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se retirer sont contraints louer maisons et vivre séparément, et faire l'office divin sous ung couvert qu'ils ont faict.

Dict aussi qu'en l'abbaye de Saint-Chinian, par les mesmes de ladite relligion, les relligieux et prebstres ont esté prisoniers; les autres murdris; le monastère, l'église abbatialle et parrochelle ont esté pilhées et razées; le monastère de Fontcaude pilhé; tout le bestail de l'abbaye admené ; l'abbé prisonnier et le monastère bruslé, estans les dites abbayes dans ledit diocèse de Saint-Pons. Toutes les aultres églises et maisons presbiteralles dudit diocèse, entre aultres celle dudit Riolz, ont esté pendant ledit temps pilhées et razées excepté quatre ou cinq; et le peuple de la plus grande partie du diocèze refuser payer les dixmes et prémisses jusques les dites esglises estre réédiffiées. Et tout ce dessus dict savoir comme est notoire et patand à tous dudict diocèze et lieux circonvoisins.

Et plus n'a dici; répèté, a percévéré ; et c'est signé. - Besses.

Du huictième dudict moys.

JEAN CABROL, seigneur de Salebielhe, eaigé de cinquante. cinq ans, tesmoing adjourné et ouy moiennant serement comme les précédans,

A dict qu'en l'an mil cinq cens soixante sept et au moys d'octobre, ceux de la prétendue relligion novelle prindrent la ville, monastère, maison épiscopalle (1) de Saint-Pons, la ville et abbaye de Saint-Chinian et l'abbaye de Fontcaude et quasi toute la diocèze dudit Saint-Pons; pilharent led. monastère, tuarent des relligieux et prebstres, et, après, arazarent tous les dictz monastères et églises et autres maisons presbiteralles dudit diocèze, fors cinq ou six ; ce que dict savoir comme est notoire à tous les diocézains et lieux circonvoisins et pour avoir veu les ruynes encore estans; et pour ce que la pluspart des relligieux estoient prisonniers es mains des dictz de la relligion furent mys à ransson de mil escus, lesquelz Manon Cartolle dudit Saint-Pons fornist, et luy dépposant cautionna, et despuys a payé; et jusques à estre remboursé luy a esté bailhé par ledit monastère à pris convenu l'arrentement du dixme et tasque des bleds qu'ils ont en la paroisse dudit Saint-Pons; et sont contrainetz lesdictz relligieux à faulte d'habitation demeurer particulièrement en maisons à louatge dudit Saint-Pons, comme il voit journellement. Dict aussi qu'en la dite diocèze le peuple reffuse payer les dixmes et prémices pour ce qu'ils n'ont point de temples, et jusques soyent réédiffiés; ce qu'a dit savoir, comme notoire à tous, et

1 On remarquera qu'aucun témoin n'a parlé de l'évêque de Saint-Pons, qui était alors Jacques de Castelnau de Clermont, neveu de son prédécesseur. Il parait ne pas avoir observé la résidence: l'auteur de la Chronologie semble, d'ailleurs, lui en faire un reproche « Et l'on peut dire que la ruine spirituelle et temporelle de l'église et du monastère de Saint-Pons-de-Thomières vint de ce que son evesque estoit ordinairement absent. » Chron.

p.6.

que il habite au lieu de La Salvetat, audit diocèze, où le sieur évesque et dictz relligieux prennent les fruictz décimaux, desquels il dépposant est rentier et, pour estre payé desdits dimes luy convient avancer les deniers pour bastir l'église.

Et plus n'a dict; répété, a percévéré, et c'est signé. - Cabrol.

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Jean Plantavit de la Pause

CHAPITRE III

Après sa conversion. Ses voyages.

Premiers honneurs.

Plantavit de la Pause était de ces grandes âmes qui ne savent, ni ne peuvent se contenter de la médiocrité. A peine gagné à la foi catholique, il exprima le désir d'embrasser l'état ecclésiastique. Poussé dans cette voie par plusieurs évêques et les Pères Jésuites de Béziers, il partit pour Rome.

Le pape Paul V, instruit sans doute des circonstances de sa conversion, l'accueillit avec une grande bonté et reçut son abjuration solennelle. Heureux de tous ces flatteurs encouragements, le nouveau converti se mit à perfectionner ses études religieuses avec une ardeur qu'il n'avait pas encore connue. Il commença par réformer ce qu'il y avait de défectueux et d'obscur dans ses principes théologiques. Sa croyance n'en devint que plus vivace. Puis, il se mit à l'étude des langues orientales. Il voulait, disait-il lui-même, interpréter les écritures saintes d'après les textes originaires et puiser dans les livres des juifs ce qu'ils contenaient de remarquable.

Les circonstances le servirent admirablement. Il y avait alors à Rome deux hommes réputés par leur habileté à enseigner les langues orientales: Dominique de Jérusalem, rabbin devenu catholique, et Gabriel de Sion, savant MaTonite. Plantavit suivit leurs cours; du premier il apprit l'hébreu et le chaldéen; du second, l'arabe et le syriaque.

Il fit de tels progrès que bientôt le talmud et les rabbins

que

n'eurent pour lui plus de secrets. Son neveu affirme qu'il savait 17 langues et en parlait 10 sans aucune difficulté (1). Il ne tarda pas à être remarqué par les célébrités du monde ecclésiastique. Les Mémoires (2) nous apprennent les cardinaux Bellarmin et Baronius l'honorèrent de leur puissante amitié. M. de Brèves, notre ambassadeur auprès du pape, le recommanda plusieurs fois à la régente, Marie de Médicis. Paul V n'hésita pas à lui confier plusieurs missions diplomatiques des plus délicates auprès de la République de Venise.

Après un assez long séjour à Rome, le jeune savant revint à Paris. Sa réputation méritée de profond érudit, ses grandes manières, sa piété et son tact lui gagnèrent facilement les sympathies de la Cour royale. Le cardinal de la Rochefoucault, grand aumônier de France, le prit comme vicaire général.

Peu de temps après, nous le voyons nommé professeur au collège de la Flèche. C'était un poste délicat qui convenait à un tel homme.

Les protestants, pour gagner à leurs doctrines l'Ouest, avaient créé à Saumur une Faculté de Théologie qui acquit en peu de temps une réelle influence. Pour contrebalancer son action religieuse, les catholiques venaient de fonder la Faculté de la Flèche. Les controverses entre les deux Ecoles étaient fréquentes et souvent très serrées. De part et d'autre on aimait à s'entourer des sujets les plus sûrs et les plus habiles. Plantavit se fit distinguer par son savoir et réduisit plusieurs fois ses contradicteurs à un silence humiliant.

Sa polémique avec le ministre Bérauld est restée célèbre. M. Bonnet l'a racontée dans tous ses détails avec une érudition remarquable.

Une thèse soutenue par Jean Carré devant l'Académie de Saumur donna naissance à ce débat fameux.

Plantavit voulut blâmer la doctrine exposée par le jeune étudiant poitevin. C'était son droit. Il le fit en termes très vifs. Bérauld, ancien dominicain passé, on ne sait trop pourquoi, à la Réforme, voulut défendre son élève. Plantavit l'appela« Nugipolyloquides », épithète empruntée à

1. Mémoires. p. 12.

2. Mémoires, p. 12.

Plaute qui veut dire loquace diseur de riens. Bérauld lui répliqua en publiant un violent libelle intitulé « Epistola apologitica ad Plantaviticum semi-jesuitum ».

Le 19 juillet 1607, d'un commun accord, les deux célèbres théologiens se rencontrèrent à Saumur devant toute la Faculté et plusieurs pasteurs protestants accourus pour assister à la controverse. Plantavit réduisit à néant les théories de son adversaire, comme le certifie un petit livre qui parut alors sous le titre de Expositio sincera disputationis habitae Salmarii.

Le vainqueur publia un opuscule nouveau, le vaincu en fit paraître un autre. Enfin un auteur inconnu, sous le titre de Lorum ex bestia, chanta la victoire du grand orateur catholique et mit fin à la controverse.

Pour récompenser son mérite, le roi lui donna l'abbaye de Saint-Martin-aux-Bois, en Picardie, qui valait 14.000 livres de rente (1).

La communauté de Saint-Martin avait besoin, comme tant d'autres, de sérieuses réformes. Les moines, oublieux de leurs devoirs, avaient pris l'habitude de se livrer avec passion aux exercices de la chasse. La science ecclésiastique, la piété et la discipline étaient gravement compromises.

Le nouvel abbé ne craignit pas de dire que ces amusements ne convenaient en aucune façon à ceux qui avaient fait profession de vie religieuse. Il mit dans ses remontrances tant de cœur et de fermeté qu'il les vit couronnées de succès.

Rassuré sur la bonne tenue de sou abbaye, il entreprit alors un grand voyage, désiré et projeté depuis longtemps. Il quitta Paris avec ses deux amis intimes: M. l'abbé Dargouges et M. de Sarrus, conseiller au Parlement. La petite caravane descendit à Lyon, traversa la Savoie, visita le Milanais et les principales villes de l'Italie. Elle s'arrêta plus particulièrement à Venise où Plantavit avait de hautes relations, depuis que le pape Paul V l'avait délégué comme ambassadeur auprès de la petite République. Nos trois voyageurs parcoururent encore l'Autriche, la Hongrie, la Pologne, la Hollande et les provinces des Pays-Bas (2 Bean voyage pour l'époque!

1. Mémoires p. 13

2. Mémoires p. 13

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