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LE

KÉRATOPHYRE DE GRAND-COO

PAR

E. MATHIEU (1)

Capitaine du Génie

Répétiteur à l'École militaire.

A deux reprises, en séance du 20 octobre et du 17 novembre 1903, nous avons entretenu la Société belge de Géologie de la roche verte de Grand-Coo, signalée au mois d'avril dernier par M. Massange, industriel à Stavelot, à M. G. Cumont, et dont celui-ci avait présenté des échantillons. Ayant terminé l'examen microscopique de cette roche, nous rassemblons, en un même travail, les résultats que nous avons obtenus.

Gisement. Le chemin qui se détache de la route de Roanne-Coo à Trois-Ponts, dans la vallée de l'Amblève, pour passer au-dessus de la cascade de Coo, contourne le Mont de la Tour de Coo (voy. carte fig. 1) compris dans la boucle de la rivière, en traversant Grand-Coo, et aboutit à un gué qui conduit au bois de Lahister. Ce chemin a été tout récemment élargi en face de ce gué et prolongé vers le Sud, le long de la rive droite de la rivière. C'est ce travail d'appropriation qui a mis au jour la nouvelle roche. Elle affleure en a dans le talus qui a été entaillé verticalement sur une hauteur approximative de 1m50.

La roche forme un banc de 250 environ d'épaisseur, intercalé dans les roches reviniennes qui, en cet endroit, sont verticales et ont une direction E. 17° N.-E., passant un peu au Nord de la cascade de Coo.

(1) Mémoire présenté à la séance du 13 décembre 1903.

Les roches encaissantes sont, au Nord, des quartzophyllades et quartzites, et au Sud, des phyllades noirs.

La roche est gris verdâtre, très compacte et très dure. Vers le Nord, elle comprend une pâte de fond à cassure cireuse, esquilleuse, englobant des cristaux très rares, informes et petits, blanc jaunâtre, à éclat légèrement vitreux, ternis en certains endroits, et qui peuvent être des

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feldspaths altérés; on distingue également des grains brillants de pyrite. Vers le Sud, la cassure est moins cireuse, et la roche rappelle à s'y méprendre un quartzite devil!ien que nous avons recueilli sur la route de Vielsalm à Grand-Halleux, entre les bornes 103 et 104; en outre, la pyrite est plus abondante.

Dans toute l'épaisseur du banc, les éléments sont alignés parallèle

ment aux couches encaissantes, et donnent à la roche verte un aspect stratoïde. La couche est, en outre, divisée par deux systèmes de fissures: l'un d'eux parallèle à la stratification des roches reviniennes, (vertical dans la position actuelle) et l'autre perpendiculaire au premier et parallèle à la direction des couches (horizontal dans la position actuelle). Plusieurs de ces fissures sont remplies par des filonnets de quartz.

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Des deux côtés du banc, et en contact avec les couches encaissantes, on observe (voir fig. 2, en 2 et 4, deux salbandes de 005 d'épaisseur, d'une teinte jaunâtre, se divisant en plaquettes de 1 centimètre à 1cm d'épaisseur; à la loupe, on peut constater qu'elles appartiennent encore à la roche verte intercalaire; ces salbandes sont nettement séparées de la roche verte et des couches voisines (1).

(1) M. Malaise a signalé dans un mémoire, Sur quelques roches porphyriques de la .Belgique (BULL. DE L'ACAD. ROYALE DE BELGIQUE, 2e sér., t. XXXVII), une roche verte découverte dans le lit de l'Amblève, à Coo. Nous avons pu constater, grâce à l'obligeance de M. Malaise, que la roche découverte récemment diffère complètement de la roche signalée par lui.

Nous avons, dans une précédente note (1), exposé les raisons qui nous ont amené à conclure que la roche en question existe également sur la rive gauche de l'Amblève, au milieu du bois de Lahister en b, dans le prolongement des couches de l'affleurement du gué, ainsi qu'en c, dans les parages de la cascade de Coo, où les couches encaissantes ont une direction E. 30° N.-E. et un pendage de 15° à 20° vers le Sud. La corrélation entre le point d'affleurement du gué et le gisement du bois de Lahister ne présente aucune difficulté. Il n'en est pas de même de la relation entre cet affleurement et le gisement de la cascade; car le prolongement de la direction E. 17° N.-E., menée par le gué, passe au Nord de la cascade, et il faudrait admettre à l'intérieur de la boucle de l'Amblève une véritable inflexion des couches avec variation de pendage. Ce point mérite donc encore un examen ultérieur.

Mais ce que l'on peut en retenir, est que la roche verte intercalaire constitue une couche continue de plus de 1500 mètres de longueur, masquée actuellement par les dépôts quaternaires.

Composition chimique. Densité. Dureté. L'analyse chimique (2) de la roche (partie Nord), après séchage à 140°, a donné les résultats sui

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On n'a pas dosé séparément Fe2O3 et FeO, ni H2O et CO2. Mais la roche fait fortement effervescence aux acides.

La densité, mesurée à la balance hydrostatique, est de 2.7.

(1) BULL. DE LA SOC. BELGE DE GÉOL., DE PALéontol. et d'HYDROL., t. XVII, 1903, Procès-verbaux, p. 1.

(2) M. Lindeman, professeur de chimie générale à l'École militaire, a bien voulu se charger de cette analyse. Nous tenons à lui exprimer toute notre reconnaissance.

La dureté de la roche, après sciage au lithosecteur, est comprise entre 6 et 7 (échelle de Mohs). Cependant, elle ne fait pas feu au briquet.

Les données de l'analyse chimique permettent déjà d'éliminer certaines hypothèses au sujet de l'origine de la roche. Certains échantillons, surtout ceux provenant de la cascade, paraissent, à l'œil nu, rappeler certains schistes à séricite (Sericitschiefer des Allemands). Mais les schistes argileux et leurs dérivés métamorphiques se caractérisent par la prédominance de MgO sur CaO, qui n'existe qu'à l'état de traces, par une teneur élevée d'oxydes de fer et d'alumine, aussi bien que par la prédominance de K2O sur Na20 (1). Or, dans la roche qui nous occupe, nous voyons, au contraire, la chaux l'emporter de beaucoup sur la magnésie et la soude sur la potasse. Ces caractères seuls suffisent pour rejeter l'identification de la roche de Grand-Coo avec un membre de la famille des schistes.

Il faut plutôt, comme l'indique l'étude microscopique, rechercher parmi les roches éruptives. On ne peut la rapporter à la diabase, car celle-ci se caractérise par une teneur moyenne en SiO2 de 50 % avec écarts très faibles de part et d'autre, et par la prédominance des oxydes RO sur les oxydes RO (2). L'étude microscopique fait d'ailleurs rejeter cette hypothèse.

Examen microscopique (5). - Examinée au microscope, en lumière ordinaire, la roche est très confuse; on observe des éléments incolores pour la plupart, avec intercalations de plages vert pâle qui sont de la chlorite, et des parties plus claires, plus limpides, donnant à la roche un aspect vaguement porphyrique. Les éléments colorés sont constitués par des flocons de leucoxène opalescents en lumière réfléchie, opaques en lumière transmise, et provenant sans aucun doute de l'altération de grains d'ilménite dont quelques-uns ont été observés intacts au centre; puis des sections de pyrite.

On reconnaît encore en lumière ordinaire de rares sections d'apatite, les unes normales à l'axe c, les autres parallèles à cet axe, et alors tronçonnées comme cela se présente sous l'action d'un étirement; enfin quelques grains de zircon bien reconnaissables à leur fort relief et à leurs couleurs de polarisation élevées.

(1) Rosenbusch, Elemente der Gesteinslehre, 1901, 2o édition, p. 441.

(2) IDEM, Ibidem, pp. 317 et 337.

(3) Les plaques minces ont été effectuées avec grand soin par la maison Voigt et Hochgesang, à Göttingen.

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