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dans un coin de laquelle cette ville fut båtie. De Petit avance que notre cité, de même que le bois de Soignes, tire son nom de Sonne, mot qui, dans la mythologie germanique, signifie le soleil. Il appuie cette assertion sur la similitude du nom que portent la forêt de Soignes et le bois de Soignies en flamand et en français les villageois du Brabant disent: Sonie-Bosch (bois du soleil), et ceux du Hainaut s'expriment ainsi : El bos d' Sonie. Malgré cette identité, nous préférons l'étymologie de Guicciardin qui fait dériver le nom de Soignies de celui de la rivière sur les bords de laquelle elle est bâtie ou celle de A. Chotin qui soutient que Soignies, en latin Sunniacum, signifie ville sur Senne 3.

Le nom de Soignies n'a guère subi de grandes variations, comme on peut le voir par ses formes successives. Sunniacum (870); Sonegia (1053, 1071, 1089, 1092, 1120, 1126, 1152, 1185, 1195, 1232; PHILIPPE DE HARVENGT; RICHARD DE GEMBLOUX; XIVe siècle); et adjectivement Sonegiensis (Sigebert de GEMBLOUX; Sungeias (BALDERIC); Sonnia (1181); Sognesia (1543; VALÈRE AND É; MIREUS); Soingnies (1308; JACQUES DE GUISE); Songnies (1186, 1328, 1481, 1543, 1615); Songnyes (1433); Sougnies (1317); aujourd'hui on prononce encore vulgairement Sognies et Sougnies, et en flamand Sonie.

Aucune autre localité en Belgique ne porte le nom de Soignies. En France, cette ville a un homonyme: Soigny, près de Montmirail, en Champagne (Marne).

Au viie siècle, la terre de Soignies, paraît-il, faisait partie du patrimoine d'un noble personnage nommé Madelgaire qui, selon l'opinion la plus accréditée, naquit à Strépy, sous le règne de

'FORTIUS, Histoire de S. Vincent, comte de Haynav. Mons, 1653; p. 155. J. DE PETIT. Recherches historiques sur la ville de Soignies Mons, 1852; p 6

3 GUICCIARDIN, Description de tovts les Pays-Bas. Amsterdam, 1625; p. 415A. CHOTIN. Études étymologiques sur les noms des villes, bourgs, villages et hameaux de la province de Hainaut. Tournai, 1857; p. 45.

• On montre encore aujourd'hui à la ferme de Sotteville, à Strépy (Sterpeice), trois caves superposées qu'on prétend, d'après la tradition, ètre des restes du castel de Madelgaire. Au xvi siecle, il existait en cet endroit un fonds de terre franc et libre appelé le fief Saint-Vincent.

Clotaire II, roi des Francs. Madelgaire entra, jeune encore, dans l'armée austrasienne et accompagna le roi Dagobert dans plusieurs expéditions que ce prince entreprit contre les Saxons, les Neustriens et les Esclavons. A son retour à Strépy, il épousa Waldetrude (Sainte-Waudru), fille aînée de Walbert IV que certains auteurs qualifient de comte ou gouverneur du pagus Hainoensis. Il devint l'un des leudes les plus puissants du royaume d'Austrasie. Allié comme son illustre épouse à la famille des rois mérovingiens, il fréquenta longtemps la cour du roi Dagobert, où il exerça les charges les plus éminentes. Bien plus, ce souverain voulant récompenser les services militaires qu'il en avait reçus, lui conféra, suivant la légende, le gouvernement de l'Irlande. Après y avoir séjourné quelques années, il revint avec son épouse dans le Hainaut. Plusieurs missionnaires irlandais, animés d'un grand zèle pour la propagation de la foi chrétienne, les accompagnèrent; c'étaient Feuillien, Ultan, Fursy, Eloquius, Algise, Etton, Adelgise. Le premier d'entre eux périt victime de son dévouement : la chapelle élevée au lieu de son martyre fut le berceau de la ville du Roeulx'.

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Dieu bénit l'union de Madelgaire et de Waldetrude qui vécurent ensemble dans une paix parfaite. Quatre enfants en furent les fruits : Landry et Dentelin, Aldegonde et Madelberte.

Cependant Madelgaire qui était encore idolâtre vers l'époque de son mariage, avait embrassé le christianisme, à la sollicitude de sa pieuse compagne.

Vers le milieu du vire siècle, ces vertueux époux prirent la résolution suprême de se séparer pour embrasser la vie contemplative. Madelgaire, éclairé par l'Esprit-Saint, découvrit toute la vanité des biens et des honneurs de ce monde passager. Son âme touchée des exhortations paternelles du grand apôtre saint Amand aspirait à la pratique des vertus religieuses et des actions saintes; elle se sentait entraînée dans la voie sublime de la perfection

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'BOLLANDISTES. Acta sanctorum. Anvers, 1695; 31 octobre GHESQUIÈRE et SMET. Acta SS. Belyii selecta Bruxelles, 1785; t. I, pp. 1-9. VINCHANT Annales du Hainaut. Édition des Bibliophiles belges; t. 11, p. 100.

évangélique. Madelgaire se rend donc à Cambrai, expose les désirs de son âme à l'évêque saint Aubert, reçoit de ce vénérable prélat la tonsure cléricale et va jeter sur une colline au bord de la Sambre les fondements de l'abbaye d'Hautmont pour s'y consacrer à Dieu avec de pieux compagnons. Au bout de quelque temps son œuvre se trouva achevée. Cette nouvelle maison de prière devint bientôt comme un centre de réunion des porte-étendards de la milice de Jésus-Christ; d'illustres pontifes et de grands serviteurs de Dieu, attirés par la réputation de sainteté et de vertu du puissant leude du palais, devenu un humble moine, s'y assemblaient fréquemment << pour parler entre eux du salut des âmes. » Cependant ces visites, ces honneurs qu'il reçoit de tant de personnages éminents jettent l'effroi dans l'âme de Madelgaire, qui prend désormais le nom de Vincent à cause de la victoire qu'il a remportée sur le monde : son vœu le plus cher est de s'y soustraire. Il court donc à la recherche d'une retraite plus solitaire. Vincent rencontre un endroit désert, inculte et environné de bois sur les rives de la Senne, à proximité du lieu où cette rivière prend naissance. Là, il crée un nouveau monastère autour duquel s'élèvera insensiblement la ville de Soignies, qui lui doit ainsi son existence.

Quant à Waldetrude, après avoir achevé au château de Coursolre l'éducation de ses deux filles qu'elle plaça ensuite au monastère de Malbod (Maubeuge), sous la direction de sa sœur Aldegonde, elle résolut, sur l'avis de saint Ghislain, son directeur spirituel, de se retirer sur la colline de Castriloc. Son parent Hydulphe, comte de Lobbes, lui fit construire une habitation modeste avec un oratoire. C'est là l'origine de la ville de Mons'.

Vita S. Waldetrudis, auct. anonymo ex vetustis codicibus mss cap 2. Acta SS. Belgii selecta, t. iv, p. 443. — J. SIMON. Histoire de Sainte-Waudru, liv. 2, chap. 5. DELEWARDE. Histoire générale du Hainau. Mons, 1728;

t. 1, pp. 156-158,

II.

Monastère de Soignies.

On fixe généralement à l'année 650 l'établissement du monastère de Soignies. L'église abbatiale qui fut consacrée par l'évêque Aubert, de Cambrai, fut placée sous le vocable de la sainte Vierge, de saint Pierre et de saint Jean, apôtres. Son illustre fondateur la dota de plusieurs parties du territoire circonvoisin, des terres de Haulchin (Halcinus) et de Mesvin (Methuinus), et des biens qu'il possédait à Masnuy, à Steenkerque, à Écaussinnes et à Neuville. Il y appela ensuite des religieux de l'ordre de SaintBenoit, qu'il gouverna pendant le reste de sa vie, moins par des paroles que par des exemples. Peu de temps avant sa mort, il fit venir auprès de lui son fils Landry et lui remit la direction des deux monastères qu'il avait fondés. Après avoir adressé de paternelles exhortations aux religieux qui l'entouraient, saint Vincent s'endormit dans le Seigneur, le 14 juillet 660*.

SIGEBERT DE GEMBLOUX. Chronicon ab anno 381 al 1113. Paris, 1513, s'exprime ainsi sur ce sujet : ad annum 631. In nostrâ vicinia tunc florebant Maldegarius dux, qui est Vincentius Altimontensis et Sonegiensis, ejusque conjux Waldetrusis Castrilocensis. Le P. Delewarde place à tort la fondation du monastère de Soignies à l'année 636

2 BOLLANDI TES, ad xiv Julii — GBESQUIÈRE et SMET. Acta SS. Belgii selecta; t. iv, pp. 1-14.-— MABILLON Annales ordinis S. Benedicti occidentalium monachorum patriarchæ. Paris, 1703; t 1, pp. 405-406. — Acta sanctorum ordinis S. Benedicti in sæculorum classes distributœ, collegit D. Lucas D'ACHERY, edid. D. MABILLON et D. RUINART. Paris, 1669; t. 1, p. 672. MOLANUS. Natales SS Belgii, al xıv Julii. JACQUES DE GUISE. Illustrations de la Gaule Belgique. Paris, 1531; vol. 1, fol. 75. — IBIDEM. Histoire du Hainaut, t. vi, pp. 483 et suiv; t. vi, pp 139-153. - FORTIUS Histoire de S. Vincent, comte de Haynav.-J SIMON Histoire de Sainte-Waudru, liv. 1, chap. 13. VINCHANT. Annales du Hainaut, t. 1, p. 51; t . pp. 26105. Cfr. aussi généralement tous les hagiographes et les chroniqueurs qui font mention de saint Vincent. Fortius met la date de la mort de ce bienheureux en 666; Mabillon, d'Achéry, de Sainte-Marthe, le P Delewarde et de Reiffenberg, en 677.

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Le tombeau de notre bienheureux fut bientôt illustré par de nombreux et éclatants miracles dont on peut lire le récit dans les Bollandistes et dans Fortius. On rapporte à l'année 875 la première translation de ses reliques. L'histoire raconte que Regnier I au long Col, comte de Hainaut, ayant été vaincu par les Normands dans l'île de Walcheren, comprit que ses états ne tarderaient pas à être envahis par ces barbares. Ce prince, aussi pieux que brave, songea à sauver avant tout les reliques des saints patrons du Hainaut. A cet effet, cheminant à pieds-nus, il transporta lui-même les restes de saint Vincent dans la ville de Mons pour les mettre avec ceux de sainte Waudru, de sainte Aye et de plusieurs autres saints à l'abri des profanations de ses redoutables ennemis '.

D'après une coutume pieuse de l'église et à la prière de Marguerite de Constantinople, comtesse de Flandre et de Hainaut, Pierre, évêque d'Albe, légat du Saint-Siége apostolique, déposa en 1250 dans une châsse particulière le chef du saint patron de Soignies. A cette cérémonie assistèrent Albert, archevêque de Prusse et de Livonie, Nicolas, évêque de Cambrai, les chanoines de Soignies, la comtesse Marguerite et les personnages les plus considérables du comté de Hainaut. L'anniversaire de cette translation se célèbre encore le 29 octobre.

Nous n'avons à mentionner aucune particularité se rattachant à l'abbatiat de saint Landry qui gouverna conjointement les deux monastères d'Hautmont et de Soignies, après avoir quitté le siége épiscopal de Metz ou de Meaux. Il mourut en 691 ou en 692. Son corps fut enseveli à Soignies, où il est honoré le 17 avril 3.

1 VINCENT. Ancien château de Mons. chap. 3. Jacques de GUISE, Histoire du Hainaut, t. 1x, pp. 289-290. - VINCHANT. Annales du Hainaut, t. 1, pp. 154-156. BOLLANDISTES. Acta sanctorum, ad xv julii, p 682. GHESQUIÈRE, loc. cit., t. iv, p 25.

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3 La vie de saint Landry a été publiée par les Bollandistes. Voyez Acta SS., ad xvu aprilis. Elle a été reproduite par les auteurs des Acta SS. Belgii selecta. t. v, pp. 203-210. On peut encore la lire dans l'Histoire du Hainaut par JACQUES DE GUISE. t. vn, pp. 224 et suiv., édition du marquis de Fortia Les érudits sont partagés sur la question de savoir si saint Landry a été évêque de Metz ou de Meaux. Henschenius s'est prononcé pour

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