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sources, où l'absence de ce microbe qualifié de pathogène est la très rare exception, tandis que dans les eaux filtrées, sa présence est une rareté?

Les essais de M. Miquel se ressentent de sa méthode; il a fait un peu trop abstraction de l'expérience accumulée par la pratique antérieure. J'applique d'autres règles, que je crois bonnes. Quand j'ai à intervenir dans une installation de filtrage, je commence par laisser faire, exactement comme on faisait avant, pour me rendre compte. Puis je demande au personnel la raison de telle ou telle pratique et je modifie graduellement, en donnant les explications. Je m'assure ainsi la collaboration du personnel. Si M. Miquel avait agi de la sorte, le contremaître de Saint-Maur l'aurait probablement mis en garde contre sa manière de régler les vitesses des filtres.

Il ne semble pas qu'à Paris, du moins à Saint-Maur, on utilise suffisamment les indications combinées de la vitesse et de la perte de charge. Je donne fréquemment pour instructions de n'atteindre une vitesse sérieuse que lorsqu'il y a une perte de charge suffisante. Je considère ce moyen comme très important pour assurer la régularité des résultats.

Les renseignements sur la nature de la pellicule manquent presque complètement. Il y a une seule indication au sujet du filtre expérimental pour l'eau de la Vanne. Le recouvrement d'algues brunes a flotté par l'oxygène occlus et a laissé le sable dénudé par place. Il n'y a pas d'indication d'espèce, mais cela a dû être la diatomée Melosira. Or M. Miquel est micrographe et spécialement diatomologiste; son attention a certainement été attirée sur ces faits; il nous les réserve probablement pour un rapport ultérieur, qui ne peut manquer d'être intéressant.

Quand le travail de M. Miquel a été communiqué à la Commission, il n'y a pas eu beaucoup de discussion. Le Dr Roux a exprimé son accord avec M. Miquel, quant à la signification du coli, comme indiquant un fonctionnement défectueux du filtre; il n'a pas parlé de son caractère pathogène; probablement le rapport n'a pas été lu en entier. M. Janet voudrait voir faire des expériences avec des bassins remplis de sable de Fontainebleau: comme la nature et la provenance du sable sont choses assez accessoires, l'utilité de pareille expérience est assez secondaire. M. Rendu a pris acte que, par une surveillance active, on peut encore améliorer les résultats déjà remarquables du filtrage et rappelle que de nombreuses villes sont fort satisfaites de ce procédé; on doit pouvoir obtenir la même chose à Paris. M. Bechmann émet le

vœu que les méthodes de surveillance permettent de fournir des indications rapides, à quoi M. Miquel répond qu'il se fait fort de dire en moins de vingt-quatre heures si une eau filtrée contient le coli, « dont l'absence garantit le bon fonctionnement du filtre ».

Sauf M. Rendu, personne dans la Commission ne songe à ce qui est admis partout ailleurs. Paris doit naturellement faire autrement, et c'est à cela que va servir le bacille coli.

Dans la séance du 16 juin, le Dr Cornil a eu un mot typique. Parlant du projet de M. Carnot, il dit que les bassins de filtration artificielle offrent plus de sécurité; « mais alors, si l'on se résout à filtrer par ce procédé, pourquoi aller chercher de l'eau dans la Loire? Ne vaudrait-il pas mieux la prendre plus près, dans la Seine? » Personne n'a relevé cette phrase, à laquelle il n'y a rien à répondre.

Il résulte du présent compte rendu que l'on est, à Paris, quelque peu à la débandade. La seule idée nette est la mauvaise qualité des sources, leur danger au point de vue hygiénique toujours menaçant. Également nette est l'impression de l'efficacité du filtrage, malgré encore des réserves et des réticences. Mais quant à un plan d'ensemble pratique, une ligne de conduite générale pour les travaux devant amener une situation stable, c'est le néant. Le service technique continue à mettre en quarantaine les eaux filtrées; elles n'ont pas été utilisées pour l'alimentation, dit M. Bechmann, les filtres de Saint-Maur n'ont fonctionné que pour les expériences de M. Miquel. Le Service technique continue à proposer des captages, que la Commission rejette.

Dans l'étude du deuxième volume, nous avions fait une proposition: utiliser les sources actuellement captées pour les usages publics et grossiers, assurer l'alimentation domestique par de l'eau de Seine filtrée. Si tant est qu'ils nous fassent l'honneur de nous lire, beaucoup d'hygiénistes parisiens auront considéré cette proposition comme une plaisanterie. Le rapport actuel de la Commission est de nature à leur faire prendre plus au sérieux cette suggestion au premier abord subversive. On y gagnerait de pouvoir abandonner cette surveillance médicale qui ne pourra jamais être suffisamment efficace, qui est condamnée à toujours rester une protection précaire; on y gagnerait la suppression de la fièvre typhoïde. L'institution resterait ce qu'elle est maintenant, sauf que ce serait l'inverse. Elle resterait aussi comme l'exemple d'un grand effort, malheureux à cause de l'imperfection de la science à l'époque de sa conception et par un autre effort de volonté, tout aussi méritoire moralement, modifié radicalement pour être mise en rapport avec une science plus parfaite. AD. K.

NOTES ET INFORMATIONS DIVERSES

Enduit pour réservoirs d'eau.

A Zwickau (Saxe), l'enduit intérieur, ou ciment, du réservoir de la distribution d'eau a été attaqué de façon telle qu'à des intervalles de temps relativement courts, il a fallu y exécuter des réparations onéreuses et causant des interruptions dans le service d'alimentation. On a pu constater aussi qu'aux endroits où le ciment avait reçu des éclaboussures de couleur siderosthen (voir Annales, t. VI, p. 1081, et t. VII, p. 1283) dont on avait recouvert les armatures en fer, l'enduit semblait intact. Un essai fait sur de grandes surfaces montra que cette protection est réelle. Le siderosthen pénètre profondément dans le ciment et recouvre celui-ci d'une pellicule très élastique et parfaitement homogène, laquelle adhère fortement à la surface et résiste à toutes les pressions. Les frais se sont élevés a fr. 0.89 le mètre carré pour deux couches de couleur.

L'action destructive exercée sur le ciment par l'eau très pure et très douce du réservoir doit être attribuée, d'après le professeur Vogel, de Berlin, à la dissolution du carbonate de chaux du ciment sous l'influence de l'acide carbonique contenu dans l'eau. Ce phénomène se produit assez fréquemment dans les canalisations et réservoirs d'eau potable exécutés en béton.

Nos Annales ont indiqué, tome VIII. page 184, la raison de cette décomposition du béton de ciment. D'autre part, elles ont montré comment la même action de l'acide carbonique entraine des conséquences préjudiciables et rapides pour les conduites en fonte. Cette démonstration se trouve dans les tomes II, page 912, et V, page 303. (Extr. Annales Trav. publ. de Belg., juin 1903, 2o série, t. VIII, p. 625.)

Puits artésiens.

Actuellement, les appareils de forage perfectionnés permettent d'atteindre facilement d'énormes profondeurs.

A Paruschonitz, on a creusé un puits artésien de 2 003 mètres en quatre cents jours, soit un avancement de 5 mètres par jour; 200 mètres environ sont creusés dans l'alluvium et le diluvium; le reste traverse des couches houillères. Le diamètre initial du trou de sonde est de 320 millimètres, le diamètre terminal de 70 millimètres. Au fond du puits on a constaté une température de 69,3 C. Tous frais compris, le travail a coûté 93 750 francs, soit environ 40 francs par mètre courant. Le tubage est composé de tuyaux en acier.

D'après les observations de Tecklenburg, le débit d'un puits artésien de 150 milli

mètres de diamètre utile s'élève à 40 mètres cubes par jour; un diamètre de 500 millimètres peut donner, à une profondeur de 50 à 90 mètres et dans le gros gravier abondant en eau, jusque 750 mètres cubes par jour.

Un des puits artésiens les plus larges est celui de 1 mètre de diamètre et 36 mètres de profondeur, creusé à Mannheim par MM. Sholz et Höring.

(Extr. Annales Trav. publ. de Belg.. juin 1903, 2e série, t. VIII, pp. 624-625.)

Action de l'eau sur les conduites en plomb.

Comme suite à un article paru précédemment dans nos Annales (année 1898, p. 834), nous donnons ci-dessous le résultat de recherches faites par la Commission d'hygiène du Massachusetts au sujet de l'action de l'eau sur le plomb.

Il résulte de l'ensemble de ces recherches que si l'eau attaque les tuyaux en plomb de certaines distributions, c'est à cause de la présence d'une quantité considérable d'acide carbonique libre dans les eaux souterraines. De nombreuses expériences de laboratoire ont prouvé qu'une eau pure et douce, surtout lorsqu'elle contient de l'oxygène en dissolution, attaque le plomb; et tandis que l'ammoniaque libre, les nitrates et les nitrites contenus dans l'eau douce exercent une action dissolvante notable sur le plomb dans les essais de laboratoire, on constate, au contraire, que pour obtenir un semblable effet dans la pratique, il est nécessaire que l'eau potable contienne une grande quantité d'acide carbonique libre.

Quoi qu'en disent les expériences de laboratoire, il ne suffit pas qu'une eau soit douce ou relativement pure de matières minérales en dissolution pour qu'elle puisse se charger d'une quantité de plomb suffisante pour en rendre l'usage dangereux. Le fait peut être dû encore à d'autres causes, et il est établi par les analyses d'échantillons d'eau pris sur des conduites en usage dans des villes alimentées par des eaux de surface, qui sont généralement plus douces que la moyenne des eaux souterraines. De même si l'eau contient de l'oxygène en dissolution sans acide carbonique libre, elle est susceptible d'attaquer le plomb.

Certains indices font supposer que la composition des matières minérales contenues dans l'eau de source peut influencer légèrement l'action de celle-ci sur le plomb, et qu'une certaine quantité d'oxyde de fer, se séparant de l'eau et se déposant dans les tuyaux, a parfois une action appréciable sur le mème métal. Ce ne sont là que des influences minimes cependant. Il a été établi, d'autre part, que plus une eau est dure, moins l'acide carbonique libre qu'elle contient a d'action sur le plomb.

(Extr. de Engineering News, 9 octobre 1902. Reproduit dans les Annales des Trav. publ. de Belg., juin 1903, 2e série, t. VIII, pp. 619-620.)

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Du 11 au 17 janvier 1903, l'archipel des Tuamotu a été dévasté par une tempète. Sur ce désastre, M. Édouard Petit, gouverneur des Établissements français de l'Océanie, a fait publier un ensemble de documents officiels très intéressants (1).

(1) République française. Établissements français de l'Océanie. - Renseignements sur le cyclone qui a dévasté les iles Tuamotu du 11 au 17 janvier 1903. (Extrait du Journal officiel des Établissemenis français de l'Oceanie des 12-13 janvier 1903.) Papeete, Imprimerie du Gouvernement,

Rappelons que l'archipel des Tuamotu se compose d'une série d'atolls, c'est-à-dire d'iles coralliennes constituées par un étroit cordon entourant plus ou moins complè tement une nappe intérieure appelée lagoon. Ce cordon, sur lequel sont établies les habitations et les plantations, ne s'élève qu'à 2 ou 3 mètres au-dessus de la haute mer et, par suite, se trouve très exposé aux envahissements de la mer. Cette disposition explique la catastrophe qui a atteint notre colonie du Pacifique.

Les documents officiels donnent le nom de cyclone à l'ouragan qui a dévasté les Tuamotu; mais, comme le fait observer le rapport du capitaine de frégate N. Rozier, commandant de la Durance, les renseignements ne sont pas encore suffisants pour savoir si c'est une tempête de ce genre qui a touché l'archipel.

Tandis que les parties Ouest et Nord-Ouest des Tuamotu n'éprouvaient que des dégâts matériels peu importants, les iles orientales étaient dévastées, notamment Hikueru et Marokau.

A Hikueru, le 14 janvier, à 8 heures du matin, avec un assez fort vent d'Est, la mer est grosse. Deux heures plus tard, elle atteint les habitations, et, à midi, en enlève plusieurs. Après une accalmie dans la soirée, le lendemain le village est anéanti. Le 16, à 4 heures du matin, la mer déferle également par le lagoon; la population, menacée de tous côtés de submersion, se réfugie sur un espace de 50 mètres à la pointe de Tupapati. Pendant quelques minutes, l'ile est alors absolument sous l'eau, le lagoon passant par-dessus l'atoll et rejoignant la mer.

Le 16 également, la mer submerge les ilots qui bordent la partie Est de l'île, enlevant maisons et habitants, à l'exception de quelques personnes réfugiées au sommet des cocotiers. Pas moins de 373 habitants ont trouvé la mort à Hikueru.

A l'ile voisine de Marokau, le désastre n'a pas été moins terrible. Le village a été complètement rasé et 95 habitants engloutis, les cocotiers brisés et déracinés; une partie de ces arbres a été jetée dans le lagoon, preuve que la mer a complètement balayé le cordon corallien et déferlé jusque dans la nappe intérieure.

A Makemo, le village du Nord-Ouest aurait été détruit; celui de Teturanga a beaucoup souffert, mais il n'y a pas eu de mort à déplorer.

L'ile Raroia a été également ravagée, les maisons et les cocotiers rasés et 12 indigènes noyés. Telle était la violence et la hauteur des vagues que des goélettes et des cotres ont été transportés à 200 mètres du rivage au milieu des ruines du village. Au total, 515 personnes ont trouvé la mort dans ce sinistre, soit environ le dixième de la population des Tuamotu.

(Extr. de la Géographie de Paris, 15 avril 1903.)

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