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ments de terrains nous permettront d'assister à la découverte de nouvelles trouvailles, que nous ferons contrôler par des spécialistes, et nous répandrons alors un travail d'ensemble et définitif, qu'il était impossible d'essayer ici dans ces deux communications, qui ne doivent être considérées que comme deux inventaires.

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L'HISTOIRE DES VAUDOIS

(1489)

Par M. le docteur CHABRAND

Séance du 28 avril 1884

Messieurs,

Vers le milieu du XIIe siècle, les disciples de Pierre de Vaud ou Valdo, chassés de Lyon comme hérétiques, se dispersèrent dans toutes les directions. Ils se portèrent en grand nombre vers les Alpes et trouvèrent un refuge dans les vallées de Freyssinières, de Vallouise, de Pragelas, en Dauphiné, et dans celles de Pérouse, de Luzerne, de Saint-Martin, en Piémont, qui depuis sont connues sous le nom de Vallées vaudoises.

On a prétendu que Valdo était à leur tête, et qu'après les y avoir établis et s'être assuré qu'ils pourraient y vivre sans trouble, il les quitta pour aller rejoindre une autre troupe de fugitifs qu'il conduisit en Bohême, où il passa le reste de ses jours (1).

(1) Gilles, Histoire ecclésiastique des Eglises vaudoises, p. 7.

Les habitants des vallées alpines reçurent les réfugiés lyonnais avec beaucoup de bienveillance. Ils leur abandonnèrent la partie supérieure de ces vallées où se trouvaient encore beaucoup de terrains incultes, gardant pour eux les parties inférieures, plus agréables et plus productives.

Quelques années après, les Albigeois qui purent se soustraire à l'épée des croisés de Simon de Montfort et aux bûchers des inquisiteurs, se précipitèrent aussi vers les vallées vaudoises, soit parce qu'elles leur offraient des retraites encore peu connues où ils pourraient échapper aux regards de leurs ennemis, soit parce qu'ils savaient qu'ils y trouveraient les réfugiés Vaudois révoltés comme eux contre l'Eglise catholique.

Pendant de longues années, les Vaudois des Alpes purent vivre tranquilles dans leurs sombres retraites. Si, par hasard, l'autorité ecclésiastique avait quelquefois songé à les poursuivre, leur petit nombre, leur pauvreté, leur isolement les faisaient bientôt oublier. Il n'en fut plus de même lorsque ce nombre se fut accru par la multitude d'Albigeois qui vinrent leur demander asile. Ceuxci, conservant le souvenir des cruautés exercées contre leurs frères, à Albi et à Béziers; irrités d'ailleurs par la détresse où ils se trouvaient, dans ces vallées froides et stériles, si différentes des plaines fertiles qu'ils avaient été forcés d'abandonner, se montrèrent, en toute occasion, les ennemis jurés des catholiques, et toujours prêts à prendre les armes contre eux. Aussi, l'autorité civile et l'autorité ecclésiastique se trouvèrent dans la nécessité de sévir contre ces hérétiques, moins parce qu'ils erraient dans la foi, que parce qu'ils méprisaient les lois de la Société et qu'ils troublaient la tranquillité publique.

Les mesures prises contre eux furent autant une répression pour cause de révolte, qu'une persécution pour cause de religion.

Ce fut à la fin du XIIe siècle ou dans les premières années du XIII que commencèrent les poursuites contre les Vaudois. L'empereur Othon IV, allant se faire couronner à Rome, en 1209, donna à l'évêque de Turin l'autorisation de poursuivre, même par les armes, ceux du Piémont, parce qu'ils semaient la zizanie (').

Pendant le XIIIe siècle, les archevêques d'Embrun prirent fréquemment des mesures pour extirper l'hérésie des vallées de Freyssinières, de l'Argentière et de Vallouise.

En 1348, le Dauphin, Humbert II, ordonna expressément aux baillis du Briançonnais et de l'Embrunais de prêter main-forte à l'archevêque d'Embrun contre les Vaudois et autres hérétiques qui, dit Valbonnais, « pour « se mettre à couvert des poursuites qu'on faisait contre «eux partout ailleurs, se répandaient dans son diocèse, << pillant et brûlant les églises »>().

Depuis cette époque, des inquisiteurs furent envoyés à Embrun, à diverses reprises, pour procéder contre les Vaudois de Freyssinières et de Vallouise, dont plusieurs furent livrés au bras séculier et brûlés vifs.

Dans les dernières années du XIVe siècle, saint Vincent Ferrier, de l'ordre des Dominicains, pénétra dans les trois vallées vaudoises du diocèse d'Embrun, Freyssi

(*) Monumenta historiæ patriæ, t. III, col. 488.

(1) Valbonnais, Mémoires pour servir à l'Hist. du Dauphiné, p. 621.

nières, l'Argentière et Vallouise, avec l'intention de n'employer que les prédications, la prière et le bon exemple, pour ramener dans la voie du salut ces populations grossières et ignorantes, contre lesquelles on avait sévi jusqu'à ce jour. La véhémence et la simplicité de ses prédications, l'austérité de sa vie, ne tardèrent pas de produire des résultats inespérés. Les Vaudois qui, dès le début de sa mission, avaient tenté de l'assassiner, finirent par l'écouter et se convertirent en grand nombre. L'une des trois vallées que le saint missionnaire venait d'évangéliser changea son nom de Val-Pute en celui de Val-Pure qu'elle conserva jusqu'au règne de Louis XI, sous lequel elle reçut le nom de Val-Louise qu'elle a définitivement conservé.

L'apòtre de la Vallouise parcourut aussi la Savoie et les vallées vaudoises du Piémont; «il ramena dans le << sein de l'Eglise beaucoup de Vaudois et d'autres héré«tiques », comme il le raconte dans sa lettre, écrite de Genève en 1403, au général de son ordre (1).

Les Vaudois que saint Vincent Ferrier n'avait pu convertir, et ceux qui, convertis, revinrent à leurs erreurs, furent souvent inquiétés pendant le xv° siècle, soit par le Parlement de Grenoble, soit par les archevêques d'Embrun.

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́(') H. Bouche, Hist. de Provence, t. II, p. 427. Le souvenir de saint Vincent Ferrier ne s'est point effacé, dans ces contrées : sur le plus riant plateau de la vallée de la Gyronde, un village, PuySaint-Vincent, porte son nom. Un peu plus haut, s'élève une chapelle qui lui a été dédiée, vers laquelle se fait un grand concours de fidèles le lundi de la Pentecôte.

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