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Rennes, fait une communication sur l'Accent latin et la prononciation du latin en France. Il montre qu'il serait utile et facile d'habituer les élèves à prononcer le latin en marquant la place de l'accent.

Cette réforme présenterait des avantages sérieux pour l'étude même de la langue latine. D'abord, au point de vue esthétique, s'il ne nous est pas permis d'espérer que nous prononcerons jamais le latin comme les Romains du temps d'Auguste, nous devons du moins essayer d'arriver à une prononciation moins monotone. Au point de vue pratique, la réforme rendrait plus facile l'étude de la prosodie; les vers latins étant supprimés, l'étude théorique des règles de la prosodie n'est plus accompagnée d'aucun exercice pratique; si les élèves avaient l'habitude de bien placer l'accent, la connaissance de la règle qui détermine le rapport de la quantité et de la place de l'accent pourrait suppléer presque toutes les règles des traités de prosodie,

La réforme ne serait pas moins profitable à l'étude du français, à l'étude philologique ou pratique des langues romanes, et même en général des langues étrangères.

Plusieurs membres de la Section approuvant les observations de M. Macé, émettent le vœu que les élèves soient habitués à prononcer le latin en marquant la place de l'accent.

La communication de M. Macé, jugée fort intéressante par M, G. PARIS, donne lieu à un échange de vues entre MM, REVILLOUT, JORET et plusieurs membres de la Section. M. Paris fait observer que le latin est devenu une langue morte, non pas dans les temps modernes, comme le pense M. Révillout, mais dès l'époque de Charlemagne. C'est alors que sont nées et que se sont propagées les habitudes de prononciation qui, en se fortifiant de plus en plus, sont devenues les nôtres. Il serait assurément très souhaitable que les Français ne fussent pas isolés dans une sorte de barbarie par suite de la manière dont ils prononcent le latin, mais il ne faut pas se dissimuler qu'il y aurait à cela de bien grosses difficultés pratiques.

M. Louis BLANCARD, lisant une étude sur la date de la traduction française du Traité d'Oresme, démontre que cette traduction, qui est universellement attribuée à cet auteur, lui est postérieure de près d'un siècle. Il prouve, par de nombreuses inexactitudes qu'il signale en cette traduction, qu'elle ne peut être de l'auteur même du traité, et démontre par la mention contenue

dans cette traduction, d'une monnaie frappée en 1453, que l'œuvre n'a pu être écrite qu'après cette date, c'est-à-dire près de cent ans après la rédaction de l'original.

Il faudra désormais rayer la traduction française du Traité des monnaies d'Oresme de la liste des œuvres de ce moraliste.

M. G. Paris s'associe aux conclusions de M. Blancard; c'est au texte d'Oresme qu'il faudra désormais recourir.

M. THOMAS, directeur des Annales du Midi, communique une chanson française anonyme sur les batailles de Taillebourg et de Saintes (juillet 1242), dont Leroux de Lincy n'avait pu se procurer le texte pour l'insérer dans son Recueil des chants historiques français, en 1841. Cette chanson a été publiée l'an dernier par M. J. Camus, professeur à Modène, dans la Revue des langues romanes, mais sans commentaire historique ni philologique. M. Thomas qui, grace à une nouvelle collation du manuscrit de Modène faite, à sa demande, par M. Jeanroy, professeur à la Faculté des lettres de Toulouse, a pu établir un texte plus exact que celui de M. Camus, insiste surtout sur l'intérêt historique de cette chanson, ouvre d'un trouvère champenois inconnu qui, vraisemblablement, a été un témoin oculaire de ces deux batailles. Grâce au trouvère, et grâce à lui seulement, nous connaissons les noms de six seigneurs français qui se sont distingués dans ces deux journées; parmi eux, on remarque le futur connétable de France, Imbert de Beaujeu, et Erard de Valery, si souvent cité par Joinville comme le modèle de la chevalerie, qui tous les deux ont dù faire leurs premières armes dans cette campagne. Le témoignage du trouvère est également important en ce qui concerne Archambaud, sire de Bourbon, que la plupart des biographes font mourir à Taillebourg ou à Saintes; il résulte de ce témoignage que le sire de Bourbon n'a pas assisté à ces deux batailles. S'il est mort un peu plus tard, le 23 août, à Cognac, en Angoumois, ce ne peut être, comme on l'a dit, des suites des blessures reçues à Taillebourg ou à Saintes; il fut sans doute une des victimes de l'épidémie qui décima l'armée française et qui l'obligea à la retraite.

M. Siméon LUCE constate que la communication de M. Antoine Thomas est de la plus grande importance au sujet d'une chanson historique relative à la bataille de Taillebourg. Cette chanson, inconnue jusqu'à ce jour, a été signalée pour la première fois l'année dernière, par M. Jules Camus, professeur à Modène, dans

une publication relative aux manuscrits de la bibliothèque de cette ville. Cette chanson a été composée en 1242, immédiatement après la bataille, par quelqu'un qui y avait pris part. Elle comprend sept . couplets qui ne sont pas dépourvus, quoi qu'on en ait dit, de valeur littéraire. Toutefois, c'est surtout en raison de sa valeur historique que la chanson, si savamment commentée par M. Antoine Thomas, doit être considérée comme un document de premier ordre. Elle fait connaître les noms de six héros de Taillebourg dont il n'est fait mention nulle part ailleurs.

Mile Marie LECOco, membre de la Société des Traditions populaires, lit une note sur le mot « Abraxas ».

SEANCE DU JEUDI 9 JUIN 1892

MATIN

PRÉSIDENCE DE MM. DE BOISLISLE ET DE MAS LATRIE, MEMBRES DU COMITE, ASSISTES DE M. JULIEN HAVET, MEMBRE DU COMITE

Assesseurs: MM. Ernest PETIT et CHATEL.

La parole est à M. LABROUE, principal du collège de Bergerac, qui donne lecture d'un mémoire relatif au terrier du seigneur de Pilles, comte de Durfort-Boissière, maréchal du camp de Louis XV.

M. Alexandre SOREL, président du tribunal civil de Compiègne, membre de la Société historique de cette ville, fait l'analyse des plaintes, doléances et vœux émis par les corporations d'arts et métiers de Compiègne en 1789, et les divise en trois catégories : 1o ceux d'intérêt général; 2o ceux d'intérêt local; 3° ceux d'interêt particulier.

Les premiers révèlent une antipathie profonde pour tout ce qui constitue un privilège au profit de la noblesse et du clergé, ou une perception arbitraire. C'est ainsi que presque toutes les corporations réclament la suppression des aydes et gabelles et leur remplacement par un impôt unique versé directement au Trésor royal, et que devront supporter également la noblesse et le clergé, voire même les concierges-portiers, qui, parait-il, en étaient exonérés.

Quelques métiers sollicitent l'abolition des octrois de villes. D'autres demandent la liberté du commerce excepté avec l'Angleterre. On n'était pas alors libre-échangiste.

Le droit pour les roturiers d'entrer dans la magistrature, la liberté de la presse, la réforme des lois sur la chasse, la destruction du gibier et la suppression des capitaineries sont l'objet de vœux divers. Il n'est pas jusqu'aux maçons et tailleurs de pierre qui ne réclament la réforme de l'éducation nationale d'où dépend, disent-ils, le bonheur de la société.

Au point de vue de l'intérêt local, on est presque unanime à se plaindre de l'obligation de loger les troupes de passage, et chacun

réclame qu'il n'y ait plus de dispenses à cet égard. D'autre part, un certain nombre de métiers, tels que couteliers, orfèvres, horlogers et drapiers, n'envisageant que leur intérêt personnel, demandent à cor et à cri le droit de poursuivre les colporteurs qui nuisent à leur commerce. Les peintres-vitriers concluent à la diminution de l'impôt sur le blanc de céruse, tandis que les cordonniers réclament la suppression des marques sur les cuirs. Il n'est pas jusqu'aux notaires de la ville qui n'exhalent des plaintes : leurs vœux tendent à obtenir la suppression de leurs confrères de la campagne et le droit d'instrumenter dans toute la France, tandis que les serruriers demandent que le nombre de ces officiers ministériels soit augmenté dans les villes, ce qui établira entre eux une concurrence profitable au public.

En résumé chacun prêchait pour son saint. « Il ne faut pas autrement s'en étonner, dit en terminant M. A. Sorel; à cette époque les petites villes dont l'horizon était borné ne vivaient que de leur propre fonds; leurs relations avec Paris n'avaient pas, à beaucoup près, l'étendue qu'elles ont aujourd'hui. On se trouvait donc forcément ramené à la vie de chaque jour, et il était tout naturel qu'on cherchât à l'améliorer. C'est ce qu'ont fait les corporations de Compiègne, justifiant une fois de plus en cela le vieil adage de droit L'intérêt est la mesure des actions ».

Revenant sur la lecture faite mercredi matin par M. DUMAS, M. DE BOISLISLE croit qu'il serait possible de retrouver d'autres mémoires fournis sur la demande du contrôleur général de l'Ayerdy. Celui-ci n'avait fait que reprendre une idée déjà mise en avant par son prédécesseur Bertin, en 1762, plus anciennement encore par M. de Machault (1754), par Orry (1745), par Le Peletier. des Forts (1726) et par les membres du conseil des finances de 1716. A chacune de ces époques correspond un certain nombre de mémoires épars dans nos archives et conçus sur un plan uniforme, généralement dérivé de celui de 1698.

A en juger par les détails que M. Dumas a présentés dans la dernière séance, l'enquête de 1764 était de nature à donner d'excellents résultats; à provoquer des réponses très instructives, et, si l'on possédait pour toutes nos anciennes provinces des mémoires pareils à celui de la généralité de Tours, il est certain que la publication d'un tel tableau d'ensemble serait encore plus intéressante que celle des mémoires de 1698. Malheureusement, il est probable que peu d'intendants eurent le pouvoir nécessaire pour

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