Dans ces cinq années, l'Allemagne a augmenté sa flotte de vapeurs de 197 navires et de 518.000 tonneaux, c'està-dire de 47 0/0. Elle a diminué sa flotte à voiles de 412 navires et de 140.000 tonneaux, c'est-à-dire de 23 0/0. Dans la même période, nous augmentions quelque peu notre flotte à voiles, mais nous n'augmentions notre flotte à vapeur que de 58 navires et 66.961 tonneaux, soit de 7.5 0/0, et encore cet accroissement pénible est-il dû uniquement aux navires subventionnés et à ceux effectuant le cabotage français, c'est-à-dire la navigation réservée. Enfin pour accentuer les preuves de notre recul, on produit des chiffres plus démonstratifs peut-être. Quelle est la part du pavillon français dans le mouvement de navigation des ports de France? La suivante: En 1875, 29 0/0 entrées et sorties réunies; en 1885, 26 0/0, en 1895, 24 0/0. La situation s'est encore aggravée depuis, pour arriver à 22.9 0/0 pour les 6 premiers mois de 1898. Pour traduire des chiffres en un langage plus frappant encore, il est constaté que le tonnage transporté sous notre pavillon en 1896 ne représente pas le quart de notre mouvement commercial en mer, c'est-à-dire que les trois quarts des marchandises expédiées ou reçues par nos ports sont chargées sur navires étrangers, et que nous leur payons ainsi un tribut formidable. Notons encore l'énorme augmentation des transactions directes de l'Allemagne avec la Turquie grâce à la création de services maritimes directs. Les chiffres suivants qui concernent un intervalle de 5 ans, l'indiquent (l'unité est la piastre) (1): Ainsi donc, dans l'espace de cinq ans, le commerce direct de l'Allemagne avec l'Empire Ottoman a passé de francs 1.761.577 à 12.861.972, c'est-à-dire qu'il a plus que septuplé. << N'est-ce pas la meilleure et la plus éloquente démonstration de l'influence considérable qu'ont les lignes de navigation directes sur les transactions des pays qu'elles relient, dit le rapport de la Chambre de commerce française à Constantinople? >> La France n'est pas le seul pays à jeter des cris d'alarme << Nous savions d'une façon générale, écrivait récemment la Pall mall Gazette d'après les derniers rapports consulaires, que le commerce de l'Allemagne allait en augmentant et que les Allemands ouvraient de nouvelles routes à leur commerce et à leur navigation. A présent nous avons sous les yeux, en de froids tableaux, la comparaison humiliante pour nous du commerce allemand avec le commerce anglais... De 1873 à 1895, le tonnage des entrées et sorties des navires dans les ports allemands s'est élevé de 12 à 30 millions. Pendant cette même période son commerce avec l'Amérique du Nord a progressé de 128 0/0 et de 480 0/0 avec l'Amérique Centrale et l'Amérique du Sud. >> D'après le mémoire qu'adressaient naguère au Reichstag les armateurs du port de Hambourg pour lui demander de voter en faveur de l'augmentation des forces navales, dans la période de 1873 à 1895, c'est-à-dire dans une période de 23 années, la progression de la marine (1) La ligne faire Dunkerque-Levant, d'après le rapport de la Chambre de commerce française de Constantinople donnerait de pareils résultats si on se décidait à la créer. marchande a été pour l'Allemagne de 100 à 265, tandis que pour la France elle n'a été que de 100 à 132. << Les victoires de 1870, dit Ford, n'ont pas seulement inauguré pour l'Allemagne une vie politique nouvelle; elles ont été le point de départ d'une période sans exemple de progrès industriel et commercial... Il n'est pas une branche de la vie industrielle qui n'atteste un développement qui certainement n'est pas passager. La prospérité des places de commerce n'est qu'un signe du bienêtre général et il faut ajouter que l'état des finances est excellent. >> Le « Spectator » complète l'esquisse de J. A. Ford en ajoutant: « Ce que l'Angleterre a atteint en un siècle, l'Allemagne l'a obtenu en un quart de siècle. Aussi peuton dire que ce pays s'est tellement transformé que quelqu'un qui ne l'aurait pas visité depuis 1870 ne le reconnaîtrait plus. Ce qui est propre surtout à surprendre un Anglais, c'est la qualité et la solidité des produits allemands vendus aujourd'hui dans le monde entier, Il y a des gens en Angleterre qui attribuent cet essor économique au protectionnisme. Non, il y a des causes plus profondes. C'est le peuple allemand lui-même qui a été l'ouvrier de cette victoire ». Situation générale d'après les Chambres de İl est intéressant de connaître l'opinion des Chambres de commerce allemandes sur la situation générale et actuelle des affaires en Allemagne. Nous pouvons la résumer de la manière suivante : Les résultats des années économiques 1898-99 ont été aussi satisfaisants que ceux des années précédentes. Les progrès économiques qui ont commencé à se faire sentir dans toutes les branches de l'industrie et du commerce se sont encore accentués. La raison de cet accroissement provient de l'augmentation de la production intérieure. L'essor économique d'une nation est déterminé par deux facteurs (1): la consommation intérieure de charbon et le mouvement des affaires financières. Or, on n'a pu satisfaire à toutes les demandes en combustible et en minerais; d'autre part, l'escompte de la Banque impériale a été en moyenne de 4,26 0/0 et s'est même élevé jusqu'à 6 o/o. La plupart des Chambres de commerce (2) ont constaté les mêmes résultats économiques. Dans certaines régions, les Chambres de commerce (3) se déclarent moins satisfaites: ce sont celles qui représentent les arrondissements dans lesquels se trouvent les industries textiles. Partout on se plaît à constater en Allemagne que l'accroissement de l'importation et de l'exportation correspond aux progrès accomplis dans les industries. L'augmentation des exportations démontre que les pro. duits de l'industrie allemande sont de plus en plus appréciés. (1) Comptes-rendus de la Chambre de commerce de Cassel. (2) Comptes-rendus de la Berufsgenossenchat der chem. Industrie. (3) Comptes-rendus de la Chambre de commerce de Mulhouse. Comptes-rendus de la Chambre de commerce de Bayreuth, |