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sent se suborner les uns les autres, ni préparer des collusions, des machinations, des subterfuges. (1)

A la nouvelle époque fixée, les commissaires reprennent leurs séances.

Bientôt de tous les points de la France arrivent des Templiers traduits, du fond de leur prison, pour prendre la défense de l'Ordre devant la commission papale.

Ici se présente un spectacle, qu'un philosophe ancien avait jugé digne des regards du ciel, la vertu aux prises avec le malheur. On voit entrer à chaque instant dans Paris, chargés de chaînes, ces braves et nombreux Chevaliers qui, jusqu'alors, avaient tenu dans les cours, dans le monde et dans les armées, un rang si honorable. On remarque avec admiration et attendrissement les doubles cicatrices qui attestent leur valeur dans les combats et leur constance dans les tortures.

A mesure qu'ils arrivent, ils sont présentés successivement aux commissaires. Tous, à un très-petit nombre près, déclarent vouloir dé

(1) Sub tamen fidâ, tutâ et certâ custodiâ, quod non possint aufugere et ità cautè et segregatim quod se invicem non valeant subornare aut aliquas collusiones, falsitates, machinationes, subterfugia fabricare.

fendre l'Ordre, se récrient contre l'accusa-
tion et protestent de leur innocence; ils de-
mandent qu'on leur rende les habits de l'Or-
dre dont on les a dépouillés; ils demandent
surtout d'être admis aux sacremens de l'Église.

Plusieurs mettent dans leurs réponses cette
franchise et cette énergie qui sont si dignes de
l'innocence, et qui la caractérisent si bien.

Voulez-vous prendre la défense de l'Or-

RICHARD DE MARSEILLE.

Oui, parce que veux sauver mon âme.

ROBERT DE SORNEY.

« Je l'ai toujours voulu.

(1) Usque ad mortem.-Usque ad finem. -Adjiciens

Richardus, quia volebat salvare animam suam, etc.

Proces. contra Templar.

"

BERTRAND DE SAINt-paul. (1)

« Je n'ai jamais avoué les crimes imputés à « l'Ordre, je ne les avouerai jamais ce sont « des calomnies. J'ose croire que Dieu ferait « un miracle, si l'on donnait en même temps « la communion, et à ceux qui avouent et à «< ceux qui nient.

DOUZE CHEVALIERS (2)

« De corps et d'âme.

NEUF AUTRES. (3)

<< Devant et contre tous, jusqu'à la mort.

PIERRE DE MARVILLE ET JEAN DE PORTINI.

« Contre tout homme vivant, excepté le Pape et le Roi.

(1) Bertrandus de Sancto Paulo Viennensis, qui dixit quod nunquam confessus fuit errores dicti Ordini impositos, nec confitebitur, quia verum non est. Et credit quod Dominus operaretur miraculum si corpus Christi administraretur eis et si acciperent simul confitentes et diffitentes. Proces. contra Templar.

(2) Détenus à l'abbaye Saint-Magloire.

(3) Détenus dans la maison de Guillaume de Martilé, près la porte Saint-Antoine.

SEPT CHEVALIERS QUI AVAIENT ÉTÉ INTERROGÉS EN PRÉSENCE DU pape. (1)

«

Quoique nous ayons, en présence du Pape, « fait quelques aveux contre l'Ordre et contre « nous, nous déclarons que nous avons menti devant lui; nous révoquons ces aveux, et demandons à défendre l'Ordre.

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JEAN DE VAlgellé.

« Et moi aussi, j'ai été présenté au Pape, ́« et je n'ai fait aucun aveu; je demande à défendre l'Ordre.

"

BERNARD DE VADO.

« J'ai été tant torturé, on m'a tenu si longtemps devant un feu ardent, que la chair de

<< mes talons est brûlée; il s'en est détaché ces deux os que je vous présente. Voyez, ils manquent à mon corps. (2) ›

«

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Mais voici un incident assez remarquable.

(1) Gauzerand de Montpesat, Jean Costa, Etienne Trobati, Jérôme de Fort-Aigu, Déodat Jafet, Raymond Finel, Ademard de Sparros. Proces. contra Templar.

(2) Ostendens duo ossa quod dicebat illa esse quæ ceeiderunt de talis. Proces. contra Templar.

par

Un Templier présente une lettre que le clerc Jean Chapini avait remise aux Chevaliers à Sens, quand l'évêque d'Orléans vint les interroger. Marquée des sceaux de Philippe de Voet, et de Jean Jainville, préposés, l'un le Pape, et l'autre par le Roi, à la garde des Templiers, elle était adressée à Laurent de Beaune et aux autres accusés, détenus à Sens. Ces préposés du Pape et du Roi invitaient les détenus à faire les aveux exigés, et annonçaient que le Pape avait mandé que tous ceux qui n'y persisteraient pas, périraient dans les flammes. (1)

(1) Voici cette lettre :

Philipe de Voet prevost de l'eglese de Poytes et Jehan de Janville, huissier d'armes notre segnor le Roi deputet sus l'ordonance de la garde des Templers ès provinces de Sens, de Roan et de Rems.

A notre améz frere Lorent de Biaune jadis commandeur de Apuli et aus autres freres qui sont en prison de Sens, salut et amor.

Savoir vous faisons que nous avons procure que li Roys notre siere vous envoie à l'eveche d'Orleans pour vous reconcilier; si vous requirons et prions que vous en la bone confession que nos vous lassames vous tenez si devotement et si gransement envers le dit evescheve d'Orliens que il n'aie cause de dire que par vous nous l'aiens fait travalier ne fait entendre menconge. Nous

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