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prétendre, pour ainsi dire, rendre le ciel complice de ce funeste succès.» Mais ce n'est pas l'art qui se corrompt, c'est l'artiste, et la décadence dont ses œuvres offrent le signe, prouve seulement qu'il n'a pas compris sa tâche, qu'il ne peut pas ou ne veut pas la remplir dignement. L'artiste qui s'éloigne de la nature, et qui est sans moralité dans ses œuvres, croit se justifier en disant qu'il a été dépendant de la corruption de l'art à l'époque où il travaillait, et qu'il s'est vu forcé d'obéir à l'esprit de son siècle; mais on doit lui objecter que l'éclat de l'art est inaltérable et éternel, comme le foyer divin d'où il émane. Or, c'est cette incorruptibilité de l'art, de même que c'est l'incorruptibilité de la vertu, qui fait paraître corrompus ceux qui violent la sainteté de l'un et de l'autre. C'est donc dans le sanctuaire de l'art que doit se réfugier l'artiste qui veut se soustraire à la corruption. »

Partant de cette idée noble et féconde, M. de Montabert établit ensuite que l'unité, principe éternel du beau, doit être la base sur laquelle repose la loi constitutive des beaux-arts. Le vrai lui paraît inséparable du beau, et la variété n'est qu'une condition soumise à ses ordres. Après avoir consacré un chapitre à l'origine des beaux-arts, il les passe tour à tour en revue et montre comment les préceptes qu'il vient d'exposer s'appliquent aux conditions générales de chacun d'eux. Cette analyse détaillée renferme une foule d'observations fort ingénieuses, et des conseils excellents à l'usage des jeunes artistes. Elle le conduit à faire ressortir l'importance d'un enseignement théorique et philosophique des beaux-arts dans l'éducation. Tout en rendant justice aux mérites des institutions existantes, il propose de les compléter par une organisation supérieure qui soit mieux en harmonie avec la nature du principe, ainsi qu'avec la grandeur du but. Ce vaste et magnifique projet termine l'Artistaire, ouvrage très-remarquable, où l'élévation de la pensée s'unit aux données de l'expérience pour féconder à la fois la théorie et la pratique.

L'OISEAU, par J. Michelet. Paris, 1856; 1 vol. in-12: 3 fr. 50 c.

Quoique depuis longtemps accoutumés aux bizarreries de M. Michelet, nous ne nous attendions guère à le voir se lancer dans l'histoire naturelle, s'éprendre tout à coup d'un amour tendre pour les petits oiseaux. Si nous avons bien compris l'explication qu'il en donne, c'est dans un séjour à la campagne, peu après son mariage, que pour la première fois il

eut l'idée d'étudier les mœurs de la gent volatile. Etudier n'est peut-être pas précisément le mot qui convient ici. En général, M. Michelet, doué d'une intelligence très prompte, se borne à saisir les choses par un petit bout, et son imagination fait le reste. Ce n'est pas un observateur patient et scrupuleux; il emprunte ses matériaux à la nature, mais les dispose à son gré, suivant les exigences du but qu'il se propose. On ne sera donc pas étonné si, comme naturaliste, il donne essor à la fantaisie encore plus que dans ses travaux d'historien. Les habitudes et les mœurs des animaux le frappent surtout par leur côté poétique. L'œuf, L'aile, Premiers essais de l'aile, Le triomphe de l'aile, Les rivages, Le combat, L'épuration, La mort, L'orage, Le travail, Le chant, Education: voilà les titres de quelques-uns des chapitres du volume dans lequel il semble avoir pris à tâche de faire ressortir la supériorité de l'oiseau sur l'homme. Cette singulière thèse, soutenue avec talent, est bien propre à piquer la curiosité des lecteurs. On y trouve une foule d'aperçus ingénieux, d'anecdotes intéressantes, de pensées originales, et la naïveté des impressions ne manque pas de charme. Seulement l'histoire naturelle est sacrifiée plus ou moins aux vues excentriques de M. Michelet. Sous sa plume, l'oiseau devient le type de l'élévation morale, de l'intelligence et de l'amour, un être providentiel dont la mission est d'épurer la terre des innombrables insectes ou reptiles venimeux qui rendrait son séjour impossible à l'homme, un modèle accompli de toutes les vertus domestiques, un éducateur habile, un artiste parfait. Dans son enthousiasme exalté, M. Michelet ne veut pas entendre parler d'instinct pour la créature ailée. Il lui donne une âme douée des plus nobles facultés, ouverte aux plus hautes aspirations. « L'amour et la lumière, » dit-il en parlant du rossignol,« sont sans doute son point de départ, mais l'art même, l'amour du beau, confusément entrevus et très-vivement sentis, sont un second aliment qui soutient son cœur et lui donne un souffle nouveau. Et cela est sans limites, un jour ouvert sur l'infini. »

L'éducation, la perfectibilité que l'on croyait être les priviléges distinctifs de l'intelligence humaine, se retrouvent, à ce qu'il prétend, chez l'oiseau, qui a besoin que ses parents lui apprennent à voler, à chanter, à construire son nid, etc., et qui, de plus, possède un sens, inintelligible pour nous, dont la fonction est de l'orienter dans l'espace où nulle route ne peut guider son vol.

Assurément c'est fort beau, mais sur quoi reposent de semblables hypothèses? Assurément aussi ce n'est pas sur l'observation. En effet,

prenez un jeune oiseau dont les ailes ni la voix ne sont encore développées, élevez-le dans une cage, et bientôt vous verrez que malgré son isolement il volera et chantera comme père et mère. Si l'auteur nous cite l'exemple d'une femelle qui, née dans la captivité, ne savait pas faire son nid, nous lui en opposerons un autre fourni par la nature elle-même : c'est le petit coucou, éclos dans un nid étranger, au milieu d'oiseaux d'une autre espèce, qui n'adopte ni le chant, ni les habitudes de ceux-ci, mais chez lequel se développe, au contraire, l'instinct particulier de sa race, quoiqu'il ne connaisse pas même ses parents. M. Michelet a le tort de prendre trop facilement ses idées pour des faits. Aussi son livre renfermet-il maintes assertions qui ne peuvent soutenir le moindre examen. C'est de l'histoire naturelle passablement fantastique, mais dont l'ingénieux penseur a su tirer parti pour donner cours à des considérations morales ou philosophiques d'une haute portée. On y trouvera de belles pages sur les merveilles de la création, sur la sagesse et la puissance qui éclatent dans les œuvres de la nature. L'originalité même de la forme ne manque d'ailleurs pas d'un certain attrait.

QUELQUES MERVEILLES DE LA NATURE et de l'art, lectures instructives pour les familles et les écoles, par A. Vulliet. Paris, 1856; 1 vol. in-18 1 fr. 25.

Dans ce petit volume, M. Vulliet expose d'une manière tout à fait familière quelques notions intéressantes, relatives soit à l'histoire naturelle, soit aux arts et à l'industrie. On y trouve un aperçu des nouvelles inventions ou découvertes, ainsi que des objets de curiosité les plus remarquables qui ont figuré dans l'exposition universelle de Paris. Nous citerons, par exemple, les pierres précieuses, le canif à 200 lames, les porcelaines, le lion en verre filé, les tableaux en allumettes chimiques, le corail et les éponges, les perles, l'industrie cotonnière, les dentelles, les draps, les soieries, les arbres à cire, l'ambre jaune, etc. Ces différents sujets sont traités brièvement, mais clairement, et l'auteur a su joindre aux données scientifiques ou techniques des réflexions morales d'un véritable mérite. Nous recommandons le nouvel ouvrage de M. Vulliet comme excellent à mettre entre les mains des enfants, et pouvant être employé dans les écoles d'une manière très-avantageuse.

MANUEL D'ARBORICULTURE, de la culture, de la taille et de la greffe des arbres fruitiers, par Butret, Thouin, etc., publié par M. Boitard. Paris, Passard, 1856; 1 vol. in-32 fig. : 1 fr.

Ce petit volume présente un résumé bien fait des connaissances pratiques nécessaires à ceux qui veulent se vouer spécialement à la culture des arbres fruitiers. M. Boitard a puisé aux meilleures sources, et ses propres études lui ont permis de compléter les instructions qu'il emprunte à des écrivains qui font autorité dans cette matière assez difficile. S'étant beaucoup occupé de botanique, il a l'avantage de pouvoir soumettre au contrôle de la science les phénomènes signalés par l'observation. On comprend, en effet, combien il importe d'étudier leurs rapports avec les lois qui régissent l'organisation végétale, pour apprécier leur valeur réelle et se tenir en garde contre les erreurs d'une pratique trop routinière. Le traité de la circulation de la sève, que M. Boitard a mis en tête de son manuel, nous paraît tout à fait propre à remplir ce but. Il renferme des notions claires et précises sur la partie de la science la plus utile pour les jardiniers. La taille des arbres et la greffe sont aussi l'objet de développements assez étendus, dont l'intelligence est encore facilitée par de nombreuses planches exécutées avec soin.

TABLE

DES MATIÈRES CONTENUES DANS LE TOME XXXI.

(1856-NOS 121 à 124.)

Histoire de la littérature française sous la Restauration.
Histoire de la littérature française sous le gouver-

-

nement de Juillet, par M. Alfred Nettement.

(Suite.)

Idem.

Les poëmes homériques. (Second article.)

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La comédie contemporaine

Une ascension au Mont-Blanc.

Mil huit cent cinquante-cinq.

Du système de Fourier. (Dernier article.)

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Pages.

5

205

27

51

69

96

173

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Principles of political economy with some of their appli-
cations to social philosophy, by John Stuart Mill.
Dictionnaire de l'économie politique contenant l'ex-
position des principes de la science, publié sous la
direction de MM. Coquelin et Guillaumin.

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Corso di economia politica, per Fr. Trinchera... 309

Giacomo Leopardi.

Cachemyr et l'Himalaya occidental .

332

350

Voyage d'une femme au Spitzberg, par Mme L. d'Aunet. 372
De l'avenir politique de l'Angleterre, par le Cie de Monta-
lembert. Après la paix; considérations sur le libé-

ralisme et la guerre d'Orient, par le Cte A. de Gasparin. 381
Idem. (Second article)

Les dernières expéditions dans l'Afrique centrale.

La veillée des servantes.

L'encyclopédie juridique de M. Warnkönig

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