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permettre aux prêtres de cette nation de se confesser entre eux, après avoir choisi parmi eux ceux qu'il croira les plus dignes de la confiance, et leur avoir fait subir un examen d'idonéité.

« 14° Si, dans le nombre des ecclésiastiques français séculiers ou réguliers réfugiés dans les États du Pape, il s'en trouvait qui eussent eu la déplorable faiblesse de prêter le serment civique, ils auront à se présenter par-devant l'évêque ou l'un des vicaires généraux du diocese où ils résident pour en obtenir l'absolution des censures et la dispense de l'irrégularité encourue par eux, leur exposer le repentir où ils sont de leur faute, et, pour justifier de leur repentir, ils feront trois copies de leur rétractation en bonne forme, dont une restera au greffe de la chancellerie ecclésiastique; une autre sera envoyée à la municipalité du lieu où ils ont donné le scandale de leur coupable serment; la troisième au chef-lieu du département, requérant que cette rétractation soit insérée dans les registres et rendue publique. Ces préliminaires remplis, à la suite de cette formalité qui est de rigueur, les évêques ou grands vicaires pourront procéder à l'absolution des censures, bien entendu en faveur de ceux desdits ecclésiastiques assermentés qu'ils croiront n'avoir cédé que par faiblesse, et qui, depuis leur serment, se sont abstenus de tout acte public de schisme, montrant une crainte respectueuse pour les censures encourues par eux, et témoignant une sincère et persévérante douleur de leur faiblesse. Quant à ceux des ecclésiastiques qui à la faute de cette prestation de serment auraient ajouté le mépris des censures qu'ils ont méritées, auront violé la défense qui leur avait été faite de continuer l'exercice des saints ordres, ou même auraient été intrus: après qu'ils auront donné les témoignages de repentir les moins équivoques, et rempli toutes les conditions imposées ci-dessus, Sa Sainteté veut bien que les évêques ou leurs vicaires généraux aient la liberté de les absoudre même des censures; mais elle ordonne de plus qu'en punition de la violation faite par eux des censures ou du crime de leur intrusion, les évêques ou leurs vicaires généraux, avant de leur accorder la dispense d'irrégularité, les tiennent préalablement suspens de l'exercice des saints ordres, pendant un certain temps prescrit par eux, et limité avec modération.

a 15° Tous les réguliers sortis de France devant, aux termes de la loi qui en a été portée, se rendre dans les monastères ou couvents des ordres respectifs auxquels ils appartiennent, les archevêques et évêques, après en avoir conféré avec les supérieurs de chacun des divers ordres, auront soin de tenir la main à l'exécution de ladite ordonnance, dans le cas où il s'en trouverait dans leurs diocèses qui eussent négligé jusqu'ici de s'y soumettre. Conformément à cette règle, Sa Sainteté a arrêté ce qui suit:

• 16° Que, vu l'état d'indigence où ils sont, il ne puisse être exigé d'eux aucuns frais pour droit d'entrée, ni à titre de premières dépenses, comme c'est l'usage, ou d'avances à prendre sur ce qui peut revenir à chacun annuellement. Mais les supérieurs des monastères ou couvents, combinant ensemble les droits d'une charité fraternelle et de l'économie religieuse, pourvoiront au vestiaire et autres besoins de ces infortunés étrangers, de la même manière qu'ils en usent à l'égard des autres membres de la famille religieuse;

si toutefois, comme cela est à présumer, ces hôtes eux-mêmes ne refusent pas par l'abandon du produit de leurs messes, appliqué à l'usage commun, de participer à l'ordre adopté, et généralement suivi par les autres membres de la maison où ils sont établis.

« 17° Qu'ils soient astreints aux règles et coutumes observées dans chacun des monastères et couvents, malgré les différences qui pourraient se trouver entre les mœurs desdites maisons et celles des couvents où ils ont fait profession.

« 18° Qu'en conséquence, ils se règlent en tout et pour tout sur l'ordre établi dans ces maisons adoptives, pour les heures du lever, de l'office, du réfectoire, de la récréation, etc., sans aucune distinction d'avec la vie des religieux parmi lesquels ils ont été recus.

19° Ils ne pourront rien exiger de particulier dans la nourriture, ni dans aucun autre objet, mais ils se contenteront des secours que l'esprit d'humanité et de charité fournit à leurs frères en religion.

« 20o Les supérieurs veilleront avec la plus sérieuse attention à ce qu'ils ne se livrent point aux vaines distractions de la littérature, ni aux dissipations qu'entraînent la fréquence des visites, et particulièrement le commerce des laïques.

« 21° Si parmi les confesseurs du monastère ou couvent, il n'y en avait point qui sussent la langue française, le supérieur choisira dans le nombre des religieux étrangers ceux qu'il croira les plus dignes de sa confiance, après s'être assuré par un examen préalable de leur capacité.

« 22o Les religieux français fugitifs, n'étant reçus que provisoirement, ne trouveront pas mauvais que dans les actes capitulaires et les élections ils n'aient point voix active ni passive, à moins d'une permission spéciale de Sa Sainteté, délivrée par le secrétariat d'État, sur la demande des supérieurs. Néanmoins ils pourront être employés aux fonctions qui seront du ressort de la disposition libre des mêmes supérieurs.

« 23° Les laïques profès, également accueillis par la charité, ne pourront récuser les divers emplois dans les monastères ou couvents, auxquels ils auront été nommés.

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Enfin votre sollicitude pastorale et votre vigilance connues Vous feront un devoir de tenir la main à ce que la présente ordonnance ait sa pleine et entière exécution dans votre diocèse; que tous les ecclésiastiques français, tant séculiers que réguliers, qui y ont été admis, ainsi que les communautés religieuses, en prennent une connaisance exacte et précise, et qu'ainsi personne n'ait sujet d'en prétexter cause d'ignorance. Sur ce, etc. »>

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Après avoir, de cette manière, donné une marche régulière et un nouvel élan à l'OEuvre pie de l'hospitalité française, Mr Caleppi, sous la date du 1 août de cette même année, dans un rapport extrêmement intéressant, informe le Pape des heureux résultats que sa charité et son zèle avaient déjà obte

nus. Nous croyons ne pouvoir nous dispenser d'insérer ici ce remarquable travail dans son entier :

« Très-Saint-Père,

Rome, 1 août 1793.

a

J'ai l'honneur de transmettre à Votre Sainteté le catalogue des ecclésiastiques français émigrés et des religieux et religieuses auxquels Votre Sainteté a donné asile et hospitalité dans ses Etats. Avant que l'invasion de la vilie et du comté de Nice, où s'en étaient réfugiés plusieurs milliers, eût engagé Votre Sainteté, à l'exemple des Etienne et des Grégoire, ses glorieux prédécesseurs, à leur ouvrir ses bras paternels et à secourir leur indigence, l'on comptait à peine deux cents de ces ecclésiastiques dans Rome et les États pontificaux. Depuis cette époque, c'est-à-dire depuis le mois d'octobre 1792 jusqu'à ce jour, leur nombre s'est élevé à plus de deux mille, c'est-àdire autant qu'en annonçait le bref du 21 novembre adressé par Votre Sainteté aux évêques et aux abbés de l'Allemagne (1), et, à l'exception d'une centaine à peine qui pouvaient subvenir aux frais de leur entretien, tous les autres sont entretenus par la piété des réguliers et des autres lieux pieux de l'État, conformément au plan que Votre Sainteté daigna tracer pour une œuvre qui fera toujours l'éloge de son grand cœur, et sera toujours mémorable dans les fastes de l'église. Supposé, en effet, que l'on compte leur entretien annuel à raison seulement, l'un dans l'autre, de cinquante écus, l'on aura, pour deux mille, la somme considérable de cent mille écus. Ce qui même a fait dire à plusieurs que Pie VI avait payé à lui seul la dette contractée par le Saint-Siége envers Charlemagne.

«Mais, afin que Votre Sainteté puisse voir distinctement d'un seul coup d'œil tout le système de la présente hospitalité, j'ai placé avant le catalogue les circulaires déjà ordonnées et gracieusement approuvées et corrigées par son zele infatigable: elles présentent l'idée de la répartition des susdits ecclésiastiques entre les monastères et couvents des provinces, la méthode suivie pour faire cette répartition dans les meilleures proportions possibles, et le règlement prescrit aux nouveaux hôtes pour assurer non-seulement la sécurité particulière de chacun, mais encore la tranquillité publique.

« Aux circulaires elles-mêmes, et précisément à la première, est annexé le plan de la division des diocèses de l'État pontifical en cinq chefs-lieux, et en même temps l'indication sommaire du nombre des personnes qui ont été reçues dans chacun d'eux. L'événement a confirmé ce qui avait été prévu, c'est-à-dire que, des cinq chefs-lieux par où les ecclésiastiques français émigrés pouvaient entrer dans l'État, Rome, par la voie de Civita-Vecchia, en recevrait le plus grand nombre, et par suite il ne paraîtra point surprenant si dans le district de Rome l'on fait entrer un plus grand nombres de diocèses. Conformément à l'esprit de ces mêmes circulaires, c'est-à-dire aux inten

(1) Leur nombre s'est accru cependant de beaucoup comme on le voit par le catalogue.

tions si douces et si paternelles de Votre Sainteté, l'on s'est efforcé de procéder toujours de manière à faire prévaloir constamment par la persuasion et la charité l'exécution de ce système; et, dans ce but, l'on a toujours conservé avec les évêques, les réguliers et les autres émigrés une correspondance très-amicale. Pour la rendre plus facile, et afin de soulager de ce poids l'éminentissime secrétaire d'État, j'ai cru devoir prendre sur moi la rédaction des minutes que j'ai, du reste, fidèlement envoyées à la secrétairerie d'État pour y être signées par Son Éminence, afin que tout portât l'empreinte de la volonté souveraine, et émanât en réalité de la vigilance et de la libéralité de Votre Sainteté.

«Par ce moyen, nous avons toujours été d'accord avec les évêques et les réguliers, et l'on a pu remédier à tous les inconvénients qu'il avait été dès l'abord impossible de prévenir, et qui ne pouvaient manquer d'arriver dans une œuvre aussi compliquée et aussi étendue. Je dois rendre ici aux évêques, et au plus grand nombre des supérieurs majeurs des réguliers et surtout des ordres mendiants, le témoignage qu'ils ont mis le plus grand empressement à seconder les bienfaisantes intentions de Votre Sainteté pour aider et secourir les malheureux émigrés, comme je dois aussi dire à la louange des émigrés eux-mêmes, qu'ils s'en sont montrés dignes par leur reconnaissance et leur bonne conduite.

<«< Et comme il convenait que Rome montrât l'exemple aux provinces et leur donnât l'impulsion pour la mise à exécution du plan de Votre Sainteté, je me suis entendu directement avec le vicariat et avec le gouvernement, en Is faisant, autant que possible, contribuer de leur côté à la tranquilité publique et au bon ordre des émigrés. Pour la même raison, je me suis entendu avec les agents des évêques et avec les supérieurs des ordres religieux résidant à Rome. Et sachant quelle était la force du bon exemple, je reçus dès le commencement moi-même dans ma maison, et y admis à ma table, un ecc ésiastique français émigré, ce qui a été imité ensuite par plusieurs évêques. Mais, soit dans la crainte d'attirer dans la capitale un trop grand nombre d'émigrés, soit parce qu'il était nécessaire de concilier au système le concours des supérieurs majeurs des réguliers, j'ai cherché à les contenter en plaçant un seul émigré par couvent ou monastère, afin de trouver plus facilement en eux, à l'occasion, un appui contre les indiscrètes difficultés des supérieurs des provinces. De cette manière, en effet, les réguliers s'y sont prêtés plus volontiers, les évêques en ont été satisfaits, et les émigrés ont joui et jouissent tranquillement d'une hospitalité qui devra toujours les attacher au Saint-Siége et à son auguste chef.

« Mais toutes ces dispositions, bien que suffisantes pour donner aux émigrés un abri et du pain, ne suffisaient pas pourtant dans le cas où il fallait de l'argent comptant. Le plus grand nombre d'entre eux sont arrivés sans habits ecclésiastiques; plusieurs étaient infirmes, et par conséquent incapables d'être placés dans une maison religieuse; beaucoup, à cause de leur grand nombre, comme aussi pour cause de maladies, obligés de passer de l'un à l'autre diocèse, se voyaient dans la nécessité d'être secourus pour leurs voyages. Il fallait donc penser à trouver d'autres ressources. Dans ce but,

Votre Sainteté a daigné bénignement approuver un projet d'offrandes gratuites qui seraient mises à la disposition de M. le connétable don Philippe Colonna ; une nouvelle circulaire adressée aux évêques de l'État dans cette intention, la note des émigrés auxquels, pour les raisons déjà données, on a décidé d'accorder un secours mensuel, et enfin la note des autres secours éventuels qui de temps à autre jusqu'à ce jour ont été distribués aux évêques eux-mêmes, démontreront à Votre Sainteté combien les susdits projets étaient opportuns, et combien les secours administrés étaient indispensables au succès du système adopté.

a Pour que les émigrés pussent s'occuper utilement, selon les sages dispositions de Votre Sainteté, je les ai engagés à faire parmi eux la collection des mémoires relatifs à la persécution actuelle et à ses martrys, et déjà un grand nombre y travaillent dans les provinces et dans la capitale, sous la haute direction du cardinal Gerdil; comme encore beaucoup d'entre eux continuent à s'occuper des cas sur lesquels ils sont consultés par les ecclésiastiques restés en France, et qui pourront se présenter lorsqu'ils reprendront la conduite de leur troupeau relativement à ceux qui auraient reçu les sacrements des intrus, prêté le serment civil, favorisé le schisme, etc., je n'ai point négligé de leur procurer les livres et les guides nécessaires pour les diriger dans une affaire si importante.

« Enfin, voyant que des ecclésiastiques de presque tous les diocèses de France étaient venus se réfugier dans l'État pontifical, il m'a semblé voir que la Providence en avait disposé ainsi pour qu'il y eût de toutes les provinces de ce très-malheureux royaume quelques témoins de la charité du Saint-Siége et des éminentes vertus du Père commun des fidèles. Et, dans cette vue, j'ai cru ainsi devoir profiter de ces circonstances pour leur insinuer des pensées et des maximes de plus en plus conformes aux nôtres. C'est pour ce motif que je leur ai fait distribuer à Rome et envoyer dans les provinces une grande quantité de petits opuscules, tels que celui de la Conduite du SaintSiége envers la France, dans les circonstances actuelles, traduit du Journal ecclésiastique de Barruel; les Brefs émanés de Votre Sainteté pour les mêmes circonstances, et surtout celui du 10 mars 1791; quelques-uns des meilleurs Mandements des évêques français, insérés dans la collection des Témoignages des églises de France, et quelques Lettres pastorales de MB Furchi, évêque de Parme.

« Mon dessein, en agissant ainsi, est qu'un jour, lorsque ces ecclésiastiques rentreront en France, ils y retournent moins prévenus de leurs opinions, et des soi-disant libertés gallicanes. Je me suis surtout appliqué à détromper les ecclésiastiques d'Avignon et du Comtat, sujets de Votre Sainteté, auxquels, je ne sais par quelle fatalité, dans leurs célèbres séminaires, il était défendu d'instruire les clercs de la véritable valeur des quatre fameuses propositions de 1682, et je pense que le soin particulier que j'ai pris de les bien placer et de les secourir de préférence ne m'a pas peu aidé à y réussir.

« Enfin, en toute occasion j'ai cherché à ne rien négliger de tout ce que je croyais convenable à la dignité de Votre Sainteté, à la gloire du Saint-Siége,

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