Imágenes de páginas
PDF
EPUB

à bâtir; ils s'en servirent pour élever une loge à la Mine; ils y laissèrent dix à douze hommes, et s'en revinrent, après une absence de dix mois. Le petit vaisseau fut contrarié par les courans qui, dans ces parages, présentent le phénomène remarquable de deux courans parallèles, en contact l'un avec l'autre, allant avec une grande vélocité dans des directions opposées. Il ne put remplir qu'imparfaitement sa mission; il revint avec une cargaison incomplète, trois mois avant les deux autres; il fut réexpédié, à l'arrivée de ceux-ci, pour approvisionner la nouvelle colonie. Bientôt après on augmenta cet établissement, qui devint assez important pour qu'on y construisît une église, «< dont les Hollandais, dit Bellefond, se ser<< vent; on remarque encore, ajoute-t-il, dans « cet édifice, les armes de France 1. »

1

L'on a retrouvé encore d'autres traces des établissemens formés par les Français, qui ne se bornèrent pas à celui de la Mine. Au témoignage de Villaut de Bellefond s'unit celui d'un autre voyageur, qui visita ces parages à peu près dans le même temps.

Le sieur d'Elbée, dans le journal de son voyage à la côte de Guinée, en 1669 et 1670, dit : « Le long de Ceberé (Rio Cobus) et proche de là, il y a un château qui appartient « aux Hollandois, que l'on appelle Saint-Antoine d'Axem

Les développemens de cette prospérité furent arrêtés par les affreuses calamités qui fondirent sur la France peu de temps après l'avénement de Charles VI. La décadence du

[ocr errors]
[ocr errors]

« (Axim); il paroît rouge, assez bien bâti; l'on m'a assuré qu'autrefois cela avoit été aux François, et même qu'il y avoit eu sur la porte de ce château les armes du roy de France, qui ont été ostées les Hollandois depuis huit à dix ans, par « et qu'il y a encore des vestiges d'une chapelle qui y étoit. » (Journal du voyage du sieur d'Elbée, commissaire général de la marine, aux îles dans la côte de Guinée. Paris, 1671.)

[ocr errors]

"

་་

[ocr errors]
[ocr errors]

Dapper, dans sa description des côtes de Guinée, Amsterdam, 1686, dit : « Le fort de la Mine est à trois lieues du petit Commendo. C'est un bâtiment fort vieux, à ce qu'on « en peut juger par les dattes et par les masures. Il y a quelques années que, les Hollandois relevant une batterie qu'on appelle la batterie des François, parce que, selon l'opinion des originaires du pays, les François en ont été les maîtres avant les Portugois, on trouva gravés sur une pierre les deux premiers chiffres du nombre treize cents, « mais il fut impossible de distinguer les deux autres. Il y avoit un antre écriteau, gravé aussi sur la pierre, entre deux colonnes, dans une petite chambre, en dedans du fort; mais il étoit tout effacé. On peut conjecturer, par un « chiffre qui est sur la porte du magasin, que cet apparte« ment a été bâti l'an 1484, sous Jean II, roi de Portugal.

[ocr errors]
[ocr errors]

"

[ocr errors]
[ocr errors]

[ocr errors]

Or, comme les chiffres de ce nombre sont encore aussi

« entiers que s'ils avoient été gravés depuis neuf ou dix ans,

« on a raison de croire que les autres sont d'une grande an

[blocks in formation]

commerce suivit celle de l'État, et, quand son souverain eut perdu la raison, la malheureuse France, livrée aux fureurs des partis, devint la proie de l'Angleterre.

C'est à cette funeste époque que l'on voit tomber d'année en année, et enfin disparaître le commerce d'Afrique. Le comptoir de la Mine fut abandonné avant 1410; depuis ce temps, jusqu'après 1450, on est bien fondé à conjecturer que les Normands ne tentèrent aucune expédition maritime.

Cependant, au moment même où la compagnie fondait son établissement de la Mine, la conquête des Canaries venait de s'opérer. Les îles que connurent les anciens, que les navigateurs du moyen âge ne perdirent jamais de vue, et que des géographes arabes ont décrites, avaient été visitées dans le courant du XIVe siècle par les aventuriers normands, qui, de l'aveu de Don Fernandez Navarette, avaient exploré depuis long-temps la côte occidentale d'Afrique jusqu'au cap Sierra Leone, c'est-à-dire jusqu'à 8o 30' latitude nord; leur conquête avait été tentée en 1344 et 1354, par Don Louis de la Cerda, comte de Clermont, qui descendait de la maison royale de Castille. Quoique ces expéditions aient été sans succès, le Pape Clément VI

couronna ce prince à Avignon, en 1346, roi des Canaries, titre vain qui n'ajouta rien à la considération du malheureux prince, et ne le dédommagea point de sa mauvaise fortune.

En 1393, quelques Andaloux et d'autres aventuriers de Biscaie et de Guipuscoa s'associèrent à Séville, et équipèrent, avec la permission de Henri III, une escadre de cinq vaisseaux, avec lesquels ils reconnurent une partie des côtes de l'Afrique et les îles Forte-Ventura, Canaries, de Fer, Gomera et Teneriffe. Tombant ensuite sur Lancerote, ils saccagèrent tous les endroits peuplés, firent prisonnier le roi, et, après y avoir chargé leurs vaisseaux de cuirs, d'animaux et de cire, ils revinrent à Séville, où ils retirèrent beaucoup d'argent de ces marchandises. Ils informèrent le roi de la facilité de la conquête, et firent ainsi naître chez d'autres l'avide désir d'entreprendre des expéditions aussi lucratives. Cette première descente à Lancerote, selon Antonio de Viana et Gallendo cités par M. Bory de St.-Vincent (Histoire des iles Fortunées), aurait été dirigée par un sieur Servant, normand, qui aurait été muni de la permission du roi de Castille; cependant d'autres écrivains prétendent que cette permission n'aurait pas été donnée au sieur Servant, mais

[ocr errors]

à un Robin ou Robinet de Braquemont, en reconnaissance des services qu'il avait rendus 1 dans la guerre de Portugal. Tout concourt à confirmer

[ocr errors]

Braquemont est un village qui dépendait autrefois de la vicomté d'Arques; il est situé à une demi lieue de Dieppe, sur l'ancien chemin de Dieppe à Eu, près du camp de

César.

Renaud, sire de Braquemont, servait dans l'ost de Bouvines, avec deux écuyers, en 1340. Mathieu de Braquemont, son troisième fils, avait épousé Isabelle, dame de Saint-Martin-le-Gaillard, veuve de Jean de Bethancourt.

Robert de Braquemont, dit Robinet, chevalier conseiller et chambellan du roi en 1406, amiral de France en 1417, était probablement fils de Mathieu de Braquemont, mais sa mère était-elle Isabelle, veuve de Jean Bethancourt? S'il en était ainsi, Robert de Braquemont serait frère utérin de Jean II de Bethancourt qui épousa Jeanne du Fayel, qu'on croit mal à propos issue de Champagne, et qui était dame du Fayel, fief de la baronnie de Cuverville, laquelle, selon le père Anselme, aurait obtenu, le 27 février 1405, arrêt qui lui adjugeait la quatrième partie des biens que son mari avait vendus audit Robert.

Aldonce de Braquemont épousa, en deuxièmes noces, le seigneur de Rouville. Le roi d'Angleterre leur accorda, par lettres du 16 août 1425, de pouvoir jouir des terres de Grainville et de Bethencourt, acquises par Robinet son père.

La famille de Bracamonte d'Espagne est issue de Jeanne de Fuentesol et de Pennarenda, en Castille, qui fut mariée à Alvaro Gonzales d'Avila, maréchal de Castille. Elle était

« AnteriorContinuar »