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Le premier de ces documents remonte au 30 mars 1018. C'est une bulle de Sergius, qui cède le château de Lescure à Vedian, sous la redevance de dix sous raymondins. Cette bulle nous apprend que le château de Lescure avait été jadis donné au saint-siége par les rois de France. Une autre lettre du pape Honorius III, adressée le 26 novembre 1218, c'est-àdire deux siècles plus tard, à l'évêque d'Alby, lui ordonne de rendre au cardinal Bertrand, son légat, ce même château, qu'il avait livré aux perfides Toulousains; elle lui enjoint surtout de ne point tourmenter dans la possession de Lescure, soit le cardinal, soit la personne à laquelle celui-ci voudra le donner.

Presque toutes les copies de ce recueil sont aussi intéressantes, que celles que je viens de citer, et je n'ai qu'un regret après l'avoir vu, c'est de n'avoir pu entièrement le copier. J'aurai encore occasion d'en parler dans la suite de ce rapport.

Les archives de la mairie d'Alby sont bien certainement plus riches en documents historiques; mais, je le dis avec peine, il est presque impossible d'en profiter. Comme personne n'est chargé de leur garde, les chartes restent entassées sans ordre dans des sacs, et l'on ne peut consulter avec fruit que quelques volumes contenant les anciennes coutumes et certains faits remarquables consignés par les consuls. Il est trop pénible de voir des archives semblables n'avoir pas un classement, même sommaire, pour que je ne signale pas cet état de choses à votre attention. Quand on pense au soin que prenaient nos pères de ces précieux restes d'antiquité; quand on songe à leur culte pour ces souvenirs du temps passé, pour ces témoins vénérables de notre histoire, et qu'on les compare à l'état d'abandon et d'oubli dans lequel sont

quelques archives, on est tenté de se demander si plusieurs siècles de barbarie ont passé sur nos têtes.

Dans le Livre des priviléges et coutumes de la ville d'Alby, anciennement appelée le Vieux barbare, j'ai remarqué les priviléges, libertés et franchises approuvées, le 13 mai 1245, par Durand, évêque, seigneur de la ville. Sans doute ce n'est point là le premier acte du droit des évêques comme seigneurs temporels, puisque l'on connaît un règlement de Guillaume Petri du 17 mai 1220; mais je le signale, parce qu'il est fait avec le consentement et la permission des prud'hommes et de toute l'université de la cité d'Alby.» Je crois y voir les traces de ce gouvernement épiscopal, municipal et populaire, souvent attaqué par les vicomtes d'Alby ou par les officiers du roi, mais qui ne cessa entièrement qu'à la Révolution, après avoir commencé au vir siècle, à l'élection de Citrinus. En 680, cet évêque fut élu par le peuple, antistes factus est judicio populi, ainsi que le dit une vieille chronique 1. Or, il me semble voir là un usage dans lequel le pouvoir temporel de l'évêque a pris sa source. Le peuple préférait la souveraineté épiscopale à l'autorité militaire du comte. L'élu de ce même peuple possédait presque toujours l'affection générale. Il soutint d'abord les habitants de ses conseils, de son amitié; puis il régla leurs différends; enfin, il devint leur seigneur et leur donna des lois.

Ce livre des priviléges et coutumes contient également la relation des diverses entrées des évêques dans la ville d'Alby, depuis le 19 juillet 1503 (Jacques d'Amboise, procureur de Louis d'Amboise, évêque) jusqu'au 6 mars 1687 (Charles Legoux de la Berchère, archevêque). Ces procès-verbaux de

D. Luc. d'Achery Spicil. t. III, p. 571. — Chron. episcop. Albiensium.

la réception faite aux évêques montrent, non - seulement le luxe qui présidait à ces cérémonies, mais ils rappellent encore l'humble et respectueux langage des consuls pour leurs seigneurs. Assurément ces magistrats n'auraient pas déployé plus de magnificence ni montré plus de respect pour le roi de France.

Il existe encore aux archives de la mairie un manuscrit fort précieux par les détails qu'il renferme sur l'histoire d'Alby: c'est le Livre des consuls, de 1536 à 1588. Au commencement, on remarque quelques portraits des consuls en exercice. Les magistrats semblent ainsi avoir voulu s'emparer du droit d'image, qui était particulier aux capitouls de la ville de Toulouse; mais cette tentative ne réussit point, car on ne voit bientôt après que le nom et les armes des nouveaux consuls, puis enfin le nom seul des magistrats en exercice.

Dans ce volume sont contenus les faits remarquables arrivés dans Alby et consignés par les consuls eux-mêmes durant le temps de leur charge. L'histoire de la ville, pendant une grande partie du xvI° siècle, se trouve ainsi détaillée d'une manière fort curieuse. Quelquefois même les actes sont racontés en vers par l'historien, et je citerai ici quelques lignes d'un consul poëte, qui s'est plu à rapporter en ces termes les événements survenus en l'an 1537:

Annale faicte pour Alby

Lan mil cinq cens et trente sept
Quon ne doibt pas mettre en oubly
Car cest chose que chacun scet.
Lan mil cinq cens sept dessus trente
Finissant deux mains de quarante
Les vignes gelerent en France
Dont le vin fist si grant souffrance
Devant Alby et autres lieux. . . . .

Ce récit, assez long, n'est pas le seul qui soit écrit en vers. En effet, on trouve un peu plus loin, dans le même volume, le Memoyre de ce qu'a este faict en les ans mil cinq cens sexante deux et sexante trois, estans consuls, etc. commençant ainsi :

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Partout on trouve dans ces annales des notes utiles, excellentes, et si les chartes qui sont encore enfermées aujourd'hui devenaient d'un abord plus facile, non-seulement on pourrait compléter ces renseignements, mais on y recueillerait certainement les éléments d'une bonne histoire. Sans doute nous ne sommes plus au temps où des congrégations entières se livraient à l'étude des monuments écrits pour reconstituer les annales d'une province; mais il se rencontre parfois des hommes travaillant avec courage, dépensant leur fortune, usant leur santé pour le bien de tous, et j'ose espérer qu'un de ces dévouements surgira un jour pour nous donner l'histoire de la ville d'Alby.

En résumé, toutes les pièces et les registres de la mairie d'Alby offrent assez d'intérêt pour être étudiés avec fruit. On peut y trouver des documents fort curieux pour l'étude des mœurs et usages du pays, ainsi que pour celle du langage vulgaire dans cette partie de la France.

Les archives de l'archevêché, qui furent brûlées pendant la Révolution, ne pouvaient offrir que bien peu de documents échappés aux flammes ou aux mains des spoliateurs. Cependant j'y ai trouvé le Procès-verbal de la visite de l'église métropo

litaine et du chapitre faite en 1698 par monseigneur Legoux de la Berchère. Ce volume m'a fourni des renseignements pleins d'intérêt sur l'état de la cathédrale à cette époque. J'ai aussi recueilli quelques notes dans le tome II des Procès-verbaux de la visite faite dans le diocèse par le même prélat. Le premier volume de cette visite est égaré depuis longtemps; il est, diton, dans le département; mais la personne qui le possède ne veut pas s'en dessaisir.

Je croyais avoir tout vu, après avoir compulsé ces manuscrits, quand M. l'abbé Berbié, chanoine de la cathédrale et secrétaire de Ms l'archevêque d'Alby, me dit avoir reçu depuis quelques années une assez forte liasse de papiers qu'il n'avait pas encore eu le temps de déchiffrer. J'examinai aussitôt ces papiers, et je ne tardai pas à reconnaître qu'ils concernaient uniquement le diocèse d'Alby. Ce sont des actes relatifs à plus de cinquante paroisses, parmi lesquels on remarque beaucoup de titres de fondations faites à la cathédrale, à Sainte-Martianne, à Saint-Salvi ou à l'hôpital Saint-Jacques.

La plupart de ces pièces, presque toutes sur papier, appartiennent aux xvio et xviie siècles; un très-petit nombre remonte à une époque antérieure. J'en ai fait un classement sommaire en réunissant tous les actes d'une même ville ou d'une même église dans un seul paquet, avec le nom placé à l'extérieur, et je pense qu'il sera ainsi facile de les consulter dans l'occasion.

Je ne quitterai pas ce noyau d'archives, Monsieur le Ministre, sans vous dire que j'y ai rencontré avec étonnement un Rôle des chevaliers de la vénérable langue de Provence fait en 1683. Je ne crois pas qu'il existe de relevé des chevaliers de Malte plus complet que celui de Vertot, même aux archives de la Haute-Garonne, où sont rassemblés les actes relatifs

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