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ENTRÉE A BRUXELLES

ET RÉCEPTION DE DON JUAN D'AUTRICHE.

(D'après les originaux, reposant aux archives des anciens états du Tournaisis, à Tournai.

I.

Extrait d'une lettre écrite aux états du Tournaisis par Barthélemi Liébart (1), leur député aux états généraux: 30 avril 1577.

Messeigneurs,

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Il plaira à voz seigneuryes y penser et adviser et en temps et heure envoyer vostre resolution, comme

(1) Barthélemi Liébart était avocat et bailli général du temporel de l'évêché de Tournai. Les états du Tournaisis le députèrent, par acte du 24 décembre 1576, avec Mathias De la Chaussée, écuyer, St de Monsoret, pour les représenter dans l'assemblée des états généraux, en remplacement de Martin Huttin et de Jean Cotterel, écuyer, S1 d'Esplechin,'qu'ils avaient commis à cet effet le 4 octobre précédent. Liébart signa, en cette qualité, l'Union de Bruxelles du 9 janvier 1577. Le 15 février, le S De Monsoret, son collègue, étant parti pour Tournai, il demeura seul représentant du Tournaisis aux états

pareillement de ce qu'entendez de vostre part estre proposé, remonstré et requys à S. A., apres qu'elle sera receue à gouverneur, quy sera non prestement son arrivee (a) en ceste ville, qu'attendons ce jourd'huy en bonne devotion (estants, à ceste occasion, icy venuz, pour luy al-' ler au devant et recevoyr, prelatz en grand nombre de tous quartiers de ces Pays Bas et aussy des nobles, de sorte qu'il ne reste place aux hosteleryes, et sy y sont en plusieurs endroictz hourdaiges (b) appareillez pour y faire esbattemens en signe de joye), ains apres qu'aurons receu certaine nouvelle que la gendarmerye espagnolle, italienne et bourguignone sera du tout sortye du pays de Luxembourg, et que sadicte alteze nous aura accordé aulcuns points et articles (1) que noz deputez, quy partirent hier, luy sont allez proposer avant sa venue, desquelz

généraux. Le 20 juin suivant, sur la demande qu'il fit d'avoir un successeur, pour pouvoir s'occuper de ses affaires particulières, les états nommèrent à sa place Jean Houfflin, licentié ès lois, l'un de leurs membres. Ils adjoignirent à celui-ci, le 7 août, un second député, dans la personne d'Olivier Vohaghe, abbé de Château-l'Abbaye près de Mortagne. Au mois d'avril 1578, Houfflin ayant été élu secrétaire des états généraux, Barthélemi Liébart fut de nouveau commis par les états du Tournaisis, pour siéger en leur nom aux états généraux, et il remplit cette mission jusqu'à l'époque de la prise de Tournai par le prince de Parme. (Registres des états du Tournaisis.)

Le savant M. De Jonge s'est trompé, en faisant de Mathias De la Chaussée, dont il est question ci-dessus, et dont la signature, dans l'acte original de l'Union, est conçue ainsi : Mathias dele Cauchie, en en faisant, dis-je, Mathias dele Cambe. Il se trompe aussi, en donnant à Jean Houfflin la qualité de conseiller du Tournaisis. (Voy. DeUnie van Brussel des jaars 1577, door J. C. De Jonge, pp. 147 et 206.)

(a) Non prestement son arrivee, non immédiatement après son arrivée.

(b) Hourdaiges, hourdages, du latin hourdagium, espèce d'échafaud. (Voy. le Supplément à Du Cange.)

(1) Ces articles étaient au nombre de six. Les principaux portaient que don Juan licencierait de sa suite tous étrangers et leurs adhérens, pour n'empêcher le droiturier gouvernement du pays, et que les états généraux réunis à Bruxelles pourraient continuer leurs assemblées. Don Juan ne statua sur ces demandes que le 6 mai, deux jours après sa réception. (Documens inédits.)

points n'ay peu encores avoir copie, pour vous en faire part.

Nous sommes advertyz que, dimenche dernier, entre les une et deux heures apres midy, lors qu'il plouvoyt extremement, l'arriere garde de ladicte gendarmerye, avec tout le reste, se partyt de Mastricht (y estants entrez les nostres), passa la Meuze, et (comme le Sr Escovedo (1) at escript à son alteze) chemina bien cinq lieuwes plus

avant.

Et, comme il n'a pleu à vos seigneuryes d'envoyer icy avec moy quelque aultre, et mesmement un prelat, pour saluer et bienvenir (a) sadicte alteze à son arrivee en ceste ville, ce que, pour l'honneur des estats du Tourne

(1) Escovédo était secrétaire de don Juan, qui avait en lui beaucoup de confiance. Ce prince le chargea de négocier avec les Espagnols qui étaient à Maestricht et à Anvers, pour qu'ils évacuassent ces deux villes : plus tard, il l'envoya en Espagne, avec la mission de rendre compte au roi de l'état des affaires des Pays-Bas. Il y était à peine de quelques mois, qu'il y fut assassiné, les uns ont dit par les ordres de Philippe II, mécontent des conseils ambitieux qu'il donnait à son frère; les autres, par Antoine Pérez, dont il avait dévoilé au roi les intrigues avec la princesse D'Eboli. Dans l'obscurité dont est resté enveloppé cet événement, on lira avec intérêt l'extrait suivant d'une lettre (inédite) que le cardinal De Granvelle écrivait de Rome, le 3 mai 1578, à l'abbé de S1 MaurisMontbarrey, prieur de Bellefontaine, son cousin, et qui fait partie de la collection conservée à la bibliothéque de Besançon : « L'on nous escript d'Es« pagne, qu'ayant le secretaire Scovedo echappé avec sa femme le danger où « ils sont esté de la poison que une esclave avait donnee à tous deux, pour mau<< vais traitemens que, comme elle dysoit, luy faisoit sa maistresse, dont tous « deux furent en grand danger de leur vie, par depuis, la seconde feste de « Pasques, comme il retournat en son logis environ les dix heures du soir, « pres de sondict logis, estant luy à cheval, trois ou quatre inconnus l'assaillirent, « desquels l'un luy passa l'espee au travers du corps, dont il deceda tost apres << sans avoir peu dire une seule parole, et que, en cinq jours, l'on n'avoit peu de<«< couvrir chose quelconque pour scavoir les malfaicteurs. S. M. le souhaiteroit « fort et le seigneur don Jean que luy estoit très affectionné, car il luy avoit faict << bons services. Un courrier est passé par Lyon, qu'en portoit la nouvelle audict seigneur don Jean. Son trespas viendra mal à propos pour les finances; il << venoit de bas lieu et estoit bastard, craint peu à peu, et l'on le tenoit pour << hautain et insolent. Dieu luy pardonne par sa grâce!

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(a) Bienvenir, féliciter, complimenter.

sis, il convenoyt bien, attendu mesmes que tous les aultres estatz sont grandement renforcez non seulement de nobles mais aussy de prelatz, je suis intentioné de m'accoster des Srs De Mortaigne et De Meploix (1) qui arrivairent icy hier, et d'aultres Srs quy encores arriveront dudict Tournesis, pour faire cest acte de salutation et bienvennement ce que pourray, comme j'espere, commodement faire, veu qu'est resolu que, demain au matin, tous prelatz, gouverneurs, gentilshommes et deputtez iront parensamble en la court, et, apres avoir salué en general sadicte alteze, quelcun de la compaignie pour tous portera la parole et harenguera en la bienviennant, et puys par ordre les deputtez de chascune province ou estatz avec leur gouverneur se representeront en particulier, et luy viendront baiser les mains.

Neantmoyns me samble (à correction) que, pour l'honneur dudict Tournesis et mesmes reverence de sadicte alteze, seroyt bien requys d'avoyr avec moy quelque prelat pour la recevoyr à gouverneur et congratuler, ensamble recommander le povre quartier dudict Tournesis, et à ce sera tres bien et plus que idoyne mons le doyen Mannart (2), en parlant aussy à correction

De Bruxelles ce dernier d'avril 1577.

De voz seigneuryes

Tres humble et affectionné serviteur,

BARTHELEMY LIEBART.

(1) C'était deux seigneurs du Tournaisis.

(2) Mannart était doyen de la cathédrale de Tournai.

II.

Lettre du même aux mémes : 3 mai 1577.

Messeigneurs, cește n'est à aultre effect, que pour advertir voz seigneuryes comme le Sr dom Jean entra en ceste ville le premier du courrant environ les six heures du soyr, accompaigné de plus de mille chevaulx des gouverneurs, nobles, gentilshommes, et aussy d'aulcuns prelatz du pays, que precedoyent vingt six enseignes des bourgeoys de cestedicte ville, et marchoyt entre le reverendissime de Liege (1) et le nonce du pape (2). Un peu devant estoyt le Sr duc D'Arschot, vestu d'un collet de velour rouge cremoisy brodé d'or, estant ledict Sr dom Jean affulé (a) d'un manteau de drap de couleur verde. Et, de la porte de Louvain, où luy fut presenté par les sieurs (6) de cestedicte ville un aigle seché au four, fut conduit par la rue des Augustins et puys des Fremineurs (c) au Marché, où, sur la maison de la ville, en l'une des galeryes, nous estions pour saluer son alteze, comme nous fismes, laquelle nous resalua par troys foys

(1) Gérard De Groisbeck, élu évêque de Liége en 1564, mort en 1580. (V. Analectes beigiques, pp. 176 et 177.)

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