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de même 600 écus lui avaient été demandés pour désintéresser un marchand d'Avignon, Ernée, créancier de la ville 1. Aussi ne voulutil pas s'engager à nouveau sans se faire garantir le remboursement des anciens prêts.

Il restait encore à trouver deux cents livres pour parfaire la somme qu'on était convenu de remettre au comte de Richemont; il fallut les demander à l'impôt. Le 11 février, on prescrivit à Pierre de la Fay2, receveur de l'aide, de remettre 100 francs sur sa recette à Paumer, receveur à Lion « pour Monseigneur le Connétable 3 ». On pensait par cet empressement fléchir plus facilement le favori du roi, mais c'était une illusion. Pierre de Nièvre et Guillaume Testu eurent beau aller le trouver à l'hôpital de Rochefort'; ils n'obtinrent aucun « rabat» de l'aide voté à Poitiers et duquel Richemont avait «< assignacion sur la ville de 3.000 francs ».

Aussi fut-on obligé d'envoyer Jaques Panoillat auprès du roi. Mais en attendant la décision de Charles VII, il fallut s'occuper quand même de l'aide du connétable auquel on devait encore 2.200 francs. A cet effet, une taille de 1 denier pour livre fut votée le 20 février par les consuls et les notables. La perception de cet impôt fut d'abord confiée à Colin Mauregart, puis ses lettres ayant été annulées pour une raison que nous ignorons à Ennemond Godin qui devait centraliser la perception des tailles pendant un an et s'offrait, en outre, à recueillir les impôts de la ville au cas où Jean Gontier se démettrait de ses fonctions en septembre?.

1 Ibidem.

2 et 3 BB 2 fol. 12 r. « Ilz ont commandé a Pierre de la Fay qu'il baille cent frans a Paumer receveur a Lion pour Monseigneur le connestable et ce de l'argent de sa recepte du premier aide de Poictiers mis sus en juillet dernièrement passé et en décharge de ce que puet estre deu de reste dudit aide audit Monseigneur le connestable et desdis 100 francs ont passé mandement audit de la Fay.

4 et 5 BB 9 fol. 12 vo. Le 12 février, il fut ordonné a Pierre de Nièvre et a Guillaume Testu d'aller « a deux chevaux apres Monseigneur le connestable jusques a l'opital de Rochefort » afin d'obtenir de lui « rabat » de l'aide dernièrement octroyé a Poictiers « duquel mondit seigneur le connestable a assignacion sus la ville de III frans lequel n'y a rien obtenu, mes a fallu apres envoyer Jacques Panoillat par devers le roy pour en avoir aucun rabais ».

6 La taille de Poitiers est couramment appelée à Lyon l'aide du connétable, elle finit par être considérée comme sa propriété. Pendant sa disgrâce îl n'en fut plus question, mais à son retour aux affaires i la réclama. Sur l'histoire très bizarre de cet impôt, v. p.

7 BB 2, fol. 14. Le 28 février « Colin Mauregart a prins la charge de recevoir l'aide mis sus en la ville de Lion le XXe jour de ce moys de février (à ce sujet, voir Pièces justificatives n° LXVII) pour le complément du premier terme de l'aide

Mais c'était là un empressement apparent, les bourgeois étaient tenaces; ils ne renonçaient pas, malgré les ordres du connétable, à l'idée de faire diminuer par le roi le chiffre de la taille demandée à la ville à la suite des États de Poitiers. C'est dans cette intention que le 17 mars les conseillers décidèrent de dépêcher auprès de Charles VII et de Richemont une ambassade composée de Garnier et d'un délégué du bas pays1. En outre, la taille votée en février se levait difficilement, et le même jour les conseillers s'étaient vus contraints de faire enfermer à Roanne Pierre de la Fay, qui ne recueillait pas assez vite les sommes demandées; quant au second terme, on ne s'en préoccupa pas. Bref, les choses traînèrent tellement en longueur que les consuls reçurent vers le 25 avril de Jean Rastaut, huissier d'armes, sommation d'avoir à comparaître devant sa cour le 15 mai, sous peine d'une amende de 100 marcs d'argent « pour deffault », disent les textes, « de mectre sus le second payement de l'aide de Poyctiers». Ce fut Jacques Panoillat qui, le 28 avril, reçut mission de représenter la ville. Il obtint gain de cause sur toute la ligne3. D'abord, le 8 mai, on apprit que le roi venait de remettre à la ville et au pays de Lyonnais une somme de 7.000 francs «< sus le reste de l'aide dernièrement octroyé à Poitiers». C'était la taille, dite du connétable, qui était de la sorte

dernièrement octroyé a Poictiers ou moys d'octobre dernièrement passé duquel aide la ville de Lion est a VI IIIe frans a trois termes par la forme qui s'ensuit... » V. aussi BB 2 fol 14 v°. — Le 3 mars, Ennemond Godin « a prins la charge de lever la taille dernièrement mise sus et toutes autres tailles qui se mectront sus en la ville decy a ung an entier et aussi les deniers communs et du pont du Rosne de la dicte ville pour ledit an au cas que Jehan Gontier qui a prins la recepte des deniers communs et dudict pont decy an au dernier jour de septembre prochainement venant s'en vouldra demectre. >>

1 BB 2 fol. 16 vo. — «Ilz ont concluz que l'on retorne Pierre de la Fay a Roanne jusques il ait fait diligence de ses arrerages... Ilz ont conclus que Garnier pour la ville et ung autre du plat pays yront par devers le roy et Monseigneur le connestable pour avoir rebat de l'aide de Poictiers et ce aux gaiges communs de la ville et du plat pays, desqueulx gaiges la ville payera le tiers et le plat pays les deux pars qui pourra et se le plat pays ne vuelt paier les dis deux pars la ville y aye son

message. »>

BB 2 fol. 17 bis. -- « Ilz ont conclus que l'on poursuivra l'apointement qui fut prins jeudi dernier passé d'envoyer par devers le roi au XV jour de mai prouchain venant auquel jour Jehan Rastaut, huissier d'armes, a adjourné les conseillers en personne a peine de cent mares d'argent pour deffault de mectre sus le second payement de l'aide de Poyctiers et pour ce ont fait procureur Jaqueme Panoillat a soy comparoître et les excuser avec puissance de restituer autres procureurs, presens quant à la procuracion, Pierre Archimbaut et Loys Blanc tesmoings. >> 3 Au moins en apparence, comme on verra par la suite.

4 Voir Pièces justificatives, no LXIX.

supprimée en très grande partie. Mais le roi se dédommagea autrement. On se souvient que la ville devait encore 2.200 livres à Richemont: c'est évidemment dans la suppression de cette obligation que consistait le cadeau royal en faveur de Lyon (les 4.800 autres livres devaient concerner le plat pays). Or, ce cadeau fut presque annulé, ou du moins considérablement diminué par l'ordre que Charles VII donna au Lyonnais de payer 2.000 francs au bailli : il s'agit, sans aucun doute, du traitement d'Humbert de Grolée que le roi ne pouvait pas payer cette année et qu'il faisait fournir de la sorte par les habitants de Lyon'. Ce qu'on accordait d'un côté on le reprenait de l'autre. Le trésor de la ville était tellement épuisé cette année qu'on dut prendre sur les arrérages de Berart Jacot les 640 francs qu'il fallut payer immédiatement au bailli sur la somme accordée à ce dernier par le roi'.

Entre temps, il s'était accompli un événement important et auquel il a été fait allusion plus haut. Nous avons vu que les États de Poitiers avaient voté, outre la taille dite du connétable, un impôt indirect, le onzain et que beaucoup de villes demandèrent la conversion de cette taxe en un impôt direct. Le roi finit par y consentir en 1426, mais, ainsi que M. Thomas l'a démontré3, ce n'est pas dans une prétendue réunion d'Etat tenue à Montluçon (en avril 1426) et dont on a prouvé l'inauthenticité, mais sur l'avis du conseil du roi que cette décision fut prise Lyon fut taxé à 3.200 livres à l'occasion du remplacement du onzième par cet équivalent. Les Lyonnais devaient verser cette taille le 15 juillet suivant. D'ailleurs, les registres du Consulat nous révèlent que cette conversion eut lieu très postérieurement au mois d'avril, comme en témoigne le procès-verbal de la réunion du 14 juillet où il en fut parlé comme d'un fait tout récent. Ce texte est formel: «Il leur a esté dit par le dit Pierre de Cuysel' ce que vendredi

((

1 et 2 BB 2, fol. 18 ro. V. cette délibération du 13 mai aux Pièces justificatives, n° LXX.

3 Voir Revue historique, t. XL, p. 62 63. M. Thomas dans le Cabin. hist. de 1878, p. 162-163, avait déjà parlé de ces États de Montluçon d'avril 1426.- Il s'est rectifié dans la Revue historique. Un mandement de Charles VII publié par lui p. 62-63 du t. XL et analysé par nous (Pièces justificatives), contient ces mots: lignes 18-19 de la page 63 « par grant et meure deliberacion de plusieurs de nostre sang, et grant Conseil avons délibéré et conclud d'abatre ledit XI.

✦ BB 2 fol. 20, V. Pièces justificatives n° LXVII. Cette réunion eut lieu à la cathédrale Saint-Jean parce que cette affaire intéressait non seulement les consuls,

derrain passé fut proposé de par le roy nostre sire par meissire Jehan Girart1, Monseigneur le bailli, en la présence de Monsegneur de Lion en l'église Saint Jehan, c'est assavoir que l'on voulsist mectre sus IIIII fr. que la ville de Lion doit pour sa porcion de l'onziesme dernierement octroyé à Poictiers pour la conduite de la guerre ». Les consuls, après avoir écouté la proposition qui leur était faite avaient demandé à consulter les notables. Ceux-ci répondirent le même jour que « actendu les grans nombre de tailles qu'ilz ont desja payé le temps passé et aussi la mutacion des monnoyes, la petite fortiffication de la ville, les grans perils de la guerre, la chierté des vivres, le grant nombre des povres gens de la ville et plusieurs autres choses, ils prièrent le roi de vouloir excuser les refus de contribuer à cette charge3.

Les périls dont parlaient les bourgeois n'étaient d'ailleurs pas imaginaires, car on annonçait la prise de Bonson, de Rocheague et d'autres places aux environs du Puy'. En conséquence, les conseillers préparèrent une lettre destinée à justifier aux yeux du roi la mesure qu'ils prenaient (8 septembre)5. Mais les notables ne consentirent pas à l'envoi de cette lettre. Ils préférèrent avoir recours à l'entremise du bailli «< qui est si amïs de la ville, car on était sûr qu'il transmettrait la réponse au roi, en recommandant toujours la dicte ville au dit seigneur ».

Sur ces entrefaites, la ville reçut une lettre du roi qui faisait de nouveau un pressant appel à la bourse de ses fidèles sujets pour

mais encore l'archevêque et le chapitre, maîtres d'une grande partie du plat pays qui devait payer aussi le onzième.

1 Sur Jean Girard, conseiller au Parlement, plus tard maître des requêtes de l'hôtel, v. la notice de Thomas, les Etats provinciaux de la France centrale sous Charles VII, t. I. p. 329-330.

2 Voir Pièces justificatives, ibidem.

3 lbidem.

Délibération du 13 août. V. BB 2, fol. 22... «Ilz ont tous esté de conclusion que je procureur au nom d'eulx face a Monseigneur le baillif la semblable response qui fut délibérée le dimenche 14° jour de juillet dernièrement passé, considérées les causes contenues ou registre de la dicte conclusion et aussi que l'on die que les Englois ont de nouvel prins Bonyont, Rochagüe et autres places empres le Puy. » 5 BB 2, fol. 23, délibération du 16 septembre. Les dessus nommés conseillers ont conclus qu'il leur semble que l'on doit escripre au roy les lettres dont l'on a parlé nagueres par plusieurs foys porveu que les maistres des meitiers en soyent d'acors et qu'ilz voyent les dictes lettres pour y corriger ce que bon leur semblera. 617 septembre, V. Pièces Justificatives.

7 Délibération du 22 septembre, BB 2, fol, 23o. V. aux Pièces justificatives n° LXXV le texte de la délibération et celui de la lettre.

payer l'arriéré de l'aide de Poitiers. Une nouvelle demande de dégrèvement fut la réponse de Lyon à cette importune missive1. Mais en vain le roi, au milieu de la détresse financière où il se trouvait n'entendait pas renoncer aux secours que pouvait lui fournir une ville aussi riche, placée comme une réserve financière aux extrémités du royaume. Son représentant, Girert Blanchet, fit donc savoir à une Assemblée tenue à Saint-Jean qu'il fallait payer l'équivalent du onzain, ainsi que les sommes encore dues au connétable sur l'aide de Poitiers. De ce dernier chef, la ville et le Lyonnais devaient encore 21.000 francs. Les consuls lui firent répondre qu'ils avaient entendu parler d'une prochaine réunion d'États et qu'ils profiteraient de l'occasion pour faire supprimer par le roi une partie des charges pesant sur la ville. Tout au plus, quelques-uns consentirent-ils, le 20 novembre, à faire offrir 100 francs à Blanchet pour lui faire prendre patience3, mais la plupart repoussèrent l'idée d'une démarche de ce genre et demandèrent qu'on s'entendit directement avec le roi. Ils proposèrent même de se plaindre des dommages causés à la ville par la diminution des monnaies, lequel dommaige monte plus beaucoup que ne fait ce que l'on puet devoir du reste ». Le dommage subi par la ville, constituait, selon eux, à l'avantage du receveur «< un profit >> dont il devrait estre « content ». C'était là le plus sûr moyen de gagner du temps. et c'est à ce parti que s'arrêtèrent les conseillers, le 24 novembre : ils décidèrent de ne rien payer à Blanchet et au bailli avant le retour des ambassadeurs; tout au plus devait-on offrir 100 livres à Blanchet et autant au bailli s'ils voulaient contraindre la ville à

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1 Ibidem.

* Délibération du 17 novembre BB 2 f°, 260-27гo. « Il leur a esté récité ce qui leur fut dit par maistre Girart Blanchet de par le roy nostre sire a Saint Jehan jeudi dernièrement passé, c'est assavoir que l'on payast au roi nostre dit Seigneur, ce qui est deu au lieu de xre qui monte sus la ville et pays de Lyonnois x francs, item que l'on paye ce qui est deu de reste de l'aide de Poitiers à Monseigneur le connestable, sur quoy ilz ont delibere faire response au dit maistre Girart Blanchet qn'ilz ont entendu que le roy nostre dit sire doit briefment mander les trois estas et lors la ville y envoyera et exposera l'on au dit segneur les povretés et charges de la ville, et lui suppliera l'on qu'il ait pitié et compaission de la dicte ville et toujours obeyra l'on en tout ce qui sera possible a ses comandemens >>.

3 Délibération du 20 novembre BB 2, fol. 27. V. le texte aux Pièces justificatives, n° LXXVI.

4 Voir ibidem.

5 Ibidem.

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