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habitation décente, avec de vastes enclos entourés de murailles1. Cet historien ajoute encore qu'il attira auprès de lui les Dominicains; et cette assertion se trouve confirmée par le témoignage de M. Compayré, lequel nous dit que les frères Prêcheurs arrivèrent à Alby à peu près vers le même temps que l'évêque. Pendant quelques années, ces religieux se contentèrent de l'habitation qui leur avait été concédée; mais un jour ils voulurent d'autres bâtiments, et ils construisirent en 1293 une nouvelle église sous l'invocation de saint Louis. Bernard de Castanet en posa la première pierre, le dimanche après l'octave de SaintPierre et Saint-Paul, c'est-à-dire le 12 juillet 12932.

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1 Massol, Hist. de l'ancien pays d'Albigeois, p. 355.

* Compayré, Études hist. sur l'Albigeois, p. 59.

CHAPITRE IX.

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Les curés du diocèse demandent la permission de disposer de leurs biens par testament. Élections consulaires. Bernard de Castanet rend la justice. -Les petits pèlerinages.

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Confisca

tion des biens des hérétiques. Les clercs exerçant des arts mécaniques non soumis au subside de guerre. Le faubourg du Bout-du-Pont.

On a déjà vu que les habitants d'Alby avaient une entière liberté de disposer de leurs biens, mais que leur succession appartenait de droit au seigneur-évêque lorsqu'ils mouraient ab intestat et sans parents. Ce droit avait été inséré dans le livre des coutumes de la ville et ne pouvait ainsi être contesté. Cependant il paraît que les curés n'avaient pas encore cette faculté de disposer de leurs effets mobiliers en 1278, puisqu'il existe plusieurs requêtes présentées à Bernard de Castanet par divers curés ou recteurs des églises du diocèse, qui lui en demandaient la permission 1. Au reste, cette autorisation ne tarda pas à leur être accordée, et les ecclésiastiques durent même souvent participer aux donations de leurs administrés; car nous connaissons une sentence de l'official d'Alby, du 28 juillet 1283, qui défend aux notaires de recevoir au

1 Ces demandes furent adressées à l'évêque par l'archiprêtre de Cordes et les recteurs de Puy-Celse et de Lisle au nom de leurs confrères, les 19 et 31 janvier et le 9 février 1278 (1279). - Archives de l'évêché d'Alby, ms. 107, fol. 60 et seq.

cun testament, si ce n'est en présence des curés1. Il n'est peut-être pas inutile de rappeler ici que l'évêque Bernard avait obtenu du pape Jean XXI le pouvoir de conférer les bénéfices qui viendraient à vaquer dans son diocèse, et le droit de nommer deux tabellions ou notaires. Ce fut en vertu de cette autorité qu'il institua notaire public, en présence de quatre prud'hommes, Amelius de Candeil, dont il reçut le serment le 21 décembre 12802, et auquel il remit les notes et registres d'Isarn Aimera et de R. Rubei, avec pouvoir d'en faire des extraits pour ses actes.

Fort de sa puissance de seigneur temporel, Bernard de Castanet ne manquait jamais d'exiger, conformément à la charte de saint Louis (1264), que le viguier royal entrant en fonctions vînt lui jurer de respecter ses droits et de garder et conserver intactes les prérogatives de l'église d'Alby. L'acte de serment d'Élie Judicis, daté du 13 février 1279, nous en fournit la preuve3. L'évêque faisait aussi procéder avec le plus grand soin, et dans les formes voulues, à l'élection des consuls, qui lui prêtaient également ensuite le serment de respecter et faire respecter les droits de l'évêque, de l'église et de la ville d'Alby. Trois

1 Archives du chapitre de l'église cathédrale, ms. 107, fol. 274. 2 Archives de l'évêché, ms. 107, fol. 186.

3 Ibid. fol. 134. M. Compayré, qui nous a donné dans ses documents inédits (p. 200) une partie de ce serment d'après la copie des archives du viguier, croit devoir traduire le nom du bailli royal d'Alby et de

l'Albigeois par Élie de Juge. Nous pouvons affirmer ici que la famille Judicis,

qui plus tard acquit la terre de Mirandol, existe encore et n'a jamais donné une autre orthographe à son nom. Elle signe encore aujourd'hui Judicis de Mirandol.

documents, l'un du 19 août 1285, le second du 20 juin 1293, et le troisième du dimanche après la Saint-Barnabé de l'an 1316, nous prouvent qu'à cette époque la ville était encore divisée en six gaches ou quartiers, ainsi nommés : Verdusse, le Vigan, Sainte-Martianne, Saint-Afrique, Las Combes et Saint-Etienne. Tous ces documents sont antérieurs à ceux que l'on a publiés jusqu'à ce jour, et il nous a paru utile de reproduire ici le texte du premier, c'est-à-dire de l'an 1285, non-seulement à cause de son antiquité, mais encore pour les précieux renseignements qu'il fournit sur le nombre des consuls et conseillers, sur les formes de leur élection et sur le serment qu'ils devaient prêter à leur entrée en fonctions1.

La science, l'activité de ce prélat ne lui laissaient rien négliger. Ainsi, nous voyons que le 8 janvier 1 280 (1281), il passait une transaction avec les consuls et habitants de Réalmont au sujet du droit de passata ou de paix, dont il les déchargeait pour l'avenir moyennant une somme de quatre mille sous melgoriens 2; et, le 2 décembre 1284, il recevait du prévôt et du chapitre d'Alby le droit de disposer de la camérerie de la cathédrale, ainsi que de plusieurs autres bénéfices vacants et dépendants du chapitre 3. Ce n'est pas tout encore : l'évêque d'Alby rendait lui-même la justice, et sa justice était souvent sévère. On peut s'en convaincre en lisant une sentence de lui qui condamne, le 4 avril 1280, à la prison perpétuelle, au pain de dou

1 Preuves, n° XXII.

2 Archives de l'évêché, ms. 107, fol. 193.

3 Ibid. fol. 298.

leur et à l'eau d'angoisse Gabriel de Fumet, chanoine de Saint-Salvi et prieur de l'église de Saint-Afrique, pour un de ces actes d'immoralité et de corruption que l'on est heureux de ne pas rencontrer souvent dans l'histoire1. Toutefois, on reconnaît qu'en certains points ce prélat n'était pas ou ne savait pas être au-dessus de son siècle. Le samedi avant la Saint-Barthélemy de l'an 1290, un nommé Bernard Salomon de Noalha (de Noailles), accusé d'avoir eu commerce charnel avec une vache, comparut devant l'évêque siégeant en cour séculière, et celui-ci, après avoir pris l'avis des prud'hommes qui l'assistaient, condamna le malheureux traduit à sa barre à avoir la tête tranchée, ainsi que la vache, et ordonna de les brûler tous deux ensemble. L'exécution de ce jugement fut enfin suivie d'une proclamation criée par toute la ville et portant défense de toucher aux ossements brûlés, sous les peines encourues par les deux coupables2.

Deux ans auparavant, le mercredi avant la Saint-Jacques 1278, Guillaume de Vezian, juge de la cour séculière de l'évêque, avait rendu une ordonnance portant que tous ceux qui seraient surpris en adultère devraient courir entièrement nus dans les rues de la ville; mais, après cette course faite selon la coutume, la justice était satisfaite; les condamnés ne perdaient point la liberté, et on leur restituait leurs biens et leurs vêtements3.

1 Archives de l'évêché, n° 107, fol. 146.

2 Archives de l'hôtel de ville d'Alby, fonds Doat, ms. 103, fol. 30. 3 Compayré, Études hist. sur l'Albigeois, p. 175. — Archives de l'hôtel de ville d'Alby, ms. 103, fol. 22.

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