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estoit ; et, le quatriesme jour après, passèrent dessus icellui pont, les comtes de Nevers et d'Eu, sieur de Beueil, cellui de Montenay, et Joachim Rohault, à grande compagnie de gens de guerre; lesquels s'en allèrent logier ès fauxbourg de la ville, du costel de devers la mer, en une abbaye de dames nommée la Trinité; et dès le premier jour que les Franchois y meirent le siége, incontinent qu'ils y feurent arrivés, assaillirent le boullevert de la porte qui va à Bayeulx; et illecques y eust fait des beaux faits d'armes, tant qu'à la fin icellui boullevert fust prins d'assaut; mais les Franchois le laissèrent depuis, pource qu'il estoit ouvert du costel devers la muraille de la ville; et semblablement demoura désemparé des Anglois, pource que, incontinent après la prinse d'icellui boullevert, ils murèrent leur porte.

CHAPITRE XXVIII.

Comme le roy de Franche se partist d'Argentan, et alla au siége debvant Caen, et comme les Franchois assaillirent le boullevert et le prindrent.

La ville de Caen assiégée comme dict est, Charles, roy de Franche, se parteit d'Argentan pour aller tenir siége avecques ses gens, accompagnié du roy de Cécille, du duc de Calabre son fils, des

comtes du Maine, de Saint-Polet de Tancarville; du vicomte de Lymaigne, de monseigneur Ferry de Loherraine (Lorraine), de Jehan son frère, seigneur de Traynel, chancellier de Franche, des seigneurs de Blanville et de Pruilly, des baillis de Berry et de Lyon, et de plusieurs autres chevalliers, escuyers, et de gens d'armes et de traicts, jusques au nombre de six cent lanches; et alla coucher à Saint-Pierresur-Dive, et le lendemain à Jaure, et l'autre jour après alla disner avecq touts ceux de sa compagnie ès fauxbourgs de Vaucelle; puis se parteit incontinent et passa au-dessus de la ville, la rivière, pardessus le pont, à demi-lieue près de là ; et s'en alla logier atout ses gens dedans une abbaye nommée Ardaine, où il fust durant le siége, fors une nuict en passant par les fauxbourgs, qu'il fust logié, ès fauxbourgs, en ladite abbaye de la Trinité. Illecques demeurèrent le roy de Cécille, le duc de Calabre, le duc d'Allenchon, le comte de Saint-Pol, monseigneur Ferry de Loherraine, Jehan son frère, et plusieurs autres, jusques au nombre de mille lanches, et deux mille archiers à cheval, et de deux mille francs archiers à pied, dont la pluspart estoient logiés ès villaiges allentour dudit Caen. En une chappelle, entre le chastel et l'abbaye dudit Saint-Estienne, estoient logiés les sieurs de Beauvoir et de Bourbonnois, alout trente lanches et mille cinq cent francs archiers. Assez tost après la venue du roy, le comte de Dunois feit assaillir les boulleverts de Vaucelle, qui estoient sur la rivière

les

gens

d'Orne, près de la muraille de la ville de Caen, lesquels se tindrent longuement, mais en la fin feurent prins grande foison d'Anglois. A chacun logis du siége avoit mines jusques dans les fossés de la ville, et par espécial du costel devers le connestable, dont minèrent la tour et la muraille de debvant Saint-Estienne, tellement que le tout cheut et trébucha à terre, en telle manière, que les Franchois de dehors pouvoient combattre les Anglois en la ville main à main. Quant les Anglois se veirent ainsi approchiés de toutes parts tout allentour de la ville, doubtants qu'ils ne feussent prins d'assaut, requirent de parlamenter pour trouver leur traictié devers le roy.

CHAPITRE XXIX.

Comment ceux de Caen eurent leur traictié devers le roy, et comme ils lui délibvrèrent les ville et chastel où estoit le comte de Sombreset, lequel, sa femme, ses enfants et touts ceux de leur compaignie, feussent Anglois ou autres, s'en allèrent, leurs corps et leurs biens saufs.

QUANT le roy de Franche sceut que ceux de la ville de Caen requéroient parlamenter pour trouver leur traictié, icelluy roy, mectant Dieu devant ses yeux, regardant la pitié que ce seroit de destruire une telle ville, et de violer et piller les églises de Dieu, pour aussi eschevir (éviter) l'effusion de

sang de hommes, de femmes et de enfants, qui dedans euissent pu estre tués, se consentist de parlamenter à eux ; et la ville fust receupte à composition, jà-soit-que à la vérité il n'y avoit nulle apparence que s'il eust pleu au roy, que la ville n'euist esté prinse d'assaut sans nul remède; et euist eu après le chastel et le donjon; mais non pas sitost; car icelluy chastel est l'ung des forts de Normandie, garni de haye et grand boullevert de moult dure pierre, assis sur une roche, laquelle contient autant que la ville de Corbeil ou celle de Montferrant; et y a dedans un donjon très fort, fait d'une large et haute tour carrée de la fachon de celle de Londres ou du chastel d'Amboise, et environné tout autour de quatre grosses tours maçonnées depuis le pied des fossés jusques au haut à l'esgal de la terre, lesquelles tours sont moult hautes; puis est fermé de fortes murailles et hautes tout autour, selon la quantité des tours dessusdites. Dedans icelluy chastel se tenoient le duc de Sombreset, ses femme et enfants, et dedans la ville, messire Robert Vere, frère du comte de Melfort, messire Henry Reddefort, messire Enpausier (Despenser), Henry Seandre, Guillaume Carne, Henry lord Clogiet, Toucquet, Hocton, et plusieurs autres, lesquels estoient conduiseurs, pour le duc de Sombreset, de quatre mille Anglois pour la garde de la ville de Caen. Lesquels Anglois durant le siége s'assemblèrent par plusieurs fois et coururent sus aux Franchois; et ce feirent pareillement les Franchois sur les Anglois :

c'est à scavoir, pour le roy de Franche, le comte de Dunois, le séneschal de Poitou et plusieurs tres. Quant les Anglois sceurent que le roy estoit content de tenir parlement à eux et ceux de la ville, sy ordonnèrent, par l'octroy du roy de Franche, certain lieu pour parlamenter. Auquel lieu, pour le roy de Franche, feurent députés le comte de Dunois, le séneschal de Poitou, et messire Jean Bureau, thrésorier de Franche; et, pour les Anglois, messire Richard Ireton, bailly de Caen, Foucques Hecon, et Jehan Gages; et pour ceux de la ville, Eustasse Canivet, lieutenant du bailly, et l'abbé de Saint-Estienne de Caen. Lesquels, ensemble assemblés, parlamentèrent tant que le lendemain du jour de Saint-Jehan-Baptiste, fust le traictié faict par la manière que s'ensuit; c'est à sçavoir que les dessusdits Anglois promeirent de mectre les ville, chastel et donjon en la main et obéissance du roy de Franche, en dedans le premier jour de juillet, au cas que le roy de Franche et sa puissance ne seroient combattus des Anglois; et moyennant ce, le duc de Sombreset, sa femme, ses enfants, et tous les autres Anglois qui s'en voudroient aller, s'en iroient, eux, leurs femmes et enfants, chevaux, harnois et autres biens meubles; et avecques ce, pour les porter et mener, on leur bailleroit vaissaux et charroy pour les passer en Angleterre, et non ailleurs, à leurs despens, à telle condition que les Anglois délibvreroient touts prisonniers. Sy délibvreroient et laisse

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