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miocène tortonien qui est assigné par les géologues autrichiens à la faune de Ziegelwerk.

Pour ce qui est de la comparaison de cette faune avec celle de nos couches miocènes belges, il serait difficile de l'établir avec précision au moins quant à présent.

Il est à remarquer toutefois que si le tableau ci-dessus ne signale que cinq espèces des couches miocènes de Ziegelwerk comme se trouvant dans les sables à Panopœa Menardi de notre Miocène bolderien, le nombre en sera probablement fort augmenté après la revision de la nomenclature de nos listes et la distinction des espèces anversiennes, et bolderiennes proprement dites.

J'ajouterai que l'éminent paléontologiste de Göttingen, M. le professeur von Koenen, qui faisait partie de l'excursion, m'a dit qu'il considérait la faune de Ziegelwerk comme correspondant à celle de nos sables miocènes bolderiens du Bolderberg, mais plus méditerranéenne (Tegel méditerranéen de Baden, Faune de Gainfahrn).

Avant de terminer ce compte rendu sommaire de la Session de Vienne, à laquelle la Société belge de Géologie m'a fait l'honneur de me déléguer, je dois faire remarquer que si cette Session a présenté un grand intérêt pour la majorité de ceux qui y ont pris part, elle a été l'occasion presque d'une déception pour les étrangers qui n'étaient point familiarisés avec la langue allemande. Il a été de toute impossibilité, en effet, pour ces derniers de suivre avec autant de fruit que cela eût été désirable, tant les excursions que les séances, dont les directeurs et les orateurs s'exprimaient à peu près exclusivement en allemand.

Cela paraît être un sérieux écueil pour les Congrès à venir et l'on ne peut s'empêcher de se demander s'il n'y aurait point moyen d'y parer par l'emploi, non pas d'une langue universelle qui semble ne pouvoir jamais sortir du domaine de l'utopie, mais bien d'une langue auxiliaire, telle que l'Espéranto, qui compte déjà un grand nombre d'adhérents et mérite d'attirer sérieusement l'attention des géologues.

Enfin, j'omettrais de signaler une des particularités les plus intéressantes de la Session de Vienne, si je ne rappelais qu'à différentes reprises, voire même à la séance solennelle d'ouverture, il a été fait une manifestation grandiose en l'honneur du Nestor de la géologie autrichienne, j'ai nommé le célèbre Édouard Suess, président de l'Académie impériale des sciences à Vienne et l'auteur d'une publication qui a fait sensation dans le monde savant comme étant peut-être la

seule ayant pu synthétiser, en en tirant les conséquences tectoniques les plus surprenantes, tous les grands travaux géologiques de ces dernières années.

Que dirais-je encore pour être absous des imperfections de ce compte rendu, au sujet desquelles je crois pouvoir invoquer les circonstances atténuantes résultant d'une connaissance insuffisante de la langue dominante à la Session de Vienne, si ce n'est que votre délégué, qui était aussi celui du Service géologique de Belgique, s'est trouvé dans le cas, à plusieurs reprises, en sa qualité de vice-président du Congrès, de prendre la parole au nom des géologues étrangers.

C'est ce qui lui a permis de rappeler notamment que nous n'avons pas seulement avec l'Autriche des points de contact par les analogies que présentent nos formations géologiques des bassins de Vienne et d'Anvers, mais aussi par nos souvenirs historiques du Prince Charles de Lorraine, le seul peut-être auquel, vivant, la reconnaissance publique ait élevé une statue, et de sa belle-sœur, Marie-Thérèse, l'Impératrice des Pays-Bas autrichiens, qui, en décembre 1772, fonda l'Académie royale de Belgique.

Il ne me reste plus maintenant qu'à rappeler que les Congressistes, avant de se séparer, ont fait choix de Mexico pour la réunion, en 1906, de la Xe Session du Congrès géologique international.

M. Stainier fait connaître ensuite les curiosités archéologiques renseignées à l'ordre du jour et développées ci-dessous :

CURIOSITÉS ARCHAEO-GÉOLOGIQUES

PAR

X. STAINIER

Professeur de Géologie à l'Université de Gand.

On s'étonnera peut-être de me voir présenter à la Société de Géologie un travail d'un genre qui s'éloigne beaucoup de ceux dont elle entend d'habitude la lecture. En faisant cela, j'ai eu pour but de reposer notre Société des graves discussions dont on vient de clore la série. Il y a toujours d'ailleurs un intérêt philosophique à jeter de temps en temps, sur la longue route du progrès, un petit regard en arrière et à voir ce qu'ont dit ou ce qu'ont pensé nos prédécesseurs dans des voies où tout nous semble clair aujourd'hui.

Fossile belge le plus anciennement signalé.

Il y a quelque temps, un de nos plus intelligents chercheurs, M. Delheid, dont les sociétés scientifiques connaissent bien le nom, signalait (1) certaines découvertes qu'il avait faites à Uccle. Au cours de cette note, il attirait l'attention sur le nom bizarre que possède un château situé à proximité de l'avenue Defré, où il avait fait ses trouvailles. Ce nom, en effet : « Het hof te zeecrabbe », traduit en français signifie La propriété aux crabes de mer. Au premier abord, on se demande ce que les crabes de mer peuvent bien faire à Uccle, à 125 kilomètres du littoral, et l'on comprend l'étonnement manifesté par M. Delheid.

Or nous allons voir qu'il s'agit là d'un nom de lieu-dit, qui possède une respectable antiquité de plusieurs siècles; qu'il fait allusion non pas à des crustacés actuels, mais bien à des fossiles dont nous trouvons là la mention de loin la plus reculée pour notre pays. Je précise.

Un éminent historien belge, feu Alph. Wauters, a eu l'occasion, au cours de ses savantes recherches, de rencontrer, le premier, l'antique mention de ce nom de lieu-dit. C'est dans le riche fonds des chartes des Archives nationales de France qu'il a exhumé l'acte original important, daté de septembre 1270, qui contient cette mention avec celle de beaucoup d'autres des plus intéressantes pour la topographie ancienne du Brabant (2).

A la veille d'épouser la duchesse Marguerite, fille de saint Louis, roi de France, Jean Ier le Victorieux, duc de Brabant, le célèbre vainqueur de Woeringen, constitua à sa fiancée un douaire de 6000 livres de Louvain. Une liste fut dressée, à dire de deux experts, des biens qui devaient constituer ce douaire. C'est l'original de la ratification de l'assignation des biens par les deux experts qui repose aux Archives de France.

C'est dans cet acte que l'on trouve la citation d'un champ appelé : La culture des enfants de Zeecrabbe à Uccle (dans l'acte Ucle, de cultura filiorum Zeecrabbe).

Notre savant historien a vu de suite l'intérêt que présentait ce passage, et il ne s'est pas trompé sur l'origine de cette dénomination, à en juger

(1) ANNALES DE LA SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE, 1903. Bull. des séances, p. LIV.

(2) ALPH. WAUTERS, Les premières années de Jean Ior. (BULL. ACAD. ROy. de Belgique, t. XL, 1876, p. 351.)

par les lignes suivantes que je transcris littéralement : « Ce nom, qui s'est conservé jusqu'à nos jours dans celui d'hof te Zeecrabbe, donné à la propriété de la famille de Thysebaert, près de Bootendael, n'est pas indigne d'attirer notre attention. Il provient évidemment des débris de mollusques et, en particulier, de crabes (crabes marins ou zeecrabbe), que le sol y recèle. Récemment, lorsque l'on a construit à proximité de cet endroit une grande tranchée pour le passage du chemin de fer de Bruxelles à Luttre, la pioche en a mis au jour en grande abondance (1). »

Nous ne pouvons que confirmer les dires de M. Wauters. Si l'on examine en effet la position de la propriété de Zeecrabbe sur la Carte géologique au 40000 (feuille Uccle-Tervueren par M. Mourlon), on constate que cette propriété, renseignée d'ailleurs sous ce nom sur la carte, se trouve tout près du contact du terrain bruxellien sur l'Ypresien. Or ce contact, on le sait, est, dans la région de Bruxelles, marqué par la présence d'un cailloutis riche en débris de crustacés provenant de l'Ypresien, dont ils ont été enlevés par les eaux de la mer bruxellienne.

Tous les géologues connaissent le gisement classique de ces crustacés, que l'on trouve dans la tranchée près de la gare d'Uccle-Calevoet, et qui est sans doute la tranchée à laquelle M. Wauters fait allusion avec tant de raison.

Ainsi donc, à l'époque si reculée dont nous venons de parler, et peutêtre encore plus anciennement, l'esprit observateur de nos ancêtres leur avait fait découvrir ces curieux restes fossiles. Et bien loin de faire comme ailleurs, où l'on donnait aux fossiles les noms les plus bizarres, le gros bon sens de nos populations flamandes leur avait fait attribuer à ces restes le vrai nom qui leur convenait.

Première tentative d'une carte géologique gouvernementale en Belgique.

Pendant la courte période de quinze ans où nos destinées ont été unies à celles de la Hollande, la Belgique fut régie par le roi Guillaume Ier. Le mal que ce souverain causa à la Belgique au point de vue politique a fait trop facilement oublier les importants services qu'il a rendus à notre pays au point de vue industriel. Quoique d'un pays où les mines étaient totalement inconnues, le roi Guillaume avait une très grande prédilection pour l'industrie en général et pour l'industrie

(1) Cf. op. cit., p. 371.

minière en particulier. Il a montré pour elles des dispositions plus libérales et plus intelligentes que ses successeurs actuels, malgré le siècle de progrès qu'il y a entre eux et lui. Je n'en veux pour preuve que l'établissement de la concessibilité des mines de fer, la création de la Société générale pour favoriser l'industrie, sa coopération à la fondation des établissements Cockerill, à Seraing. Il a rendu ainsi à notre pays des services importants qui peuvent faire oublier bien des torts qu'il a eus.

Je veux aujourd'hui rappeler deux de ses créations moins connues qui rentrent dans le même ordre d'idées et qui montrent aussi combien il avait, même au point de vue de la science, des vues élevées et justes. Le roi Guillaume savait combien les progrès des sciences importent à la bonne marche du progrès industriel et économique. Voulant activer autant que possible le développement de notre industrie minérale, il comprenait combien la connaissance géologique des gisements était indispensable et il avait institué un Comité technique chargé de parcourir le pays pour recueillir les matériaux en vue de la confection d'une carte géologique du royaume, qui eût été ainsi une des premières tentatives gouvernementales de l'espèce en Europe. Ce comité comprenait surtout des officiers du génie, parmi les plus actifs desquels nous trouvons le nom du major Van Swieten qui, toute sa vie, s'intéressa à la géologie appliquée et dont les connaissances furent mises à profit par ses compatriotes dans le Limbourg hollandais lors des recherches de houille de 1853-1856.

Ces officiers parcoururent la partie méridionale de notre pays, étudiant spécialement nos gisements métallifères et houillers et délimitant notre grand bassin du Hainaut. Comme résumé de leurs travaux, ils ont laissé un grand nombre de rapports dont le réel intérêt fait regretter vivement qu'ils soient restés dans l'oubli pendant près de trois quarts de siècle. Venant ainsi au jour après plusieurs générations de travailleurs, ils ont naturellement perdu l'attrait de l'actualité, mais il importait, spécialement au point de vue de la justice, de ne pas les laisser passer complètement inaperçus. Et puisque je suis ici sur ce terrain de justice, je ne saurais non plus passer sous silence que ces rapports doivent d'être venus jusqu'à nous, aux bons soins d'un homme à qui la Belgique doit tant de reconnaissance, je veux parler de Ph. Vandermaelen, qui avait acquis ces rapports, je ne sais comment, et les conservait dans sa bibliothèque. Il est d'autant plus étonnant que ces documents lui soient tombés dans les mains que le Gouvernement hollandais gardait jalousement ses archives. Ainsi,

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