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La fouille avait 2m,40 de profondeur, soit 2 mètres dans les alluvions, 0m, 40 dans le Bathonien inférieur, ce dernier représenté ici par une roche dure et d'aspect imperméable, mais divisée en petits bancs.

Nous fimes alors déverser dans la fosse, au moyen de la pompe à incendie, manœuvrée par huit hommes, de l'eau jusqu'à atteindre Om,40 de hauteur, c'est-à-dire jusqu'à l'affleurement inférieur des alluvions. Après quinze minutes d'attente, le plan d'eau n'avait pas sensiblement baissé, ce qui prouve que les calcaires marneux du Bathonien inférieur sont sensiblement imperméables en ce point.

Cette constatation faite, nous fimes pomper de l'eau d'une façon ininterrompue dans la fouille pendant quatre heures. Au bout de ce temps, on avait déversé dans cette dernière 383 tines à vendange ou 34m3,5, ce qui correspondait à un débit moyen de 21,5 à la seconde. Pendant ces quatre heures, l'eau ne s'était pas absorbée d'une façon régulière dans la fouille. Au début, elle s'était infiltrée avec grande facilité. Puis, les terrains environnants s'étant peu à peu saturés, elle ne s'absorba plus en totalité pendant les deux dernières heures. Son niveau monta dans la fouille progressivement et régulièrement de 0,01 par minute.

De ces données, on peut déduire quelle était la puissance d'absorption du terrain à partir de l'instant où il fut saturé.

La fosse avait, en effet, 1,50 de large et 2 mètres de long. La hauteur de l'eau s'y élevant de 0,01 par minute, le volume de l'eau s'y accroissait par seconde de

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Or, pendant le même temps, on déversait 2,5 dans la fosse. Celle-ci absorbait donc 2 litres sur les 2',5 qu'on lui fournissait, c'est-à-dire les 4/5. Ceci nous prouve l'extrême perméabilité de ces alluvions modernes, qui seules constituaient la partie absorbante de la fosse.

Après avoir ainsi fait déverser pendant quatre heures de l'eau dans la fouille, nous y jetâmes, à 1 h. 40 du soir, 1 kilogramme de fluorescéine.

A partir de ce moment, la manoeuvre de la pompe continua, il est vrai, mais fut considérablement ralentie. Les terrains étaient en effet saturés d'eau: il suffisait de verser dans la fouille de faibles quantités d'eau pour que l'écoulement créé persistât.

En une heure trois quarts de temps, on se borna à pomper 70 tines à vendange, soit 6 mètres cubes, ce qui correspondait à un débit moyen de 0,5 par seconde.

La fluorescéine apparut à 5 h. 10 du soir à la source Choslin, qu'elle colora d'un vert intense, ainsi que tout le ruisseau issu de cette

source.

La matière colorante n'avait mis que une heure trente-cinq pour parcourir les 225 mètres qui séparent le champ de la Louise de la source Choslin. Elle avait marché avec une vitesse de 150 mètres à l'heure, la pente générale étant de 9.2 %.

Ce chiffre de 150 mètres est très élevé, étant donné qu'à l'endroit de la fouille le calcaire est imperméable, que c'est dans les alluvions et non dans le calcaire que l'eau a dû circuler et qu'on ne trouve jamais pour la circulation de l'eau dans les alluvions de vitesse analogue.

Il est si élevé qu'il est permis de se demander si, à quelque distance de la fouille, il n'existe par des fissures importantes dans le calcaire ayant drainé l'eau et ayant déterminé la vitesse de propagation de la fluorescéine.

L'expérience ci-dessus n'a pu fixer ce point. Mais, étant donné que le but qu'elle se proposait était de montrer si l'eau d'infiltration baignant les corps ensevelis dans le cimetière pouvait rejoindre la source Choslin et qu'elle a prouvé qu'en effet cette eau gagnerait la source avec une grande vitesse, la question de savoir si le calcaire est ou non fissuré au voisinage de la fouille, si elle présente un certain intérêt au point de vue scientifique, n'en offre qu'un bien moindre au point de vue pratique. D'ailleurs même si ces fissures existent, il n'en reste pas moins acquis que l'eau a dû traverser les alluvions avec une certaine vitesse pour rejoindre ces fissures et que, par suite, les alluvions sont très perméables.

Conclusions:

L'expérience et les recherches précédentes ont montré:

1° Que les alluvions modernes dans lesquelles les fosses du cimetière seraient creusées sont très perméables;

2o Que les eaux de pluie ou de ruissellement qui s'infiltreraient dans le cimetière et baigneraient les corps iraient ressortir à la source Choslin;

3° Qu'en saison humide, c'est-à-dire lorsque les terrains seraient saturés, ces eaux réapparaitraient à la source Choslin avec une vitesse de 150 mètres à l'heure, exclusive de toute idée d'auto-épuration.

Dans ces conditions et sans faire de recherches plus approfondies, telles que des expériences d'ensemencement à l'aide de la levure de bière, nous avons cru pouvoir nous élever catégoriquement contre le

transfert du cimetière d'Asquins au champ de la Louise, en raison des contaminations éventuelles de la source Choslin.

Nous devons ajouter qu'à la suite de cette expérience, la municipalité d'Asquins a renoncé au transfert de son cimetière.

A la suite de cette intéressante communication, une courte discussion s'ouvre sur le point de savoir s'il est réellement possible que la vitesse de translation indiquée par l'expérience de M. Le Couppey puisse être attribuée aux seules alluvions séparant la fouille de la source.

Plusieurs membres pensent, comme M. Le Couppey, que si le calcaire bathonien s'est montré imperméable à l'endroit de la fouille, cela n'implique nullement qu'il en soit de même partout en aval, soit dans la direction de la source.

Il est vraisemblable que l'énorme vitesse obtenue de 150 mètres à l'heure n'est nullement due à un simple phénomène de propagation dans la masse des alluvions terreuses, mais qu'elle aura été obtenue grâce à des fentes ou cassures du calcaire qui, ayant absorbé localement les eaux, les auront fait disparaître sous les alluvions et circuler en canaux localisés dans la direction de la source, où d'autres cassures les auront fait réapparaître.

M. le Secrétaire général, qui partage cette manière de voir, ajoute qu'il serait fort intéressant d'appliquer expérimentalement les procédés de M. Marboutin, déterminant les allures, en terrains fissurés, de ses courbes isochronochromatiques, aux réservoirs aquifères en terrains sableux, limoneux et alluviaux, afin de déterminer dans de tels dépôts les coefficients de vitesse d'écoulement des eaux et les causes de variation et d'irrégularité de propagation souterraine.

La séance est levée à 10 h. 35.

ANNEXE A LA SÉANCE DU 17 MARS 1903

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE

M. LERICHE. Unité du bassin franco-belge pendant l'Ypresien.

L'opinion émise, dès 1855, par Hébert, qu'une communication. directe avait pu exister entre les bassins parisien et belge s'est trouvée absolument confirmée. Successivement E. de Beaumont, d'Archiac et Gosselet ont retrouvé dans les dépôts quaternaires de divers points des hautes vallées de la Somme, de l'Escaut, de l'Oise et de la Sambre, des grès à Nummulites laevigata, se présentant sous l'aspect et avec les caractères de vestiges, souvent à contours subanguleux, d'un démantèlement opéré sur place, ou du moins excluant l'idée d'un transport à grande distance.

Un progrès important dans nos connaissances sur la répartition des terres et des mers d'un âge un peu antérieur vient d'être obtenu par M. Leriche, qui, dans une Note (1) publiée dans le numéro du 26 janvier 1903 des Comptes rendus de l'Académie des Sciences de Paris, après avoir rappelé les circonstances ci-dessus indiquées, nous fait connaître que la même communication devait exister dès l'Éocène inférieur. M. Leriche a, en effet, découvert un gisement de grès à Nummulites elegans, accompagnée de sa forme microsphérique Nummulites planulata et d'Alveolina oblonga, dans un point situé à mi-distance entre les dépôts ypresiens les plus septentrionaux du bassin de Paris et les dépôts correspondants les plus méridionaux du bassin de Belgique. C'est le gisement du Bois-Mirand, à Piémont (Aisne), à proximité du prolongement de l'axe de l'Artois, qui lui a fourni ces intéressants fossiles caractéristiques, lesquels d'ailleurs s'y montraient accompagnés,

(1) Maurice Leriche, Sur l'existence d'une communication directe entre les bassins parisien et belge à l'époque ypresienne.

en grande abondance, de grès du type nummulitique lutécien, ou à Nummulites laevigata. Ainsi se trouve démontrée la continuité de communication des deux parties du bassin franco-belge pendant l'Éocène inférieur et moyen (1).

NOTES ET INFORMATIONS DIVERSES

Et V. D. B.

EDMOND LEPLAE.

La Carte agronomique de Belgique.

A l'Exposition universelle de Paris 1900, les cartes agronomiques étaient nombreuses. La France surtout avait rassemblé un grand nombre de cartes communales; l'Allemagne, l'Algérie, le Grand-Duché de Luxembourg, le Japon, les États-Unis avaient envoyé soit des extraits de leurs cartes, soit des brochures explicatives. Le jury de la Classe d'agronomie s'intéressa tout spécialement aux travaux relatifs à ces cartes agricoles, car leur confection est actuellement à l'ordre du jour dans tous les milieux techniques.

En Belgique aussi, la publication d'une carte agronomique est projetée. Depuis dix ans au moins, une commission spéciale s'occupe de la question; un grand nombre d'analyses ont été exécutées, et l'on commence à se mettre d'accord sur les grandes lignes du travail.

C'est que l'œuvre à entreprendre est difficile, très longue et très considérable : pour arriver à un résultat sérieux, digne du Département de l'Agriculture et des sommes à dépenser, il faut que le travail se fasse avec la plus grande réflexion, les facteurs dont il faut tenir compte exigeant des procédés expérimentaux très différents et dont la plupart sont encore à étudier.

Disons d'abord ce qu'est une carte agronomique. C'est une carte très détaillée indiquant les qualités agricoles » des terres cultivées. Elle doit notamment donner des indications quant aux traitements spéciaux et surtout aux fumures et amendements à appliquer dans chaque espèce de terrain.

Ces renseignements devraient pouvoir être donnés pour chaque pièce de terre, mais comme une semblable extension est pratiquement impossible, on se contente de donner les indications par groupe de terres presque identiques. Ainsi, dans une commune, il est ordinairement facile de délimiter des zones plus ou moins étendues dont les terres se ressemblent très fort au point de vue des caractères physiques et chimiques; ces zones correspondent ordinairement aux divisions géologiques.

Les études entreprises dans ce sens ont donné les plus beaux résultats, et, à cet égard, nous tenons à citer tout particulièrement les cartes agronomiques du GrandDuché de Luxembourg, qui ont été fort pratiquement conçues et rendent certainement de grands services à l'agriculture.

En Belgique, d'assez fortes divergences d'opinion se sont produites lorsqu'on a commencé l'étude de la carte agronomique : deux camps se dessinèrent. L'un, le parti

(1) Au moment de l'impression de ces lignes. nous apprenons que M. Leriche vient d'étendre encore et de multiplier ses points d'observation relatifs à cette continuité sédimentaire marine entre les deux régions, pendant l'Éocène inférieur ypresien.

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