Imágenes de páginas
PDF
EPUB

LUTTE DE L'UNIVERSITÉ AVEC L'AUTORITÉ CIVILE

AU XVIIIE SIÈCLE.

Pendant la dernière moitié du XVIIIe siècle, l'Université eut à soutenir une lutte longue et héroïque pour défendre ses droits et privilèges contre les empiètements continuels et de jour en jour plus grands du gouvernement impérial autrichien, auquel nos provinces étaient soumises à cette époque. L'histoire de cette lutte a été écrite magistralement par M. Arthur Verhaegen, dans l'ouvrage intitulé: Les 50 dernières années de l'Université de Louvain (1749-1797). Liège, 1884; vol. in-8° de IV-568 pages. Nous y renvoyons le lecteur. On y trouve d'abord une relation fidèle et détaillée des tentatives faites par le pouvoir civil pour asservir l'ancienne Université brabançonne; ensuite, en appendice, une série de documents inédits jusqu'alors, recueillis par l'auteur dans la correspondance officielle de l'Université avec le gouvernement, conservée aux Archives générales du royaume à Bruxelles. Nous nous contentons de donner ici deux règlements, espèces de Visites, publiés par ordre du gouvernement impérial, et qui n'ont pas été reproduits par M. Verhaegen. Le premier, du 13 février 1755, est relatif aux dépenses excessives imposées aux candidats demandant à être promus aux grades de bachelier, de licencié et de docteur en théologie, en droit ou en médecine; le second, du 30 septembre 1788, renferme une réorganisation du personnel de l'Université. Il ne fut jamais mis a exécution, car la révolution brabançonne, qui renversa momentanément la domination autrichienne dans les Pays-Bas, éclata quelques jours seulement après sa publication.

Après la restauration de la domination autrichienne en Belgique, en 1791, le gouvernement traita l'Université avec plus d'égards. En 1793, elle fut reconnue officiellement comme corps brabançon par l'empereur François II. Mgr de Ram a publié, dans l'Annuaire de l'Université catholique de 1839, pp. 249-271, plusieurs documents relatifs à cette

reconnaissance.

I.

Règlement de l'Impératrice-Reine Marie-Thérèse
pour l'Université de Louvain (i).

13 février 1755.

MARIE-THÉRÈSE, par la grâce de Dieu impératrice des Romains, reine d'Allemagne, de Hongrie, de Bohême, de Dalmatie, de Croatie, d'Esclavonie, etc.; archiduchesse d'Autriche; duchesse de Bourgogne, de Lethier, de Brabant, de Limbourg, de Luxembourg, de Gueldres, de Milan, de Stirie, de Carinthie, de Carniole, de Mantoue, de Parme et Plaisance, de Wirtemberg, de la haute et basse Silésie, etc.; princesse de Souabe et de Transilvanie; marquise du SaintEmpire Romain, de Bourgovie, de Moravie, de la haute et basse Lusace; comtesse de Habspourg, de Flandres, d'Artois, de Tirol, de Haynau, de Namur, de Ferrette, de Kybourg, de Gorice et de Gradisca; landgrave d'Alsace; dame de la Marche d'Esclavonie, du Port-Naon, de Salins et de Malines; duchesse de Lorraine et de Bar; grande-duchesse de Toscane.

Les princes nos prédécesseurs, après avoir fondé et doté l'Université de Louvain, n'ont eu rien de plus à cœur que d'encourager et d'y faire fleurir les études, de fixer la forme et la matière des leçons, et d'empêcher que les degrez académiques ne fussent conférés prématurément et sans choix. Ils ont permis aussi que, pour la collation de ces degrez, il fût perçu de certains droits, destinés en partie à améliorer la condition des docteurs, des professeurs et des différents officiers des facultés, et en partie au soutien de divers établissements publics dépendans de l'Université. Mais, comme Nous sommes informée que, pour la détermi

(1) Ce règlement a été publié par Mgr de Ram : 1o dans l'Annuaire de l'Université catholique, 1847, pp. 168-205; et 2° dans l'Historiae Lovaniensium libri XIV de Molanus, II, pp. 991-1010.

nation de ces droits, il n'existe point de tarif muni de l'autorité souveraine, et que d'ailleurs il se fait souvent, à l'occasion des actes académiques, des dépenses excessives, qui n'ont rien de commun ni avec les études, ni avec l'avantage de l'Université, Nous avons jugé qu'il étoit nonseulement nécessaire d'y pourvoir, mais aussi de renouveller et d'étendre en même tems la disposition des ordonnances précédentes sur la fréquentation des leçons et la durée des études dans les facultés de théologie, de droit et de médecine. A ces causes, ouï le rapport de notre très-cher et féal Patrice de Neny, chevalier, conseiller en nos Conseils Suprême et d'État, trésorier général des finances, notre commissaire royal pour les affaires de l'Université, Nous avons, de l'avis de notre Conseil Privé, et à la délibération de notre très-cher et très-aimé beau-frère et cousin, CHARLES ALEXANDRE, duc de Lorraine et de Bar, notre lieutenant, gouverneur et capitaine général des Pays-Bas, ordonné et statué, ordonnons et statuons les points et articles suivants.

I.

Personne ne sera reçu à s'inscrire dans les facultés de théologie, de droit ou de médecine, pendant qu'il étudie en philosophie, ou dans les humanités, à peine de nullité de l'inscription, et de devoir demeurer à Louvain une année de plus qu'il n'est statué ci-après pour les études de chaque faculté.

II.

Les termes statués pour les disputes et actes académiques dans la faculté de théologie, par les articles 66 et 67 du règlement des Archiducs de l'an 1617, émané en conséquence de la Visite de l'Université, seront exactement observés, de même que les termes et les intervalles prescrits par les articles 100 et 109 pour le baccalauréat et l'examen des licences en droit, et par l'article 119 pour le baccalauréat en médecine.

III.

Personne ne sera reçu à prendre le degré de licence en droit ou en médecine, qu'après avoir demeuré á Louvain et étudié en droit ou en médecine, pendant trente-six mois entiers et effectifs, soit de suite, ou par intervalles, à compter du jour de l'inscription dans l'une ou l'autre des facultés, sans que les absences faites pendant le temps des vacances ordinaires, non-plus que les absences extraordinaires, puissent être comptées, ou faire partie desdits trente-six mois.

IV.

Ceux qui, dans la Promotion générale de la philosophie, auront obtenu une place entre les trente-six premiers, qui composent ce que l'on nomme les Trois Lignes, ou entre les douze qui suivent les Lignes, de même que ceux qui auront soutenu publiquement et avec approbation des thèses générales de philosophie à Louvain, seront dispensés d'un quart des mois d'habitation déterminés ci-dessus pour les facultés de droit et de médecine.

V.

Le candidat qui se présentera pour les examens de licence, soit en droit ou en médecine, sera tenu de produire aux examinateurs un acte du président du collège ou du particulier chez qui il aura demeuré, contenant un détail exact du temps de son habitation pendant chaque année depuis l'inscription, ainsi que le détail de chaque absence qu'il aura faite, dès qu'elle passera les huit jours. Défendons tant aux présidents des collèges qu'aux particuliers qui logent des écoliers, de donner des déclarations fausses, ou déguisées, à peine de cinq cens florins d'amende, dont la moitié sera au profit du dénonciateur, et l'autre moitié au profit de l'officier qui aura poursuivi le contrevenant.

VI.

Personne ne sera admis aux examens de licence qu'en faisant conster par les certificats des professeurs, qu'il a

fréquenté les leçons sur le pied porté par les règlements, nommément par celui de l'an 1617; et ces certificats, aussi bien que ceux d'habitation, seront conservés parmi les actes de la faculté, pour qu'il puisse y être pris recours en cas de besoin.

VII.

Nous réservons à Nous et à notre lieutenant, gouverneur et capitaine général, le droit de dispenser des tems d'habitation prescrits pour les degrez des facultés de theologie, de droit et de médecine, dans les cas où la capacité du candidat, ou d'autres circonstances particulières pourraient donner lieu à une pareille grâce.

VIII.

Nous interdisons très-sérieusement aux examinateurs établis dans les mêmes facultés d'admettre qui que ce soit au degré de licence, qu'aux termes et suivant les précautions prescrites ci-dessus, à peine de cinq cens florins d'amende contre chacun de ceux d'entre eux qui aura concouru à une pareille contravention. Et Nous entendons d'ailleurs qu'ils n'y admettent que ceux en qui ils auront reconnu la capacité requise, ainsi que des connoissances proportionnées au tems d'habitation et d'étude prescrit pour chaque faculté; de quoi Nous chargeons la conscience desdits examinateurs.

IX.

Comme le bon ordre exige que le tarif des droits pour les actes académiques dans les facultés de théologie, de droit et de médecine, depuis l'inscription jusques aa doctorat inclusivement, soit rendu public, Nous avons chargé ceux desdites facultés de Nous remettre, ou à notre commissaire royal, des états détaillés de tout ce qui se paye actuellement pour lesdits actes, sans en omettre aucune partie. Et ayant fait examiner attentivement les états qu'ils ont formés et envoyés en conséquence, ainsi que les explications ultérieures qu'ils y ont successivement ajoutées; lesquels états et explications resteront attachés à la minute des présentes;

« AnteriorContinuar »