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suivante(1468) que Chaboud versa les 200 livres dues par lui pour parfaire le versement de la première année1.

Pour le second paiement (celui de 1468), il fut impossible de rien demander à l'impôt, toutes les ressources de la ville étant alors absorbées par la guerre contre le duc de Bourgogne et la réparation des fortifications.

Cette année 1468 fut certainement l'une des plus critiques que traversèrent les finances lyonnaises. Il fallut mettre en vente « l'Ostel de Lion » qui servait de maison commune à la ville. Il y avait deux ans que cette vente était décidée en principe: la mise à prix fut fixée à 1.169 livres (le 7 février 1469)2. C'est grâce à cette mesure désespérée que l'on put achever le paiement des 2,000 livres réclamées par le roi. Un mois après, le receveur royal recueillait 600 livres3 et le 30 avril, sur l'ordre de Louis XI, on s'occupait du troisième terme1. Le 4 juin, Maturin Buget versa encore 300 livres à Chauvet3. Les ressources provenant de la vente de l'Hôtel de Ville s'épuisèrent vite, car le 10 septembre, pour trouver les 500 dernières livres dues à Chauvet, il fallut établir une taille d'ı denier par livre que leva Jean Girerd 6.

Comme l'industrie de la soie prospérait, le Consulat finit par s'y intéresser, et un tisseur, Antoine de Chassagne, s'offrit pour s'occuper de la fabrique moyennant une avance de 500 écus d'or. Au

L'ordre de verser cette somme fut donné le 10 septembre 1467. V. Vital de Valous, p. 21.

2 Voir BB 15, fol. 4. << Item ont plus passé autre mandement sus Jehan Chaboud, dit Poitier, commis a recevoir la taille mise sus pour l'ouvrage des draps d'or et de soye de la somme de ne livres tournois restans a paier de vie livres tournois pour le premier paiement de 11m livres tournois ordonnez de par le roy estre levez en la dite ville pour le dit ouvrage des dis draps, l'année passée finie a Noel derrain passé pour icelle somme de ne livres tournois baillée et délivrée par le dit Chaboud receveur de Françoys Chauvet, receveur de par le roy et la dite ville et pais de Lionnois a ce commis. >>

3 Voir BB 15, fol. 37-39. Ce fait est à peine mentionné par Vital de Valous qui, page 22 de son travail, écrit : « quelles furent les démarches subséquentes du Consulat relativement à cette manufacture? On l'ignorera peut-être toujours à cause d'une lacune regrettable dans la série des procès-verbaux des séances municipales » et déclare à la note 32 qu'il « y a une lacune du 22 avril 1468 (après Pâques) au 23 juillet 1472, 4 ans et 3 mois ». Or cette lacune n'existe pas.

4 BB 15, fol. 44. Le roi avait d'ailleurs écrit d'Amboise le 29 mars aux Lyonnais pour les prier d'accélérer le payement. (V. le texte de cette lettre, t. III de l'édit. des Lettres de Louis XI par Vacsen, p. 334-336) et dans l'ouvrage de Vital de Valous (p. 23-24).

3 Voir Vital de Valous, p. 24, et BB 15, fol. 45 vo.

6 Voir ibid.

bout de dix ans, il devait rendre à la ville les «ostels et les mestiers faiz pour le dit ouvrage1 ». Mais Jean Grand, qui dirigea l'entreprise au nom du roi, refusa de laisser ce tisseur s'occuper de l'affaire ; il ne voulut même pas le nommer à la place de Perruquet qui «< n'était pas agreable aux autres ouvriers et compaignons du dit mestier » (16 janvier 1470). Il y eut ensuite entre le Consulat un désaccord qui n'est peut-être pas étranger à la décision prise soudainement par le roi de transporter l'industrie de la soie à Tours. On voit, le 2 janvier, Macé Picot, trésorier de Nîmes, venir à Lyon faire une enquête au sujet des soies, et dans le même temps la ville dépêcher Jean Palmier auprès du général Pierre d'Oriole pour << s'informer si les ouvriers accusaient la ville de négligence )). Quelque temps après, le désaccord s'accentua et tous les ouvriers partirent avec Macé Picot vers le roi, à l'exception de trois «< compaignons » qui n'ayant plus d'ouvrage ni d'occupations adressèrent le 11 mars une plainte au Consulat ".

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Peu de jours après, le 29 mars, les consuls recevaient l'ordre de transporter à Tours « tous les ouvriers, les molins, chaudieres et autres outilz de l'ouvrage des draps de soie 5 ». Encore les Lyonnais durent-ils payer 100 écus pour ce déménagement et verser 20 écus comme salaire à Macé Picot chargé de diriger l'opération. C'est ainsi que l'argent des Lyonnais servit à doter la ville de Tours de l'industrie de la soie. Encore durent-ils se déclarer bien contents que le roi ne prit les dits métiers «< combien que la dite ville les eust payez ». Ils eurent en outre à acquitter les dettes contractées par

1 BB 15, fol, 56 vo-57 v°.

2 Voir à ce sujet la délibération du 15 janvier 1470 (BB 15, fol. 72).

3 BB 15, fol. 74.

4 BB 15, fol. 75. D'après le texte de la délibération, ces trois ouvriers « n'ont a present ouvrage ne occupacion, gaignent leur vie et ont fait requeste de leur survenir et aider a vivre jusques a ce qu'ilz aient nouvelles de leurs compagnons qui sont alez devers le roy avec Monseigneur le tresorier de Nimes pour ceste matiere ».

5 La lettre de Louis XI écrite à Amboise le de Valous (p. 25-26).

février 1470 a été publiée par Vital

6 C'est ce que déclare Macé Picot dans une lettre écrite à Amboise le 12 mars 1470 et envoyée à ses «< chiers et bien amez les conseillers et procureurs de la ville de Lion ». Cette lettre a été publiée par Vital de Valous, p. 27 et par Vaesen au t. IV de son éd. des Lettres de Louis XI, p. 87-89. Sur Macé Picot, voir la n. 1, de la p. 87 de son volume. V. Godart, l'Ouvrier en soie, p. 9-19.

7 Quittance fut donnée par Picot aux conseillers d'une somme de 100 écus d'or qui lui fut délivrée par le receveur Girard. Cette quittance datée du 13 avril 1470 a été publiée par Vital de Valous, p. 27-28.

ces ouvriers durant leur séjour; les uns devaient du pain ; d'autres des souliers; certains n'avaient pas payé leurs bouchers ni leurs logeurs; l'un même devait encore de l'argent à la nourrice de son fils 1.

On a discuté sur l'importance probable de la manufacture ainsi disparue. Si nous consultons le compte des dépenses non payées par eux et soldées par la ville, nous trouvons sept noms six ouvriers: Guillaume le Bourguignon, Raphael de Pareto, Yllarion de Saciez, André Stelle, Baptiste de Territ, Estienne de la Vauge; plus un teinturier, Guicherd. Tous les ouvriers, il est vrai, n'étaient peut-être pas dans ce cas; toutefois, ce petit nombre n'a rien qui doive nous surprendre 2.

Les historiens ont cherché à expliquer cette mesure de Louis XI: suivant l'un d'eux, la crainte de voir trop prospérer une ville située dans le voisinage du duc de Bourgogne et capable de fournir à ce dernier, s'il s'en emparait, de précieuses ressources, aurait été la raison déterminante 3. Peut-être est-il plus vraisemblable d'y voir

1 Voir Godart, l'Ouvrier en soie, p. 10-13. Ce compte se monte à 123 livres 18 s. 6 d. (V. ibid., p. 13).

2 Ces noms nous sont donnés par le compte des dépenses faites par Jean Girerd, receveur municipal à cette occasion. V. le texte dans Godart, l'Ouvrier en soie. p. 10-13. Au sujet du petit nombre de ces ouvriers, v. les observations très judicieuses de M. Godart (ibid., p. 13). Il faut dire aussi que dès 1468, plusieurs ouvriers en soie accourus à l'appel du Consulat étaient déjà repartis découragés. Ainsi dans le chartreau relatif à une taille levée en août 1468, pour les fortifications, on trouve cette mention « recesserunt » en face des « faiseurs des tyssus en la maison du Basque sur les foussés de la Lanterne ». (V. Godart, ibid., p. 96). Dans les comptes de la taille de 1469, levée pour « la facture des draps de soye » on trouve la mention non (il s'agit de l'exemption) en face des noms de cinq veloutiers, et de celui d'un teinturier. (V. ibid., p. 8). Tous les documents concordent donc bien.

3 C'est ce qu'insinue Vital de Valous à la note 39 de son opuscule sur Étienne Turquet (p. 26): « Louis XI », dit-il, « a pu redouter pour la sûreté du royaume l'accroissement que la fabrique donnerait à la population ouvrière dans une ville alors frontière et voisine des terres du puissant et entreprenant duc de Bourgogne ». La liste très exacte des ouvriers venus de Lyon à Tours nous est fournie par l'abbé Bossebœuf, qui sous le pseudonyme d'Ariel Mouette, a rédigé une petite brochure intitulée: Dix ans à Tours sous Louis XI (p. 49, n. 2) : Maitres ouvriers : Baptiste de Teri, Marco de Vecote, Jaconnet de Bonjean, appareilleur de soye, Marc de la Canove, teinturier, Maufrais de Carmignole, filateur, Hilaire de Facio, André Stella, Marquet de Venise, François Garibaldi ou Gueri Baldi, Maleteste de Boulongne, Geneze Riose, Raphaël de Perreto, Bastien de Lavagi, Baldesac de Solario, dame Perruche de Boujean, Jehan de Camoge, Baldesac de Seigne. Les apprentis et élèves étaient Alain François et Jean Habert, Jean Vierre, Lancelot le Basque; Pierre Dubyon, Guillaume Monnet, Guillaume et Laurent Mondevis, Estienne Chapelier, Etienne de Bourgogne, Antoine de Remigli; Antoine de Montbrison, Jean Culart, Jean Selorm, Mathieu Vincent; Baptiste de Bargem, Jacques de Pavic, etc.

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un acte de favoritisme envers la ville de Tours, où il résidait souvent. Les querelles qui surgirent entre les ouvriers et le Consulat, jaloux de son indépendance, ont peut-être achevé de déterminer la résolution du roi. Il y a sans doute une part de vérité dans chacune de ces explications, mais aucun document ne nous permet de nous prononcer davantage.

CHAPITRE V

LYON ET LES ÉTATS GÉNÉRAUX DE TOURS EN 1468
LA LUTTE DE LOUIS XI CONTRE CHARLES LE TÉMÉRAIRE

L'expérience, tentée les années précédentes, coûta aux Lyonnais plus de 3.000 livres; elle leur sembla d'autant plus pénible que la lutte de Louis XI contre leur voisin, Charles le Téméraire, était alors pour la ville la cause de, dépenses variées.

Au moment où il allait commencer la guerre, Louis XI convoqua les Lyonnais à l'assemblée des États généraux réunis à Tours. Lyon fut représenté par Jean Grand, Jean de Villeneuve et Michelet du Lart'. Ces députés ne rapportèrent pas, comme on aurait pu le craindre, une demande d'argent. Louis XI n'avait pas besoin de convoquer les États pour se faire accorder des subsides, car il savait les exiger quand il en avait besoin. Mais en ratifiant sa politique, les États justifiaient à l'avance tous les impôts qu'il lèverait pour la

soutenir.

La participation des Lyonnais aux États généraux réunis à Tours en 1468 a été étudiée par Monsieur Paul Viollet, dans un mémoire intitulé Élection des députés aux États généraux réunis à Tours en 1468 et en 1484, paru en 18662.

La lettre de convocation qui fut adressée par le roi aux « gens d'église, bourgeois, manans et habitans de Lyon » a été publiée dans ce mémoire, d'après une communication de M. Rolle. Elle a

1 Louis XI dans sa lettre du 26 février 1468 (datée de Montilz lez Tours) demandait aux Lyonnais l'envoi de 4 personnes, 1 d'église et « troiy laiz ». Le 13 mars (BB 15, fol. 2) une assemblée eut lieu pour délibérer à ce sujet elle devait demander aux « trois estas » du Lyonnais de se réunir pour faire une élection. 2 Bibliothèque de l'école des Chartes, 6e série, t. II, p. 22-59. Il existe un tirage

à part.

3 P. 24-25.

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