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revanche, celui-ci est spécialement caractérisé par l'abondance de Scrobicularia plana, bivalve. Le sommet de cette alluvion est parfois formé d'une accumulation de ces coquilles.

L'invasion marine ayant mis fin à la formation de la tourbe a été provoquée par un affaissement du sol et a dù atteindre son maximum d'étendue vers les premières années du IVe siècle; elle a persisté jusque vers l'an 840.

Cet envahissement marin de la Plaine maritime est démontré :

1° Par la disparition complète de tous les noms de lieux d'origine latine ou gauloise, ceux-ci étant remplacés uniquement par des noms germaniques;

2o Par l'absence complète de tous débris d'origine franque ou mérovingienne sur tout le territoire de la Plaine maritime, l'occupation du sol par les envahisseurs francs n'ayant pu se produire.

C. Argile inférieure des Polders. Vers l'an 840, la mer s'est lentement retirée vers le Nord-Ouest, mais la sédimentation de l'alluvion marine inférieure ne s'étant pas faite d'une manière absolument régulière, les eaux abandonnèrent les hauts fonds, mais persistèrent dans les dépressions.

Ces dépressions restaient en communication avec la mer par des chenaux qui permettaient l'entrée des eaux à marée haute. Pendant la marée basse, ces eaux, enfermées dans la dépression, abandonnaient leurs sédiments fins sous forme d'une argile grise, plastique, très dure, à laquelle j'ai donné le nom d'argile inférieure des Polders.

On peut admettre que cette argile s'est déposée de l'an 840 à l'an 1000.

Vers l'an 1000, toute la Plaine maritime se trouvait done non seulement émergée, mais le rivage se trouvait reporté sensiblement au delà du rivage actuel.

Ce fait est prouvé par l'existence d'emplacements de villages vers la limite de l'extrême marée basse, notamment au large de Mariakerke et de Heyst.

En face de ces emplacements, la mer rejette le long du cordon. littoral une quantité de fragments de poteries très caractéristiques du haut moyen âge.

D. Alluvion marine supérieure. - Le rivage de l'époque étant vaseux, il n'y avait pas de dunes. D'autre part, le terrain étant plat et peu élevé, les eaux marines faisaient de larges invasions à chaque tempête du N.-O. En présence de ces dangers, les habitants commencèrent à élever des digues, mais irrégulièrement et sans méthode.

A partir de l'an 1000, un nouvel affaissement du sol, ayant les PaysBas comme centre, se produisit et en même temps commença une terrible période de tempêtes dont l'histoire a conservé les dates.

Les habitants de la Plaine maritime se sentirent menacés et renforcèrent les digues. Mais celles-ci devenaient bientôt inefficaces par suite de l'affaissement du sol et, de temps à autre, des invasions locales se produisirent.

Ces temps troublés par une situation instable autant que dangereuse nous conduisent jusque l'an 1170, pendant lequel se produisit la catastrophe finale.

En cette année, poussées par d'effroyables tempêtes, les vagues eurent raison des digues qui leur étaient opposées et elles se précipitèrent vers l'intérieur par les nombreuses et larges brèches qui s'étaient

ouvertes.

Le désastre fut énorme et les conséquences furent le fractionnement de la Zélande en îles, la submersion définitive de l'ile de Schooneveld qui existait à l'emplacement de l'embouchure actuelle de l'Escaut, la disparition de la terre de Wulpen, vers Heyst, le creusement du Zwyn, la formation du Zuyderzée et le morcellement du littoral de la Frise en une longue suite d'iles.

Cette invasion marine, rapide et brutale, fit sentir ses effets pendant une centaine d'années, durant lesquelles il se déposa, sur les territoires envahis, un sable jaunâtre, assez grossier, meuble, renfermant d'abondantes coquilles de la faune marine actuelle.

Vers le haut, ce sable se charge d'une quantité de petites linéoles d'argile grise.

L'ensablement, aidé d'un faible soulèvement du sol, fit reculer la ligne des rivages, mais les tempêtes qui se reproduisaient encore rendaient toujours la situation dangereuse.

On éleva donc de nouveau des digues, mais cette fois l'autorité vint en aide à l'initiative privée, et à partir de l'an 1500, des digues sérieuses et continues, élevées à peu près à l'emplacement du littoral actuel, semblèrent devoir protéger définitivement la plaine maritime contre toute invasion marine.

E. Argile supérieure des Polders. Il n'en fut toutefois pas ainsi. En effet, à partir de l'an 1500, des guerres continuelles désolèrent la région. Les Espagnols, les Hollandais, les Anglais et les Français vinrent vider leurs querelles sur ces terres déjà si éprouvées, et les places fortes, pour se couvrir, inondèrent largement leurs approches en perçant les digues et les dunes en formation.

D'énormes nappes d'eaux stagnantes s'étendirent ainsi de tous côtés, alimentées à la fois par la mer et par les watergangs ou canaux de drainage des eaux douces, et il se déposa dans les dépressions une nouvelle couche d'argile grise, fine, plastique, ressemblant beaucoup à celle qui s'était déjà déposée naturellement de l'an 840 à l'an 1000, mais dont la faune est saumâtre, indiquant ainsi l'origine mixte.

Cette argile supérieure des Polders termine la série des dépôts modernes de la Plaine maritime.

3° Basse-Belgique.

La Basse-Belgique comprend les deux Flandres et la majeure partie des provinces d'Anvers et de Limbourg. Cette région située au Nord des deux provinces a reçu le nom de Campine.

La Basse-Belgique correspond, en réalité, au territoire envahi par la mer flandrienne.

C'est donc un ancien fond de mer émergé, et ce fond de mer est constitué par les dépôts marins du Flandrien.

Comme on le sait, ces dépôts sont surtout sableux, avec recouvrement plus ou moins argileux. C'est principalement la région longeant le littoral et les bouches de l'Escaut, c'est-à-dire le Nord des Flandres et le Pays de Waes, qui présente le maximum de recouvrement argileux. Au Sud de cette zone, le sable marin pur affleure directement sur de vastes surfaces.

Pendant l'époque moderne, deux actions se sont passées sur les plaines; l'une, principale, est une action éolienne, l'autre est une action chimique.

L'action éolienne, s'exerçant à la surface des sables flandriens meubles, a provoqué la formation de dunes, comme sur le littoral.

Ces dunes de la Flandre et de la Campine sont bien connues; elles ont été délimitées et figurées sur la Carte géologique et elles forment parfois des monticules irréguliers assez importants, en tout semblables, comme formation et composition, aux dunes du littoral.

L'action chimique provoque, à une cinquantaine de centimètres sous la surface du sable flandrien, la formation d'un banc ferrugineux qui, englobant les grains de sable, transforme celui-ci en grès ferrugineux assez dur et continu sur 0,10 à 0m,20 d'épaisseur.

L'oxyde de fer provient de la décomposition de la glauconie mêlée au sable flandrien, et le banc ferrugineux, qui a reçu le nom d'alios, se forme généralement à la limite des fluctuations de la nappe aquifère renfermée dans les sables.

Cet alios est extrêmement nuisible à la végétation, surtout quand il est question de plantations de bois de sapins, culture très répandue dans la Basse-Belgique à sol sableux. Lorsque les racines atteignent le banc durci, l'arbre dépérit et meurt.

Avant d'effectuer les plantations, il faut donc défoncer à grands frais le banc d'alios.

Enfin, localement, dans les dépressions de la région sableuse, la nappe aquifère affleure directement et il se forme ainsi des étangs, des mares et des marécages dans lesquels croît la végétation des tourbières. De la tourbe tout à fait actuelle se forme ainsi, qui ne doit pas être confondue avec la tourbe du commencement de l'époque moderne.

4o Fond des vallées actuelles.

Au point de vue des terrains modernes, le fond des vallées actuelles représente une aire importante d'accumulation de dépôts modernes.

Il y a immédiatement lieu de distinguer les vallées de la Basse et de la Moyenne-Belgique de celles de la Haute-Belgique.

J'ai pratiqué, dans le fond des vallées du premier groupe, des centaines de sondages qui m'ont fourni des résultats très concordants. Les alluvions modernes de ces vallées sont absolument localisées dans la surface plate qui constitue le fond actuel des vallées. Elles ne s'élèvent pas le long des berges.

Les rivières coulent dans des sillons plus ou moins profonds creusés au travers de leurs propres alluvions.

Très régulièrement, les alluvions des cours d'eau de la Basse et de la Moyenne-Belgique sont constituées de deux éléments: un inférieur, qui est la tourbe; un supérieur, formé de sable et d'argile.

La tourbe de ces vallées des quantités de sondages et d'observations me l'ont démontré est l'exact prolongement de la tourbe

ancienne de la Plaine maritime.

Le fait admet plusieurs preuves concordantes.

En effet, lorsque, partant d'un point situé dans la Plaine maritime, donnant la tourbe sous les alluvions marines plus récentes, et que l'on entre dans la vallée d'un cours d'eau coulant en dehors de la Plaine maritime, on est certain, en faisant des sondages le long de la vallée, de continuer à trouver la tourbe, sous les alluvions argilo-sableuses, sur toute la largeur de la vallée.

Si l'on remonte jusqu'à la source, on y rencontre un grand épanouissement de tourbe dans la dépression.

De même, si l'on se rend dans quantité d'autres vallées, comme celles de la Lys, de la Mandel, de la Vieille-Caele, de l'Escaut, de la Dendre, de la Senne, de la Haine, on rencontre inévitablement la tourbe sur environ 1 mètre d'épaisseur, sa base se trouvant de 3 à 5 mètres sous la surface de la plaine d'alluvions.

Partout où des observations ont été faites, la tourbe du fond des vallées ne repose jamais sur des couches pouvant encore être rapportées au terrain moderne.

Elle repose soit sur le limon hesbayen, soit sur les dépôts campiniens du Quaternaire, soit sur les dépôts tertiaires ou secondaires. D'autre part, les mêmes découvertes archéologiques se font dans la tourbe des vallées que dans celle de la Plaine maritime.

Des trouvailles de haches polies néolithiques, parfois emmanchées dans des gaines en corne de cerf, des découvertes de poteries, d'idoles et de monnaies gauloises et de débris gallo-romains, le tout bien constaté, y ont été faites à maintes reprises.

On peut donc dire que la première partie de l'époque moderne, comprenant en réalité les quatre cinquièmes de la durée, a été caractérisée par un climat et des conditions spéciales, dont l'une des principales résultantes a été la formation d'une étendue considérable de tourbières, non seulement dans la Plaine maritime, mais dans les vallées et à leur source. C'est véritablement la grande époque des tourbières.

Quant aux 2 à 3 mètres d'alluvions proprement dites surmontant la tourbe, elles ont été déposées pendant les seize cents ans qui ont suivi la fin de l'époque des tourbières, datant du commencement du IVe siècle de notre ère.

J'ai cherché à voir si l'on ne pouvait trouver dans l'alluvion proprement dite des subdivisions analogues à celles, si nettes, constatées dans la Plaine maritime, mais je n'ai rien pu distinguer.

L'alluvion supérieure à la tourbe est presque toujours constituée, vers le milieu de la plaine d'alluvions, par du sable gris-bleu, assez pur, à stratification irrégulière, surmonté d'un limon gris-bleu foncé, panaché au sommet, souvent argileux et plastique.

Vers les bords de la vallée, la proportion de sable pur diminue et la tourbe n'est alors recouverte que de sable argileux devenant de plus en plus plastique au sommet, au point de passer à l'argile pure, parfois comparable, comme finesse, à l'argile des Polders.

C'est donc là ce qui se passe dans les vallées de la Basse et de la Moyenne-Belgique, à cours d'eau lents et tranquilles.

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