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du diocèse, on peut encore citer un acte du mois de mars 1208 (1209) dans lequel l'évêque d'Alby lui-même inscrivait le nom de la Vierge avant celui de sainte Cécile. C'est l'échange dont nous avons déjà parlé1, qui fut conclu entre Guillaume Petri et les chanoines de sa cathédrale; ce prélat y dit: Ego Guillelmus Petri Albiensis episcopus per me et per successores meos dono et concedo Deo et beatæ Mariæ et beatæ Cecilia virgini et matri et omnibus clericis Albiensis sedis.....

Faudrait-il admettre, d'après ces titres, la dédicace de l'église à la sainte Vierge? Nous ne le pensons pas; car on doit considérer les diverses formules employées par les donataires comme autant d'invocations différentes. Une dernière preuve, puisée dans une charte antérieure d'un siècle à celles qu'on vient de lire, justifiera notre assertion. C'est une donation faite, vers l'an 1130, par Aimard, Pierre-Raymond et Arnaud d'Alaman, frères, par laquelle ils cédent tous leurs droits sur une chapelle de NotreDame, qu'ils avaient dans le château de Castel-Viel, à Dieu, à sa croix victorieuse et à sainte Cécile, patronne de la cathédrale d'Alby2. Cette fois encore, on le remarquera, la croix est mise auprès de Sainte-Cécile; mais la Vierge n'y est pas encore: elle ne paraît qu'au siècle suivant.

Que devrons-nous conclure de l'examen de ces faits, auxquels on ne nous reprochera sans doute pas d'avoir consacré trop de soin? Que la cathédrale d'Alby fut de tout temps consacrée à sainte Cécile, que le nom de la

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sainte Croix, placé en tête de plusieurs actes, doit être considéré comme un gage de la foi du donateur; que si l'on remarque enfin un changement dans la formule des actes au commencement du XIIIe siècle, c'est qu'à cette époque on n'invoquait pas seulement le nom du Seigneur, ainsi que la croix de souffrance de son divin fils, mais on commençait encore à se mettre sous la protection de la sainte mère du Christ.

CHAPITRE II.

Deux églises dédiées à sainte Cécile dans l'Albigeois au commencePremière charte du cartulaire d'Alby.

ment du x siècle.

Montans et Gaillac.

Après avoir constaté et réfuté une première inexactitude constamment admise au xix siècle par tous les écrivains, depuis le bibliothécaire Massol jusqu'à MM. Crozes et l'abbé Bourassé, il nous reste à relever une erreur non moins grande qui a été commise au sujet de la cathédrale d'Alby. Par suite de la fausse interprétation d'un texte, l'abbé Forest, qui vivait il y a cent ans environ, a cru que cette église avait été cédée par un prêtre à l'évêque Godoleric ou Godalric, au commencement du x° siècle; puis, sans examiner l'origine d'une pareille assertion, et sans rechercher comment une église ainsi donnée serait devenue cathédrale, il n'a pas craint de consigner cette faute dans l'Almanach historique de Languedoc. Ainsi cet écrivain, qui publia son ouvrage à Toulouse, en 1755, dit au commencement du chapitre concernant l'archevêché d'Alby L'église de Sainte-Cécile fut d'abord bâtie dans « le territoire de Montagnac, près de la rivière du Tarn; «l'archidiacre Benebert l'avait cédée, vers l'an 913, à Godeleric, évêque d'Alby, et à son chapitre 1.

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1 Almanach historique de Languedoc, p. 95.

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A nos yeux cette phrase contient autant d'erreurs que de mots. Évidemment l'auteur a emprunté ce fait au Gallia Christiana, dans lequel on lit: Godolericus cum suo capitulo ecclesiam sancta Cecilia de Avanes, in territorio de Montagnat, in pago Albigensi, dono accepit a Beneberto presbytero et archidiacono1; mais il n'est personne qui ne remarque tout d'abord combien les lignes qui précèdent, écrites pour constater l'existence d'un évêque, ont été mal comprises et mal traduites. Trompé par la ressemblance du nom, l'éditeur de l'Almanach historique de Languedoc, sans s'arrêter au mot de Avanes, a cru qu'il s'agissait de la cathédrale même d'Alby. En conséquence il l'a placée sur la rivière du Tarn, tandis qu'il était question, ainsi que nous le prouverons bientôt, d'une chapelle ou église de SainteCécile, située sur un territoire assez éloigné et donnée à l'évêque Godalric.

Depuis ce jour, les historiens qui ont eu à parler de Sainte-Cécile ont tous reproduit cette erreur, qu'il nous sera facile de détruire pour ne plus la laisser répéter à l'avenir. Sans nous arrêter à la date de 913, dans laquelle nous ne pouvons voir qu'une faute typographique, nous citerons un passage du dernier ouvrage consacré à l'église métropolitaine d'Alby. L'auteur, après avoir consulté l'Almanach historique de Languedoc, et puisant en outre à d'autres sources aussi peu exactes, dit : « Alors fut construite << au sein de la capitale des Albienses une église cathédrale sous l'invocation de la sainte Croix. Il serait difficile d'as

Gallia Christ. t. I, col. 8.

signer l'époque précise de sa fondation; on sait seule <<ment qu'elle fut bâtie sur les bords de la rivière du Tarn, au lieu appelé Montagnac, entre le palais des comtes d'Albigeois et la métropole actuelle. » Puis, il ajoute en note: Sainte-Croix ne passa dans le domaine de l'évêque qu'en «l'année 913, où l'archidiacre Benebert lui en fit ces

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Quelle étrange confusion et que de fautes en si peu de lignes! Ce passage est complétement inintelligible pour quiconque a vu les lieux et les actes, et pourtant il a été reproduit à peu près dans les mêmes termes par l'auteur des Cathédrales de France, dans sa notice sur Sainte-Cécile. M. l'abbé Bourassé contribue ainsi à propager une erreur beaucoup trop répandue, et, pour n'avoir pas pris la peine de remonter aux sources, il tend à accréditer cette croyance qu'il existait jadis dans la ville même d'Alby un lieu appelé Montagnac ou Montagnat, sur lequel aurait été bâtie l'ancienne cathédrale.

Mais quel est donc l'acte qui a ainsi induit en erreur l'abbé Forest et ses successeurs? Ne pouvait-on le consulter parce qu'il était enfoui dans les cartons de quelques archives, ou bien était-il perdu? Bien loin de là! La charte dont les auteurs du Gallia Christiana ont donné le résumé a été publiée par D. Vaissette2, et de plus, nous

par

1 Notice historique et descriptive sur l'église métropolitaine de Sainte-Cécile d'Albi, M. H. C. Toulouse, 1841, p. 9 et 10. - L'auteur de cette notice, M. Hippolyte Crozes, a répété le même passage dans une nouvelle édition de cet ouvrage publiée sous ce titre : Monographie de la cathédrale d'Albi, 2° édit. Toulouse, 1850, p. 2 et 3.

2 Hist. gen. de Languedoc, t. II; pr. p. 59.

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