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teurs pressent ces derniers sur leur sein et les inondent, qui mieux mieux, de protestations, de souhaits et de larmes. Scène vraiment émouvante, qui attendrit jusqu'aux commissionnaires et aux gendarmes.

Seul, Raphaël Félix possède un air de jubilation parfaite.

Le sac au côté, la casquette sur le coin de l'oreille, il parcourt, suivi de ses employés, l'embarcadère et le bureau des bagages; il compte ses artistes, fait enregistrer les malles, prend les billets de tout le monde, paye à droite et à gauche, et paraît heureux comme plusieurs dieux !

Ce qui n'empêche pas les gens superstitieux de remarquer, non sans terreur, que c'est aujourd'hui VENDREDI ! Fatal présage!

Ah! ah! il se fait un mouvemeut dans la foule : C'est mademoiselle Rachel qui descend de voiture.

Ah! pour cette fois, dit le public, elle va en Amé. rique, décidément ! elle a mis le temps à prendre son parti; mais enfin elle l'a pris !

La nouvelle de l'arrivée de Rachel court de bouche en bouche; des courriers extraordinaires partent dans toutes les directions.

Rachel va en Amérique ! — répète la foule. plus à en douter.

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En effet, elle va pénétrer dans la gare. Encore deux minutes et elle sera en wagon.

Mais en voici bien d'une autre au moment décisif,

change d'idée. Elle ne partira pas par ce convoi.

elle

Et, remontant en voiture, elle disparaît bientôt aux re gards de la foule desappointée, qui reprend sur uu autre ton :

Rachel ne va pas en Amérique. Pourquoi diable nous fait-on poser là depuis ce matin ?

Et chacun de s'éloigner, parfaitement convaincu que jamais, au grand jamais, le Nouveau-Monde n'entendra la déclaration de Phèdre et les imprécations de Camille.

Quoi qu'il en soit, mademoiselle Rachel quitte Paris le jour même et se trouve, presque en même temps que nous tous, dans la capitale de l'Angleterre.

CHAPITRE II.

Où l'on fait une descente chez les Anglais.

On a beau dire, c'est une superbe ville que Londres, et c'est une admirable chose de faire son entrée dans cette cité géante, par la Tamise, qui, par parenthèse ne s'appelle aucunement la Tamise, mais bien la Thames, ce qui n'est pas tout-à-fait la même chose. C'est assez absurde, du reste, de changer ainsi tous ces noms-là : quand on voyage,

c'est une affaire d'état pour s'y reconnaître.

Il est bien entendu que nous nous priverons de vous donner sur la capitale de l'Angleterre le moindre détail. C'est connu maintenant comme le loup blanc, et l'on passe le détroit comme on avale un verre d'eau.

Laissons donc de côté la douane et tout ce qui s'en suit ; les docks de Sainte-Catherine et de la compagnie des Indes, London-Bridge et le pont de Waterloo, qui se distinguent à peine à travers une forêt de mâts; Saint-Paul, la Tour de Londres et l'abbaye de Westminster, où dorment côte à côte rois, poètes et comédiens; passons sans y entrer devant

le Colosseum et le musée de madame Tussaud, devant le Zoological-Garden où sont entassées des merveilles; - traversons au pas de course Hay-Market, le Strand, Regent-Street et la place Trafalgar ! C'est là qu'est érigée la statue de ce brave amiral Nelson, à qui l'on a si artistement insinué un paratonnerre dans le dos, ce qui lui donne un certain air de famille avec la statue du duc d'York, placée à l'entrée de Saint-James's Park, laquelle statue possède, elle aussi, son petit paratonnerre, et au beau milieu de la tête encore ! C'est d'un effet charmant !

Bah! ne regardons pas et marchons toujours !... marchons et ne nous arrêtons que devant l'aristocratique théâtre Saint-James, que dirige depuis longues années le libraire de S. M. Britannique, John Mitchell, gentleman tout-à-fait charmant, et de plus, admirateur passionné de mademoiselle Rachel.

Ce qui fait que ce même M. Mitchell est enchanté de pouvoir annoncer, respectfully, au public anglais que c'est à Saint-James's Theatre que the Eminent tragedienne consent à donner quatre représentations avant son départ pour l'Amérique.

CHAPITRE II.

Où l'exploitation Félix commence assez bien.

Le 30 juillet 1855, une immense affiche annonce le spectacle suivant :

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(Nous donnons le programme anglais tel quel. Ceux qui ne connaissent pas cette langue vivante, sont priés de comprendre tout de même.)

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