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et Magnin dans le Jura, la vitesse de propagation de cette substance était, en général, inférieure à 1 kilomètre par jour, elle est toujours égale, au moins, à 3 ou 4 kilomètres pour les terrains jurassiques à régime vauclusien de la région dite des vallées de l'Yonne et de la Cure. Le retard de la fluorescéine par rapport aux autres substances ne semble pas non plus être constant, ni même définitivement démontré : le phénomène est en tout cas, dans les régions crayeuses alimentant la ville de Paris, inverse de celui constaté dans le Jura.

Il ne semble donc pas qu'on puisse, dès à présent, formuler les lois générales de la marche souterraine de cette substance et qu'il faille, au contraire, pour déterminer ces lois, procéder à de nombreuses expériences dans des terrains très différents au point de vue de leur constitution géologique et rechercher, lors de ces expériences, quelle peut être l'influence de ces terrains sur la conservation ou la destruction de la fluorescéine.

Ces diverses expériences devront, pour pouvoir être comparées, être non seulement effectuées dans des saisons analogues au point de vue hydrologique, mais autant que possible faites simultanément; ainsi qu'on le sait depuis longtemps, et ainsi que M. Fournier l'a montré lui-même dans le cas de la source d'Arcier (1), le parcours des eaux souterraines est parfois très différent en saison sèche de ce qu'il est en saison humide.

Successivement, M. Van den Broeck donne connaissance à l'assemblée des lettres suivantes qu'il a reçues au sujet de l'intéressant problème de la vitesse des eaux souterraines et de la fluorescéine.

Note de M. Trillat.

Je n'ai pas d'observations particulières à faire, sauf les suivantes : 1° J'ai indiqué (Mém. de l'Institut Pasteur, 1899, p. 44) qu'il y avait lieu de toujours filtrer les eaux avant leur examen au fluorescope;

2o L'objection de M. Le Couppey (p. 10 de sa note) concernant l'emploi de petites doses de fluorescéine est peu fondée. Rien n'empêche d'employer des doses minimes de fluorescéine en employant le fluorescope;

(1) E. FOURNIER, Sur le mode de propagation des eaux dans les calcaires. (COMPTES RENDUS DE L'ACADémie des sciences, 13 janvier 1902.)

3° Il est bon d'ammoniacaliser l'eau avant l'examen au fluores

cope (1);

4o Je serais fort heureux que votre recueil voulût bien donner un résumé du travail que j'ai fait paraître dans les Annales de l'Institut Pasteur et dont je vous ai envoyé un tiré à part; je crois cet exposé utile pour vos discussions;

5° Je désigne l'appareil sous le nom de fluorescope (de fluorescéine) et non de fluoroscope.

NOTA.

(s.) TRILLAT,

Chef de service à l'Institut Pasteur.

J'ai souligné dans ma Note sur la fluorescéine, publiée dans les Annales de l'Institut Pasteur, le passage où je recommande instamment de filtrer, le moindre trouble empêchant le jeu du dichroïsme de se produire.

Rien ne vaut la fluorescéine pour les recherches dont vous vous occupez, sauf peut-être la fuchsine acide, dans des cas tout à fait exceptionnels.

Il est décidé par l'Assemblée, à la suite de la demande ci-dessus, que le travail de M. Trillat, publié dans les Mémoires de l'Institut Pasteur (Note sur la fluoresceine), sera inséré en entier et annexé au procès-verbal de la séance.

Extrait d'une lettre de M. le professeur Fournier.

Après avoir fourni, en réponse à diverses demandes de renseignements, quelques données sur le mode opératoire permettant de déceler pratiquement la présence de l'amidon, du sel et des levures, M. Fournier annonce qu'il continue ses études sur les différences de vitesse de propagation des diverses substances employées, mais qu'il n'a pu jusqu'ici reconnaître les causes de ces différences.

Il ajoute ensuite

<«< Dans l'expérience de la levée des vannes, il faut tenir compte de

(1) Cette précaution n'est toutefois nullement nécessaire avec les qualités de fluorescéine généralement employées en France et qui sont rendues complètement solubles; telles les qualités fournies, en vue d'expériences de l'espèce, par la Société des produits chimiques et matières colorantes de Saint-Denis, 105, rue Lafayette, à Paris, et par la Société nationale de produits chimiques, 30, rue des Écoles, à (Note du Secrétarial.)

Paris.

la propagation du mouvement ondulatoire, qui est non seulement plus rapide que le mouvement de propagation d'une solution, mais plus rapide que le mouvement moléculaire de l'eau elle-même sous l'influence du courant.

>> Cette propagation ondulatoire peut, en certains cas, troubler des eaux décantées dans des réservoirs souterrains et faire apparaître un trouble aux résurgences, bien avant que les eaux troublées de la surface n'y soient parvenues.

>> Des expériences simultanées avec l'amidon, le sel et la fluorescéine vont être entreprises par moi incessamment; jusqu'ici, ces expériences ont été faites à des époques différentes (1), mais les variations entre deux expériences à la fluorescéine exécutées en grandes et en basses eaux n'ont jamais été aussi considérables que celles qui existent entre deux expériences faites l'une avec le sel, l'autre avec la fluoresceine, toutes deux exécutées en eaux moyennes. »

Note de M. Putzeys.

M. E. Van den Broeck, notre zélé Secrétaire général, ne s'est pas simplement borné à demander aux personnes qu'il estime spécialement compétentes en la matière, leur avis sur les conclusions de MM. Fournier et Magnin; désireux de savoir si les expériences étaient comparables entre elles, il s'est adressé à l'un des auteurs de la note, M. Fournier, et lui a demandé si les conditions dans lesquelles les expériences qui servent de base à ses conclusions sont comparables. Nous venons d'entendre la réponse de M. Fournier.

Je regrette d'être amené à dire que l'interprétation à donner à la lettre de M. Fournier n'est pas du tout celle à laquelle, en bonne logique, on devrait s'arrêter. On devrait pouvoir conclure de cette lettre Les expériences ont été faites le même jour, du moins à intervalles suffisamment rapprochés pour éviter des causes d'erreur.

Nous savons, en effet, que rien n'est capricieux comme le régime des eaux souterraines en terrain calcaire; qu'il suffit d'un orage, d'une pluie, d'une manœuvre de vanne dans un bief d'usine, de moulin,

(1) Cette déclaration est en contradiction avec un énoncé fourni par une lettre antérieure de M. le Prof Fournier à M. Van den Broeck, énoncé auquel il est fait allusion dans l'analyse de la Note de MM. Fournier et Magnin présentée par M. Van den Broeck. Il semble y avoir eu malentendu entre la donnée d'une même époque de l'année et celle de la notion d'années différentes : ce qui est le cas des expériences en discussion, qui n'étaient donc nullement comparables. - (Note du Secrétariat.)

d'une modification dans la distribution d'eau d'irrigation, pour travestir une situation que l'on croyait avoir bien déterminée.

Je n'ai donc pas à insister sur la portée précise que l'on devrait pouvoir attribuer aux termes d'une lettre, venant à l'appui d'une note d'allure scientifique, qui renseigne comme fait acquis (pour une région calcaire tout au moins) des faits déconcertants.

Si la science amène de perpétuelles surprises, s'il est bien des choses qui, d'abord niées, se sont trouvées rigoureusement vraies par la suite, encore faut-il que quand des faits paradoxaux sont énoncés, ils s'appuient sur des données positives.

Ce n'est pas le cas ici; si je suis tenté de croire que MM. Fournier et Magnin, dans la chaleur de leurs recherches, se sont laissés entraîner trop loin, je dois, dans l'intérêt de la science, montrer ce que, dans sa première lettre, mentionnée page 246, M. Fournier nomme des conditions semblables pour des expériences qu'il reconnaît aujourd'hui avoir été faites à des époques différentes.

La note déposée en séance de l'Académie des sciences dit que la source d'Arcier, dans l'expérience Jeannot, a témoigné de la présence du sel marin après neuf heures trente minutes au lieu des nonantedeux heures qui s'écoulent avant l'apparition de la fluorescéine.

Or, si l'on ouvre le travail de M. Fournier sur « les sources et les résurgences du Franc-Comtois », on voit que ces expériences ont été faites à huit ans d'intervalle!

Je dois confesser, Messieurs, que j'ai dû comparer les textes à plusieurs reprises avant de pouvoir me pénétrer de l'idée que les conclusions de la note à l'Académie des sciences étaient basées sur des phénomèmes relevés par des expérimentateurs différents, à plusieurs années de distance...

Nous n'avons pas à regretter le temps que nous avons consacré à une discussion en soi fort puérile, puisque nous combattions des moulins à vent; le trop grand empressement de MM. Fournier et Magnin nous a valu, en effet, la lecture d'une série de notes du plus haut intérêt, comme suite à l'appel de notre savant Secrétaire général.

Mais il y a désormais, pour toute personne ayant étudié le mode de circulation si imprévu, si fantasque, serait-on tenté de dire, des eaux dans les calcaires, il y a, dans le travail de MM. Fournier et Magnin, une juxtaposition de faits tellement inconciliables que la plus extrême bienveillance ne parviendra pas à sauver leurs conclusions du naufrage.

Extrait d'une lettre de M. Le Couppey de la Forest.

<< Pour ce qui regarde les substances en suspension, elles ne marchent guère plus vite que la fluorescéine quand le courant de l'eau est rapide et que la fluorescéine est bien mélangée à l'eau. Mais si l'eau colorée entre dans une mare pour ainsi dire dormante, l'eau colorée gagne les profondeurs de la mare, en vertu de sa plus grande densité, tandis que les substances en suspension flottent à la surface. Elles peuvent sortir alors de la mare avant l'eau colorée, suivant les courants qui les entraînent. C'est du reste une expérience très simple à faire. »

Extrait d'une lettre de M. le Prof Max Lohest.

« Je ne puis m'expliquer les résultats négatifs de certaines expériences à la fluorescéine que j'ai faites dans les calcaires carbonifères sans invoquer, ou une circulation très lente des eaux colorées, ou un dépôt de la fluorescéine en cours de route.

» Je suis partisan d'employer de grandes quantités de fluorescéine, surtout après une première expérience négative.

» Au point de vue de la possibilité de contamination, les expériences à la fluorescéine ne fournissent qu'une première indication.

>> Elles doivent être complétées par d'autres expériences à la levure de bière, par exemple. »>

Note de M. E.-A. Martel.

Bien que MM. Fournier et Magnin soient d'excellents observateurs et de hardis pionniers souterrains, que je me félicite d'avoir lancés dans les recherches spéléologiques, je ne puis admettre leur dernière note sans les plus formelles réserves, car certaines de leurs conclusions tout au moins sont prématurées.

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Au contraire, je ne puis que souscrire intégralement à la plupart des remarques et conclusions de M. Le Couppey de la Forest.

Depuis 1896, j'étudie la marche de la fluorescéine dans les eaux tant souterraines qu'extérieures, et j'ai dû faire à ce sujet près de deux cents expériences.

Je n'en ai pas encore coordonné les résultats, parce que, pour moi, la question n'est pas au point; j'espère l'y mettre cette année par une dernière série d'expériences.

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