Imágenes de páginas
PDF
EPUB

LE RASTREADOR

LE RASTREADOR.

I

Luz la Cigarrera.

En 1814, par une belle matinée d'été, un voyageur, monté sur un cheval qui, malgré les coups d'éperon, n'avançait plus qu'à pas lents, s'acheminait, en sifflant, vers la petite ville de Púcuaro, située dans l'État mexicain de Valladolid. Déjà il en pouvait découvrir les maisons éclairées par les premiers rayons du soleil. Rien qu'à voir les flancs du cheval baignés de sueur et les vêtements poudreux du cavalier, on devinait qu'ils venaient tous deux de voyager plusieurs jours à marches forcées. Le cavalier solitaire était un jeune homme de haute taille et vigoureusement découplé; il eût pu passer pour un fort joli garçon, si d'épais sourcils d'un noir de jais n'eussent donné une expression sinistre à sa physionomie, empreinte d'une audace toute militaire, Ce cavalier à la fière allure n'était autre qu'un cer

tain Berrendo, chez qui, bien des années plus tard, après ma courte halte dans un hameau voisin de San-Blas, je devais trouver l'hospitalité avant d'arriver sur les bords de la mer Pacifique. A l'époque où commence ce récit, Berrendo, qui portait alors son vrai nom de Luciano Gamboa, était un des plus audacieux soldats de l'armée révolutionnaire du Mexique, et son histoire, que je me borne à résumer ici d'après ses souvenirs, nous montre la guerre de l'indépendance arrivée à un de ses moments les plus critiques.

La petite ville de Púcuaro, vers laquelle se dirigeait Berrendo, avait, dans le courant même de l'année 1814, attiré à divers titres l'attention des Mexicains et des Espagnols. C'était là qu'à la suite d'un engagement sanglant avec les troupes royalistes, le frère du général don Ignacio Rayon, don Ramon, s'était retiré avec une centaine d'hommes, les seuls qui eussent pu quitter, sous sa conduite, le champ de bataille; mais, chose singulière, on avait perdu la trace de don Ramon et de sa petite troupe depuis l'époque même de leur entrée à Púcuaro: personne ne pouvait dire s'ils étaient sortis de la ville, et cependant rien n'y indiquait leur présence. On devait croire qu'ils n'avaient fait que traverser Púcuaro, et qu'ils s'en étaient éloignés furtivement, à l'insu des habitants; mais où s'étaient-ils dirigés? C'était là une question qui préoccupait aussi bien les guer

« AnteriorContinuar »