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couche de fausses membranes villeuses. La cavité péricardique contenait un liquide abondant (un litre environ) jaune. sale, purulent. C'est à cette masse énorme de liquide que doit être probablement attribuée la mort.

On peut se demander pourquoi un épanchement aussi considérable ne fut pas soupçonné en percutant la région précordiale. C'est que la zone de matité ne se différenciait pas sensiblement de la normale, pour la raison suivante : Les poumons droit et gauche étaient maintenus en place par les adhérences pleurales et les languettes antérieures ne se laissaient pas refouler par le liquide péricardique.

Cœur. Le cœur était petit, pâle à la coupe; les parois musculaires très atrophiées et flasques. Pas de lésions valvulaires.

Nous avons dit que la péricardite nous expliqua le earactère anormal apparent de la température pendant la pneu

monie.

On a remarqué en effet que, quand une péricardite survient au cours d'une maladie primitive, il arrive parfois que la température s'abaisse; ce fait s'observe surtout chez les vieillards et les individus débilités 1. Or c'est bien là le cas de notre malade, et on comprend pourquoi la température a commencé à baisser dès le troisième jour.

Ainsi, dans cette pneumonie, les symptômes subjectifs, frissons, point de côté, expectoration, ont manqué par suite de la très faible sensibilité du sujet.

Les signes donnés par la percussion furent négatifs et les signes stethoscopiques peu nets, à cause de la localisation du mal au centre du poumon. Quant à la température, nous venons de voir à quoi tenait sa courbe anormale en appa

rence.

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§ 5. Il nous reste, pour terminer l'autposie, à parler des organes abdominaux.

Le tube digestif, la rate, les reins, etc., ne présentaient rien de particulier, et arrivons au foie, à l'examen duquel nous fimes une nouvelle découverte intéressante. De volume normal, l'aspect et la couleur jaune étaient ceux d'une dégénérescence infectieuse et cachectique. Le lobe gauche portait à sa face supérieure une épingle implantée dans le tissu hépatique et dirigée de haut en

V. op. cit. t. V, Maladies du Cœur, par M. André Petit.

bas et d'avant en arrière. Cette épingle, sans tête, mesure 25 millimètres. Elle était enfoncée de 15 millimètres. Les 10 millimètres restant au dehors, pressés par le diaphragme à la surface du foie, y avaient déterminé une petite gouttière. Cependant, quand le foie fut retiré de la cavité abdominale, la partie extérieure de l'épingle ne resta pas couchée dans la gouttière, mais s'en écarta d'an millimètre à peu près. La portion cachée de l'épingle s'enfonçait très obliquement dans le tissu hépatique, la pointe étant dirigée sensiblement vers la colonne vertébrale.

Il fallut employer une certaine force pour retirer ce corps étranger. Il était contenu dans un trajet fistuleux cicatrisé a priori, formé de tissu fibreux, d'un aspect blanchâtre. Autour du point d'implantation, se voyait une aire, de diamètre très réduit, sur laquelle l'aspect du péritoine hépatique était dépoli, laiteus, traces d'une inflammation très restreinte. D'ailleurs, à aucun moment de la vie de T..., on n'avait observé de symptômes de péritonite.

Nous ne trouvâmes point sur le diaphragme de cicatrice décelant le passage de l'épingle; et, cependant, il est probable qu'elle avait traversé ce muscle avant de s'implanter dans le foie, étant donnée sa directien dans ce dernier.

Quels furent le point de pénétration de l'épingle dans le corps de T..., et le chemin qu'elle suivit pour arriver où nous l'avons trouvée ? Cela est difficile à établir de façon certaine1. On peut supposer que le malade s'introduisit ce corps étranger avec ceux que nous avons retirés de son phlegmon du tissu cellulaire au devant du grand pectoral gauche (§ 1). En admettant ce point d'entrée, comment l'épingle descenditelle ensuite jusqu'au diaphragme? Glissa-t-elle en avant des côtes, ou bien en arrière? C'est ce que nous ne pouvons décider.

III. Etat mental. § 1. Les renseignements très brefs donnés par le médecin de son pays, signalent T... comme maniaque, jaloux, violent, depuis quelque temps. A la maison de secours de Nancy, où il a passé plusieurs jours avant son internement, il eut des accès d'agitation violente « qui le rendaient dangereux pour lui-même et pour son entourage ».

A son entrée à Maréville, T... parait triste, son attitude est déprimée. Il est calme au début, cependant ne tarde pas à s'exciter et à s'agiter. Il répond assez volontiers aux questions

'L'orientation de l'épingle ne permet pas d'admettre qu'elle ait été

avalée.

qu'on lui pose. Son intelligence est peu développée, son caractère fort niais. C'est ainsi que, très émotif, il se met tout à coup à pleurer en demandant à retourner auprès de ses enfants; mais il s'apaise facilement et se met à rire si on lui adresse quelque compliment sur lui-même, car il est très content et a haute idée de soi il n'y a pas d'ouvriers qui gagnent plus, il est bon gars, etc. Au bout de quelques jours, durant lesquels il s'était tenu dans une réserve presque complète au sujet des événements qui traversèrent son existence avant sa mise en observation, T... se décide enfin à parler et raconte les faits suivants, qui montrent bien les troubles profonds survenus dans son intelligence déjà anormale et débile originairement.

T... se croyait en butte aux persécutions d'une vieille femme habitant la même maison que lui. Dans cette maison, se trouvaient encore d'autres personnes, chez lesquelles un cœur de boeuf était suspendu au plafond, ce qui l'intriguait beaucoup.

I alla trouver « une dormeuse >> et lui demanda conseil. Celle-ci lui apprit que le cœur était destiné à le faire mourir, mais que s'il parvenait à couper la ficelle qui le retient, tout danger serait écarté.

Malgré l'opposition du propriétaire du cœur, T... peut accomplir la recommandation de la dormeuse. Mais tout n'est pas fini. Il se sent travaillé intérieurement, une force le pousse à sortir de chez lui et à battre la campagne. Il est à ce moment fortement halluciné et ne cesse d'entendre des voix qui sont, explique-t-il, celles de démons familiers et bienveillants.

Pour se délivrer des démons malveillants qui le travaillent intérieurement, il entre dans une église et prend de l'eau bénite. Une voix lui dit : « Vous êtes délivré, vous êtes délivré... » Néaumoins, il entre encore dans diverses maisons et demande de l'eau bénite. Il finit par en obtenir et accomplit ce qu'une voix lui commande, c'est-à-dire qu'il brûle un mouchoir que sa femme lui a mis dans la poche, et l'arrose d'eau bénite.

Dans ces pérégrinations, il rencontre un M. D..., qui est le bon Dieu et qui le délivre, et aussi un homme à cheval; cet homme est sa femme, qui a le pouvoir de se métamorphoser.

Par la suite de son séjour à l'asile, les hallucinations demeurent aussi intenses. Il voit et entend une vierge blanche; c'est elle qui le retient enfermé à Maréville; par moments, il lui répond et l'injurie grossièrement. T... n'est d'ailleurs pas seulement exubérant en paroles, mais aussi en actions; il se livre à toutes sortes d'extravagances, entre autres avale des cailloux pour faire sa digestion. D'après ce qui précède, le diagnostic de notre malade est Dégénérescence et débilité mentales originaires, avec idées délirantes polymorphes (culpabilité, persécution, mysticisme, satisfaction personnelle exagérée), hallucinations de la vue et de l'ouie.

$ 2.

Il a été dit au commencement de cette observation, que T... s'était introduit sous la peau, au-devant du grand pectoral gauche, plusieurs corps étrangers, allumette, mine de crayon, fragment de bois, sans compter l'épingle. Sous quelle inspiration agit-il, et quel était son but?

Malgré notre insistance à le lui demander, nous ne pûmes obtenir de réponses satisfaisantes. Ce qui est évident tout d'abord, c'est que, l'état de sensibilité très amoindrie qui était le sien, fut la cause occasionnelle de l'automutilation qu'il accomplit.

Quant à en déterminer la cause efficiente, nous ne pouvons que faire des suppositions à ce sujet. Il faudrait d'abord savoir si T... s'est introduit les corps étrangers dans le phleg. mon déjà existant, ou s'il a pratiqué à la peau saine, par le moyen de l'épingle, une boutonnière au travers de laquelle il a ensuite glissé les autres objets, et a ainsi déterminé le phlegmon.

Dans le premier cas, il se pourrait que son but eut été de se guérir par ce moyen bizarre; mais ceci semble peu probable. Les automutilateurs obéissent le plus souvent à des idées délirantes; les uns veulent se punir des crimes qu'ils croient avoir commis; d'autres pensent se soustraire aux persécutions. Dans certains cas, les automutilations peuvent être encore simplement le résultat, les manifestations du désespoir du malade qui s'arrache les cheveux, et qui, grâce à l'anesthésie, peut se livrer sur lui-même à d'autres mutilations. Souvent aussi, il est impossible de comprendre quelle relation lie l'idée délirante à la mutilation. Aussi, dans une observation de Krafft-Ebing, un malade qui a vu la sainte Vierge se mord le genou à l'endroit où elle s'est assise, pour qu'elle réapparaisse. Nous avons vu à Maréville un malade. se dévorer complètement les lèvres, et dire qu'il faisait cela, parce qu'il était emmené dans le soleil et les astres.

On voit qu'il est difficile de déterminer exactement la cause d'une automutilation, mais qu'elle doit être recherchée dans une idée délirante (mystique, de persécution, de culpabilité...)

Chez notre malade, en raison de son délire essentiellement polymorphe, et en l'absence de toute indication, la cause

1

V. von Krafft-Ebing, Traité de Psychiatrie, p. 360.

occasionnelle seule nous est connue, c'est l'amoindrissement de la sensibilité.

En cet état, T... a peut-être obéi à une voix? Peut-être a-t-il voulu se délivrer des mauvais génies qui étaient en lui? Peut-être a-t-il voulu se punir de fautes dont il se croyait coupable? Voilà, quant à la cause efficiente de sa mutilation, ce que nous pouvons supposer.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

XXVII. Des inégalités pupillaires produites par l'action différente de l'éclairage direct et de l'éclairage indirect; par A. PICK. (Neurolog. Centralbl., XIX, 1900.)

Dans la réaction des pupilles, il faut tenir grand compte de la situation de la source de lumière. Ainsi, avant tout, chez le neurasthénique et l'épileptique, puis dans les cas de psychoses fonctionnelles, notamment à la suite d'accidents, il n'est pas du tout rare d'observer une inégalité pupillaire défavorable à l'œil placé le plus près de la fenêtre. C'est que le sujet est éclairé latéralement. Le place-t-on de façon que l'autre pupille qui vient d'apparaitre la plus large soit la plus rapprochée de la fenêtre, c'est elle maintenant qui semble plus étroite que la première, actuellement la plus éloignée de la baie. Cette inégalité pupillaire se produit alternativement à volonté; il suffit que l'éclairage porte uniformément sur les deux yeux en même temps pour qu'elle disparaisse à son tour. Il s'agit d'individus à pupilles très mobiles, réagissant énormément sous de très faibles différences de lumière, qui présentent une sorte d'hyperesthésie de l'appareil centripete; peut-être aussi y a-t-il simultanément exagération de fonction de l'appareil centrifuge (Bach, Elschnig, Pick). P. KÉRAVAL.

XXVIII. De la valeur du réflexe scapulo-huméral; par W. de BECHTEREW. (Obozrénié psichiatrii, V, 1900; Neurolog. Centr., XIX, 1900.) Même article en russe et en allemand. C'est une réponse à M. Haenel (Neurolog. Centralbl., 1900). A la suite de la discussion, l'auteur établit que la recherche de ce réflexe peut être utile, non seulement pour le diagnostic différentiel entre l'atrophie scapulohumérale d'origine cérébrale et l'atrophie scapulo-humérale d'ori

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