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Annon, archevêque d'Arles, fonda près de la bourgade de Fos une abbaye où il établit des Bénédictins sous la direction du moine Pacion ou Pacéon. Le Pontificium Arelatense (1) parle de cette nouvelle maison, d'après des indications puisées dans un vieux recueil manuscrit de documents sur l'église d'Arles, portant la date de 978. Le cartulaire de cette abbaye constate qu'elle passa dans la suite du temps aux moines de Cluny. En effet, en l'année 1084, Rostaing de Fos, archevêque d'Aix, et avec lui Amiel, son frère, ainsi que ses neveux Pons, Raimond, Gui, Geoffroy et Bertrand, firent don à Hugues, abbé de Cluny, du monastère fondé dans leurs terres patrimoniales par ceux de leur maison en l'honneur des SS. Gervais et Protais, dans le territoire de Fos « in territorio castri quod Fossas dicunt, ad mare (2). » Parmi les signataires de l'acte de donation figurent Bertrand, comte de Provence, Amiel, sa femme et ses fils. Ces derniers, à la mort de leur père, confirmèrent la cession précédente au même Hugues et à Yves, moine de Cluny. La maison de Fos devient ensuite un simple prieuré ; mais, peu après, elle reconquiert son autonomie, et se donne comme jadis un abbé particulier. Les papes Serge IV (3), Paschal II (4) et

(1) Page 193. L'acte de fondation et au livre noir f. 42, livre rouge 351 v. avec la date de 989.

(2) Ruffi pense que si la maison de Fos est issue des vicomtes de Marseille, comme l'admettent certains généalogistes, elle ne peut se rattacher qu'à Pons Ier, puisque Pons de Fos, qui en est la souche, vivait à la fin du Xe siècle. Cette famille a possédé, outre les marquisats de Fos et d'Hyères, la terre de Bormes, qui passa au XVe siècle, par alliance à la maison de Grasse, et celles de la Molle et de Collobrières que recueillirent les Boniface, en 1424, par suite du mariage de Jean de Boniface avec Batrone de Fos. (Histoire de Marseille. Tom. 1, p. 86).

(3) Lettre de 1110 à l'abbé Jausserand.

(4) Lettre de 1130 à l'abbé Guillaume. On trouve aux archives départementales, Liv. rouge d'Arles fol. 345, une_bulle d'Honorius III unissant les églises de Saint-Sauveur de Fos et de SaintGervais.

Innocent II lui reconnurent le droit de posséder des biens et des églises. Plus tard l'abbaye fut restituée aux moines de Cluny par Guillaume, seigneur de Montpellier, peut-être à l'occasion de la vêture de son fils Raimond. Innocent II acquiesça à cette restitution en 1139, et voulut que la maison de Fos, faisant retour à Cluny, fut érigée en abbaye. Selon Chantelou, le rescrit du pape ne reçut pas d'exécution parce qu'il fut rendu sans l'assentiment de l'archevêque et du chapitre d'Arles. Cependant on cite les noms de plusieurs abbés de St-Gervais. Toutefois l'abbaye de Fos ne subsista plus longtemps: un petit nombre de prêtres séculiers s'y établirent à la place des moines, et les revenus furent attribués aux archidiacres d'Arles. Chantelou dit que ces dignitaires en jouirent jusqu'à l'époque où il écrivait, mais, en fait, ceux-ci ne les conservèrent que fort peu de temps, et le bénéfice en fut dévolu aux prévôts de l'église primatiale (4).

Outre ces divers monastères on en voyait encore un autre dans l'enceinte même de la ville d'Arles; Louisle-Débonnaire et Charles-le-Chauve en assurèrent la possession à l'abbaye d'Aniane.

Il y avait aussi à Beaucaire un chapitre fondé à la fin du XVIe siècle par le duc de Montmorency, dépendant de l'abbaye de la Case-Dieu (2).

A une faible distance de la même ville de Beaucaire. au sommet d'une colline, se trouve le château de SaintRoman auprès duquel est une église desservie autrefois par les moines de Psalmody.

Chantelou ne parle pas d'Ulmet et Silve-Réal, aussi

(1) Pour le monastère de Fos, v. Gallia Christ. Tome I p. 600 n° VI.

(2) La Case-Dieu, dioc. d'Auch, appartenait à l'ordre de Prémontré.

voisins d'Arles. L'abbaye d'Ulmet (1) fut fondée au XIe siècle par des moines cisterciens de celle de Valmagne, diocèse d'Agde, près de la chapelle de N.-D.-d'Ulmet en Camargue, que leur abandonnèrent les religieuses de Saint-Césaire.

Ulmet n'eut qu'une existence assez éphémère. Sa réunion à Valmagne, décrétée déjà en chapitre général en 1299, reçut son effet en 1437 (2). Avant cette réunion, l'abbaye avait été transférée au lieu appelé SilveRéal, sur la lisière de la Silve ou Pinède d'Albaron, donnée à l'ordre de Citeaux par Alphonse Ier d'Aragon et confirmée à l'abbé d'Ulmet par Alphonse II en 1496. Les religieux de cette abbaye eurent avec les Templiers de longues contestations sur le territoire appelé le Clamador. L'intervention de l'archevêque d'Arles, Imbert d'Aiguières y mit une heureuse fin en 1204 (3).

Le Gallia Christiana (4) cite encore les monastères de Saint-André en Camargue donnés par Manassès, archevêque d'Arles, à Drogon, évêque de Marseille, et de Sainte-Marie de Pierredon, de Podio rotundo, fondée par Boscodon et Chalais et devenu simple prieuré rural dès le XIVe siècle.

Après avoir énuméré ces diverses maisons, Chantelou aborde enfin le sujet de son ouvrage, l'histoire de Montmajour.

(1) V. Gallia Christ. tom. Ier. Instrum. eccles. Arelat., n. 37, 38 et 39.

(2) Une lettre de l'archevêque d'Arles, Gaillard Saumate, du 26 mars 1320, nous apprend que cette réunion fut prononcée parce que « dictus locus Silvæ-regalis non haberet sufficientes reddi«tus seu prouentus competentes pro sustentatione idonea seu congrua honoris et oneris abbatiæ et conventus ejusdem.. Gall. Christ., I, instrum. eccl. Arelat. XXXIX.

(3) Pour Ulmet et Silve-Réal, v. Gall. Christ., I, 624. (4) Tom. I, 601.

Origines de Montmajour.

II

A qui doit-on en attribuer

la fondation?

Dès l'abord se présente une question fort controversée doit-on attribuer à Childebert la fondation de cet illustre monastère? L'honneur en reviendrait-il plutôt à Charlemagne ?

Selon certains auteurs, Childebert, fils de Clovis, chassant un jour aux environs des montagnes de Cordes et de Montmajour « y trouva une grande troupe de « bons religieux qui vivaient fort austèrement parmy « les bois, sous la règle et discipline de saint Césaire... «< ce qui esmeut le roy à dévotion; et leur fit bastir dans

la montagne une maison pour leur retraicte..... (1) » Cette opinion, qu'aucun fondement n'appuie, a tous les caractères d'une légende. Comme nous l'avons vu naguère, Saxi, induit en erreur par un mot, a été amené à considérer le monasterium insulæ suburbanæ comme le berceau de notre abbaye, et à dire qu'après sa ruine par les Goths, saint Hilaire le fit réédifier non plus sur l'ancien emplacement qu'il occupait, mais au MontMajour. Longtemps après, les Sarrasins devenus maîtres d'Arles, auraient détruit dans les environs de cette ville tout ce qui pouvait servir de défense à leurs enne

(1) Bouis, la Royale Couronne d'Arles, p. 66. - Cf. La Lauzière, Abrégé chronol. de l'Hist. d'Arles, p. 80. Cette légende prend une forme plus précise encore dans un manuscrit arlésien du commencement de ce siècle, intitulé Abrégé chronologique et historique des abbesses de Saint Césaire et des abbes de Montmajour, par Viala, M. L. de Crozet a bien voulu, avec son obligeance si connue, nous communiquer cet ouvrage appartenant à sa magnifique bibliothèque. L'auteur de l'Abrégé dit, sans cependant en fournir de preuve, que, le 25 avril 542, Saint Césaire, archevêque d'Arles, consacra avec pompe l'église Saint Pierre et prescrivit aux religieux la règle de Saint Cassien. Il ajoute même que le premier abbé s'appelait Paul, mais ne cite après lui aucun autre nom jusqu'à Mauringus, par lequel Chantelou commence sa liste.

mis, et en particulier le monastère de Montmajour, dont ils comprenaient l'importance stratégique. Chassés par Charles Martel et Luitprand, ces barbares renouvelant leurs attaques contre la ville d'Arles auraient été vaincus par Charlemagne. Après leur défaite, ils se seraient retranchés dans de fortes positions, mais, poursuivis dans ce dernier asile, ils auraient été exterminés par ce prince qui voulut perpétuer le souvenir de sa victoire sur les ennemis de la Croix sur le théâtre même de son triomphe. Cette opinion s'étaie sur une antique inscription qu'on lit encore aujourd'hui dans la chapelle de Sainte-Croix au pied de la montagne : « Qu'il soit connu de tous que le très-illustre prince « Charlemagne, roi des Francs, ayant mis le siége de<< vant la ville d'Arles tombée au pouvoir des infidèles, «<et s'en étant rendu maître, poursuivit avec son armée « ces barbares qui s'étaient retirés sur les hauteurs de << Montmajour et s'y étaient fortifiés, remporta sur eux « une éclatante victoire, et, en reconnaissance de ce << triomphe comme pour en perpétuer le souvenir, a a fait consacrer cette église en l'honneur de la Sainte« Croix, a relevé de ses ruines le monastère de Saint« Pierre entièrement détruit par les infidèles, l'a repeu«plé de moines, lui a assigné de nombreuses dotations « et l'a comblée de ses dons. Beaucoup de Francs tom«bés dans le combat ont été ensevelis dans ce monas«tère. Frères, priez pour eux ! » (4)

(1) ◄ Noverint universi quod cum serenissimus princeps Carolus Magnus Francorum Rex civitatem Arelatem, quæ ab inflielibus detinebatur, obsedisset, et ipsam vi armorum cepisset, et Saraceni in eadem civitate existentes pro majori parte aufugissent in montanea Montis-majoris et ibidem se retraxissent, et in eadem se munivissent, et idem Rex cum exercitu suo veniens, pro ipsis debellandis (et ipsos debellando) triumphum de ipsis obtinuisset, et de ipso gratias Deo agendo in signum hujusmodi victoriæ præsentem ecclesiam in honorem Sanctæ Crucis dedicari fecit, et præsens monasterium in honorem Sancti Petri Apostolorum principis dedicatum, quod ab ipsis infidelibus penitus des

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