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qui lui succéda au duché, et Havoise, donnée en mariage à Hoël, fils du comte de Cornouaille et de Nantes.

Il était, en outre, père de deux bâtards: l'un, nommé Geoffroi, auquel il donna le comté de Rennes et qu'il maria avec Berthe, fille du comte de Dol; l'autre, Riwallon : l'histoire est muette sur ce qui concerne les faits et géstes de celui-ci.

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La date exacte de la fondation de Saint-Georges n'est pas indiquée dans l'acte qui contient les donations primitives du duc Alain III. Aussi l'époque précise de cet évènement a-telle été diversement assignée par nos historiens bretons. Des documents inédits conservés dans les archives du monastère donnent les dates de 1018, 1028, 1030.

Le Baud et d'Argentré semblent adopter approximativement la date de 1028; dom Lobineau et dom Morice se sont cru autorisés à fixer l'an 1032, comme concordant mieux avec les noms des témoins figurant dans la charte de fondation.

Le P. du Paz et le P. Albert-le-Grand font remonter l'établissement de Saint-Georges à l'an 1006, en l'attribuant au duc Geoffroi. Cette dernière hypothèse est en contradiction avec les termes mêmes de l'acte qui est dressé au nom d'Alain, et qui, par conséquent, ne peut être antérieur à l'an 1008, puisque ce prince ne porta le titre de duc qu'après la mort de son père.

Il y aurait peut-être moyen de concilier les assertions divergentes et de trancher la difficulté, en disant que le projet de fondation était dans la pensée du duc Geoffroi, qui n'eut pas le temps de l'exécuter. Son fils Alain, plus heureux, aurait accompli le vœu paternel.

Les termes de la charte se prêteraient à une pareille interprétation. Ils supposent, en effet, que la princesse Adèle, première abbesse de Saint-Georges, vivait depuis plusieurs années déjà dans les exercices de la vie religieuse quand fut libellé l'acte de fondation dressé en sa faveur et à sa sollicitation.

En lisant les formules de cette charte importante et vraiment intéressante par son contexte, on est frappé, presque étonné du langage empreint de sentiments élevés et délicats, traduisant la pensée du fondateur et révélant une émotion qu'on s'attendrait peu à rencontrer chez ces fiers et rudes seigneurs féodaux :

« Ma sœur, dit le duc Alain, voilà le plus précieux trésor que je possède sous le soleil; je l'ai offerte à Dieu; et pour combler le spirituel désir de son âme, j'ai consenti qu'elle se consacrât à lui par un vœu de perpétuelle virginité. Puis, la voyant possédée de l'amour divin, embrasser avec ardeur les saints exercices de la vie religieuse, et, par l'étude de la règle et de la science monastique, marcher dans la voie de la perfection, je lui ai fait don d'un lieu où se trouve réuni tout ce qui convient au régime de la vie régulière. Un stade, à peine, le sépare de ma cité de Rennes. Là, elle pourra, avec les saintes filles ses compagnes, servir sous la règle de saint Benoît le Seigneur Dieu et son précieux martyr saint Georges.» (1)

Le duc détaille ensuite les dons qu'il fait au nouveau monastère c'est un domaine de médiocre étendue, mais d'un

:

(1) V. le Cartulaire, charte de fondation.

produit avantageux. Il renferme des vignes d'abondant rapport, des champs fertiles, de fraîches prairies, une rivière poissonneuse avec deux moulins. Les limites de ce domaine sont, au Septentrion, la voie publique, « via publica; » c'est l'ancienne voie romaine se dirigeant vers Subdinum (Le Mans); au Midi, la rive gauche de la Vilaine; à l'Orient, les possessions de l'abbaye de Saint-Melaine; enfin, à l'Occident, le faubourg (1) même de la ville,« suburbium. »

Sous cette dénomination étaient alors compris tous les quartiers en dehors et à l'Est de la ville close, de la vieille CITÉ; les agglomérations de maisons et l'ensemble des rues au milieu desquelles s'élevaient dès lors l'église de Saint-Germain, l'hôpital Saint-Jacques, qui devint, au x siècle, le couvent des Franciscains ou Cordeliers; en un mot, tout l'espace désigné plus tard sous le nom de ville neuve, » lorsqu'on l'entoura de douves et d'une enceinte de défense, de 1424 à 1448; espace que représente aujourd'hui la portion. de territoire délimitée par la Vilaine au Sud, les rues de Rohan, de l'Horloge, Châteaurenault, Champ-Jacquet à l'Ouest; la place Sainte-Anne, la rue de la Visitation et celle des Fossés, au Nord; le contour de la Motte et la rue des Violiers, à l'Est..

On peut donc se représenter l'ancien pourpris de l'abbaye tel que le décrit la charte, circonscrit par le cours de la Vilaine avant sa modification par l'établissement des quais, le chemin de Viarmes, les rues actuelles de Paris et de Belair, enfin la rue qui borde la promenade de la Motte à l'Ouest, la place Saint-Georges et la petite rue des Violiers (2).

(1) L'ancienne orthographe, conforme à l'étymologie du mot, écrivait « forsbourg foris burgus. C'est le bourg extérieur, hors de la ville murée.

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(2) Le nom originaire était « rue des Volliers, » c'est-à-dire « des jar

Outre ce petit mais fructueux domaine destiné à asseoir l'habitation principale des nouvelles épouses du Christ et l'église du monastère, le duc Alain conféra à sa sœur et à la communauté qu'elle gouvernait, soit dans l'acte de fondation, soit par des largesses successives, des immunités considérables. Ainsi, il leur accorda l'exemption générale de toutes coutumes ou redevances féodales que lui attribuaient l'usage et la loi des fiefs; le privilége de la liberté commerciale la plus étendue; la jouissance et l'entière propriété de quatre moulins établis sur les deux rives du fleuve qui baignait, au Midi, les murailles de la cité. Ce sont ceux qu'on appela, au XVe siècle, « les moulins de la Porte, » et de nos jours << moulins de la Poissonnerie. » Ce qui en subsistait a complètement disparu lors des travaux pour la construction du canal et des quais de la Vilaine, dans la traverse de la ville, de 1841 à 1845.

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Là ne se bornaient pas les dons du duc Alain: il concédait encore à l'abbaye la seigneurie et le plein domaine d'un bourg considérable de Bretagne, nommé Tinténiac, « Vicum non exiguum, >> - sans compter la propriété de plusieurs riches métairies et villages, dans la paroisse d'Acigné et dans celle de Mordelles.

L'acte de fondation de Saint-Georges fut entouré des formalités solennelles qui garantissaient alors la stabilité des concessions de cette importance et rendaient sacrés les engagements pris en pareilles conjonctures. La tendresse maternelle de la duchesse Havoise était ici d'accord avec la vive affection que portaient à leur sœur Adèle le duc Alain et son frère, le comte Eudon; aussi rien ne fut négligé de ce qui

dins de volerium, volarium, qui, en latin du moyen âge, signifie « jardin. » On avait ainsi nommé cette rue, parce qu'elle longeait l'enclos des jardins de Saint-Georges.

devait rendre la cérémonie plus imposante et les promesses plus irrévocables.

De puissants barons, grands feudataires du duché, étaient présents; ils ratifièrent comme témoins les largesses ducales et y donnèrent leur assentiment.

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On comptait dans cette noble assemblée le comte de Cornouailles, Alain Canhiart, le baron de Vitré, les sires de Porhoët et de La Guerche, etc. Plusieurs d'entre eux offrirent à l'envi leurs mères, leurs sœurs ou leurs filles, les consacrant à Dieu sous le gouvernement de la princesse Adèle. Ainsi, parmi les premières compagnes de l'illustre abbesse, figurent la mère et la sœur de Warin (ou Guérin), évêque de Rennes; la fille du vicomte Godsellin, ou Josselin, fils du premier comte de Porhoët; la fille de Riwallon, dit « Le Vicaire, premier baron de Vitré.

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Les neuf évêques de Bretagne, l'archevêque de Dol en tête, furent aussi appelés à prêter leur concours et leur confirmation à l'acte de fondation de Saint-Georges; ils prononcèrent, comme c'était l'usage, les plus redoutables anathèmes contre les infracteurs ou violateurs des immunités et les déprédateurs des possessions de l'abbaye.

Aux donations primitives ne tardèrent pas à venir s'en joindre de nouvelles. Pendant que s'exécutaient les travaux de construction du monastère et de ses dépendances, le duc Alain et sa famille, puis les hauts barons, rivalisèrent de générosité et de zèle pieux pour assurer aux servantes de Dieu d'amples ressources.

Pour aider à l'édification de l'église abbatiale et des bâtiments conventuels, comme pour assurer la subsistance de sa communauté, Alain III abandonna à sa sœur les droits d'usage et de disposition les plus larges dans toutes ses forêts, notamment dans celles de Rennes et de Tanouarn; il lui donna également la propriété exclusive du cours de la rivière et le droit

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