Seigneur, je sais trop bien avec quelle constance BAJAZET. Et que deviendrez-vous, si dès cette journée ATALIDE. Ne vous informez point ce que je deviendrai. 695 700 Que sais-je? A ma douleur je chercherai des charmes1. BAJAZET. Non, vous ne verrez point cette fête cruelle. Quoi? cet amour si tendre, et né dans notre enfance, J'épouserois, et qui (s'il faut que je le die)? 1. Corneille a employé le mot charmes au même sens : (Le Cid, acte III, scène Iv, vers 921 et 922.) 710 715 Qui présente à mes yeux les supplices tout prêts1, Et trop digne du sang qui lui donna le jour, ATALIDE. Seigneur, vous pourriez vivre, et ne me point trahir. BAJAZET. Parlez. Si je le puis, je suis prêt d'obéir. ATALIDE. La Sultane vous aime; et malgré sa colère, 720 725 Si vous preniez, Seigneur, plus de soin de lui plaire, 730 Si vos soupirs daignoient lui faire pressentir Qu'un jour.... BAJAZET. Je vous entends: je n'y puis consentir. Ne vous figurez point que dans cette journée, Craigne les soins d'un trône où je pourrois monter, 735 J'écoute trop peut-être une imprudente audace; 740 Je prendrois quelque place entre tant de héros. Je ne puis plus tromper une amante crédule. En vain, pour me sauver, je vous l'aurois promis : lit: 1. Dans les éditions de 1807, de 1808 et dans celle de M. Aimé-Martin on et le Qui présente à mes yeux des supplices tout prêts; vers, tel que nous le trouvons dans toutes les anciennes éditions, est donné par M. Aimé-Martin comme une variante. J. RACINE. II 33 Et ma bouche et mes yeux, du mensonge ennemis, : Et je vous quitte. ATALIDE. Et moi, je ne vous quitte pas. Venez, cruel, venez, je vais vous y conduire; Et de tous nos secrets c'est moi qui veux l'instruire. 745 756 755 760 Roxane, malgré vous, nous joindra l'un et l'autre. 765 Elle aura plus de soif de mon sang que du vôtre; Et je pourrai donner à vos yeux effrayés Le spectacle sanglant que vous me prépariez. O ciel! que faites-vous? BAJAZET. ATALIDE. Cruel! pouvez-vous croire Que je sois moins que vous jalouse de ma gloire? Pensez-vous que cent fois en vous faisant parler Ma rougeur ne fût pas prête à me déceler? 770 Mais on me présentoit votre perte prochaine. Pourquoi faut-il, ingrat, quand la mienne est certaine, Allez, Seigneur sauvez votre vie et la mienne1. ᏴᎪᎫᎪᏃᎬᎢ . 780 785 Hé bien! Mais quels discours faut-il que je lui tienne? ATALIDE. Ah! daignez sur ce choix ne me point consulter. Allez entre elle et vous je ne dois pointparoître : 1.Var. Allez, Seigneur : tentez cette dernière voie. BAJ. Hé bien! Mais quels discours voulez-vous que j'emploie? (1672) FIN DU SECOND ACTE. ACTE III. SCÈNE PREMIÈRE. ATALIDE, ZAÏRE. ATALIDE. Zaïre, il est donc vrai? sa grâce est prononcée. ᏃᎪᎥᎡᎬ . Je vous l'ai dit, Madame : une esclave empressée, Aux portes du Serrail a reçu le Visir. 795 Ils ne m'ont point parlé; mais mieux qu'aucun langage, Roxane a pris sans doute une plus douce voie. ATALIDE. Ainsi de toutes parts les plaisirs et la joie Quoi, Madame? Quelle est cette nouvelle alarme ? ATALIDE. Et ne t'a-t-on point dit, Zaïre, par quel charme, 800 805 810 |