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sa vision; jamais il n'a manifesté la moindre émotion à ce sujet. Son état morbide n'avait, semblait-il, pas pénétré dans sa conscience. Il dit un jour à un serviteur : « Allumez la lumière, il fait tout à fait sombre ».

c) Il percevait sans comprendre ce qu'il percevait. Comme il se fatiguait intellectuellement assez vite, comme on ne pouvait soutenir son attention longtemps, il était impossible d'analyser la perturbation de la personnalité. Les fonctions d'association étaient probablement troublées; à certaines sensations et impressions sensorielles ne se rattachait aucune ou ne se rattachaient que peu des idées habituelles et, par suite, ces sensations, ces perceptions ne faisaient plus aucune impression sur lui. Ainsi s'expliquerait et le défaut de toute réaction émotive et l'absence d'initiative, de vivacité d'esprit. Ce n'était pas un apathique, un indolent dans le sens ordinaire du mot, car il répondait généralement promptement et correctement dans un ton enjoué, avec assaisonnement de plaisanteries. Il était encore capable de renseigner vite et justement sur ses affaires et sa personne, de prendre des décisions correspondantes judicieuses, pourvu qu'il s'agit de choses se rapportant au passé. Seulement l'intelligence se fatiguait excessivement vite, de sorte qu'au bout de peu de temps il devenait inattentif, distrait, et souvent alors somnolait et même s'endormait profondément.

d) Fort humoristique, il faisait volontiers des remarques ou tenait des propos à prétention spirituelle, qui sentaient les farces des garçons cordonniers de Berlin. Ceci contrastait avec l'état piteux du malheureux. Il avait en réalité conservé l'habitude de railler, comme au temps de sa splendeur physique, où il employait volontiers le jargon berlinois, parce qu'il ne s'apercevait pas de sa triste position.

e) Le caractère, irritable dans les premiers temps, le 'poussait à envoyer aisément promener les gens; il perdait vite patience. Plus tard, il était devenu d'une douceur, d'une insouciance remarquables.

L'état des yeux est tout aussi intéressant. L'étude anatomique indique une névrite optique compliquée de nombreuses hémorragies dans la papille et la rétine, et non une papille étranglée ordinaire, compliquée d'hémorragies. Quoi qu'il en soit, il est impossible de la rattacher aux foyers de ramollissement; il n'existe pas ici de névrite optique descendante, et rien n'est en faveur d'une infection. Rien non plus ne permet d'admettre une névrite optique vraie. Il y avait donc en l'espèce simple coïncidence de foyers de ramollissement frontaux et de névrite optique bilatérale compliquée d'hémorragies.

La cécité et l'état du fond de l'œil qui, au début, pouvait fort bien représenter les premiers signes de la papille étranglée, firent,

de concert avec les accidents cérébraux, d'abord penser à une tumeur cérébrale. L'évolution fit abandonner ce diagnostic. Plus tard, les phénomènes cérébraux et leur marche imposèrent l'idée du foyer de ramollissement siégeant très probablement dans le cerveau antérieur. L'état des yeux ne s'y rattachait plus. On opina pour l'indépendance de l'affection cérébrale et de l'affection oculaire, ayant cependant pour cause commune l'athérome ou la thrombose des vaisseaux. Les nombreuses hémorragies à disposition spéciale qui siégeaient à l'intérieur et au pourtour de la papille proéminente firent soupçonner l'existence d'une éventualité rare, de la thrombose bilatérale de la veine ophtalmique. L'autopsie montra qu'il n'en était rien, qu'il s'agissait d'une névrite optique qui avait occasionné l'erreur de diagnostic en question à cause des hémorragies nombreuses occupant la papille et la rétine.

Cette observation doit en cette manière être rapprochée des exemples d'affection cérébrale ou spinale compliqués de névrite optique, dans lesquels on n'a pu constater à la genèse de la névrite optique de cause plausible, infectieuse ou autre; on en trouve dans la bibliographie. P. KERAVAL.

Kyste dermoïde du cerveau; par le professeur J. HALVA.

L'auteur décrit un cas de kyste dermoïde, qui siégeait dans le lobe temporal et frontal de l'hémisphère droit chez un homme, épileptique, de quarante-six annéées. Le kyste dermoïde, était rempli de touffes de poils et de masses graisseuses. A l'examen microscopique, l'auteur trouva, que les parois du kyste étaient couverts d'épithélium pavimenteux sur une couche de tissu conjonctif scléreux, qui contenait çà et là du tissu osseux, des glandes séborroïques. Une trouvaille remarquable était un tissu, qui était composé de fibrilles sclérotiques et des cellules ressemblant à des cellules musculaires striées, comme on les trouve dans le rhabdomyoma cordis. Il s'agit donc d'un reliquat du cœur.

Vu ces tissus différents il ne s'agit pas d'une inclusion seulement de l'épiblaste, mais d'un enclavement de l'épiblaste et du mésoblaste appartenant à un deuxième fœtus. On ne peut pas caractériser ce kyste comme un kyste dermoïde simple, mais il faut le classifier d'après le procédé de Wilms et Marchand comme une tumeur tératoïde, c'est-à-dire comme un embryoma dermoïdal.

Le premier cas d'un kyste dermoïde du cervelet était publié par Clairat (Gazette des hopitaux civils et militaires, no 42, 1838). — Un fait pour ce temps si bizarre, que la rédaction croyait nécessaire à ajouter sous la ligne : « Nous publions ce fait sous la garantie personnelle de l'auteur et sans oser nous prononcer en aucune manière ». D'autres cas de tératomie ou de kystes dermoïdes du cer

veau ont été publiés par R. Maier Wood, Bathorst, Irvine, Strassmann et Strecker, Tannenhain, Przewosky, Saxer, y non compris les cas de kystes dermoïdes, qui se trouve dans la pie-mère cérébrale ou dans l'hypophyse ou dans la glande pinéale. (Archives Bohèmes de médecine clinique, a, 1902, t. III, fascicule 4).

SOCIÉTÉS SAVANTES.

SOCIÉTÉ DE NEUROLOGIE

Séance du 5 juin 1902.

Présidence de M. GOMBAULT.

Sur un cas de surdité verbale pure.

MM. DEJERINE et THOMAS présentent un jeune garçon de onze ans, atteint de troubles de l'audition depuis six mois et de troubles de l'équilibre depuis deux mois, avec surdité verbale pure. Le père était alcoolique, l'enfant est intelligent mais nerveux, l'acuité visuelle est diminuée, il y a une ébauche de signe de Romberg et une légère altération de l'écriture. L'acuité auditive est normale, le bruit de la montre est entendu à une distance raisonnable, la conduction osseuse des sons est normale, l'orientation des bruits est normale aussi, l'enfant va ouvrir quand on sonne, comprend ce qu'il lit, comprend les jeux de physionomie, lit sur les lèvres ce qu'on lui dit, écrit facilement, mais ne comprend pas ce qu'on lui dit oralement. L'audition verbale seule est abolie. Il ne comprend plus que le mot Gustave qui est son prénom.

Les troubles de l'équilibre s'accentuent pendant le mouvement et l'attirent en oscillations en avant et en arrière surtout en montant un escalier. Dans les yeux,'il n'existe qu'un peu de pâleur de la pupille, le champ visuel est normal. Il n'y a pas lieu de voir dans ce cas une surdité verbale fonctionnelle hystérique ni traumatique, bien que le sujet ait reçu près de l'oreille, il y a quelque temps, une pomme de terre lancée avec vigueur. S'agit-il d'une surdité verbale organique corticale, sous-corticale ou labyrinthique? les symptômes ne permettent pas de préciser. Il n'y a pas de vertige galvanique, mais les réactions vestibulaires sont intactes, il n'y a pas de signes cérébelleux, pas de paraphasie,

rien qui permette un diagnostic certain. L'origine organique semble seule pouvoir être affirmée sans plus ample explication.

M. BRISSAUD Comptait justement présenter lui-même ce malade qu'il a examiné avec M. Bonnier et M. Péchin. Ce dernier a trouvé chez le patient une atrophie papillaire bi-latérale intense.

M. BONNIER, invité à parler, bien qu'étranger à la Société, a trouvé chez ce malade des lésions labyrinthiques anciennes, très accusées, et des lésions assez intenses de l'oreille moyenne avec paracousie marquée, surtout à gauche. L'enfant est obligé de faire effort pour entendre et comprendre, il saisit encore quelques mots et lit facilement sur les lèvres. Il y a chez lui des phénomènes suspensifs plutôt que des phénomènes de déchet organique. Les lésions oculaires qu'il présente correspondent aux lésions auriculaires anciennes qu'elles accompagnent souvent. Néanmoins les lésions labyrinthiques ne suffisent pas pour expliquer la surdité verbale pure. Il n'y a d'autre part aucun trouble du langage intérieur. Les lésions périphériques jouent en tout cas un grand rôle dans ce cas.

M. BABINSKI. L'examen voltaïque du vertige étant négatif, il y a une lésion bi-auriculaire.

Facies de Sphinx dans la myopathie.

MM. Gilbert BALLET et DELHERM montrent deux malades affectés de myopathie chez lesquels on constate un facies assez particulier produit par l'élargissement de la base du cou, élargissement bilatéral chez le premier malade, unilatéral chez le deuxième. Cet élargissement dépend de la saillie du muscle trapèze, saillie qui paraît tenir elle-même à la prédominance d'action du faisceau supérieur (claviculaire) du muscle par suite de l'atrophie des faisceaux inférieurs.

Le cou ressemble à celui des statuettes égyptiennes, particulièrement du Sphinx, le trapèze rappelant l'aspect des bandelettes latérales qui, dans les statuettes en question, tombent de la coiffure. C'est la raison pour laquelle les auteurs proposent de désigner ce facies particulier de certains myopathiques sous le nom de facies de Sphinx.-MM. DÉJERINE et MARIE: C'est la forme classique du cou dans les myopathies.

Préparations d'un cas de névrite hypertrophique.

MM. DÉJERINE et THOMAS. Les symptômes ont été ataxie avec atrophie musculaire et scoliose. La moelle épinière avait conservé son volume normal, il y avait des lésions des faisceaux de Burdach dans la région dorsolombaire et du cordon de Goll dans la

région cervicale. Les racines étaient molles, gélatineuses, lardacées; les nerfs périphériques étaient gros et durs. Les racines étaient faciles à dissocier, les nerfs résistants. Dans les racines, l'hyperplasie conjonctive n'est pas le principal phénomène, le rôle important est dévolu à la multiplication des tubes nerveux comme dans un véritable névrome. Dans les nerfs périphériques au contraire, l'hyperplasie conjonctive est énorme et les tubes, nerveux sont très raréfiés. L'affection était familiale et, fait curieux, le phénomène d'Argyll-Robertson existait chez les trois malades atteints dans la famille, bien que pour l'un d'eux l'absence de syphilis fut prouvée. La névrite hypertrophique serait donc la seule affection pouvant donner le signe d'Argyll sans syphilis.

M. MEUNIER Communique un cas d'atrophie musculaire progressive, avec contractures transitoires d'un membre.

MM. EGGER et DEJERINE Communiquent deux cas de paralysie radiculaire par arrachement, compliquée d'hématomyélie.

Sensibilité osseuse décelée par le diapason.

M. EGGER présente le diapason avec lequel il recherche la sensibilité osseuse et qu'il considère comme l'irritant spécifique des os. Les vibrations du diapason atteignent ceux-ci sans impressionner les parties molles interposées. Une tabétique dont la peau est demeurée sensible ne sent pas le diapason appliqué sur le tibia; au contraire, une malade atteinte de paraplégie spasmodique et qui a perdu toutes les autres sensibilités, a conservé sa sensibilité osseuse au diapason (ce qui expliquerait la non-flaccidité de sa paralysie). Il y a donc dissociation possible des autres sensibilités et de la sensibilité osseuse.

M. DUFOUR. En effet, la cocaïne qui anesthésie tous les autres tissus, n'anesthésie pas les os.

M. TOUCHE montre les pièces d'un cas d'hémiplegie infantile avec athélose.

M. BRISSAUD présente un doigt à ressort très caractérisé chez un névropathe. Les chirurgiens n'ont-ils pas tort d'avoir, après tant d'autres choses, accaparé le doigt à ressort.

Marteau automatique et gradué.

M. Maurice DUPONT présente un petit appareil qu'il a expérimenté dans le service de clinique de M. le professeur Joffroy pour la recherche et la mesure des réflexes tendineux. Cet appareil, à percussion automatique et graduée 1, se compose d'un petit mar

Cet appareil a été construit sur les indications de M. Dupont par la maison Mathieu.

ARCHIVES, 2 série, t. XIV.

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