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trois fois aux arrêts, ceux-ci prescrivirent à Rolin Guérin de se faire prêter cette somme et de la verser le plus tôt possible entre les mains du receveur royal'. Il rembourserait ensuite l'emprunt avec l'argent provenant du premier terme de la taille, dès qu'il l'aurait recueilli 2.

Les gens de guerre n'étaient d'ailleurs pas aimés des Lyonnais, car, malgré les soins dont on les entourait (ils étaient logés, nourris et payés), ils étaient un véritable fléau pour ceux qui les hébergeaient.

Ces hôtes en étaient particulièrement mécontents. Ils déclaraient que la présence de gens d'armes chez eux leur ferait perdre leur clientèle, car personne ne viendrait loger là où on « saurait les dis gens ». Aussi, exigèrent-ils une compensation on leur accorda le 3 février 1453 une indemnité dérisoire de six sous par lance3. La présence de tous ces soldats avait encore pour les Lyonnais un autre inconvénient; elle irritait le Dauphin qu'ils avaient tant d'intérêt à ménager. Ainsi, le 5 février, ils reçurent la visite de Monseigneur de Chateauvillain, envoyé du Dauphin Louis. Ce messager leur déclara que son maître, lors d'un récent voyage de Vienne à Saint-Priest, avait appris les mesures de précautions prises contre lui à Lyon, tant

1 Le 23 janvier (BB 6, fol. 40 vo). — V. Pièces justificatives n° CCXX. Ce document nous apprend entre autre choses que Jean de la Goute pour avoir paie ment de cette somme avait « desja contraint et fait donner les arrests pour la tierce foys a iceulx conseillers ».

2 Voir Pièces justificatives, no CCXX. 3 BB 6, fol. 42. Délibération du 3 février. Les hôtes avaient déclaré qu'« ilz ne pourront louger ne recueillir les dis gens d'armes en leurs hostelleries que ne feust leur tres grant dommage veu et consideré que la plus part d'eulx et quasi tous tenoent les dites hostelleries a grans louages et grans charges, lesquelles charges ilz ne pourroent paier, se ainsi estoit qu'ilz eussent les dis gens d'armes pour ce qu'ilz perdront leurs hostes et n'en viendront nul louger la ou il sauront les dis gens d'armes requerans iceulx hostes, que se fere se povoit, qu'ilz n'eussent point le dit lougiz des dis gens d'armes ». On décida de les apaiser. Pour « les degrever et relever decharge leur sera paié pour accroyssance des dis lougiz et oultre ce qu'ilz ont pour iceulx lougis des dis gens d'armes de et sur les deniers communs de ladite ville et pour le receveur d'iceulx deniers pour chacun moys qu'ilz les tiendront decy en la, c'est assavoir audit Jaquemet Guigue qui a ung homme et cinq chevaulx, dix sous tournois, audit Vincent de la Lisse qui en a quatre et quatre chevaux VII sous VI deniers, audit Gerbe qui en a quatre et quatre chevaux VII sous et VI deniers, audit Quartillon qui en a autant VII sous VI deniers tournois, et semblablement aux autres habitans de ladite ville qui ont lougez les dis gens d'armes et qui d'iceulx se plendront qu'il leur soit paié semblablement ladite croissance selon le nombre qu'ilz auront desdis gens d'armes et a raison de dix sous tournois pour six hommes et six chevaulx ».

par les habitants que par les gens de guerre, ce dont il était « bien esbay et mal contens ». Il leur demanda aussi de faire savoir au grand Maître d'Ostel « qu'il n'eut jamais doubte » de son maître1. Mais ces entrevues déplurent au représentant du roi qui répondit sèchement aux conseillers de ne pas aller voir Monseigneur de Chateauvillain sans la permission des officiers royaux'. On obéit, car la ville était alors en instance pour obtenir divers privilèges (création d'une Université, prolongation des foires). D'ailleurs, les représentants du roi le grand Maître d' « Ostel », l'évêque d'Aleth, Élie de Pompadour, et Girert le Bourcier reçurent bientôt après du vin de Beaune « du melieur que l'en pot finer ». Cela ne contribua pas peu à leur faire oublier les relations de la ville avec le représentant du Dauphin, La taille des gens d'armes ne donna lieu à aucun incident nouveau cette année-là.

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Au début de 1454, Jehan de la Goute présenta aux consuls une nouvelle lettre de commission: il n'y avait de changé que le chiffre de l'impôt qui s'élevait insensiblement d'année en année depuis la reprise de la guerre. La ville, cette année-là, était taxée à 3.095 livres, 16 sous3. Comme en 1453, les conseillers et les notables votèrent une taille de 4 deniers pour livre payable à 4 termes.

Comme en 1453 également, les consuls durent, pour éviter les arrêts à Roanne, recourir à l'emprunt pour payer au receveur le premier quarteron (771 livres, 9 sous'). Mais les autres versements se suivirent régulièrement pendant toute l'année.

En 1455, le receveur fut changé : ce fut François Jordayn qui

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2 Délibération du 15 avril (BB 6, fol. 49).- ... Item les dessus nommés conseillers nouveaulx apres le departement des autres dudit conseil ont esté d'oppinion que actendu les matieres et afferes que la ville a devers le roy et que l'on n'a enquores rens donné ne fait point de plesir à mes seigneurs qui sont en ceste ville de par le roy, que pour ce qu'ilz aient cause de fere bon rapport au roy de ladicte ville et escripre s'il est besoing au roy et a son conseil desdictes afferes que l'on donne a mon seigneur l'evesque d'Alet, Monseigneur le Grand Maistre d'Ostel et a mestre Girerd le Bourcier, à chacun ung ponczon de vin de Beaune du melieur que l'on puisse finer »>.

3 C'est le 10 janvier 1454 que les conseillers s'occupent pour la première fois de ces lettres de commission (BB 6, fol. 64 vo). Le premier terme indiqué était le

1 décembre 1453. La taille de 4 deniers fut votée par les consuls et les notables le 13 janvier (fo 65 vo-96). - V. CC 74 le détail de la perception.

4 Délibération du 17 janvier 1454 (BB 6, fol. 66). n° CCXXV.

V. Pièces justificatives,

succéda à Jean de la Goute et réclama au nom des élus, Ayme Sala et Pierre du Bec 3.120 livres : la perception de cet impôt ne donna lieu à aucune observation. On peut cependant remarquer en passant que le receveur en demanda le payement plus tôt que d'habitude, le 30 décembre'. Ce fait s'explique assez par les nécessités de la guerre contre les Anglais pour qu'il ne soit pas nécessaire d'y chercher une autre explication. Aussi, vota-t-on cette année, le 2 janvier, le paiement du premier quarteron dont il n'était pas question d'ordinaire avant le milieu ou la fin de mars.

En 1456, le chiffre de la taille s'éleva brusquement à près de 5.000 livres (exactement 4.914 livres, 7 sous, 6 deniers) pour la levée desquelles on vota, le 11 janvier, un impôt de 4 deniers par livre3. Il y eut mille difficultés cette année-là entre le receveur et les Lyonnais, mais comme elles ont trait à la nature des monnaies qui devaient servir au payement, nous y reviendrons dans un appendice spécial1. Nous apprenons par le procès-verbal de la séance du 23 janvier que le receveur municipal Rolin Guérin avait avancé la somme nécessaire au paiement du dernier terme de l'année précédente et qu'il n'était pas encore remboursé5. Ce fait montre la peine qu'avait la ville à satisfaire aux exigences sans cesse grandissantes du pouvoir royal. Au cours de l'année 1455, les conseillers avaient bien essayé d'obtenir du roi « rabat des lances », entretenues aux frais de la ville. Jean Grant avait même été envoyé auprès de Charles VII à cette intention, mais le 12 septembre (1455) il avait rapporté une réponse négative. Le roi avait

1 C'est le to décembre 1454 (BB 6, fol 97 vo), que les consuls s'occupent pour la première fois officiellement de ces lettres de commission.

Nous savons par la délibération du 30 décembre 1454, que François Jourdayn avait prescrit aux conseillers de venir le lendemain tenir les arrêts à Roanne. Ceux-ci décidèrent de réunir les notables et le 2 janvier 1455 (BB 6, fol. 101 vo), eut lieu le vote d'une nouvelle taille de 4 deniers. — V. CC 75 les détails de la perception.

3 (BB 8, fol. 4. v° 5). Délibération du 11 janvier. V. Pièces justificatives, n° CCXXXV. V. CC 77 (malheureusement incomplet les détails de la perception ainsi que CC 76.

Voir aussi notre article sur la Circulation des Monnaies à Lyon, déposé à la Gazette de Numismatique.

5 Voir Pièces justificatives, no CCXXXVI. « Au regard du quart et derrier quarteron de l'année passée que le diet Raoulin en chevisse le mieulx qu'il pourra avec le dit Jourdain receveur ou son commis et de l'interet qu'il dira en sa conscience avoir soubstenu et souffert au payement d'icellui quarteron ilz l'en degreveront ainsi qu'il sera veu et advise. »

déclaré que lorsqu'il ferait un « rebat» il le ferait général et non autrement1.

Ce qui avait fait espérer aux Lyonnais une diminution de charges, c'est que le roi venait de recouvrer la Guyenne, la dernière province encore occupée par les Anglais.

En 1456, ils renouvelèrent leur tentative à l'occasion du voyage que le roi devait faire à Lyon. Le 7 octobre, ils décidèrent de «< lui remontrer à son passage que la ville et païs sont excessivement chargés du nombre des XXVII lances? ». Mais le roi ne dut pas se laisser fléchir, car il n'est plus question des suites données à cette démarche. Le roi alla en Dauphiné, et nous savons seulement que le 23 octobre les Lyonnais furent informés par leur envoyé Jean Grant, que Charles VII, alors à Saint-Priest, demandait à la Ville de conduire à Vienne cent asnées d'avoine. Le sénéchal de Beaucaire assura aux Lyonnais que s'ils obéissaient au roi, celui-ci en aurait un très grand plaisir3. Le passage et le séjour des gens du roi, furent aussi pour les consuls l'occasion de dépenses, car on ne pouvait se dispenser de faire des cadeaux à leurs chefs: le maréchal des logis reçut deux aunes de satin et fut prié de « se comporter gracieusement ». On donna aussi une cue de bon vin au comte de Dunois, qui eut encore soixante ras d'avoine et une douzaine de boîtes de confitures, ainsi que des torches. De semblables présents furent faits à Monseigneur le général Pierre d'Aryole, à Jehan de Jambes, au trésorier Estienne Chevalier, au bailli de Cotentin. Le prévôt de l'« ostel » ne fut pas oublié. Il eut 2 aunes « de veloux >> pour se faire un pourpoint. On espérait qu'ainsi tout ce monde

1 BB 6, fol. 136. Jean Grant avait rapporté « au regart du dit rebat des dictes lances que quant le roy en feroit point il le feroit general et non autrement ».

2 (BB 8, fol. 27). V. le texte de cette délibération, Pièces Justificatives, n° CCXXXVIII.

3 (BB 8, fol. 28). « Apres ce que le dit messire Jehan Grant leur a dit et recelé que aujourd'yer Monseigneur le seneschal de Beaucayre lui avoit dit que le roy estant a Saint Pries l'avoit chargé de fere conduyre de ceste ville a Vienne cent années d'avoyne ou environ et que se les dis conseilliers prenoent ceste charge, le roy en aroit ung tres grant plesir et seroit tousjours plus acquerir sa grace, ilz ont conclu que qui pourra trouver la dicte avoyne que on luy face mener et conduyre et pour icelle finer et conduyre ont charger Raoulin Guerin present lequel garderont, se perde pouroit a lui venir de par de la. >>

4 Sur Étienne Chevalier, v. la notice de A. Thomas, les États provinciaux de la France centrale sous Charles VII, t. I, p. 304-305.

aurait la ville pour recommandée1. En attendant, rien n'avait été obtenu, et, l'année suivante (1457), le receveur des vivres des gens d'armes réclama 3.438 livres en vertu de lettres patentes envoyées de Vienne le 22 octobre aux élus. Les lettres de commis. sion nous apprennent qu'en outre des 10.044 livres le roi réclamait à l'élection de Lyonnais une somme de 1.000 livres pour aider à <«< fournir et supporter la dispence de certain nombre de gens d guerre tant à pié que a cheval oultre le nombre ordinaire ». I s'agit là de l'armée levée par le roi, après la fuite du Dauphin Gand pour remettre la main sur les terres du Dauphiné. Suit un liste de sommes moins considérables: 370 livres pour tous frais 153 livres, 5 sous, 4 deniers pour la moitié des gages des magis trats ayant siégé à Montferrand durant les Grands Jours, 100 livre pour le capitaine des francs archers, 66 livres pour six brigandine: 40 livres pour un voyage à Gannat effectué par Jean de Villenov à la demande de Charles VII, et une autre somme pour permetti au bailli de Rouen, Guillaume Cousinot, de payer sa rançoi Comme on le voit, l'impôt principal était accompagné d'un chiff respectable de petits impôts accessoires qui portaient le total 11.790 livres 15 sous 4 deniers. Le nouveau receveur Jehan Goux, perçut facilement cette taille, ainsi que celle de l'année su vante (1450), qui se monta à 3.290 livres pour la ville3.

Parmi les sommes accessoires réclamées cette année-là dans s lettres aux élus datées de la Chaulcière-en-Bourbonnais (15 octob 1457) il faut mentionner 700 livres « tant pour le menage de fille tres excellente dame Magdelene que pour les gages de gens guerre »>«<oultre le nombre ordinaire ».

La taille des gens d'armes était, on le voit, un peu moins élev que l'année précédente, mais, cette année-là, les conseillers eure. à s'occuper d'un impôt qu'on ne leur avait pas réclamé les anné précédentes. Charles VII voulant augmenter ses ressources I

1 Ces dons furent décidés dans la séance du 15 décembre 1456. (V. BB 8 fol. 33 v 34).

La taille accoutumée de 4 deniers fut votée le 16 janvier 1457 BB 8 f. 36 v V. Pièces justificatives, n° CCXXXIX, l'analyse des lettres des élus dont la copie trouve insérée dans les registres du Consulat (BB 8, fol. 36 v°-37). V. les détails la perception CC 80, CC 78 et CC 79.

3 Voir la deliberation du 29 janvier 1458 (BB 8, fol. 59 v où fut votée la taille c 4 deniers. A la suite se trouve la copie des lettres des élus (fol. 60). V. l'analys Pièces justificatives, no CCXLIII. V. CC 81.

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