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BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

CH. RABOT. Diminution de la nappe phréatique en Angleterre. (Extrait de La Géographie, VII, no 5, 1903, 15 mai, pp. 376-377.)

Dans ces dernières années, le niveau de la nappe phréatique s'est abaissé dans toute l'Angleterre, et, en plusieurs localités, avec une rapidité alarmante. Dans une réunion tenue à Londres, le 11 février, sous les auspices du « Sanitary Institute », pour envisager cette question de l'eau, plusieurs orateurs ont mis en lumière des faits très intéressants que rapporte le Symon's meteorological Magazine, publié par notre savant collègue, le Dr Hugh Robert Mill (n° CCCCXLVII, vol. XXXVIII, avril 1903; Londres, p. 45). La disette d'eau a été signalée comme particulièrement remarquable dans le Hertfordshire, notamment dans la vallée de la Lea; dans la région crayeuse du Kent septentrional, l'abaissement du niveau de la nappe souterraine se manifeste avec non moins d'évidence, à la grande inquiétude de la population, et les cours d'eau tarissent. M. W. Whitaker, après avoir montré la généralité du phénomène dans toute l'Angleterre, a attribué le déficit, pour une part, à une diminution des précipitations, et, pour une autre, à l'usage abusif de la nappe souterraine par les usines et par des travaux. M. R. H. Mill, avec sa compétence toute particulière, a démontré à l'assemblée que l'Angleterre passe actuellement par une phase de sécheresse.

Pendant la dernière période de trente-sept ans (1865-1901), durant laquelle a fonctionné le service pluviométrique dû à l'initiative privée (British Rainfall), seulement les sept années qui s'étendent de 1865 à 1871, les précipitations ont atteint la moyenne de toute la période; durant les quinze années suivantes (1871-1886), il y a eu excès de

pluie (8% en moyenne) par rapport à la moyenne de toute la période, tandis que de 1886 à 1901, il y a eu déficit (8 % en moyenne).

Durant cette dernière période, seulement trois années les précipitations ont été supérieures à la moyenne. Le déficit est particulièrement remarquable en Irlande et dans le pays de Galles; dans le centre de l'Angleterre, il est très important et atteint 16 ou 17 % pour la période décennale 1890-1899. En revanche, actuellement, on relève une augmentation des précipitations dans l'Ouest de l'Écosse, dans le district des Lacs et dans le Nord-Ouest du Yorkshire.

CH. RABOT.

ROGERS ET SCHWARZ.-Une période glaciaire pendant l'époque devonienne dans l'Afrique du Sud. (Ann. Rep. Geol. Comm. Cape of Good Hope, 1900.)

A peine l'étude géologique des formations du Karroo a-t-elle établi l'existence d'une période glaciaire pendant le Trias dans l'Afrique du Sud, que voici, dans le rapport de la Commission géologique du Cap pour 1900, MM. Rogers et Schwarz signalant, à leur tour, l'existence d'un conglomérat glaciaire avec roches striées dans les couches d'àge devonien (Table Mountain Sandstone) des Cederbergen : une chaîne de montagnes qui court parallèlement à la côte de l'Atlantique, au NordEst de la colonie du Cap.

Le conglomérat, que, par suite de sa position stratigraphique, il faut rattacher au Devonien inférieur, est constitué par un Boulderclay durci, renfermant des galets de quartzite veineux, de quartzite homogène, de felsite et de granite, dont les plus volumineux peuvent atteindre un diamètre de 1 décimètre. La grande majorité de ces galets présentent des facettes avec des stries très caractéristiques. Le conglomérat a été déposé en concordance avec les roches sous et susjacentes; on peut donc en conclure qu'il a été déposé sous l'eau, et que les galets auraient été amenés par le transport des blocs de glace provenant d'un glacier voisin.

M. Costorphine, le directeur du Service géologique du Cap, rappelle du reste qu'on a trouvé également des traces de striation glaciaire dans les conglomérats du Old Red Sandstone d'Écosse.

Le sol sur lequel on a découvert les traces d'une accumulation glaciaire pendant la période devonienne n'a plus subi d'immersion depuis cette époque éloignée, et c'est à ce point de vue la partie la

plus ancienne du continent africain actuel. Les grès du Table Mountain proviennent de la dénudation des Malmesbury beds, et l'on ignore de quelles régions provenaient les sédiments, arénacés et vaseux, constituant cette dernière formation, qui représente le sol de cette partie de l'Afrique pendant les temps prédevoniens. C'est sans doute aussi de cette dernière formation que proviennent les roches striées qui font partie du conglomérat glaciaire devonien des Cederbergen. V. DE W.

REUSCH HANS. La structure géologique du Telemarken. (Naturen, Bd 27, Bergen, 1903.)

Le district de Telemarken se trouve à l'Ouest de Christiana. Les dépôts algonkiens y représentent une épaisseur remarquable, qui, d'après Dahll, atteindrait au moins 9 500 mètres. L'auteur a représenté, sur une carte, le gisement des quartzites, des roches volcaniques superticielles et des roches ignées profondes qui y correspondent.

Il est manifeste que la période algonkienne a été d'une très longue durée. Il semble qu'il faille remonter aux temps obscurs de la période archéenne pour découvrir l'apparition de la vie sur le globe. Il survint ensuite une étape pendant laquelle l'essor des organismes fut arrêté, et ceux-ci furent détruits pour la plupart. C'est pendant la période algonkienne que les espèces qui étaient parvenues à se maintenir purent se développer pour atteindre la période cambrienne.

V. DE W.

NOTES ET INFORMATIONS DIVERSES

Conférence de M. le ProfTM Lacroix à la Société de Géographie de Paris. Les

éruptions de la Montagne Pelée et de Saint-Vincent.

Dans une conférence donnée à l'Assemblée générale du 24 avril 1903 de la Société de Géologie de Paris, et qui se trouve résumée dans le numéro du 15 mai de la Géographie, par M. Fréd. Lemoine, M. A. LACROIX, professeur au Muséum, a traité des résultats synthétiques de ses études et observations tant à la Montagne Pelée de la Martinique qu'à la Soufrière de Saint-Vincent.

L'orateur a commencé par indiquer magistralement les grands traits de la topographie et de la géologie de la Martinique. Le sol en est généralement volcanique et le point culminant du relief est la Montagne Pelée, dont le volcan, endormi depuis 1851, s'est réveillé en 1902. Avant l'éruption, ce volcan offrait comme appareil extérieur un cratère, situé sur le revers occidental de la montagne, à une altitude de quelques centaines de mètres au-dessous de l'ancien lac des Palmistes. Les crètes du Morne la Croix, du Morne Martin et du Petit Bonhomme le bordaient. Ce cratère unique est formé par une ancienne caldeira, dont le fond était occupé par l'Étang Sec. On désigne sous le nom de caldeiras des cavités abruptes, environnées d'une sorte de rempart conique, résultant d'une explosion exceptionnellement violente accompagnée d'effondrement. Les parois intérieures des caldeiras sont généralement verticales, décelant. comme découpées à l'emporte-pièce, les roches de l'ancien sol. Le rempart conique extérieur est constitué par l'accumulation des matériaux projetés. La caldeira de la Montagne Pelée s'ouvrait au sommet, mais présentait du côté Nord-Ouest une profonde échancrure qui a eu une influence néfaste sur les résultats de l'éruption. Elle est, en effet, dirigée vers Saint-Pierre. De cet unique cratère sont parties, sillonnées d'éclairs pendant les paroxysmes, les projections de gaz et de vapeur d'eau chargée de cendres, de boue, de lapilli, de blocs et bombes que l'on observe dans toute éruption.

En effet, l'éruption actuelle, jusqu'au 31 juillet 1902, date du départ de la mission Lacroix, a consisté exclusivement dans une phase explosive; elle n'a produit aucune coulée de laves. On n'a constaté, en dehors du cratère, ni fente béante, ni changement de niveau du rivage, ni affaissement, ni soulèvement notables dans l'intérieur des terres, ni modifications appréciables des fonds au voisinage de la côte, ni tremblement de terre. Les grandes explosions ont été accompagnées d'une dépression barométrique subite et de petits raz de marée, parfois meurtriers, se faisant sentir jusqu'à Fort-de-France. Les blocs de lave incandescente n'ont été projetés qu'à quelques centaines de mètres du cratère, mais les cendres et les lapilli sont tombés sur toute la

Martinique. La dévastation n'était complète, au 31 juillet, que sur une zone de 2 à 3 kilomètres autour du cratère et sur toute la côte Ouest entre l'ilot de la Perle et les premières maisons du Carbet. Au milieu de la zone dévastée, dans le prolongement de la large brèche ouverte près du sommet de la Montagne Pelée, abondent, dirigées vers le Sud-Ouest. les fumerolles sulfhydriques. Ces fumerolles jalonnent, dans la vallée de la Rivière Blanche, une ligne de fissures se trouvant vraisemblablement sur la prolongation de la fente du cratère. La destruction de Saint-Pierre doit ètre attribuée sans doute, à la position de cette fente, profonde échancrure en forme de V, qui s'ouvre vers le Sud-Ouest, au-dessous de la Rivière Blanche, et par laquelle des poussées obliques se sont dirigées en éventail sur la malheureuse ville. Enfin, la direction des fissures se prolonge sous la mer et doit être la cause de la rupture du câble sous-marin français.

Mais, outre ces faits ordinaires, deux phénomènes spéciaux caractérisent l'éruption actuelle. La description de ces deux phénomènes et l'explication de la catastrophe de Saint-Pierre font plus particulièrement l'objet de la conférence. A l'aide de nombreuses projections photographiques, M. Lacroix fait renaître sous les yeux de ses auditeurs ces phénomènes et le déplorable événement qui attriste la France.

Le premier de ces phénomènes est la formation, par accumulation, d'un dôme de lave sur l'orifice de sortie de la bouche souterraine du volcan. Il se produit dans les éruptions de laves acides, trachytes ou andésites; l'intérieur de l'amas est rempli de lave en fusion; celle-ci, à cause de sa faible fusibilité, est très visqueuse. Sa surface est revêtue de blocs qui s'éboulent au fur et à mesure de leur solidification, et qui lui constituent ainsi une sorte de carapace pierreuse. Les dômes trachytiques des volcans éteints du Puy sont de ce genre. Mais c'est la première fois que des savants assistent à ce phénomène.

Grâce à des profils datés avec exactitude, et à de curieuses photographies, M. Lacroix fait assister ses auditeurs étonnés à la naissance et à la croissance de ce dôme de lave. Dès les premiers jours de l'éruption, un amas de laves, que les géologues américains prirent à tort pour un cône de débris, constitué par de la lave compacte et continue, s'est édifié dans l'ancien cratère (Étang Sec). Aujourd'hui ce dóme dépasse la crête de la montagne de 300 mètres. Il s'élevait parfois de plus de 10 mètres en vingt-quatre heures, mais souvent son ascension était compensée par des éboulements. Voici quel est son mode d'accroissement. La lave visqueuse afflue d'abord dans les fissures du cône déjà existant; son incandescence la rend visible la nuit. Ensuite, toute la masse, ou seulement une partie, se soulève avec lenteur. Des aiguilles hérissent sa surface et au sommet se dresse une dent. Vue de la mer, cette dent a la forme d'un obélisque aigu; des bords du cratère, elle est, en réalité, recourbée vers le Sud-Ouest, limitée au Nord, à l'Est et au Sud-Est par une surface eylindrique, polie et striée verticalement par frottement. La face Sud-Ouest, qui ne suit pas régulièrement le lent mouvement d'ascension, s'écrase, prend l'aspect ruiniforme, pendant que la courbure de la dent s'accentue. Ce dôme, que l'orateur a vu surgir des bords du cratère, fait de la Montagne Pelée le plus haut volcan des Antilles; puis élevé au milieu de l'ancienne caldeira, il en comble peu à peu la cavité et s'est déjà soudé à sa paroi occidentale. Ainsi deux types volcaniques différents se sont greffés l'un sur l'autre et se confondront peut-être.

L'autre phénomène, non encore observé scientifiquement, est la production de nuées ardentes, l'un des traits essentiels de l'éruption actuelle. Ces nuées, ou nuages denses à haute température, qui, rasant le sol, brûlent et asphyxient les ètres vivants et détruisent tout sur leur passage, sont produites par une projection de gaz et de vapeurs, entrainant dans une direction plongeante une énorme quantité de cendres et

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