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datait du siècle suivant (1); le chapitre, avant le pillage et l'incendie de sa trésorerie, commis par les iconoclastes en 1566, pouvait montrer des titres du ge et même du 6o (2) mais on ne doit pas perdre de vue que les gens d'église prenaient un soin religieux de leurs chartes; qu'ils les plaçaient dans des endroits retirés des lieux saints, où il arrivait rarement que, même au milieu des dissensions civiles et des guerres, elles ne fussent pas respectées. Les archives séculières, moins bien soignées d'ailleurs, n'étaient pas en possession de ce dernier privilége (3).

Malgré les pertes qu'elles ont faites, les archives de Tournai sont peut-être encore celles des villes de la Belgique qui renferment le plus de monumens originaux; on n'évalue pas à moins de douze cents le nombre des chartes qui y sont rassemblées jusqu'au règne de Charles-Quint seulement. Une particularité les distingue des autres dépôts de nos provinces : c'est la grande quantité de diplômes des rois de France que l'on y trouve, et cela se conçoit aisément, puisque Tournai ne cessa de faire partie de la monarchie française qu'en 1521.

Avant de donner un aperçu des richesses de ce dépôt, je dirai quelques mots des travaux dont il a été l'objet en différens temps.

Le premier classement connu qui en ait été entrepris le fut vers le milieu du 15° siècle. L'inventaire qui en fut formé à cette époque comprend quatre cents articles environ; il fut fait avec assez de négligence. Les actes y

(1) La plus grande partie des chartes de l'évêché de Tournai est aussi aux archives du royaume : elle fut transportée à Vienne avec les archives du gouvernement après les événemens de 1794, et elle a été restituée en 1803. (2) La charte de Chilpéric de l'an 578.

(3) V. Nouveau traité de diplomatique, t. I, p. 103; et Dictionnaire raisonné de diplomatique, par De Vaines, au mot archives.

sont désignés de la manière la plus sommaire : quelquefois l'analyse se borne à la date de la pièce et à la mention en deux mots du sujet. On ne saurait tirer beaucoup d'utilité d'un pareil répertoire.

En 1643, le magistrat ordonna la visite et la continuation du classement des archives. On transcrivit, à la suite de l'inventaire ancien, l'indication des titres obtenus depuis sa confection : mais cette opération fut faite avec moins de soin encore que la précédente.

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Depuis cette époque jusqu'en 1794, on ne voit pas que l'on se soit occupé de la mise en ordre des chartes de la cité il en résulta qu'elles s'entassèrent confusément à la Tour des six (1). On avait pourtant autrefois un fréquent besoin de recourir aux anciens priviléges; la moindre contestation en matière de jurisdiction ou de prérogatives donnait lieu de les rechercher, pour s'en prévaloir: mais les copies que l'on en produisait n'étaient pas faites ordinairement sur les originaux; elles l'étaient d'après les registres dans lesquels ils avaient été transcrits, ce qui avait l'inconvénient de perpétuer les inexactitudes que le premier copiste avait pu commettre.

Sous le régime français, les administrateurs municipaux eurent peu le loisir de s'occuper d'archives. Celles de Tournai demeurèrent donc négligées pendant près de deux siècles; et, de dire qu'elles étaient dans une grande confusion, c'est ce qui n'étonnera personne. En 1822, cet état de choses fut pris en sérieuse considération par les magistrats auxquels la direction des intérêts de la ville avait été commise: ils sentirent la nécessité d'y porter remède, et de ne pas laisser plus long-temps ense

(1) On appelait ainsi une tour attenant à l'hôtel de ville, où étaient, depuis plusieurs siècles, renfermées les archives. Je ne suis pas assez sûr de l'étymologie que j'ai vu donner à ce nom dans plusieurs ouvrages manuscrits, pour la reproduire.

velis dans l'obscurité, en proie à la poussière et au désordre, les titres d'illustration de leur patrie. De premiers travaux furent ordonnés par eux dans ce but. J'avais, en ce temps, l'honneur d'être attaché à leur administration je commençai l'inventaire détaillé des chartes originales; 700 environ se trouvaient cataloguées, lorsque, en 1826, ma nomination au poste d'archiviste adjoint du royaume me le fit abandonner.

Ce n'avait été là, en quelque sorte, qu'un essai. En 1828, M. l'échevin Le Hon (1), qui avait toujours consacré à cet objet une active sollicitude, présenta au conseil de régence un plan pour le classement complet des archives. Ce plan, qui était tel qu'on devait l'attendre des lumières de son auteur, fut approuvé dans toutes ses parties: la régence chargea de son exécution M. Fréd. Hennebert, auquel elle conféra l'emploi d'archiviste de la ville. Il lui eût été impossible de faire un meilleur choix.

Les travaux de classement étaient en pleine activité, lorsque la révolution est survenue. Ils furent suspendus dès lors, et l'archiviste chargé d'autres soins, que les circonstances rendaient plus urgens.

S'ils n'ont pas encore été repris au moment où j'écris ces lignes (septembre 1832), il faut espérer qu'ils le seront bientôt. La régence de Tournai s'est toujours distinguée par son zèle pour les choses utiles : les lumières des magistrats actuels, celles surtout du chef de l'administration,

(1) M. Le Hon est aujourd'hui envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire du roi à Paris. Échevin de Tournai, sa ville natale, depuis 1814 jusqu'en 1830, époque où il en fut élu bourgmestre par le choix libre de ses concitoyens, c'est particulièrement à ses soins qu'elle est redevable des améliorations que les établissemens municipaux consacrés à l'instruction publique et aux arts ont reçues durant cette période de seize années. M. Le Hon a fait partie des états provinciaux du Hainaut dès l'époque de leur institution. Lorsque la révolution de 1830 éclata, il était député de sa province aux états généraux : il fut envoyé au congrès national par le district de Tournai, dont il est encore l'un des mandataires à la chambre des représentans.

doivent inspirer la confiance qu'ils ne laisseront pas inachevé l'ouvrage entrepris en 1828, à l'applaudissement de tous les citoyens : ils s'acquerront par-là des droits à la reconnaissance publique. Disons-le hautement, d'ailleurs : c'est un devoir, et un devoir rigoureux, pour les administrateurs de nos cités, de tirer de l'oubli, de produire au grand jour, les titres qui rappellent ce qu'elles ont été aux différentes périodes de leur existence; qui constatent les faits glorieux dont elles peuvent s'enorgueillir, les institutions civiles et politiques dont elles ont joui, la part enfin qu'elles ont prise au mouvement social des âges qui se sont succédés jusqu'à l'époque actuelle.

Une notice n'étant point un catalogue, je pourrais me borner à faire connaître, en général, la nature des actes que les archives de Tournai renferment. Il sera, je le suppose, agréable aux amis de l'histoire, que j'élargisse ce cadre. La partie de l'inventaire qui était redigée en 1826 comprend la plupart des titres les plus curieux de la ville, nommément les chartes relatives aux changemens que subit sa constitution dans les 14°, 15° et 16e siècles. J'en donnerai des extraits; j'indiquerai ensuite les cartulaires et autres recueils qui font partie des archives.

§ Ier. DIPLOMES ORIGINAUX.

A Corbie en 1211. Charte de commune accordée à la ville de Tournai par Philippe-Auguste, roi de France (1). Mai 1234. Deux lettres d'Ansiaux d'Aigremont, avoué de Tournai, sire de Wez, et de Sare, sa femme.

Par la première, ils déclarent que, tant qu'ils vivront, ils ne pourront vendre l'avouerie qu'a ledit seigneur

(1) Elle est insérée ci-après.

dans la justice de Tournai, et qui lui échut de Gillion, son père, etc.

Par l'autre, ils promettent, en renouvelant la déclaration contenue dans la lettre précédente, de n'engager leur avouerie à personne, s'il n'est bourgeois de Tournai et suffisant à la commune, et ce pour le terme de huit ans au moins.

(Ces deux actes sont en français, ainsi que tous ceux qui suivent.)

Juillet 1286. Accord conclu entre l'évêque de Tournai Michius (Michel) et les gouverneurs de cette ville, touchant le droit qu'il prétendait avoir de battre monnaie et de la mettre en circulation, comme l'avaient fait ses prédécesseurs.

(Cet acte semble prouver qu'effectivement le droit de battre monnaie fut, pendant plusieurs siècles, une des prérogatives de l'évêque.)

1287. Vente faite aux Tournaisiens, par Marie, dame de Mortagne, de la ville du Bruisle (1) et de la justice du châtel au Bruisle.

(On voit, d'une quittance donnée au magistrat, en 1295, par Marie, dame de Mortagne, châtelaine de Tournai, que cette vente avait été faite pour le prix de 8,600 livres tournois.)

Août 1289. Vente faite aux mêmes, par Hues de Châtillon, comte de St.-Pol, et sa famille, de la ville des Chaufours (2), de toute la seigneurie et justice haute, moyenne et basse qu'ils avaient en icelle, ainsi que des bois de Breuze.

Cette acquisition coûta à la commune de Tournai,

(1) Cette ville du Bruisle forme aujourd'hui la paroisse dite du Château, sur la rive droite de l'Escaut.

(2) La ville des Chaufours forme aujourd'hui la paroisse de St-Jean-Baptiste, aussi sur la rive droite de l'Escaut.

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