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Parker

1-26-37 33328

INTRODUCTION.

* Patria nihil dulcius, nibil carius in vita esse debet. >

Cic.

Cette épigraphe, que j'adoptai naguère dans un ouvrage historique que je publiai sur mon pays natal1, est encore celle qu'avec non moins de raison j'applique à ces recherches sur les voyages et les découvertes des navigateurs de ma patrie originaire: elle exprime le sentiment qui m'inspira mes premiers essais, qui m'a dirigé dans mon nouveau travail, et qui me soutiendra dans le reste de ma carrière.

Toutes les contrées de la France sont riches en glorieux souvenirs, mais la Normandie figure au premier rang dans ceux qu'a consacrés l'histoire. Plus que toute autre province, elle doit occuper une place que nos pères, plus empressés de bien faire que soucieux de trans

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mettre à la postérité le récit de leurs succès ont laissée vacante. La tradition seule nous a conservé la connaissance de la plupart de nos exploits maritimes, de nos découvertes et de nos établissemens commerciaux avant le xvie siècle. Cette incurie, dont nous ne pouvons blâmer l'intention, mais dont nous devons déplorer l'effet, a contribué à ravir à notre patrie une célébrité qui lui appartient, et qui doit être ajoutée à tous ses titres de gloire.

Avant la révolution, un investigateur éclairé avait les moyens de consulter les actes conservés avec soin dans les archives des monastères, des amirautés, des seigneuries, des corporations; mais aujourd'hui, toutes ces ressources lui manquent: il est réduit, après ce grand naufrage, à chercher dans des ruines et au milieu de débris dispersés, quelques documens épars, que presque toujours le hasard seul lui procure. Qu'alors une bizarre et jalouse manie, trop commune chez certains amateurs, ne lui fasse pas conserver pour lui seul la connaissance de faits qui peuvent intéresser le pays. Il nous semble que c'est alors une obligation réelle de publier sa découverte : c'est dans cette conviction que, pour notre tribut personnel, nous présentons ce que nous som

mes parvenus à recueillir. Nous témoignerons de nouveau le regret de n'avoir trouvé dans la ville de Dieppe que des traditions, et de n'avoir pu découvrir des manuscrits qui existaient encore en 1785 1.

Il nous eût été facile de multiplier les autorités dont nous étayons nos conjectures et nos observations: nous avons cité les plus puissantes, et nous donnons textuellement celles qui légitiment des inductions qui, sans cet appui, pourraient paraître téméraires et hasardées. Nous désirons que notre exemple trouve des imitateurs, et excite l'attention d'observateurs plus habiles et plus heureux que nous. Alors, chacun communiquant le résultat de ses recherches et de ses découvertes, contribuera,

Le bombardement de Dieppe, en 1694, nous a privés d'une grande partie de nos archives, et des titres et notes de famille qui auraient pu aider à détailler les faits. J'ai été obligé de me restreindre à travailler d'après les manuscrits de MM. Estancelin, Dablon, Gouïe et Asseline, qui vivaient dans les xvie et xviro siècles, et de M. Guibert, qui était un des prêtres les plus vénérables et le plus àgé de notre ville. Ainsi, je n'ai d'autre mérite que celui de la critique des faits, de la vérification de leurs dates, et de l'ordre sous lequel je vous donne ces mémoires.

(Mémoires chronologiques pour servir à l'Histoire de Dieppe. Paris, 1785.)

par ce concours patriotique, à la manifestation de la vérité, et à réacquérir à la France une gloire que lui ont ravie des peuples qui n'ont fait que marcher sur ses traces, mais qui ont su profiter de ses fautes. Nous prouverons alors que, dès le xive siècle, les marins français, bien dirigés, étaient ce que leurs récentes et admirables expéditions scientifiques prouvent qu'ils -sont au xixe, les plus intrépides, les plus éclairés et les plus expérimentés du monde. En appréciant ce genre de gloire, puissions-nous n'en pas dédaigner la jouissance et l'accroissement: il semblerait pourtant, à l'interruption de ces voyages de circumnavigations, dont le résultat a été si avantageux pour les sciences, si honorable pour notre pavillon, et non moins profitable pour nos intérêts politiques, que nous n'aurions pas apprécié tout le fruit que nous pourrions obtenir de ces pacifiques expéditions. Nous n'avons garde d'accuser à cet égard d'indifférence le gouvernement actuel. Un souverain qui, aux connaissances les plus étendues et les plus approfondies des sciences géographiques, unit le rare avantage d'avoir naguère, dans la condition d'un simple citoyen, navigué dans les mers boréales, dans l'Atlantique et dans la Méditerranée, est le meilleur

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