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invisible à l'observateur. Nous croyons utile d'indiquer ici les principales causes d'altération de ce témoin et les moyens d'y remédier.

Influence de la lumière. La lumière a une influence très importante sur les solutions très diluées de fluorescéine, d'autant plus que l'action décolorante qu'elle exerce est irrémédiable; il n'est plus possible de régénérer la teinte disparue. On peut dire qu'une solution de fluorescéine au 100,000,000° n'est plus décelable avec certitude au fluorescope après avoir été exposée pendant trois heures aux rayons directs du soleil. Il est donc absolument indispensable de placer à l'abri de la lumière les échantillons d'eau pris à l'émergence, si l'on ne veut s'exposer à obtenir des résultats négatifs.

Influence de l'acide carbonique. L'acide carbonique, qui se rencontre toujours en quantité plus ou moins notable dans les eaux souterraines, exerce aussi une action décolorante et très rapide sur les solutions de fluorescéine. Pour s'en convaincre, il suffit de faire passer un courant d'acide carbonique dans la solution, et l'on peut constater alors que cette solution se décolore en très peu de temps.

Si à de l'eau de pluie recueillie directement -eau qui contient, comme on le sait, une notable proportion d'acide carbonique — on ajoute de la fluorescéine pour amener le titre au 100,000,000o, la teinte verte n'est absolument pas visible, même au fluorescope. Mais ici, contrairement à ce que nous avons vu pour la lumière, la matière colorante peut toujours être régénérée, même après des actions de longue durée. Il suffit pour cela de neutraliser la solution par quelques gouttes d'ammoniaque, et la teinte verte caractéristique de la fluorescéine réapparaît exactement avec la même intensité que précédemment. Le contact prolongé sur le calcaire, autrement dit le fixage à peu près complet de l'acide carbonique par le calcaire, produit le même résultat, c'est-à-dire qu'il régénère la teinte verte. (Contrairement à ce qu'en pensent certains auteurs, le calcaire ne détruit donc pas la matière colorante verte.) Influence du limon des cavernes. On peut dire que certains limons déposés dans les conduits souterrains n'exercent pas d'action sur les solutions de fluorescéine, ou que cette action, si elle existe, peut être considérée comme quantité négligeable pour des dépôts de cette nature. Il parait n'en être pas de même pour certaines argiles souterraines.

Il conviendrait d'ailleurs, pour bien déterminer l'influence des limons, d'entreprendre quelques expériences complémentaires avec quelques types variés et bien définis de limons : soit cohérent, calcareux, soit gras, argileux ou décalcifié, etc. Les cavités souterraines renferment aussi bien des argiles grasses et plastiques, résultant de la

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décomposition du calcaire, que des limons infiltrés venant du haut, et des limons fluviaux ou d'inondations internes. Des propriétés différentes peuvent caractériser ces dépôts, de structure et de composition diverses. Influence du sol tourbeux. Des expérimentateurs ont reconnu que la fluorescéine, après son passage dans un sol tourbeux, était décolorée et que la matière colorante ne pouvait être régénérée. Dans ce cas, on pourra utiliser la fuchsine acide (teinte rouge), qui se décolore également, mais peut être régénérée par l'acide acétique.

MANIÈRE D'EFFECTUER LE JET DE LA MATIÈRE COLORANTE.

Avant d'être déversée, soit dans un point d'absorption, soit dans un ruisseau, soit dans une rivière, la fluorescéine doit tout d'abord se trouver en solution. Il faut bien se garder de la jeter en poudre, sinon la dissolution ne se fait pas tout de suite, l'excès de substance tombe au fond du cours d'eau, où elle ne se dissout que lentement, elle est alors emportée progressivement par les parties lentes du courant, ce qui a pour résultat de fausser les indications. Si l'on n'a pas à sa disposition des récipients d'une capacité suffisante pour opérer une dissolution convenable et complète, il est bon d'ajouter de l'ammoniaque, alcali dans lequel la fluorescéine est infiniment plus soluble que dans l'eau. Un kilogramme de fluorescéine doit être dissous, pour bien faire, dans 50 litres d'eau, et le mélange doit être long, si l'on veut être certain de la dissolution complète. La matière colorante doit être déversée sur une tranche de toute la largeur du courant, ou parfois aussi dans sa portion la plus rapide, suivant le but à atteindre; mais il ne faut pas la projeter sur les bords seulement, là où la vitesse des eaux est considérablement ralentie, sinon on s'expose - si l'on a de longs trajets en vue à ne pas retrouver la fluorescéine à l'émergence à une dose suffisante pour être décelée, même au fluorescope, et ainsi le problème proposé ne serait pas résolu. La tranche à colorer doit être d'une teinte d'autant plus intense - tout en étant assez grande — que le trajet est plus long et que les réserves d'eau que l'on s'attend à rencontrer sont plus considérables.

PRISE D'ÉCHANTILLONS.

Si l'on veut faire une expérience vraiment consciencieuse, dont le résultat peut être important, les échantillons d'eau doivent être prélevés à l'émergence toutes les heures et parfois pendant dix à quinze jours

si c'est nécessaire. Suivant le but à atteindre, les échantillons devront être pris dans toute la tranche du cours d'eau, ou bien il suffira de les prélever dans l'axe le plus rapide du courant. Il arrivera que l'on puisse encore déceler la fluorescéine sur les bords, dans les parties les plus lentes, quand la matière colorante n'est plus appréciable dans l'axe de la plus grande vitesse des eaux.

OBSERVATION AU FLUORESCOPE.

L'observation à l'œil nu est souvent insuffisante; aussi l'emploi du fluorescope est indispensable, surtout si l'on veut relever l'arrivée de l'avant-garde peu colorée et se rendre compte des variations qui se produisent dans l'intensité de la coloration.

L'examen des échantillons doit toujours se faire par comparaison entre l'échantillon type pris avant l'expérience et l'échantillon suspect; si l'échantillon offre le plus léger trouble, il faut absolument filtrer, sinon on ne pourrait parvenir à déceler les faibles doses, le dichroisme propre à la fluorescéine étant masqué par les matières en suspension. Il est toujours bon d'ajouter quelques gouttes d'ammoniaque afin de neutraliser l'acide carbonique et par conséquent de pouvoir régénérer la matière colorante, si elle existe même à faible dose. Si l'ammoniaque produit un précipité (par exemple de bicarbonate), il faut laisser déposer à l'abri de la lumière et filtrer.

L'examen au fluorescope doit être très consciencieux; il faut s'assurer que les tubes à expérience soient d'un verre aussi homogène que possible, sinon on obtiendra des teintes différentes pour la même eau, d'où cause d'erreur possible.

L'observateur doit posséder une vue lui permettant l'appréciation exacte des couleurs (ce qui est assez rare).

En prenant toutes ces précautions, on peut arriver à déceler, au fluorescope, le 10 000 000 000o sans aucun doute et parfois même aussi le 20 000 000 000 de fluorescéine en solution dans l'eau.

CONCLUSIONS.

1° La fluoresceine reste, jusqu'ici, la meilleure substance à employer pour la recherche des relations entre les points d'absorption ou pertes et les points de réapparition ou résurgences.

2o La fluoresceine ne modifie pas les conditions du mouvement de l'eau

dans laquelle elle est incorporée. Le soi-disant retard de la matière colorante sur l'eau qui la véhicule n'est qu'une illusion résultant de la défectuosité des opérations et des observations, ou bien d'erreurs dans les interprétations.

3o L'eau colorée se comporte comme l'eau pure dans les grandes cavités; elle n'a pas de tendance à s'accumuler dans leurs fonds. L'existence de ces grandes cavités peut être parfois révélée par une réapparition de la coloration, provoquée par une crue subite.

4o Des intumescences dues aux crues et aux levées de vannes peuvent amener aux résurgences des dépôts microbiens et des troubles, bien avant l'arrivée des eaux colorées qui ont provoqué ces crues.

50 Il ne faut pas demander à la fluoresceine plus qu'elle ne peut donner : prouver l'existence d'une communication entre deux points, donner une idée approximative des temps employés à effectuer le trajet. La vitesse de l'eau est une notion très complexe; la détermination des éléments qui la définissent sera d'autant plus complète et plus précise que les causes d'erreurs auront été mieux écartées et que les observations seront faites avec plus de soin.

6° La fluoresceine doit être jetée à l'état de solution assez étendue et d'après les indications données précédemment.

7° Les prélèvements des échantillons au point d'observation doivent être très fréquents et prolongés assez longtemps. L'examen des échantillons doit se faire au fluorescope. Tout échantillon paraissant limoneux ou légèrement trouble réclame le filtrage préalable.

8o La lumière solaire décolore rapidement les solutions de fluoresceine. 9o Les sols tourbeux ont la même influence sur cette matière colorante. 10° L'acide carbonique décolore également les solutions de fluorescéine, mais la substance peut être régénérée.

14° Certains limons, de même que les calcaires, n'exercent pas d'action décolorante sur la fluoresceine.

12° Il faut se montrer très circonspect en ce qui concerne les conclusions à tirer d'expériences négatives, même si elles ont englobé un cycle complet d'influences saisonnières très diverses.

Le Comité spécial de la Fluorescéine :

AD. KEMNA, E.-A. MARTEL, E. PUTZEYS, E. VAN DEN BROECK, membres, H. RABOZÉE et ED. RAHIR, rapporteurs.

En l'absence de M. Mourlon, M. Rutot donne lecture de la note sui

vante :

COMPTE RENDU SOMMAIRE

DE LA

IX SESSION DU CONGRÈS GEOLOGIQUE INTERNATIONAL

QUI S'EST TENUE

A VIENNE, EN AOUT 1903

PAR

MICHEL MOURLON

La IX session du Congrès géologique international a eu lieu cette année à Vienne, et l'ouverture en a été faite le jeudi 20 août, avec une solennité tout à fait exceptionnelle.

Après une séance du Conseil, dans laquelle il fut procédé, selon l'usage, à la nomination du président et des vice-présidents, ces derniers étant, sur la proposition de MM. Barrois et Tschernyschew, réduits en nombre et choisis exclusivement parmi les membres présents au Congrès, on se rendit dans la grande salle des fêtes de l'Université où un trône avait été dressé.

S. A. I. Mr l'archiduc Rainer, en y prenant place, prononça un discours de bienvenue qui fit la meilleure impression, mais que l'étiquette, sans doute, empêcha d'applaudir.

On entendit ensuite un discours fort bien venu de Son Excellence W. de Hartel, conseiller intime de Sa Majesté, Ministre des Cultes et de l'Instruction publique, et Président d'honneur du Congrès.

Enfin, après deux autres discours prononcés en allemand, comme les précédents, l'un du Pro-recteur de l'Université et l'autre du Maire de la ville de Vienne, on entendit encore M. Capellini, l'ancien président de la session de Bologne en 1881, se faire l'interprète des géologues étrangers pour remercier, aux applaudissements de l'assem blée, le Représentant de l'Empereur, les autorités et les savants autrichiens de leur magnifique réception.

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