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député n'était autre que Martin Guillaume, qui devait centraliser aussi les contributions du Puy, de Moulins et de Clermont. Il prit divers engagements à l'égard des représentants de ces diverses villes venus à Lyon. Il promit de gouverner la bourse commune pendant cinq ans (Lyon fournit 100 écus, chacune des trois autres villes en donna 500). A l'expiration de ce délai, les diverses sommes seraient remboursées aux villes qui les avaient fournies 1.

Martin Guillaume se rendit à Franchise; mais deux ans avant, il avait été précédé sur cette route par Claude Taillemond qui, en septembre 1480, s'était chargé de conduire le deuxième convoi de six ménagers réclamé à la ville et de porter les 1.500 écus de la bourse commune. Mais son voyage fut inutile: les bonnes villes se plaignirent amèrement des frais causés par cette affaire et, à la suite de conférences tenues à Tours entre leurs députés et les commissaires, ceux-ci accordèrent un sursis. Taillemond, à l'issue de cette conférence, se rendit à Paris où quatre de ces « mécaniques » se trouvaient déjà et reprit le chemin de Lyon 2.

[1482]. On sait que la ville avait dû fournir 1.200 écus pour payer les seize << mécaniques » envoyées à Franchise. Comme les conseillers ne pouvaient alors disposer d'une somme aussi importante, ils l'avaient empruntée à Étienne Richard, marchand de Perpignan. Or, celui-ci, à la fin de 1482, n'était pas encore remboursé; il fallut emprisonner plusieurs conseillers pour forcer le Consulat à restituer l'argent ainsi avancé. Dupré fut chargé de trouver 600 ou 700 écus avant Pâques3. Dans le même temps, le commissaire de

pruntés pour payer les 16 mécaniques (de la foire de Toussaint à la foire de Pâques). Le 9 février 1483, on payait encore à Richard « marchand de Parpignan » 50 livres pour l'intérêt de 680 écus d'or empruntés pour le même objet (foire de la Toussaint à la foire de Pâques) (V. CC 482, no 52).

1 Voir Pièces justificatives, no CCCXXI, le texte de ses engagements. Ces diverses sommes étaient fournies par ces villes a cause du « rabais » d'un marchand fait à l'avantage de chacune d'elles. V. ibid.

? Voir Pièces justificatives, no CCCXXVIII, la lettre des consuls du 26 février 1482 prescrivant de rabattre de la recette d'Alardin Varinier 257 livres 10 sols 3 deniers baillés par lui à feu Claude Taillemond pour les frais de son voyage, nonobstant l'annulation du crédit de 200 livres, ouvert à Claude Taillemond, en septembre 1480, pour achever de payer les dommages-intérêts promis par Fenoyl aux ménagers renvoyés à Franchise et pour conduire audit lieu les six autres mécaniques, crédit devenu inutile par suite du retour à Lyon de Taillemond.

3 Tous ces faits nous sont également révélés par la délibération du 29 novembre 1482 (BB 17, fol, 19 vo).

Franchise, Martin Guillaume, voulait obliger les conseillers à prendre « 25 pièces de drap » fabriquées à Franchise et à les payer fort cher1. Une expertise, demandée par le Consulat, révéla que ces draps ne valaient pas la moitié des sommes auxquelles ils avaient été taxés (ils avaient été taxés à 12 sous 6 deniers l'aune 3). Taillemond déclara qu'il ne voudrait pas donner 300 livres de ce qui était taxé à 5 ou 600. On offrit, le 5 décembre, de transiger pour 100 livres et d'en référer au roi si le commissaire refusait 4. Le lieutenant du bailli prit parti dans cette affaire pour les Lyonnais : il déclara que le commissaire devait se contenter de 100 livres; en cas de refus, on vendrait les draps de ça et de là les ponts. Enfin Martin Guillaume se contenta de 140 livres que l'on promit de lui payer avant Pâques. Il était en effet impossible de rien verser comptant".

Le séjour des émigrants lyonnais à Franchise fut de courte durée. Par le traité d'Arras (3 décembre 1482), le roi autorisa les bannis qui se trouvaient chez l'archiduc d'Autriche à revenir dans leurs maisons. On croit même que ceux qui habitaient la France jouissaient de ce droit depuis quelque temps.

L'édit de Charles VIII (du 14 janvier 1484) les remit en possession de leurs biens.

Les émigrants furent autorisés à rentrer chez eux 7.

1 Voir à ce sujet la délibération du 1er décembre 1482 (BB 17, fol. 21).

2 C'est à cette séance que l'expertise fut décidée.

3 Voir la délibération du 3 décembre 1482 (fol. 21 v0-22).

4 Voir BB 17 (fol. 22). Ce jour-là, on proposa de transiger pour 100 livres, et on résolut le 8 décembre (fol. 23), si Guillaume ne voulait pas accepter, de faire taxer les draps d'office et, en cas de refus, d'en référer au roi.

5 Voir la délibération du 9 décembre (BB 17, fol. 23 vo). Il fut convenu que selon le commandement du lieutenant, on doit « prendre acte du rapport des marchands et laier C livres à Guillaume et qu'il depesche les draps ou bon luy semblera et en son reffuz les fere exposer vendables de ça et de la les ponts ».

6 Voir la délibération du 17 décembre (BB 17, fol. 25 v°-26). Le scribe a par erreur mis janvier au lieu de décembre. - Martin Guillaume se vit accorder 140 livres pour «chesire et vendre quant et a qui il voudrait ».

7 Voir à ce sujet Teilhard de Chardin, Bibliothèque de l'Ecole des Chartes, t. LXVII, p. 22-23, et Henri Sée, Louis XI et les villes, p. 290. Charles VIII rappela les indigènes dans leur ville et leur accorda pour six ans le droit de lever un octroi sur les marchandises et l'exemption des impôts pendant dix ans.

CHAPITRE XI

LYON PENDANT LES DERNIÈRES ANNÉES DU RÈGNE DE LOUIS XI

Les faits exposés dans le chapitre précédent constituent peut-être l'épisode le plus saillant de l'histoire de Lyon à la fin du règne de Louis XI. Les quatre dernières années de ce règne sont remplies d'une foule de menus faits qu'il serait oiseux d'énumérer en détail... Quatre ou cinq seulement retiendront notre attention : l'installation de la poste à Lyon, divers épisodes de l'histoire diplomatique du règne finissant, et le séjour de saint François de Paule à Lyon.

La Poste royale à Lyon. Nous ne connaissons pas la date exacte de l'établissement, à Lyon, de la poste royale. Un mandement du 7 janvier 1482 nous prouve qu'à cette date elle fonctionnait dans la région lyonnaise. Si nous en croyons ce document, Ymbert de Varey était contrôleur des postes à Lyon, et Pierre Jourdein d'Isodon était attaché à ce service avec le titre de posté à Lyon. C'était lui, notamment, qui devait requérir les guides dont il avait besoin lorsque son service l'obligeait à voyager de nuit. Enfin, ce service fonctionnait pour les lettres royales seules. C'est ce qui résulte d'un passage de ce document : « Comme le roy nostre sire pour savoir et avoir nouvelles de plusieurs pays circonvoisins, comme de Provence, Savoye et Dauphiné et aultres, aist fait mectre et establir plusieurs chevaulcheurs appellez postez sur les chemins tirans de la ou le dit seigneur est es dis païs, esquelz postez le dit seigneur ait voulu et mandé fournir et bailler guides pour les convoier quant il est besoin qu'ils chevaulchent de nuyt1».

Voir ce mandement: Pièces justificatives, no CCCXXIV, ce mandement des consuls au trésorier municipal, Alardin Varinier, lui prescrivant de bailler to livres

Louis XI et Ludovic Sforza. — Louis XI eut plusieurs fois l'occasion, dans les dernières années de son règne, de recourir à la bourse des Lyonnais pour faire à ses amis d'agréables cadeaux. Nous citerons seulement l'épisode du lévrier envoyé à Ludovic Sforza, parce qu'il est un des exemples les plus curieux des fantaisies de Louis XI. Le roi avait en tout temps entretenu avec Ludovic les meilleurs rapports; en 1479, voulant lui être agréable, il lui envoya un magnifique lévrier. L'écuyer, Jean de Blazin, fut chargé, avec une escorte de dix hommes, de conduire le chien à Milan. A cette époque, on avait l'habitude d'habiller très richement les chiens qu'on donnait en cadeau. Louis XI, désireux de s'éviter cette dépense, prescrivit aux Lyonnais de l'habiller à leurs frais. Ils durent le revêtir d'un « jaques » de damas couvert d'étoffe blanche et rouge, et garni de coton; en outre, il fallut lui construire une litière, décorée d'étoffe blanche et rouge et couverte de toile cirée 1.

tournois à Pierre Jourdein d'Isodun, posté en la ville de Lyon, pour le défrayer des sommes données par lui aux guides qu'il a requis durant la nuit pour porter diverses lettres royales conformément aux ordres d'Imbert de Varey, contrôleur des postes à Lyon.

1 Voir à ce sujet, Pièces justificatives, no CCCIV, le texte de la lettre latine de Louis XI écrite le 23 novembre 1479 au Plessis du Parc les Tours et accordant un sauf conduit à Jean Blazin, écuyer, envoyé avec une escorte de dix hommes à Milan auprès de Ludovic. Avant d'aller plus loin, nous devons mentionner un court voyage qu'aurait fait Louis XI à Lyon au mois de mai 1482 et dont parlent quelques auteurs, notamment M. de Mandrot, le savant éditeur de Philippe de Commynes, au t. I de son édition : p. xx1(Introduction), « Commynes le retrouva à Beaujeu et le ramena à Lyon dans les premiers jours du mois de mai 1482 pour y régler enfin les affaires de Savoie ». Louis XI serait venu à Lyon ainsi au retour d'un pèlerinage qu'il avait fait à Saint-Claude pour obtenir sa guérison; il y était arrivé vers le 20 avril après être passé par Bourges, Nevers, Paray-le-Monial où il fit ses Pâques (v. M. de Mandrot, n. 2 de la p. 119 du t. II de son édition de Jean de Roye), Mâcon et aussi Beaujeu où il se trouvait du 9 au 12 avril et où il manda Commynes (V. ibid., t. II, p. 46). Le célèbre chroniqueur, qui passe rapidement sur une foule de faits, ne mentionne pas ce séjour à Lyon; il dit seulement que le roi retourna à Tours (p. 48). Nous savons, par l'Itinéraire manuscrit de Louis XI, dù au regretté M. Vaesen, que son départ eut lieu le 2 juin. — Quant aux registres consulaires et aux documents lyonnais, ils sont muets sur ce séjour de Louis XI dans notre ville. Le registre BB 352 si rapide n'y fait aucune allusion. D'ailleurs, le journal de Jean de Roye (Chronique Scandaleuse), ne nous laisse guère d'illusions à cet égard. Selon lui, Louis XI, après un voyage à Saint-Claude, se serait rendu à Notre-Dame-de-Clery où il passa une partie du mois de juin et du mois de juillet : « Après que le roy eut fait et accomply son voyage au dit lieu de Sainct Claude, il s'en retourna fort malade à Notre-Dame-de-Clery, la où il fist sa neufvaine ». Puis de là, il se rendit à Mehun-sur-Loire et à Saint-Laurent-des-Eaues; et retourna à Clery vers le milieu du mois d'août ». (V. l'Ed. de La Soc. de l'Histoire de France, publiée par M. de Mandrot, t. II, p. 115). Etant donné les dates et le peu d'accord de Commynes et de Jean de Roye au sujet des actes de Louis XI après son pèlerinage

Louis XI et le prince de Tarente. Louis XI n'avait pas une dépense un peu considérable exigée par les besoins de sa diplomatie ou les nécessités de la guerre, qu'il n'en fit supporter une partie à ses bons amis de Lyon. Ainsi, le 2 janvier 1482, le Consulat se vit demander encore 5.000 livres destinées au prince de Tarente qui se rendait à Naples auprès de son père, Ferdinand et sur lequel Louis XI comptait pour maintenir le roi de Naples dans son amitié1. La ville résolut, le 3 janvier, d'envoyer au roi une ambassade pour lui << remontrer les charges et pauvretés de Lyon ». Pierre de Villars et son fils furent désignés par l'Assemblée. Mais le commissaire royal, de Beaune, qui avait apporté les lettres royales ne se prêta pas à cette manœuvre. Il refusa d'accorder un délai de plus d'une semaine, si le dimanche suivant, les consuls persistaient dans leur refus, ils devraient payer 50 marcs d'amende. Il les menaça même de prison. Ces notables ne se laissèrent pas intimider par l'énergie du commissaire royal; ils déclarèrent que les conseillers devaient, s'il le fallait, tenir les « arrestz » et prendre ceste peine en patience pour la chose publique 2. De Beaune tint sa promesse.

(l'un le fait aller à Tours, l'autre à Notre-Dame-de-Clery), leur silence ne serait pas une preuve absolument convaincante; très souvent, d'ailleurs, le désaccord de deux chroniqueurs n'est qu'apparent, l'élasticité des dates permet de les concilier. Mais nous devons constater qu'ils sont muets sur le voyage de Louis XI å Lyon. Quant à Thomas Basin, il ne parle même pas du pèlerinage de Saint-Claude. Du reste, la maladie du roi et les misères accumulées par la famine qui sévit alors expliqueraient à elles seules que Louis XI ait abandonné à Commynes après l'avoir mandé à Beaujeu, la direction des négociations avec la Savoie qui se poursuivaient à Lyon.

1 Délibération du 2 janvier 1482 (BB 352). Le commissaire royal Antoine de Beaune, leur remit une lettre de Louis XI, écrite à Argenton le 16 décembre 1481, dans laquelle il est seulement question de l'emprunt nécessaire pour indemniser les Suisses du droit qu'ils prétendaient avoir sur le comté de Bourgogne. Cette lettre a été publiée par M. J. Vaesen, Lettres de Louis XI, t. IX (1905), p. 108-111. D'autre part, la délibération du 2 janvier 1482 vise à peu près en ces termes cette lettre. Les lettres du roi remises par de Beaune qui leur a dit « que a cause des grans afferes que le roy nostre sire tant a cause des grans deniers qu'il luy falloit bailler tant au prince de Tarente qu'il envoyait à Naples devers son père comme a plusieurs autres grans seigneurs »; le roi leur demandait 5.000 livres. Il est certain que les lettres visées sont celles qu'a publiées M. Vaesen d'après une copie des archives municipales de Lyon (CC 203), car le texte in extenso en a été recopié également dans les registres consulaires (BB 352) à la suite de la délibération sus dite. La seule explication de cette anomalie est que Louis XI voulait employer cette somme à ces deux fins, mais qu'en ce qui concerne le Prince de Tarente il ne voulait pas laisser figurer dans une lettre le don qu'il lui faisait.

2 De Beaune avait refusé le 7 janvier les explications des conseillers et le to il l'avait menacé des arrêts, ainsi qu'il a été dit plus haut (BB 352). En dépit de ces menaces, les notables tinrent bon lors de leur réunion le 13 janvier.

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