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le premier Consul qui venait de sortir d'exercice, enfin un député de la même ville sans voix délibérative.

Dans cette assemblée devaient se trouver quatre commissaires : le commissaire principal ou extraordinaire nommé par les présidents pour le Roi aux états-généraux; trois commissaires ordinaires : le Viguier d'Albi, le premier Consul d'Albi et le Consul de l'une des trois villes de Gaillac, Rabastens ou Cordes. Il y avait, comme aux états-Généraux, un syndic et un secrétaire-greffier. En 1542, il fut arrêté que pour accélérer l'expédition des affaires, il y aurait deux syndics, l'un à Albi, l'autre à Gaillac.

Après la cérémonie religieuse, célébrée suivant l'ancienne coutume dans l'église de St.-Julien, les états-particuliers du diocèse d'Albi se réunissaient dans la maison consulaire qui était attenant (1). Le secrétaire faisait l'appel des députés et donnait lecture de l'ordre de convocation, des commissions et des ordonnances relatives aux impositions. Après quoi, l'assemblée arrêtait que l'impôt serait réparti sur tous les taillables du diocèse en la forme accoutumée, examinait les affaires qui lui étaient soumises et procédait à la nomination du syndic, du greffier, d'un commissaire spécial chargé d'ouïr et d'arrêter les comptes du receveur, enfin des membres du bureau des comptes auquel elle renvoyait toutes les affaires, demandes ou réquisitions, lui donnant plein pouvoir de délibérer, décider et ordonner tout ce qu'il jugerait utile, et de faire sur les communautés le répartement des sommes imposées.

Ce bureau des comptes, présidé par l'évêque, était composé du député de l'église de Ste-Cécile et alternativement du prévôt ou du député du chapitre collégial de St.-Salvi, de celui de l'abbé de Gaillac ou de Candeil. Le baron de Castelnau, (plus tard celui de Cadalen), y entrait seul, ou accompagné d'un des barons diocésains, représentant au bureau de l'assiette l'ordre de la noblesse. Le tiersétat fournissait pour ce bureau six députés des villes d'Albi, Gaillac, Cordes, Rabastens, Réalmont et Lombers; deux députés des villes

(1) Les actes relatifs à l'acquisition de la maison consulaire attenant à l'église de St.-Julien existent aux archives de la mairie d'Albi.

de Lisle, Valence, Montmiral, Cadalen, Monestiés et Cahuzac, qui alternaient entr'elles de trois en trois ans; enfin un autre député d'Albi, qui occupait le dernier rang et n'avait pas voix délibérative.

Un bureau de direction des affaires pendant l'année, se composait de l'Évêque ou de son Grand-Vicaire qui le présidait, du Baron de Castelnau ou de Cadalen, du Viguier et du premier Consul de la ville.

Le diocèse d'Albi était un des plus considérables de la Province; il payait la quatorzième partie de ses impositions; cette partie s'élevait, en 1776, à 1,100,000 livres (1).

Les impositions étaient payables en trois termes.

L'assemblée diocésaine, émanation des états-généraux, n'était comptable de son administration qu'à ces états et au Roi. Elle ne pouvait, sans le consentement des États, ni faire de réglement de discipline intérieure, ni poursuivre auprès des commissaires du Roi l'autorisation des dépenses ou emprunts qu'elle avait délibérés. Elle devait être convoquée immédiatement après la tenue des étatsgénéraux, et au plus tard un mois après la fin de leur session.

Dans les anciens procès-verbaux conservés aux archives de la préfecture, on voit que les états-particuliers d'Albi, avant de nommer le bureau des comptes ou de l'assiette, délibéraient sur toutes les affaires intéressant l'administration du diocèse, examinaient avec soin les demandes et réclamations qui leur étaient soumises et traçaient, pour ainsi dire, la marche à suivre à l'assemblée de l'assiette qui devait leur succéder. Mais plus tard les députés des communes semblaient ne se réunir que pour la forme. Ils organisaient le bureau des comptes ou de l'assiette et se retiraient, se reposant entièrement sur lui du soin des affaires du diocèse.

Le dépouillement de ces procès-verbaux, aussi bien que les délibérations des états-généraux conservées aussi aux archives départementales, présentent d'immenses matériaux pour l'histoire du pays. C'est une mine à exploiter.

(1) Délibération des états-diocésains de la même année 1776. ( Archives de la préfecture. )

ÉVÉNEMENTS.

FAITS RELATIFS A LA CROISADE CONTRE LES ALBIGEOIS.

L'hérésie des Albigeois, ainsi appelée, assure-t-on, parcequ'elle fut condamnée, en 1165, au concile de Lombers, château fort situé à environ 16 kilomètres d'Albi, prit naissance vers le milieu du 12me siècle. Pierre de Bruys et Henri, son disciple, prêchèrent les premiers dans le Midi leurs funestes doctrines. Partout la foule enthousiaste les suivait, brisant les autels et ne voulant d'autre culte que celui qu'ils prêchaient. Ils imposaient aux simples, par des discours étudiés, une piété apparente et un extérieur extrêmement négligé. Ils portaient une longue barbe et marchaient nuds pieds. Henri ne manquait ni d'esprit ni d'éloquence; St.-Bernard déclare lui-même qu'il était homme de lettres (1).

Après avoir échappé au danger auquel son maître, Pierre de Bruys, avait succombé, Henri se réfugia à Toulouse, d'où il répandit ses dogmes pernicieux dans les pays voisins, soit par lui-même, soit par ses disciples.

L'église dût songer à arrêter ce fléau : elle envoya dans le Midi plusieurs prélats et abbés pour le combattre ; St.-Bernard s'adjoignit au légat du Pape, et vint à Albi en 1147. Le légat qui l'avait précédé de deux jours dans cette ville, dont presque tous les habitants avaient embrassé l'hérésie ou la favorisaient ouvertement, y fut mal reçu. Les Albigeois, dit l'histoire de Languedoc, allèrent par dérision au-devant de lui, montés sur des ânes. Le saint abbé au contraire fut accueilli avec de grandes démonstrations de joie. Il prêcha dans la cathédrale, en présence d'un auditoire très-nombreux, et parvint par ses discours à ramener à la foi tous ceux qui s'en étaient écartés.

Cependant, étouffée un instant, l'hérésie reparut bientôt plus dangereuse encore, malgré l'extrême sévérité dont on usa envers

(1) Lettre de St.-Bernard à Alphonse II, comte de Toulouse. D. Vaissete, tome 2, page 444.

les sectaires. Ni les nombreux jugements prononcés par divers conciles, ni l'éloquence et le pouvoir des légats du Pape ne purent empêcher qu'elle ne se propageat. St.-Dominique vint la combattre ; mais les annales du couvent des Frères-Prêcheurs de Toulouse, en citant ses triomphes, attestent que dans ses courses pénibles, il trouva peu d'hommes fidèles à la foi catholique.

Innocent III voyant que les moyens employés n'avaient pas le succès qu'il désirait, exhorta Philippe-Auguste à faire la guerre aux hérétiques. La croisade fut publiée en 1208, et bientôt une armée formidable, composée de pélerins et d'hommes assemblés au hasard, porta dans le midi la désolation et la mort.

Il ne m'appartient pas de dérouler les pages de ce grand drame. D'autres feront sans doute connaître le rôle que joua l'Albigeois pendant ces guerres sanglantes; ils diront toutes les circonstances de la croisade, les croyances des sectaires, le siége et la destruction de nos châteaux, la domination des Montfort sur une portion considérable du pays; pour moi n'ayant pas à traiter cette matière à la fois difficile et délicate, je dois me borner à attirer l'attention du lecteur sur quelques pièces relatives à ces événements, dont mes recherches m'ont procuré la découverte.

La première est une lettre de Pierre, roi d'Aragon, datée du mois de février 1203 (1204): elle fait connaître au clergé l'interrogatoire qu'ont subi devant lui et les légats du Pape, plusieurs hérétiques réunis par ses ordres. Cette lettre, qui est mentionnée dans le poëme de la croisade contre les Albigeois et dont les historiographes du Languedoc rapportent des fragments, a été conservée sur la couverture d'un manuscrit du 13me siècle, appartenant à M. Louis Cavalié, juge suppléant près le tribunal civil d'Albi (1).

Les documents qui suivront celui qui précède n'auront pas moins d'intérêt.

Devenu, par droit de conquête, maître de l'Albigeois, Simon de Montfort reçut le serment de fidélité d'un grand nombre de seigneurs. (1) Documents et pièces justificatives N 54.

Il donna en fief à Guillaume, évêque d'Albi, les terres de Marsac et de Rouffiac, sous la condition de foi et hommage. Les lettres de ce conquérant sont datées d'Albi, du mois d'avril 1212 (1).

Ainsi qu'il a été dit, les biens des hérétiques condamnés étaient confisqués au profit de l'Évêque et du Roi. Dans une enquête dressée en 1252 par Guillaume de Pian, sénéchal de Carcassonne, on voit que le nombre des hérétiques condamnés à Albi s'élevait alors à plus de 60, et qu'on estimait leurs biens dix mille livres tournois (180,000 francs de notre monnaie. ) Chaque jour voyait s'accroître ces condamnations; elles ne frappaient pas seulement les habitants de la ville, mais encore ceux des campagnes. C'est ainsi qu'Ozilis de Morlhon et sa femme Sauria furent dépouillés de leurs domaines de Lagarde-Viaur, et qu'on enleva à Pons, à Vierna, son épouse, et à Guillaume Dupuy, les propriétés qu'ils avaient à Monestiés, aux lieux d'Airole et de l'Hichardié (2). Des actes relatifs aux contestations que souleva le partage de ces biens seront joints aux documents (3).

On rapporte à l'année 1204 l'origine de l'inquisition établie contre les Albigeois; mais ce ne fut qu'en 1229 que le concile de Toulouse l'organisa définitivement: quatre ans après, Grégoire IX en confia le soin aux Frères-Prêcheurs et établit deux Inquisiteurs de cet ordre à Albi. Ils avaient pouvoir de faire citer à leur tribunal, non-seulement tous ceux que les rapports de leurs commissaires dénonçaient comme hérétiques ou suspects d'hérésie, mais encore tous ceux accusés de sortilège et de magie (4). Les condamnés à mort, livrés au bras séculier, étaient brûlés vifs et leurs cendres jetées dans les égouts; les condamnés à la prison perpétuelle devaient finir leurs jours dans des cellules étroites et obscures; on les désignait sous le nom d'immurati, emmurés, ou placés entre quatre murailles (5). Toute communication entr'eux était interdite. Ils recevaient par une lucarne la nourriture nécessaire à leur subsistance. Quelquefois les Inquisiteurs commuaient les peines de mort et de prison en une

(1) Documents et pièces justificatives No 55. (2) Pièces justificatives No 56. (3) Pièces justificatives Nos 57 et 58. (4) Pièces justificatives No 59. (5) Glossaire de Ducange.

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