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lier l'a prévue"), et, sur son plan, il indique une série de murs dans lesquels il a cru reconnaître des témoins des restaurations nécessitées par les invasions normandes (2).

C'est d'abord un large empattement construit sur pilotis au pourtour de l'absidiole médiane; puis une construction analogue servant de base à la première chapelle du transept3); c'est enfin ce large soubassement épais de trois mètres sur lequel reposent les piliers du rond-point du chœur (“).

Si l'âge récent de ce soubassement, de ce podium, comme l'appelle le savant prélat, était bien établi, ma démonstration serait vite terminée, car on ne peut admettre qu'il ait été ajouté après coup, l'hémicycle sur lequel s'ouvrent les chapelles étant d'un trop grand diamètre pour qu'on puisse en concevoir l'existence sans une colonnade intérieure. Donc si cette colonnade n'existait pas à l'époque mérovingienne, les absidioles ne sauraient remonter à une date aussi ancienne.

Malheureusement ce podium a soulevé des assertions si contradictoires (5), que je n'ose en discuter l'àge.

Par contre il est bien certain que les empattements sur pilotis sont de très basse époque, car on y a recueilli des frag

(1) Les fouilles de Saint-Martin, p. 102

et suiv.

(2) Ce sont les parties figurées par des hachures croisées sur la planche jointe au présent mémoire.

(3) La seconde chapelle du transept (en D de mon plan) repose sur des murs où Mg Chevalier veut voir les restes d'un baptistère du v siècle. Je doute, pour ma part, que ces murs soient plus anciens que l'empattement de la chapelle voisine. En tout cas l'exiguïté de la construction, autant que son plan, me paraissent interdire une hypothèse qu'au

cune découverte n'est venue confirmer.

(4) Le travail le plus important du chevet, dit M Chevalier, consista dans la construction du podium ou soubassement circulaire destiné à porter la colonnade. Cette muraille, épaisse de près de trois mètres, n'existait pas au va siècle, car saint Grégoire nous montre le sépulcre très facilement accessible.» (Les fouilles de Saint-Martin, p. 104.)

(5) Voir Ratel, Les basiliques de SaintMartin, Supplém., p. xii et suiv. et la réponse de M Chevalier, Les fouilles de Saint-Martin, Note complém., p. 14 et suiv.

ments d'inscriptions carolingiennes"); et l'un de ces fragments a été trouvé sous la chapelle du chevet (en C de mon plan) dans un emplacement tel que Ma Chevalier a été obligé d'admettre la reconstruction partielle de cette chapelle dans le cours du 1x ou du xe siècle (2).

Pour moi j'y vois la preuve que non seulement cette abside, mais toutes les autres sont postérieures au milieu du 1x° siècle (3). Et cette manière de voir est confirmée par les conséquences mêmes auxquelles on serait conduit si l'on devait accepter la thèse soutenue par MM. Ratel et Chevalier, et reconnaître avec eux dans ces absidioles rayonnant autour du sanctuaire les restes de l'église bâtie par saint Perpet.

On remarquera d'abord que cette thèse suppose un nombre d'absides inconciliable avec les divers passages où Grégoire de Tours parle de l'abside du monument en employant toujours le singulier (4).

Certains archéologues, je le sais, ont cru qu'il y avait deux absides à Saint-Martin parce que Grégoire de Tours men

(1) Les fouilles de Saint-Martin de Tours, p. 98, 103 et 106.

(2) Ibid., p. 103.

(Une partie de ces murs, notons-le bien, est fondée sur des pilotis, attribués par M Chevalier au 1x ou au x' siècle. Or ces pilotis ont dû être établis en même temps que les absidioles pour en assurer les fondations, ou ajoutés peu après pour remédier à quelque tassement causé par l'instabilité du sol. Si donc ils sont du 1x ou du x° siècle, les absidioles placées au-dessus ne peuvent remonter au temps de saint Perpet. Un cadre de bois a été retrouvé dans les fondations de l'absidiole médiane. M Chevalier suppose que ce cadre aurait été glissé après

coup sous le mur du v° siècle pour le consolider (Les fouilles de Saint-Martin, Note complém., p. 11). Cette opération est bien invraisemblable. Cadre et pilotis me semblent, par leur position même, contemporains des constructions qui les

surmontent.

(4) Perpetuus..... submota basilica quam prius Briccius aedificaverat super sanctum Martinum, aedificavit aliam ampliorem in cujus absida beatum corpus ipsius venerabilis sancti transtulit.» (Hist. Franc., 1. X, c. 31, n° 6.) « Basilica Sancti Martini a furibus effracta fuit. Qui ponentes ad fenestram absidae cancellum, qui super tumulum cujusdam defuncti erat, etc. » (Ibid., 1. VI, ç. 10.)

tionne une absida sepulcri, qui leur a paru distincte de l'abside de l'église (1).

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Mer Chevalier s'est prévalu de cette opinion pour supposer qu'au vro siècle la chapelle du fond était considérée comme l'abside propre de la basilique par opposition à l'abside du tombeau (2)». Mais cette supposition n'est pas admissible, car l'abside propre d'une église, pour me servir des termes mêmes de Mg Chevalier, ne peut s'entendre que du lieu où se dresse l'autel principal. Or peut-on admettre que le maître autel de Saint-Martin fût relégué dans l'absidiole du fond de l'église? Quicherat, d'ailleurs, a déjà fait justice de cette interprétation (3). Il a parfaitement prouvé que l'abside du tombeau et l'abside de l'église ne faisaient qu'un (“).

Si Grégoire de Tours n'a pas constamment désigné par les mêmes expressions l'abside de l'église, c'est par une recherche de style dont on ne peut s'étonner. Cela est si vrai que dans les trois passages où il parle de cette abside du tombeau, il a chaque fois varié ses termes (5). Ajoutons que ces trois appartiennent tous les trois à un ouvrage spécialement consacré

(1) Le P. da Prato, dans son édition de Sulpice Sévère (t. 1, p. 400), a été le premier à mettre en avant cette hypothèse.

(2) Les fouilles de Saint-Martin, p. 36. (3) Restitution de Saint-Martin, p. 20, et Mélanges, p. 48.

(4) Son argumentation repose sur un passage des Miracles de saint Martin (1. IV, c. 25) qui nous montre un prêtre venant prier la nuit contre l'absida sepulcri parce qu'il n'avait pu pénétrer dans l'église. On pouvait donc aborder cette abside de l'extérieur, ce n'était donc pas une seconde abside placée à l'intérieur du monument et distincte de celle de l'église.

passages

(5) La première fois il l'appelle absida tumuli (Mir. S. Mart., 1. II, c. 47); la seconde absida corporis (ibid., 1. III, c. 57); la troisième absida sepulcri (ibid., 1. IV, c. 25). S'il fallait attacher à ces questions de mots tant d'importance, il faudrait dire aussi que l'absida sepulcri et l'absida corporis étaient choses distinctes. Cela ne serait pas plus arbitraire que de distinguer l'absida corporis de l'abside de l'église, alors que Grégoire dit formellement que le corps de saint Martin fut déposé dans l'abside de l'église bâtie par saint Perpet: «in cujus absida beatum corpus ipsius venerabilis sancti transtulit» (Hist. Franc., 1. X, c. 31, n° 6).

au récit des miracles accomplis par saint Martin au profit des fidèles qui venaient prier à son tombeau ; cela justifie suffisamment les expressions de l'hagiographe, sans qu'on aille leur prêter un sens qui serait en contradiction formelle avec son propre témoignage.

Je pourrais chercher encore d'autres arguments dans les rubriques des inscriptions qui ornaient la basilique, car il n'y est question que d'une abside unique, et on ne peut les expliquer d'une façon pleinement satisfaisante qu'en admettant une abside comme celle des églises de Rome et de Ravenne, s'ouvrant sur la nef ou sur le transept par un grand arc sous lequel était placé l'autel (2).

Les conjectures de MM. Chevalier et Ratel sont donc inconciliables avec les documents écrits que nous possédons. Elles ne peuvent s'accorder davantage avec ce que l'on sait aujourd'hui des monuments du ve siècle et, si elles devaient être acceptées, on serait conduit à cette conséquence singulièrement grave, qu'il faut réformer toutes les notions que nous avons actuellement sur l'architecture religieuse de cette époque.

a

(1) Voici d'ailleurs ces trois passages : Dans le premier, c'est un estropié qui vient chercher la guérison auprès du tombeau de saint Martin: « Quidam contractus... deportatus iterum a suis ante sanctam absidam tumuli ponitur. (Mir. S. Mart., 1. II, c. 47.) Dans le deuxième, il s'agit. de la guérison d'un aveugle: «In atrio quod absidam corporis ambit eo orante, subito aperti sunt oculi ejus. » (Ibid., 1. III, c. 57.) Dans le troisième, il est question d'un prêtre nommé Léon venu pour prier au tombeau de saint Martin et qui, étant arrivé de nuit, ne put se faire ouvrir la TOME XXXIV, 1 partie.

re

basilique « Cumque basilicam sanctam
ingredi non valeret, coram absida
sep uleri
fudit orationem. » (Ibid., 1. IV, c. 25.)
(2) On pourrait peut-être chercher un
argument contre ma thèse dans une de ces
rubriques qui est ainsi conçue : « Item su-
per arum absidis altaris. » Mais à cette
leçon un peu ambigue, d'autres manuscrits
substituent la suivante : « Item super ar-
cum absidae in altari», ou, cómme Quiche-
rat (Restitution, p. 23; Mélanges, p. 51)
propose de lire, « in altario ». Or cette der-
nière leçon prouverait au contraire qu'il
n'y avait qu'une abside.

3

IMPRIMERIE NATIONALE.

Tous les archéologues, en effet, ont enseigné jusqu'ici que les églises bâties en Occident au début de la domination barbare affectaient dans leurs grandes lignes le plan des basiliques dont Rome et Ravenne nous ont conservé de si curieux exemples.

S'il est un point qui paraisse bien établi, c'est la forme de leur sanctuaire. C'est toujours une abside en hémicycle s'ouvrant sur le transept ou à l'extrémité de la nef.

C'est seulement vers le temps de Charlemagne que s'introduit en France la coutume de faire précéder l'abside d'un chœur d'une ou plusieurs travées, et c'est plus tard encore qu'apparaissent les premiers monuments dans lesquels le chœur et l'abside sont entourés d'un bas côté sur lequel s'ouvrent des absidioles (2). On hésitait jusqu'ici à faire remonter cette disposition jusqu'au 1x siècle, et voilà que d'un coup il nous faudrait la vieillir de plus de quatre cents ans. On avouera que c'est chose hardie, et qu'avant de l'admettre il est permis d'exiger des preuves péremptoires. Mgr Chevalier l'a bien compris, aussi a-t-il cherché à prévenir cette objection dans un chapitre où il passe en revue les différentes variétés d'églises à absides multiples que nous connaissons aujourd'hui (3). Malheureusement il n'a pu en trouver une

je dis une seule qu'on soit en droit d'attribuer avec vraisemblance à une date aussi reculée, et dont le plan ressemble à celui qu'il prête à l'église bâtie par saint Perpet.

Il nous parle de ces chapelles trichores sur lesquelles M. de Rossi a depuis longtemps appelé l'attention des savants, mais

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