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« Rien à mettre à la place! PRINCIPES DES RÉFORMES PROPOSÉES.

Sociologie du moyen âge et sociologie du xix siècle. La prostitution et la maladie ne sont ni des crimes ni des délits. Le commerce des sexes doit être libre comme la croyance religieuse et philosophique. L'arbitraire policier fait place au droit commun. - L'hôpital général remplace la prison et l'hôpital spécial.

CONSÉQUENCES DES PRINCIPES posés par la Commission municipale de la police des mœurs:

1o Abolition de la police des mœurs; suppression des maisons de tolérance, de l'inscription, de la visite obligatoire. Organisation de la police des rues au point de vue de la prostitution. 20 Réorganisation sanitaire.

3° Protection de la catégorie d'enfants qui deviennent les prostituées.

Telle est l'institution que le Conseil municipal a trouvée debout devant lui, et que la très grande majorité de ses membres républicains entend supprimer.

Tandis que les hommes de police pure et simple, des sous-ordres que le maniement bureaucratique et matériel des faits rend incapables de s'élever à

des vues sociologiques d'ensemble; tandis que des médecins sans autres guides que la routine professionnelle et peut-être aussi des soucis plus personsonnels encore, rêvent uniquement de rendre plus oppressif, en le renforçant de mesures nouvelles et en l'étendant plus largement sur la population entière, ce système de la réglementation, le Conseil municipal de Paris condamnait ces délirantes prétentions et dégageait la vérité du milieu de ce fatras de banalités prétendues hygiéniques, de pudibonderies mensongères et de pseudo-légalités basées sur les arrêtés des fonctionnaires de Louis XIV et de Louis XVI.

L'enquête de sa Commission spéciale avait fait ressortir ce résultat hygiénique! Le nombre des maladies est en raison inverse du degré de réglementation, parce que la surveillance administrative et l'internement dans la maison publique, qui est le régime de la surveillance à son maximum, interdisent le choix, donnent une fausse garantie, font peser sur le personnel des femmes une sorte de terreur qui les pousse à se cacher, quand au contraire elles auraient besoin de réclamer des soins: parce que la surveillance administrative enchaîne à la plus triste et inéluctable abjection des milliers d'êtres qu'une mort précoce par l'alcoolisme, la folie, la phtisie enlève fatalement en masse; parce qu'enfin les hommes malades restent un foyer permanent et ambulant de contagion que rien ne peut restreindre ni localiser.

L'enquête avait montré comment fonctionne le service du Dispensaire, au point de vue exclusivement médical, et d'après les médecins mêmes qui y sont attachés dans les grandes villes. Insuffisance numérique du personnel; nulle certitude dans l'examen. Plus les médecins ont de femmes à examiner, c'est-à-dire plus la surveillance administrative cherche à s'étendre, moins l'examen est sérieux; les femmes patentées deviennent ainsi un des éléments les plus actifs de la contagion.

Ici le système aboutit à ce résultat révoltant, qu'un cabinet médical devient le vestibule d'une prison.

L'enquête avait encore montré les conséquences immorales, illégales une police secrète assurant elle-même le recrutement de la prostitution en inscrivant des enfants, des jeunes filles sur ses registres; les poursuivant pour les ramener aux carrières quand elles s'échappent; leur refusant la radiation quand elles demandent la liberté; tous ces faits se produisant publiquement, journellement, sans qu'un seul mot dans nos codes autorise la Préfecture à les commettre!

Le Conseil, par l'organe de sa Commission, comprit qu'il avait le devoir de s'inspirer de principes sanitaires et de principes de droit public en rapport avec une hygiène rationnelle et un état social digne d'un pays républicain. Ce n'est pas dans le temps où les meilleurs esprits protestent contre les actes arbitraires auxquels a donné lieu la législation sur

les aliénés, où la partie libérale du parti républicain radical proteste contre le caractère arbitraire de la loi de transportation dite des récidivistes, où la réforme du Code de procédure criminelle et de toutes nos institutions pénales commence à se discuter, que cette assemblée démocratique a entendu couvrir de sa responsabilité les théories et les procédés administratifs trop chers à la Préfecture et indignes d'un pays civilisé.

Un des médecins qui ont critiqué le plus délibérément le projet de réforme municipale, M. Martineau, a fait cette observation étrange : « Ceux qui vont tout droit à la suppression de la police des mœurs n'ont rien à mettre à la place. » Bizarre mentalité d'un cerveau par ailleurs scientifiquement garni!

D

Le Conseil demande la suppression des illégalités, des ignobles abus commis par les hauts et bas agents de police; il demande la suppression de la prison de Saint-Lazare; il demande qu'on cesse de persécuter les femmes, de les traquer, de faire fuir les malades et il se trouve un esprit distingué pour demander, non sans sérieux, ce qu'on va mettre à la place de tout cela!

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Eh bien! puisque la question est posée de cette sorte, puisqu'il faut un commentaire littéral à des travaux qui cependant parlaient assez haut par euxmêmes et affirmaient des conclusions suffisamment intelligibles, nous répéterons que, par l'organe de sa Commission spéciale, la majorité du Conseil municipal,

- à la place de l'arbitraire et de l'illégalité représentés par le préfet de police à Paris et le commissaire central en province, a voulu mettre la loi, l'observance de la seule loi, du droit commun;

à la place d'une organisation officielle de débauche légalisée et patentée grâce à l'intervention complice de fonctionnaires et de médecins municipaux, elle a voulu accréditer ce sentiment public que le commerce des sexes- en dehors de l'enfant qui peut en naître, ou du dommage qui peut atteindre sans distinction de sexe un enfant physiologiquement mineur ne regarde pas plus la commune l'État; cela ne les concerne pas plus qu'un fait de croyance religieuse ou morale;

que

- à la place de tous ces dispositifs aussi barbares que ridiculement surannés qui osent, par l'inscription, la citation au Dispensaire, etc., confisquer la liberté de personnes, citoyens au même titre que le lecteur et l'auteur de ce livre, elle a voulu rétablir le self government individuel, le personal right, sans lequel le droit démocratique tout entier est une niaiserie de discours parlementaire;

- à la place de ces préjugés saugrenus et dangereux, entretenus par les pouvoirs publics et certains médecins qui font d'une maladie humaine une manière d'entité mystique, quelque chose comme une divinité vengeresse échappée d'une mythologie infernale, elle a voulu inculquer à l'opinion publique d'en haut et d'en bas une notion rationnelle et scientifique de ce chapitre de nosologie sexuelle;

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