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emprunt'. Cette décision était motivée par le violent mécontentement qu'excita la lecture de cette lettre. Plusieurs personnes et, parmi elles des consuls s'étaient mêmes répandues en paroles injurieuses contre les élus Jean Caille et Ymbert de Bleterens 2. Le 2 juillet une réunion de notables confirma cette décision; il fut arrêté qu'on se procurerait le plus rapidement possible 6.000 livres et qu'on demanderait au régent remise du reste3. Entre temps, les agents royaux avaient réparti le montant de l'aide entre la ville et le plat pays. Les habitants de ce dernier se plaignirent par l'intermédiaire du doyen du chapitre qu'ils avaient été trop chargés à la requête des Lyonnais; ils déclarèrent même qu'ils ne payeraient rien avant d'avoir vu ce que ferait la ville. Sur leur demande, les consuls consentirent le 4 juillet à faire avancer par la ville le premier terme de l'aide'.

Le lendemain, une assemblée de consuls et de maîtres des métiers ratifia le vote émis la veille d'une taille de 3 deniers pour livre, dont le produit devait servir à procurer les 6.000 livres du premier terme. Mais comme on était pressé, on décida, le 9 juillet, qu'on emprunterait cette somme aux « grans de la ville ».

Étienne Gicle, sollicité de prêter 200 écus d'or, réserva sa réponse jusqu'au samedi suivant.

Quant aux 6.000 livres du second terme, les consuls décidèrent le 15 juillet qu'on demanderait au régent de les abandonner à la ville pour ses fortifications. Le régent ne leur fit pas grâce de cette

1 Voir ibid., p. 3og.

2 Voir délibération du 30 juin (ibid., p. 311): Ymbaud de Bleterens et Jehan Caille se sont pleins d'aucuns, tant conseillers que autres, qui ont semé aucunes parolles injurieuses contre eulx, pour ce qu'ilz sont commissaires de la presente taille. A quoy les dis conseilliers leur ont respondu qu'ilz n'en savent riens, et ont desavoé ceulx qui l'ont dit.

3 Voir C. Guigue, Registres consulaires de la ville de Lyon, p. 312.

4 Voir ibid., p. 312-313.

Cette taille avait été décidée le 4 juillet au soir (v. ibid., p. 313), le lendemain, Bererd Jacot fut chargé de la lever.

p. 315.

6 Voir ibid., On signale que « Jehan le Viste, c'est offert de bailler ung gaige pour emprompter dessus deux mil 1. tournois. Jehan Tiboud ung autre jusques a mil 1. tournois et Poncet de Saint Barthelemi autant.

7 Voir ibid., p 315: « Ilz ont prié a maistre Étienne Giscle qu'il vueille prester pour ceste cause Ile escuz d'or, lequel a respondu qu'il en fera son povoir, mais il y vuelt aviser et en doit respondre au dit messire Jehan le Viste dedans sambedi prouchain », c'est-à-dire jusqu'au 16 juillet. Étienne Gicle était un médecin. Nous ne connaissons pas sa réponse.

8 Voir C. Guigue, Registres consulaires de la ville de Lyon, p. 316.

somme, mais il prescrivit aux maîtres de la monnaie de Lyon de vouloir bien leur avancer 5.000 livres tournois (août) pour les fortifications'. Les gardes de la monnaie ne se pressèrent pas d'obéir aux ordres du régent. De guerre lasse, les consuls prescrivirent le 3 octobre, au procureur de la ville, de se rendre auprès du dauphin pour lui réclamer cette somme2. Au commencement de décembre, les consuls n'ayant encore rien obtenu, furent contraints, pour faire travailler au glacis de la Lanterne, de se faire prêter 4 ou 500 livres par Jean Caille et les gardes de la monnaie3. Mais ces derniers ne tardèrent pas à s'exécuter: le 11 décembre, on apprit que Jean Caille et les gardes Estienne de Villeneuve et Peronet de Malcieux se hâtaient de donner satisfaction à la ville'.

Rapports de Lyon et du Régent en 1422. [1422.] Au début de l'année suivante, le régent envoya à Lyon plusieurs de ses conseillers pour obtenir des trois Etats du Lyonnais le vote de diverses sommes et la levée de soldats dont il avait grand besoin pour continuer la guerre3. La réunion eût lieu à Saint-Jean dans la matinée du 8 janvier. Les commissaires royaux, Guillaume Beauniez, chanoine du Puy, et Guillaume Le Tur, maître des

1 Voir la délibération du 30 août 1421 (ibid., p. 322) : «Ilz ont confessé avoir receu de Guillaume Charrier, demourant à Borges, receveur general de toutes finances, etc., la somme de V 1. t. que monseigneur le Dauphin par ses lettres leur a données sus la monnoye de Lion pour convertir en la fortifficacion. » Le 16 août, le régent leur avait écrit de Loches qu'il leur donnerait satisfaction dans la mesure du possible. V. Pièces justificatives, n° XXVI.

2 Voir ibid., p. 328.

3 Voir ibid., p. 341.

p. 343.

4 Voir ibid., Pour les remercier de leur bonne volonté, on devait leur donner 150 livres pour leur peine. Audry Nantuas, receveur de la ville, devait recevoir ladite somme et en faire la « dispence ». Quant au second terme de l'aide de Clermont, il fut payé en octobre. V. à .ce sujet de Beaucourt, Histoire de Charles VII. t. I, p. 363, note 2.

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5 Voir à ce sujet la délibération des Consuls du 9 janvier à Saint-Jaqueme. C. Guigue, Registres consulaires de la ville de Lyon, p. 349-350. Les Consuls avaient, trois jours auparavant, porté une plainte au bailli contre un clerc du roi qui avait reproché aux Lyonnais de montrer peu de royalisme. Voici le texte de cette très curieuse délibération (6 janvier, v. ibid., p. 349): « Ilz ont concluz de soy aller pleindre a Monseigneur le baillif de clerc Pierre Chivrier appelé Symon qui est de Lengres, lequel la nuyt de la veille des Roy, acompagnié de six autres galans armés, dits a Claude Treulier, devant la porte de la Lanterne, dehors, pluseurs oultrageuses parolles, et entre les autres que Lengres estait mieulx au roy que Lyon, et que s'il eust aussi bien trouvé Guillaume de la Mure, comme le dit Claude. qu'il lui en feust mal prins et eust esté bactu. Lesquelles choses ne doivent point soffrir par especial a un tel homme estrangier ».

requêtes, exposèrent que le roi d'Angleterre avait entretenu son armée tout l'hiver et qu'il se préparait à un grand effort au printemps suivant. Ils demandèrent au nom de leur maître que les trois Etats de la sénéchaussée prissent à leur charge le payement de 250 hommes durant six mois (à raison de 15 francs par mois et par homme), ce qui faisait 2.400 écus d'or, soit 30.000 francs, payables en deux fois (au 1er mars et au 1er juin). Les maîtres des métiers et les consuls,délibérèrent à ce sujet le 10 janvier, et ils furent unanimes à demander que l'on aidât «< au dit monseigneur le régent de CL hommes d'armes, et non point en argent, pour ce que aucuns le dispendent autrement qu'au prouffit du dit seigneur1». Les commissaires royaux n'osèrent accepter cette offre très inférieure à ce qu'ils avaient déjà mission de demander?. Finalement, on s'entendit le 15 janvier sur les bases suivantes : les représentants de l'église offrirent de payer leur contribution à part, la ville et le plat pays s'engagèrent de leur côté à fournir l'aide demandée, ce qui fut ratifié par les commissaires3. Le 13 février, les conseillers décidèrent la levée d'une taille de deux deniers pour livre, afin de payer le premier terme de l'aide accordée au régent (terme de mars qui se montait à 5.250 livres pour la ville').

La perception fut très laborieuse, et le 8 août, le régent se plaignit aux Lyonnais de leur nonchalance inaccoutumée. L'Auvergne, le Bourbonnais, le Forez, le Beaujolais avaient montré le

1 Voir C. Guigue, Registres consulaires de la ville de Lyon, p. 351. Cette réponse était faite au nom de la ville, des gens d'église et du plat pays.

2 Voir ibid.

3 Voir ibid.,

p.

352.

Les commissaires réunis à Roanne acceptèrent cette offre séance tenante. Le même jour, dans une seconde délibération, les Consuls décidèrent que pour ne pas porter ombrage aux gens du plat pays, ils ne permettraient à aucun habitant de la ville d'assister à l'assiette de l'impôt : « Ilz ont concluz que pour ce que aucun de ceulx du plat pays ne soient a faire les coctes de l'aide nouvellement octroyée a monseigneur le Dauphin et afin d'oster tout debat d'entre ceulx du dit plat pais et de la ville, que nul de ceux de la ville aussi ne sera point present a faire la dicte cocte, combien que les commissaires sur ce l'aient ordonné ». (V. ibid., p. 353.) Le 19 janvier, les Consuls, pour grossir le produit de l'aide, décidérent de demander que la ville fut taxée à 6.000 1. t. (comme pour le premier terme de l'année 1421), à la condition que le rapport des cotes de la ville et du plat pays, qui était inférieur au quart, ne fût pas modifié. De la sorte, le produit de

l'aide serait de 25.000 l'an au lieu de 18.000, mais on demanderait au dauphin d'abandonner aux Lyonnais 1000 livres pour les fortifications. Il y aurait ainsi double avantage pour le régent et pour la ville. (V. ibid., p. 354.)

4 Voir ibid., p. 359.

plus grand zèle1. Il s'étonnait qu'il n'en fut pas de même de Lyon, car il avait le plus grand besoin de cette aide pour l'entretien de l'armée chargée d'opérer en Mâconnais, sous le commandement du maréchal de Séverac2.

Les Lyonnais furent tenus au courant des opérations par Humbert de Grolée, bailli de Mâcon, sénéchal de Lyon, qui servit sous le commandement du maréchal. C'est lui notamment qui s'empara de la ville de Tournus, le 23 septembre. Le lendemain, il écrivit aux Lyonnais qu'il avait pris la ville au point du jour «< par eschielle >> et que 80 hommes, femmes ou enfants s'étaient noyés dans la Saône en cherchant à fuir à Mâcon sur un bateau3. Le 30 il leur apprit la soumission de Saint-Albain, de Viriset, de Montbelet et de La Chisie, ainsi que l'arrivée à Tournus du maréchal de Séverac, « lieutenant général du roi es marches du Lyonnais », qui s'y installa avec 6.000 hommes'. Si nous en croyons cette lettre, la ville de Mâcon était alors en pleine effervescence, et l'on venait d'emprisonner au château, Jean Mercier et le lieutenant de Philibert de Saint-Léger qui avaient tenté de s'enfuir".

Un moment même, les Lyonnais avaient craint pour la sûreté de leur ville; c'était au mois de mars, lorsque le bruit se répandit que le nouveau duc Philippe-le-Bon se rendait à Genève avec une armée, pour se concerter avec le duc de Savoie, son oncle. Le consulat s'alarma et prit de sages précautions. Le gardien des Cordeliers fut envoyé « es marches de Bourgogne », pendant que Jean de Ges et Pierre Contrevoz recevaient l'ordre de se rendre, l'un à Genève,

1 Voir le texte de cette lettre dans l'Histoire de Charles VII, du marquis de Beaucourt, t. I, p. 450-451.

2 Cette campagne dura plusieurs mois. Le 9 juillet, Humbert de Grolée réclamait de Vinzelles en Maconnais une certaine quantité de blé. Il leur annonçait que la veille Vinzelles avait été prise, et que de Lion a Macon il était impossible de « trouver forteresse qui ne soit de l'obeyssance de mon segneur le regent » (V. Pièces justificatives, no XXX). Le 4 août, il leur écrit de Jarniole pour leur annoncer la prise de Pierrecloz. (V. Pièces justificatives, no XXXI)

3 Voir Pièces justificatives, no XXXII, le texte de cette lettre, et Louis Bazin, la Bourgogne de 1405 à 1435, p. 106-107.

4 Voir Pièces justificatives, no XXXIII, le texte de cette lettre. Voir sur tous ces faits l'article de Mgr Rameau: la Guerre des Armagnacs dans le Maconnais, 14181435, dans la Revue de la Société historique de l'Ain. année 1884, p. 33, notam

ment.

5 Voir Pièces justificatives n° XXXIII.

6 Dès le 17 mars, les Lyonnais s'inquiétèrent. (V. C. Guigue, Registres consulaires de la ville de Lyon, p. 366).

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l'autre à Seyssel « le long du Rosne », pour prendre des informations1. On fit « clorre les cheines dessa et de là la Saonne 2», toutes les portes et « posterbes » du bourg Saint-Vincent furent murées3, De plus, ordre fut donné de « faire rompre et terrailler tous les pas et entrées du dit bourg». Semblables mesures furent prescrites pour les passages compris entre le « portal Vacieu » et le couvent « des Frères Meneurs 5». En même temps, on décidait la construction d'un mur de clôture des Cordeliers au pont du Rhône 6. De la sorte, Lyon serait à l'abri d'un coup de main du côté du nord,

En outre, les consuls décidèrent que tous les soirs l'on enverrait au faubourg Saint-Vincent v gués et ш eschargués, et il fut entendu que Claude Treulier mettrait tous les soirs VIII personnes aux champs, « c'est assavoir deux sur Rosne et deux sur Saonne, et quatre qui yront et viendront dès l'un bot jusques a l'autre et Ixme chascun jour pour terrailler ». Ils firent mettre également quatre gaites à Saint-Just et deux autres à la porte de la Lanterne.

Mais Lyon ne fut pas menacé. La sage circonspection d'Amédée qui cherchait plutôt à réconcilier son oncle avec le régent, la mort du roi d'Angleterre Henri V, la signature d'une trêve entre Marie de Berri, duchesse de Bourbon et Philippe-le-Bon, furent autant d'événement heureux pour Lyon et la cause royale 9.

Sur ces entrefaites, Charles VI mourut. Le dauphin Charles fut reconnu comme roi avec empressement par les Lyonnais qui l'avaient toujours si fidèlement servi 10.

L'horizon était cependant bien sombre. A l'Ouest et dans le Nord, c'était les horreurs de la guerre franco-anglaise. Dans le Sud

1 Voir la délibération du 22 mars 1422 (ibid, p. 368).

2 Voir la délibération du 17 mars (ibid., p 367). Robert Curt et Guillaume Gontier furent chargés de cette mission « dessa la Saonne », Léonard Caille et Guillaume Gontier (ibid., p. 367).

2 Voir la délibération du 26 mars (ibid., p. 369).

4 Ibid.

5 Voir la délibération du 30 mars (ibid., p. 372).

Voir ibid.

7 Voir la délibération du 22 mars (C. Guigue, Registres consulaires de la ville de Lyon, p. 368).

8 Voir la délibération du 26 mars, (v. ibid., p. 369-370).

9 Voir de Beaucourt, Histoire de Charles VII, t. II, p. 8 (surtout note 2).

19 Voir de Beaucourt, Hisloire de Charles VII, t. II, p. 54 et suivantes.

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