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Cependant l'état de la Belgique n'avait jamais été aussi prospère. Si les charges étaient pesantes, le commerce avait peu d'entraves, et réparait les fautes de ceux qui gouvernaient. Comme nous avons essayé ailleurs d'esquisser le tableau des manufactures, du commerce, de la navigation et de la population aux Pays-Bas, durant le quinzième siècle, nous nous contenterons de ramasser ici tout ce que marque Du Clercq Du Clercq sur cette matière.

« Les nations de Bruges, dit-il, sont les mar>> chands tenant les tables de marchandises par » tout le pays chrestien . » Le dauphin vint à Bruges en 1457 V. S., avec le duc de Bourgogne. «< En laquelle ville de Bruges, ains qu'ils en» trassent ens, vindrent allencontre d'eux les na» tions qui se tenoient à Bruges, chacune nation >> vestue de diverses couleurs, tous en habits de >> soie et de velours; et les bourgeois pareillement; » et estoient, comme on disoit, bien huict cents

hommes, tous vestus de soie, sans autres riche» ment habilliés ; et tout le peuple qui issoit hors la >> ville pour veoir ledit monseigneur le dauphin. Et » pour certain, monseigneur le dauphiun'avoit onc» ques mais veu tant de gens qui issist de la ville; » et n'euist point cuidé comme à peu en euist au

1. T. II, ch. 43.

» tant en la comté de Flandres, au moins en la >> pluspart 1. >>

» serie

que

Nos manufactures de tapis jouissaient alors de la plus grande célébrité, et les progrès de la peinture apprenaient aux arts mécaniques à mettre plus de goût dans leurs productions. Durant son séjour à Paris, après le sacre de Louis XI, le duc de Bourgogne « feit tendre en sa salle de son hostel d'Ar» tois, et dedans les chambres, la plus noble tapisceux de Paris avaient oncques veue, » par espécial celle de l'histoire de Gédéon, que » ledit duc avoit fait faire toute d'or et de soie, » pour l'amour de l'ordre du Toison qu'il portoit, laquelle Toison Gédéon pria à Nostre-Seigneur » qu'elle fust mouillée, puis séchée, comme en la » Bible on le peut plus aisément veoir; et sur icelle >> avoit prins son ordre, et ne l'avoit voullu prendre » sur la Toison que Jason conquesta en l'isle de >> Colchos, pour ce que Jason mentit sa foi.

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>> Ledit duc feit aussi tendre l'histoire d'Alexan» dre et autres, plusieurs toutes faites d'or et d'ar>> gent et de soie; et pour la multitude qu'il en >> avoit, les faisoit tendre les unes sur les autres 2.»>

La ville de Dinant était réputée, selon Du Clercq, la plus riche ville que on sceuist, et la plus

1. L. III, ch. 27. 2. L. IV, ch. 33.

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forte . Il affirme ailleurs qu'elle surpassait Liége en force et en richesse, « car oncques n'avoit esté prinse ni gagniée, combien que plusieurs em» pereurs, roys et ducs y eussent mis plusieurs » fois le siége, et jusques à dix-sept siéges, à plu» sieurs et divers temps. Ceux de Dynant, de tout » temps avoient pillié leurs voisins, quand guerre » y estoit, et tout apporté à Dynant ; et se y faisoit» on les caudrelats et toute fondure de leton et » de métal de cuivre 2. >>

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Lille l'emportait encore : « A ce jour elle estoit » tenue une des villes du royaume où il y avoit plus de riches gens, de richesses et de grandeur ; » et y avoit grand peuple, hommes et femmes, >> moult gentement habilliés et pompeux, aussi dé» vots, et ung peuple moult ausmonier 3.

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Quelques faits laisseront apprécier cette richesse.

On avait alors des intendants à bon marché, si l'on s'en rapporte à Commines : « Ils ont des gou>> verneurs à qui on parle de leurs affaires, et à eux » rien : et ceux-là disposent de leursdites affaires; » et tels seigneurs y a qui n'ont que treize livres de » rente, en argent, qui se glorifient de dire:

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» Parlez à mes gens, cuidants, par cette parole, >> contrefaire les très grands seigneurs 1. » Le chevalier de Beaufort, véritablement grand seigneur, était riche de 5 à 600 francs de rente. Pierre du Carieuls, appelé très riche homme, en avait 4 ou 500, ce qui le fit accuser d'hérésie et de sortilège 2. Il est vrai que la fortune d'un particulier consistait en partie dans les redevances en nature, les corvées, et surtout l'argent comptant, dont on ne savait point encore tirer parti.

Dans l'année 1459, le mencaud d'avoine, mesure d'Arras, valait 16 ou 17 sous, ce qui faisait, pour la charge d'un cheval, 33 sous; et trois mois après août, la charge d'un cheval coûta 28 sous 3.

En 1460 << bled et avoine renchérirent très fort, » et valloit, la charge d'un cheval de bled, 40 » sols, monnoye d'Artois, et l'avoine autant; >> mais l'aoust venu, il rabaissa, et ne vallist le bled » que 24 sols la charge d'ung cheval, et l'avoine >> 16 sols 4.

à son

En 1460, «<on avoit fait crier de par le roy, » de trompe, parmi la ville de Paris, que nul pour » la venue du roy ni des seigneurs, sur grande

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>> amende, ne rencherist les vins, ni ne prinsist plus « de deux sols parisis pour la journée du cheval 1.«

Le franc de France, selon Du Clercq, valait 16 sous, monnaie royale, et 15 francs faisaient environ 11 couronnes d'or et demie 2; ailleurs Du Clercq dit que 6,000 francs d'or font 4,000 couronnes d'or 3. »

En 1451, 24 gros de Flandre valaient un demiécu d'or de France 5; or, les écus d'or, sous Charles VII, pesaient huit onces, à vingt esterlins par once. Ce qui est d'accord avec les auteurs de l'Art de vérifier les dates, qui disent que l'écu qui avait cours en 1435, et qui s'appelait à la couronne, était d'or fin, et de la taille de 70 au marc; ainsi les 50,000 écus payés à Philippe pour les équipages et joyaux qu'on avait pris à son père, quand on l'assassina, pesaient 714 marcs 2 onces 2 gros, 16 grains; et à raison de 828 liv. 12 sous le marc, donnaient 591,856 livres 6 sous 5 deniers 6.

Le duc Philippe fit compter aux ambassadeurs du roi de France qui s'étaient interposés entre lui

1. L. IV, ch. 33.
2. Ib., ch. 29.
3. L. III, ch. 19.

4. L. II, ch. 1.

5. L. III, ch. 31.

6. L'Art de vérifier les dates, T. XI, pag. 84, not.

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