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cousin de Saint Pol et mon cousin de Marle (1) me lessent joyr de leurs subgetz; et vous me voulez hoster les miens à mon besoing, par vous previleges, dont vous n'avez nulz! et aussy, en ce faisant, les fourfaites (a) touchant ceste matiere. Et, sy dites et maintenés que j'ay juré de les entretenir, il est vray; mais aussy vous avez juré de me servir et de me estre bons et obeissans subgetz; et toutes voyes je say bien qu'il en y a des aulcuns qui me hayent (6); et, entre vous, Flamengs, avecq vous dures testes, avez tousjours contempné ou hay vostre prince, car, quant ilz n'estoient point bien puissant, vous les contempnastes, et, quant ilz estoient puissans et que vous ne leur povoyés riens faire, vous les haystes. J'ayme mieulx que vous me hayés que contempnez; ne, pour vous previleges, ne aultrement, ne me lesray fouler, ne emprendre riens sur ma haulteur et seignourie, et suy puissant assez pour y resister: pour quoy aulcuns vouldroient que je me trouvasse en une bataille à tout v ou vjm. combatans, et que je fuisse enchachié, tué, voire esquartelé. Et, pour ce, avant que je souffresisse que vous me hosteriés mes subgetz, ne entreprendiés rien sur ma haulteur et seignourie, je y pourverroye et y resisteroye par telle maniere, que je vous monsteroye par effect que vous ne le povez ou debvez faire; et me desplairoit de vostre desplaisir, car ce seroit comme du pot et du voyre (c) : comment que le voyre se hurte o pot, toudis se rompt. Aussy ce sont

(1) Mon cousin de Saint Pol et mon cousin de Marle. Il est probablemeut question ici de Louis de Luxembourg, comte de Saint-Pol, connétable de France, décapité à Paris en 1475 (Voy. ci-dessus, page 149, note 2), et de Jean de Luxembourg, comte de Marle, fait chevalier de la toison d'or en 1473, tué à la bataille de Morat en 1476.

(a) Les fourfaites, c'est-à-dire vous en encourez la perte, la confiscation. (b) Hayent, pour haïssent.

(c) Voyre, pour verre.

ceulx qui ne scevent que c'est d'estre en la grace de leur prince, qui est bon et legier à faire qui veult bien faire, car ce n'est point de payne de bien faire, qui s'y veullent aplicquier; mais c'est bien grant paine de se applicquier à mal faire. Sy vous mettez à bien faire, et sy vous gouvernés et conduisez (a) si sagement que vous ne perdés point ma grace, car vous ne scavez point ce que vous perderiés, et soyez bons subgetz, et je vous seray bon prince. Et sy veul bien avoir regard ou cas que aucuns fievez ou arriere fievez contribuent et payent de ceste ayde, de les deschargier d'autant que leur porcion portera. Et, quant vous aurez conclut de me accorder ma requeste, ce que vous ferez toutesvoyes, et ne suy point d'advis de vous aussy plus chergier, se plus grant inconvenient ne me survient, et que je soye retourné à Lille ou à Saint Omer, envoyez aucuns deputez devers moy, et illecq, avec mon chancellier et conseil, vous feray baillier cote et porcion, et y parlerons aussy de aultres matieres touchant mon pays de Flandres.

NOTE.

A la suite de ce discours, on lit dans le registre :

Int voorseide jaer lxx, inde maend van juing, was mynen voorseide gheduchten heer gheconsenteirt de voornoemde sevencie van vj dunst cronen in zyne steide van Middelbuerch in Zeeland: nemaer de cote ende spleten van de voorseide sevencie en was niet ghemaect te diere tyd noch plecke, maer was die ghemaect inde steide van Abbeville.

<< En ladite année lxx, au mois de juin, ladite subvention de 120,000 couronnes fut consentie à monseigneur en sa ville de Middelbourg en Zélande mais la quote et portion de chaque pays ne fut pas fixée en ce temps ni en ce lieu; elle le fut à Abbeville. »

:

(1) Sy vous mettez à bien faire, et sy vous gouvernés et conduisez, etc. Il me parait que le sens de ce passage est le suivant : Mettez-vous donc à bien faire, gouvernez-vous et conduisez-vous, etc.

Sur cela j'ai à faire remarquer que, d'après les comptes qui reposent aux archives du royaume, l'aide de 120,000 écus ne fut levée dans les derniers mois de l'année 1471.

que

Je dois ajouter que, dans les registres du conseil de ville de Mons, on trouve que, le 8 juillet 1471, les trois états de Hainaut furent assemblés, et que le grand bailli, en vertu de sa charge, les requit de nommer des députés, pour être le 15 à Arras, où devaient se rendre des commis des autres états, afin de régler l'assiette des 120,000 écus par an, accordés au duc trois ans durant, pour l'entretien de son ordonnance de mille lances et des archers y appartenant, nouvellement mise sus. On y lit encore que, le 12 août 1471, il fut fait rapport au conseil de ville de ce qui avait été traité à Abbeville par les députés de tous les états.

En rapprochant ces indications, les dernières surtout, qui ont une authenticité irréfragable, de celles que fournit le registre d'Ypres, il résulte que la répartition des 120,000 écus ne se fit que plus d'une année après qu'ils eurent été accordés au duc. Les choses ne se pratiquaient pas ordinairement de la sorte. Aussi avais-je conçu d'abord quelque défiance relativement à l'exactitude de la date énoncée dans le registre d'Ypres. J'ai fait beaucoup de recherches pour éclaircir ce point; j'ai, entre autres, examiné quantité de patentes et autres pièces émanées du duc Charles dans les années 1470 et 1471. Comme j'y ai acquis la preuve que, aux mois de juin et juillet 1471, le duc ne quitta pas la Picardie et l'Artois, tandis que d'autres témoignages (nommément la lettre qui suit, cotée n° XXXV) font foi qu'il était à Middelbourg au mois de juin 1470, je crois pouvoir en conclure que la remontrance des quatre membres de Flandre et la réponse du duc, concernant la subvention de 120,000 écus, appartiennent bien à l'année 1470. Cette aide de 120,000 écus fut au reste payée, indépendamment de celles qui avait été accordées au duc précédemment. On voit, par les comptes que nous avons aux archives du royaume, que la Flandre y contribua à concurrence de 28,000 écus, et le Brabant pour 26,000.

XXXV.

Lettre du duc aux magistrats d'Ypres, touchant les hostilités commises contre ses sujets par le duc de Clarence et le comte de Warwick, et l'appui qu'ils reçoivent du roi de France: 10 juin 1470. (1)

De par le duc de Bourgoingne, etc.

Tres chiers et bien amez, il est pieça (a) peu venir à vostre congnoissance comme, apres ce que les duc de Clarence et conte de Warwyck ont esté, pour leurs sedicions et malefices, expulsez du royalme d'Angleterre, ilz, de leurs volentez et sans cause raisonnable, se sont constituez, declairez et demonstrez, par parolles, par faiz et exploix de guerre, noz ennemis, et, le jour du vendredi absolut (b), en mettant à execucion leurdite inimitié et hostilité declarees contre nous, noz pays et subgetz, prindrent, par fraude et cautele (c), certaine grande quantité

(1) On trouve, dans les Preuves des Mémoires de Commines, t. III, pp. 120, 122, 124, 132 et 134, édit. déjà citée, plusieurs pièces relatives aux hostilités que commirent contre les pays de Bourgogne le duc de Clarence et le comte de Warwick, ainsi qu'à la conduite que le roi de France tint dans cette affaire. Il y en a un plus grand nombre dans les Preuves de l'Histoire de Bourgogne par les bénédictins, t. IV, pp. cclxj à cclxxiij.

(a) Pieça, depuis long-temps.

(b) Le jour du vendredi absolut, c'est-à-dire, je crois, le jour du vendredi saint. Le fait aurait eu lieu, dans ce cas, le 20 avril 1470, suivant notre manière actuelle de compter.

(c) Cautele, ruse.

de navires et biens appartenans à pluiseurs noz subgetz, en pluz grant nombre et à trop plus grant dommaige d'iceulx noz subgetz qu'il n'estoit auparavant avenu`pour une foiz, en y continuant depuis toutes les foiz qu'ilz en ont eu l'opportunité. Pour à quoy obvier, nous avons dès lors ordonné de mettre sus armee par mer; et oultre, pour ce que, en ce meismes temps, nous feusmes advertiz que iceulx de Clarence et de Warwyck et leurs gens, apres la destrousse (a) faicte sur eulx en mer par les gens de tres hault et tres puissant prince et tres honnouré seigneur et frere le roy d'Engleterre, s'estoient retraiz sur les marches (b) de Normandie, et que, par le commandement et ordonnance de monseigneur le roy (c), ilz avoient esté receuz et recueilliez à Honnefleu (d) par l'admiral de France et aultres officiers illecq, avec tout ce qui leur estoit demouré, apres ladite destrousse, de ladite prinse faicte sur nosdits subgetz: lesquelles choses, attendu que, comme dit est, ils s'estoient declarez, estoient et sont notoirement noz ennemis, estoient directement contre les traictiez de paix faiz et passez entre mondit seigneur le roy et nous, nous en escripvismes incontinent à mondit seigneur le roy, en luy suppliant qu'il ne voulsist aidier, porter, recueillier, soustenir, ne favoriser lesdits de Clarence et Warwyck en sondit pays de Normandie, ne ailleurs en son royalme, ne y souffrir vendre, butiner et distribuer les biens de nosdits subgetz, et, pour plus en ce declarer sa voulenté, le faire cryer et publyer par tout icellui pays de Normandie et ailleurs où besoing seroit; et parelement en escripvismes à la court de parlement à Paris et aux gens du conseil de mondit seigneur le roy

(a) Destrousse est ici pour prise, capture.

(b) Retraiz sur les marches, retirés sur les côtes. (c) Le roy, c'est-à-dire le roi de France.

(d) Honnefleu, pour Honfleur.

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