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teurs, afin de faciliter la lecture et la transcription des dépêches, mais c'est toujours le même principe qui est en jeu, et je pense qu'il est inutile d'entrer ici dans ces détails qui ne seraient point à leur place.

Après avoir constaté les immenses avantages que l'on tirait de l'emploi du télégraphe aérien, on songea à en étendre les applications et à mettre en communication des points de la surface terrestre séparés par de vastes étendues d'eau. Ce problème, après bien des tâtonnements et des tentatives avortées, fut résolu de la façon la plus heureuse, au point que l'Europe se trouve actuellement reliée à l'Amérique par ces fils conducteurs instantanés de la pensée, et que les entreprises nouvelles de cette nature naissent tous les jours et permettent d'espérer que dans un temps plus ou moins long, un homme placé en un point quelconque de la surface du globe, pourra en quelques minutes informer ses amis de ce qui les intéresse, en quelqu'autre point que ceux-ci soient eux-mêmes placés. Voici comment est construit aujourd'hui, ce fil conducteur de l'électricité, qu'un navire déroule à sa suite en le laissant reposer sur le fond de la mer, quelqu'inégal que soit ce fond:

Une cordelette de 3 à 4 millimètres de diamètre et formée de 6 ou 7 fils de cuivre bien pur, est recouverte d'une couche de gutta-percha rendue visqueuse par l'adjonction d'un enduit que l'on nomme en Angleterre, mastic de Chatterton; cette première corde est ensuite enveloppée de quatre couches de gutta percha alternant avec autant de couches de mastic Chatterton; puis le tout est maintenu par dix fils de fer légèrement galvanisés, de 2 1/2 millimètres d'épaisseur, entourés chacun d'une gaîne en chanvre de Manille et s'enroulant en hélice sur la corde centrale préalablement recouverte d'une couche de jute, matière textile tirée. de l'Inde. Le diamètre total du cable s'élève à environ 27 millimètres; il pèse environ 865 kil par kilomètre dans l'air et 400 kil dans l'eau, et il peut résister avant de casser à un effort d'environ 8,000 kil. La cordelette centrale en cuivre, seule, sert à la transmission de l'électricité; la gutta percha l'isole du milieu liquide dans lequel cette électricité se dissiperait instantanément

et les fils de fer donnent à l'ensemble la solidité nécessaire pour qu'il ne casse pas pendant la pose, ou lorsqu'il est agité au fond de la mer, ou enfin quand il s'appuie sur quelques sommets écartés, en saillie sur ce fond, et qu'il reste suspendu entr'eux.

A l'aide de ce conducteur, l'habitant de New-Yorck peut entrer en conversation avec l'habitant de Paris ou de Londres, et la cote des valeurs à la bourse de Paris peut être transmise à New-York le même jour avant l'ouverture de la bourse de cette dernière ville. Il faut se rappeler, pour comprendre ce dernier fait, qu'à cause de la différence des longitudes de ces deux villes, il est midi à New-York trois heures plus tard qu'à Paris.

Nous sommes donc aujourd'hui, grâce à ces immenses travaux de communication dont je vous ai cité les principaux, en mesure de transporter nos marchandises et nous mêmes d'un bout du monde à l'autre, à un prix plus bas et avec une rapidité plus grande, que les poètes d'autrefois ne l'avaient osé rêver, et, quant à la transmission de la pensée, l'espace est tout à fait supprimé, tous les habitants de la terre peuvent entrer en conversation directe sans plus de difficultés que n'en rencontrent, pour causer ensemble, les habitants d'une même ville, à la condition, bien entendu, que ces merveilleux moyens de communication aient été mis à leur portée.

Il est facile maintenant de prévoir les immenses progrès que ces travaux et ces découvertes modernes vont permettre d'accomplir, tant au point de vue de l'existence matérielle des hommes, qu'au point de vue des lumières, et l'accélération de plus en plus rapide de ces progrès à mesure que leurs moyens de réalisation se multiplieront avec l'aide du travail, du capital et de la somme des connaissances théoriques et pratiques qui s'accroît chaque jour. Par les routes ordinaires qui s'améliorent sans cesse, par les chemins de fer qui se développent partout comme sous la baguette d'une fée, par la navigation maritime qui devient tous les jours plus active, plus économique, plus sûre, qui s'étend sur des mers qui n'avaient été jusqu'à présent que peu ou point explorées, l'homme, en quelque point de la surface ter

restre qu'il soit placé, peut se procurer les milles choses nécessaires à son existence, avec le moins de travail possible, en donnant en échange de toutes ces choses, dont chacune a été produite dans la contrée la plus favorable à sa production, un objet quelconque qu'il sait fabriquer mieux et à plus bas prix que les

autres.

Par toutes ces voies de communications, il peut se transporter lui-même, étudier partout des moyens nouveaux d'améliorer sa condition, compléter son éducation, effacer par son contact avec tous les autres hommes, ces sots préjugés de nationalité, ces haines de races qui ont été causes de tant de désastres; il cessera d'être exclusivement le citoyen d'un pays pour devenir citoyen du monde. Par la facilité avec laquelle les denrées alimentaires, sous toutes les formes, franchiront sans grands frais, les plus longues distances, il suffira que la terre porte chaque année assez de ces denrées pour nourrir tous les hommes, pour qu'une vraie famine ne puisse plus exister nulle part, malgré la perte des récoltes en quelques points déterminés. Par le télégraphe électrique, l'homme sera partout à portée des siens, il sera partout informé de l'état des récoltes, de la valeur des produits dans tous les pays et pourra avec connaissance de cause, faire les entreprises commerciales les plus importantes et être informé jour par jour de tous les événements qui peuvent influer sur le succès de ces entreprises.

Les arts, les sciences surtout, par ces rapides communications qui permettent d'innombrables observations simultanées en tous points de la surface du globe et la transmission instantanée des résultats de ces observations, feront certainement les plus étonnants progrès. Déjà la science météorologique, avec l'aide du télégraphe, en est arrivée au point que l'on ne désespère pas de prévoir un jour, les phénomènes atmosphériques, assez longtemps d'avance pour tirer parti de ces prévisions dans les voyages maritimes. En un mot, l'homme entre de plus en plus rapidement en possession entière de son domaine qui est la terre; de plus en plus il la force à satisfaire à tous ses besoins tant intellectuels que moraux, avec le moins possible de travail pour lui, et il est im

possible de prévoir où s'arrêtera cette intelligente domination Quand on contemple tous ces progrès accomplis et surtout les progrès à accomplir, et que l'on s'est rendu compte de l'immense influence qu'aurait sur leur réalision, une entente cordiale et universelle entre les hommes, on devient invinciblement partisan convaincu des doctrines de ce bon abbé de Saint-Pierre qui a révé toute sa vie la paix entre tous les habitants de la terre.

Malheureusement nous n'en sommes pas là; les préjugés, les haines de races, les diversités d'opinions religieuses, les questions de suprématies nationales, les ambitions personnelles ou nationales, toutes les passions inhérentes à notre nature, se donnant carrière dans la sombre nuit que l'ignorance a maintenue dans l'esprit de la majorité des hommes, suffisent encore pour pousser les nations les unes contre les autres, pour anéantir ces capitaux qui pourraient devenir la source de tant de bien-être et d'émancipation intellectuelle, et pour qu'en certains instants de grands pays tout entiers ressemblent à d'immenses cirques pleins d'animaux féroces qui s'entredéchirent avec des griffes perfectionnées. A quoi tient donc tant de misères à côté de si éblouissantes perpectives ouvertes par le génie de l'homme? A une seule cause, à ce que le progrès intellectuel et moral chez la plus grande partie des hommes, n'a pas marché du même pas que le progrès scientifique et matériel, et c'est au développement du premier de ces progrès que doivent énergiquement pousser tous les amis de l'humanité.

ADOLPHE DEVILLEZ.

RAPPORT

sur

LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ

pendant l'année académique 1868-1869.

Messieurs,

En me faisant l'honneur de me confier de nouveau les fonctions de Secrétaire annuel, vous m'avez appelé à vous exposer aujourd'hui la situation de notre Société.

Je comprends, et je partage votre impatience d'arriver à une partie plus intéressante de cette séance; je me contenterai donc de vous retracer très-brièvement nos travaux pendant l'année 18681869.

La mort nous a récemment enlevé un collègue, un artiste de grand talent, M. Etienne Wauquière.

MM. Bernard et Willième docteurs en médecine et M. le Baron de Hérissem ont été admis en qualité de membres effectifs.

La Société compte 58 membres effectifs et 195 membres correspondants. Elle a appris avec de douloureux regrets la mort de deux de ceux-ci : M. de Lamartine et M. Joseph Sigart.

Le titre de membre correspondant a été conféré à M. Armand Thielens, naturaliste à Tirlemont.

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