durant l'année 1596.»

Le correspondant ajoutait que cet état renfermait des détails sur l'organisation d'une armée au temps de la Ligue, qui n'avaient pas été publiés jusqu'à ce jour.

L'opinion émise par M. Geslin me paraît parfaitement fondée. On ne rencontre dans tous les ouvrages qui ont trait à l'art militaire que des renseignements généraux sur l'organisation intérieure de l'armée française avant le xvir° siècle : les indications de détails manquent avant cette époque. Les Mémoires de Sully eux-mêmes ne contiennent que des généralités sur l'emploi des sommes affectées à l'entretien de l'armée sous Henri IV. Ainsi, par exemple, lorsque en 1605 le roi doubla la force de la compagnie de gens d'armes de son ministre favori, et la porta à 100 hommes, les Economies royales font connaître seulement que Sully recevait

1 Les conclusions de cette seconde partie du rapport ont été également adoptées. (Voir Bulletin du comité, t. II, p. 594 et 627.)

2 Bulletin du comité, t. II, p. 718.

une somme annuelle de 4,000 francs d'appointements. La solde particulière allouée à chaque officier, suivant son grade, ni celle que recevaient les soldats, n'y sont nullement indiquée. Or, ce sont précisément des renseignements de cette sorte que fournit le document transmis par M. de Geslin.

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Avant d'apporter au comité une affirmation touchant l'importance de la communication qui lui a été faite par son correspondant, il me restait encore à m'assurer si les archives du dépôt de la guerre ne renfermaient pas des documents analogues. Cette dernière vérification a été tout à fait concluante. Les archives du dépôt possèdent très-peu de manuscrits pour l'époque du règne de Henri IV, et il m'a été répondu qu'une copie de l'état de l'armée du roi, qui fait l'objet de ce rapport, serait un document intéressant à avoir, parce qu'il présente, non-seulement des données sur la solde des troupes à cette époque, mais encore sur la composition de l'armée : État-major, artillerie, cavalerie, infanterie et troupes étrangères. Je crois donc pouvoir proposer la publication, dans le Bulletin, de l'extrait des registres des États de Bretagne, et je ne doute pas que le comité n'adopte cette proposition lorsqu'il aura entendu l'analyse sommaire que je vais lui donner de cette pièce.

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L'extrait des registres des Etats de Bretagne ne porte point de date, mais celle-ci peut être facilement suppléée, car le premier article concerne le traitement de l'officier qui commandera en la place de feu M. le maréchal d'Aumont. Ce chef de l'armée royale étant mort le 19 août 1595, des suites d'une blessure qu'il avait reçue au siége du château de Comper, il ne saurait donc être question que des États de 1596, puisque la session de l'année 1595 avait eu lieu au mois de janvier.

D

Le premier chapitre de l'état porte comme titre : Officiers de l'armée. C'est le détail complet d'un état-major général, où toutes les fonctions sont minutieusement indiquées, depuis le général jusqu'aux trompettes et « chevaucheurs d'escuries pour estre près des lieutenans généraux, ainsi que le prévôt d'armée, son greffier et ses vingt archers. Le médecin, les chirurgiens et l'apothicaire servant en ladicte armée » ne devaient pas être oubliés sur cette liste; mais on s'attendrait un peu moins à y voir figurer un maître des requêtes, accompagné d'un sieur Turquam, qui servira de conseil. » Ce maître des requêtes, nommé de la Gréé, paraît

du reste avoir compté en permanence au nombre des officiers de l'état-major de l'armée, car c'est ce même personnage que le maréchal d'Aumont envoya porter les conditions de la capitulation aux habitants de Quimper, lorsqu'il s'empara de cette ville, au mois d'octobre 1594.

Le paragraphe consacré aux officiers des vivres n'est pas moins détaillé que le précédent. Tout est prévu. Huit clercs, payés à raison de 25 écus par mois chacun, sont chargés d'escripre les expéditions nécessaires, voyager pour les magasins, faire mouldre les bleds, cuire le pain, faire charger dans les sacs, etc. Un maître boulanger et huit compagnons sont préposés à la fabrication du pain, et parmi les dépenses présumées figure la construction de fours.

L'attirail du canon est un des objets les plus curieux de cet état. On commence par y établir que l'entretien du nombre de chevaux ou bœufs nécessaires pour mener six canons de campagne nécessiterait de trop grands frais, et on se réduit à l'équipage de quatre canons ordinaires. Cet équipage est de deux cents chevaux; et dans le cas où l'on penserait que le menaige des bœufs soit meilleur, fault trois cents bœufs, et cent bouviers. Un peu plus loin figure l'entretien de cent Lamballais ordinaires, qui serviront de pionniers. Il n'est pas sans intérêt de remarquer que les habitants du pays de Lamballe sont encore aujourd'hui renommés en Bretagne comme d'excellents terrassiers, et qu'ils parcourent chaque année les diverses parties de cette province pour y creuser les fossés de clôture.

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Viennent ensuite les approvisionnements de poudre; de balles à canon et à couleuvrines, et de plomb; puis l'énumération des ustensiles de toute nature dont il est nécessaire de se munir. Ici tout serait à citer, de même que dans l'article des officiers de ladite artillerie. Aucun des genres d'industrie dont le concours peut être nécessaire au service de l'artillerie en campagne n'y fait défaut.

Le chapitre de la cavalerie est un des moins importants. Cette arme n'avait qu'un bien faible effectif, 195 hommes seulement.

Les régiments, c'est-à-dire l'infanterie française, comptent 3,450 hommes, répartis entre douze régiments, composés d'un nombre de compagnies qui varie de quatre à huit.

L'infanterie étrangère est représentée par cinq compagnies de

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