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Les lettres patentes de Charles IX, données à Blois, en octobre 1571, portent que les Rois ses prédécesseurs avaient octroyé aux habitants de Gaillac plusieurs beaux priviléges, entr'autres, les droits de courtage, d'encan, de poids et mesures, foires et marchés, avec la justice criminelle.

Le droit de courtage affermé, était fixé à 8 deniers pour un demi tonneau de vin appartenant à un habitant de Gaillac et au double pour un étranger; le droit de poids se percevait, à raison de 8 deniers par quintal; celui de l'encan à raison de 10 deniers. Gaillac jouissait très anciennement du privilége de trois marchés la semaine : les lundi, mercredi et vendredi; et de trois foires le 1er mars, le 29 septembre et le 29 décembre. La commune possédait une maison de ville où se tenaient les conseils publics, une autre maison sur la même place où était établi un corps-de-garde ainsi que la prison pour dettes, un second corps-de-garde à côté de la porte St.-Pierre, les promenades, un foiral près de la porte St.Antoine et une partie des fossés de la ville. Les consuls jouissaient encore par indivis avec le chapitre de St.-Michel, du moulin dit de Gaillac. En 1528, ce moulin ayant paru nuire à l'embarcadère, l'abbé et les consuls déclarèrent qu'il serait démoli aux frais de la ville et les matériaux accordés à l'abbé, que les maisons depuis la Tour du Tarn, appelée la Bocaria, jusques au coin du Monastère, devant la fontaine de la Sospesa, seraient exemptes de toutes tailles (1).

(1) Sur une feuille en parchemin vélin qui sert de couverture à un manuscrit insignifiant relatif à des affaires du consulat de Gaillac, on lit des vers en magnifique écriture gothique. Nous citerons les suivants :

Chascun ne pense au jourduy que de lui,
Charité faut, (faillit) toute joye s'en va.
On na cure de clerc ne de latin.
D'ome vaillant la science faura.
Promesse, honneur, la loy vont à dedui,
On ne les voit, mais fors en parchemin
Du temps qui queurt trestous esbaby suy
Chascuns ne pense au jourduy que de lay.
Dieux na pas fait chascun d'une jointure.
Terres ne fleurs, toutes dune coulour,
Mais rien n'avient dont frius n'ait ouverture
Je tien que Dieux fait tout pour le meillour.

Les habitans de cette ville jouissaient du droit de chasse et de pêche, de four, de forge et de colombier. Chacun des consuls avait la faculté de prendre aux forêts de Grésigne et de Giroussens 150 pieds d'arbre; enfin ils recueillaient la dime du safran et la moitié des droits de péage qu'ils avaient acheté en 1250, au prix de 19,000 sous de Cahors, à B. de Combret, évèque d'Albi.

Ils n'avaient point part au droit de coupe qui devint fort peu considérable. Ce droit était perçu sur les blés vendus dans la ville de Gaillac par des étrangers; on l'appelait ainsi, parce qu'on se servait pour la perception, d'une mesure en cuivre qui avait la forme d'une coupe, et qui existait encore à la mairie de Gaillac, à la fin du 18e siècle. C'était une redevance seigneuriale, un simple droit de mesurage, qui donna lieu cependant à de longs procès entre les consuls, d'une part, les capitouls de Toulouse et la Marquise de Saissac, de l'autre. Ceux-ci ayant obtenu à titre d'encouragement à vie, la leude royale de Toulouse et de plusieurs villes du pays Toulousain, voulurent restreindre les priviléges des habitants et étendre la perception de ce droit.

Le commerce des vins et des grains était très étendu au 13e siècle dans la ville de Gaillac. Son vignoble vaste et d'un grand rapport donnait des produits recherchés depuis longtemps.

Il y eut entre les consuls de Gaillac et ceux de Bordeaux, un procès qui fut terminé par un accord, d'après lequel tout le vin de Gaillac qu'on transportait à Bordeaux devait porter la marque de la ville. Il était fait défense à toute personne de faire entrer dans la ville ou faubourgs de Gaillac, ni vin, ni vendange provenant d'un autre lieu; et dans le cas où il y aurait eu disette de vin du terroir, il fallait une délibération de la communauté pour autoriser les habitans à aller en acheter ailleurs. D'après les statuts de la ville (1527), ceux qui enfreignaient les dispositions arrêtées à ce sujet, étaient punis par les consuls et on ajoutait à ces peines celle de ne pouvoir être jamais ni conseillers, ni consuls de Gaillac. L'administration municipale ne négligeait rien dans l'intérêt du commerce de ses vins qui avaient depuis des siècles

une réputation méritée, pour empêcher tout mélange ou falsification. Les consuls se livraient à des recherches minutieuses, ils constataient les contraventions aux réglements; le vin était saisi en faveur des pauvres et les futailles brûlées. Cette vigilance allait si loin qu'on accordait quelquefois au dénonciateur la moitié du vin confisqué, et qu'en l'année 1529, la peste sévissant dans Gaillac, les consuls et leur conseil politique se réunirent dans un pré voisin de la ville pour arrêter de nouvelles mesures à l'effet d'empêcher que le vin étranger n'entrât dans leur consulat.

Il existe dans les archives des communes de Lisle et de Rabastens, une charte d'Édouard III, Roi d'Angleterre, relative au transport des vins de ce pays à Bordeaux.

Des tarifs de droit de péage font connaître les objets de commerce portés sur les marchés de Gaillac au 13° siècle. On y remarque la désignation des étoffes de laine, de lin et de soie, de la garance, du safran, du rodon qui croît spontanément dans notre pays et qui remplace encore ici le sumac dans la teinture des étoffes.

Les consuls faisaient seuls les réglements de police; mais lorsqu'il s'agissait de mesures qui intéressaient aussi les divers seigneurs de Gaillac, ils se concertaient avec eux. Ainsi en 1256, lorsqu'il fut question de construire un pont sur le Tarn, et sur un emplacement qui appartenait à l'abbé, ils traitèrent avec ce dernier (frère Arnaud), en présence de Jean de St.-Pierre et Regnauld de Chartres, frères prêcheurs et inquisiteurs de la foi à Gaillac, et réglèrent de concert les droits de péage. Les ressources dont ils purent disposer les mirent à même de le faire terminer promptement. Destiné d'abord aux piétons, il fut fait en bois sur des pilliers de briques. Les communes et villes voisines furent appelées à concourir à la dépense. En 1271, les consuls se virent dans la nécessité de le reconstruire, ainsi que le prouve la délibération que nous insérons à la suite de cette notice (1).

Il existe une transaction de 1274, entre l'abbé et les consuls à raison du passage des bâteaux aux écluses des moulins de l'ab(1) Voir les documents

baye qui étaient placés au-dessous du monastère et à côté du pont. Il y est dit que les dispositions nécessaires seront faites pour que les bâteaux puissent aller librement jusques à la côte de la ville et au lieu appelé lo descargador, afin que le monastère perçoive les droits établis sur les marchandises.

La sénéchaussée de Toulouse fut partagée vers le milieu du 13° siècle en plusieurs juridictions ou judicatures, qui comprenaient une certaine étendue de pays. La partie de l'Albigeois située à la droite du Tarn, et demeurée à Raymond VII, par le traité de paix de 1229, composa une seule judicature, régie par un juge en chef, un procureur du comte et ensuite du roi, qui allaient tenir les assises dans les sept balliages qui en fesaient partie; savoir: Gaillac, Rabastens, Cordes, Lisle, Montmiral, Cahuzac et Penne. Cette division de baillages fut plusieurs fois modifiée. On en retrancha Montmiral, Penne et Cahuzac, pour y ajouter Valence, Arthez et le bout du pont d'Albi. Il faut dire toutefois que ce pays. avait précédemment un juge qui prenait tantôt le titre de sénéchal, tantôt celui de grand bailli ou juge en chef, et qui résidait le plus souvent au château de Belvèze situé sur les bords du Tarn. En 1256, le comte de Toulouse ayant acquis la portion de seigneurie que possédaient à Gaillac les seigneurs de Lauriac, il fut arrêté de concert entre lui, l'abbé de St.-Michel et Guillaume de Pierre de Berens, co-seigneurs de Gaillac, que le juge ordinaire de l'Albigeois serait aussi juge de cette ville, et qu'il y rendrait la justice en présence du sénéchal du comte, de l'abbé et de Guillaume de Pierre, ou de leurs baillis.

Le chef de la judicature d'Albigeois, plus communément appelée jugerie, s'intitulait juge en chef du pays d'Albigeois. Il pouvait à son choix présider celui des siéges qu'il voulait et où il avait des lieutenants. Le procureur du roi avait un substitut attaché à chaque siége; mais il fut établi plus tard un office de procureur du roi pour chaque bailliage. Le juge en chef devait prêter serment entre les mains de l'abbé, dans sa maison abbatiale.

Lorsque les états de la province s'assemblaient par sénéchaussée,

la jugerie d'Albigeois avait son syndic qui entrait aux états de la sénéchaussée de Toulouse, et prenait la qualité de syndic du diocèse. C'était alternativement le premier consul des villes de Gaillac, Rabastens et Cordes. Mais lorsque les états s'assemblèrent en corps de province, le syndic diocésain de la jugerie fut regardé comme inutile, et le syndicat du diocèse d'Albi fut dévolu sans partage au syndic de la viguerie qui résidait à Albi. Ce nouvel état de choses. subsista jusqu'en 1541, où les états particuliers du pays d'Albigeois passèrent entr'eux un traité, le 10 novembre de la même année, pour l'établissement de deux syndics, l'un dans la jugerie et l'autre dans la viguerie. Par ce traité qui fut qualifié de transaction, parce qu'il mettait fin à de longs débats auxquels la suppression du syndic de la jugerie avait donné lieu, les deux syndics furent établis vrais officiers de tout le diocèse et chargés concurremment des affaires du pays, sans autre distinction remarquable que le droit exclusif accordé au syndic de la viguerie, de porter la parole aux assemblées du pays et la qualité qui lui fut donnée de premier et principal syndic.

On verra ici (1) avec intérêt la liste des juges en chef d'Albigeois, dont on a pu retrouver les noms. Parmi eux figure à la fin du 16e siècle, M. Roch de Combettes, d'abord procureur du roi de la jugerie d'Albigeois, conseiller de la reine Marguerite de France, et qui, pour ses bons et loyaux services et son expérience dans les affaires, mérita l'estime particulière de cette princesse.

Les archives de la préfecture possèdent diverses pièces relatives aux plaintes faites devant M. Bernard D'Assezat, conseiller au parlement de Toulouse, par M. D'Audouin abbé de Gaillac, et M. Jean

(1) 1231, Guillaume, juge et sénéchal d'Albi. 1252, Bernard Olive, juge d'Albigeois. 1266, Me Neveu de Montauban. 1275, Bernard de Chantmari. Elie de Lisle, grand bailli. 1291, Barthélemi de Lagarde. 1323, G. Du Bosc. 1330, de Labarthe. 1343, Arnaud de Pebolen. 1348, Jean-de-Court. 1353, Noble Bernard de Montjuif. 1439, Jean Bachelier, secrétaire du Dauphin, depuis Louis XI. 1444, Antoine Setgier. 1505, Jean de Fronts. 15.., Jean d'Aiga. 1598, Roch de Combettes, conseiller et maître de requêtes de la Reine Marguerite de France. 1642, N. de Paule, gendre du précédent. 1644, Roch de Dreuilhet, petit fils de Roch de Combettes. Roch Antoine de Dreuilhet. 1689, Roch François de Dreuilhet. N. de Dreuilhet. 1767, Michel Lemozi D'Aurel, dernier titulaire.

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