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Or, voilà que deux lions, sortant du fond du désert, vinrent se coucher à côté de Paul, le flattèrent avec leurs queues, et jetèrent de grands rugissements, pour lui témoigner qu'ils le pleuraient à leur manière. Ils commencèrent ensuite à gratter la terre avec leurs ongles en un lieu assez proche de là; et, jetant à l'envi le sable de côté et d'autre, ils firent une fosse capable de recevoir le corps d'un homme. Aussitôt après, comme s'ils eussent demandé récompense de leur travail, ils vinrent, en remuant les oreilles, et la tête. basse, vers Antoine, et lui léchèrent les pieds et les mains. L'humble anachorète rendit des louanges infinies à JésusChrist, de ce que même les animaux irraisonnables avaient quelque sentiment de la divinité; il leur fit signe de la main, et ils partirent. Antoine courba ses épaules affaiblies par la vieillesse sous le fardeau du saint corps, et le porta dans la fosse (1).

Tel est le fait historique que rappelle la présence d'un lion à côté de la statue de saint Antoine (2).

2o Altribul. - LA BÈCHE.

Le nombre des disciples de saint Antoine était immense. En rentrant dans sa cellule, il eût voulu s'y ensevelir, et rester oublié et inconnu. Mais, déjà le bruit de sa réputation s'était répandu au loin; et plus il fuyait le monde, plus le monde le poursuivait avec ardeur. Chaque jour, on lui apportait des malades à guérir, des morts à ressusciter et

(1) Vie de Saint Antoine, par M. l'abbé Drioux, professeur d'histoire au séminaire de Langres.

(2) Dans l'atelier de M. Valtat, sculpteur à Troyes, on voit une belle statue de S. Antoine, en pierre, qui date de la dernière moitié du xve siècle, et qui représente, à droite, le Lion, comme attribut du saint anachorète. Cette statue appartient à des membres de la famille de M. l'abbé Bonnemain, chanoine honoraire, vicaire de SainteMadeleine. (VOIR LA PLANCHE No 3.)

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Statue, en

pierre. de St Antoine XV. Siecle.

dans l'atelier de M. Valtan, sculpteur à Troyes.

des possédés à délivrer. Quand il sentit que la foule lui était à charge, et qu'il lui était difficile de conserver son esprit de recueillement et de prière, il résolut de se dérober aux fatigantes instances de ses solliciteurs.

Il se réfugia vers une haute montagne, dont le pied était arrosé par une eau fraîche et limpide, et le sommet ombragé par quelques palmiers. A cette vue, Antoine se sentit poussé par un mouvement intérieur, à s'arrêter dans ce lieu et à fixer sa demeure.

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Ses disciples ayant appris où il s'était retiré, s'empressèrent de l'aller rejoindre, et lui proposèrent de lui procurer sa nourriture. Pour leur en épargner la peine, il leur demanda une Beche (1), une hache et un peu de blé. Alors, il leur donna le plus bel exemple en alliant le travail des mains à la méditation. Il cultiva lui-même l'endroit le plus fertile de la montagne, l'ensemença et l'arrosa. Tous les ans, il reprenait le même labeur, et récoltait assez de légumes et de froment pour lui et les étrangers qui le visitaient.

On dit, pourtant, qu'un jour il s'affligea de ne pouvoir se livrer à l'exercice assidu de la contemplation, et d'être obligé de quitter la prière, pour vaquer à des occupations matérielles. Dieu consola son chagrin, en lui montrant, en vision, un ange qui tressait une natte avec des feuilles de palmier. De temps en temps, l'esprit céleste abandonnait son travail et faisait oraison. Il unissait, de cette manière, la prière au travail. Il dit ensuite au solitaire « Faites de même et vous serez sauvé. » Antoine comprit la leçon et la mit en pratique. Ses disciples l'imitèrent ils ont affranchi le monde de la tyrannie et de la

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(1) Cet attribut fait partie de la statue de la fin du xve siécle, dont nous avons parlé dans l'article précédent, et qui se trouve, en ce moment, dans l'atelier de M. Valtat. (VOIR LA PLANCHE no 3.)

misère, en fécondant le sol par leurs sueurs, et en civilisant les nations par leurs vertus (1).

3o Auribul. -- LE FEU.

Les flammes, qu'on remarque aux pieds du patriarche des cénobites, indiquent l'étrange châtiment du feu sacré, que les peuples appelèrent du NOM DE SAINT ANTOINE, pour le prier d'en étre préservés.

Vers la fin de l'année 1090, plusieurs contrées septentrionales furent envahies par le FEU SACRÉ.

Qu'était-ce que ce fléau? — Affligeait-il l'univers pour la première fois? - D'où s'est-il introduit dans nos provinces? Enfin, quelles causes avaient l'enfanter?

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Voici les symptômes qui annonçaient la présence du feu sacré, et l'effet horrible de ses attaques.

Le mal commençait par une tache noire cette tache s'étendait rapidement, causait une ardeur insupportable, desséchait la peau, pourrissait les chairs et les muscles (2). Feu dévorant, il brûlait petit à petit, et, enfin, consumait ses victimes, sans qu'on pût apporter du soulagement à leurs souffrances. Plusieurs éprouvaient ses plus cruelles atteintes dans l'espace d'une nuit ; s'ils ne mouraient pas au bout de quelques heures, le fléau, prenant plus de force avec le temps, occasionnait une augmentation de tortures équivalentes à une mort de chaque instant; mais, pour les malheureux qu'elles étreignaient, l'affreuse mort n'arrivait en réalité que lorsque le feu, ayant ravagé les extrémités, attaquait les organes de la vie. Ce qu'il y avait d'étonnant, c'est qu'il agissait d'abord sans chaleur, et qu'il pénétrait

(1) Vie de S. Antoine, par M. l'abbé Drioux.

(2) Chronique de Sigebert, année 1090.

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